CA LYON (1re ch. civ. B), 15 mai 2018
CERCLAB - DOCUMENT N° 7552
CA LYON (1re ch. civ. B), 15 mai 2018 : RG n° 17/02040
Publication : Jurica
Extraits : 1/ « En application de l'article 1907, le taux annuel de l'intérêt doit être déterminé par référence à l'année civile, laquelle comporte trois cent soixante-cinq ou trois cent soixante-six jours. En l'espèce, le contrat indique que les intérêts courus entre deux échéances seront calculés sur la base de 360 jours, chaque mois étant compté pour 30 jours rapportés à 360 jours l'an. »
2/ « Il résulte de cette disposition que, lorsque les dates d'échéance sont fixées au même jour de chaque mois comme c'est le cas en l'espèce, le prêteur peut recourir à la notion de mois normalisé ou plus simplement une fraction du taux annuel mentionné au contrat correspondant à la période pour calculer les intérêts et donc calculer les intérêts sur la base de 1/12ème de l'année civile sans tenir compte du nombre exact de jours ayant couru entre deux échéances et pouvant être de 28, 29, 30 ou 31 jours. Le calcul des intérêts sur la base d'une année de 360 jours rapportée à 30 jours soit un douzième d'année par mois revient arithmétiquement à un résultat équivalent au calcul des intérêts effectué sur la base d'une année civile rapportée au mois normalisé. »
3/ « Il en résulte que les modalités de calcul prévues par la clause litigieuse sont conformes aux dispositions légales et rien n'interdit d'y recourir dès lors qu'elles aboutissement au même résultat par un calcul simplifié sans avoir à s'enquérir des dispositions relatives au mois normalisé.
M. X., qui a la charge de la preuve, ne démontre pas que le taux effectif global indiqué dans l'offre serait inexact du fait de l'omission de comptabiliser les frais d'assurance-invalidité décès en ce qu'il présenterait un écart supérieur ou égal à la décimale avec le taux effectif global réel prescrite par l'article R. 313-1 du code de la consommation.
Pas plus il ne démontre pas que la clause d'intérêts conventionnels créerait un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties de sorte qu'elle ne saurait être qualifiée d'abusive. La recommandation de la commission des clauses abusives invoquée par l'appelant concerne les conventions de comptes de dépôt en application desquelles les intérêts sont calculés quotidiennement et non pas les crédits immobiliers de sorte qu'elle ne saurait faire présumer le caractère abusif de la clause d'intérêts conventionnels du prêt litigieux. »
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE LYON
PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE B
ARRÊT DU 15 MAI 2018
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 17/02040. Décision du Tribunal de Grande Instance de LYON (4e ch.), Au fond, du 6 décembre 2016 : RG n° 14/11395.
APPELANT :
M. X.
né le [date] à [ville], Représenté par la SELARL VJA AVOCATS, avocats au barreau de LYON, Assisté de Maître Hervé B., avocat au barreau de NANCY
INTIMÉE :
La société CRÉDIT LYONNAIS, SA
représentée par son directeur général en exercice, Représentée par Maître Pierre B., avocat au barreau de LYON
Date de clôture de l'instruction : 9 novembre 2017
Date des plaidoiries tenues en audience publique : 20 mars 2018
Date de mise à disposition : 15 mai 2018
Composition de la Cour lors des débats et du délibéré : - Françoise CARRIER, président, - Michel FICAGNA, conseiller, - Florence PAPIN, conseiller, assistés pendant les débats de Myriam MEUNIER, greffier. A l'audience, Françoise CARRIER a fait le rapport, conformément à l'article 785 du code de procédure civile.
Arrêt contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile, Signé par Françoise CARRIER, président, et par Myriam MEUNIER, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
EXPOSÉ DE L'AFFAIRE :
Suivant offres en date respectivement des 24 mars 2009, 16 novembre 2009 et 13 août 2010, M. X. a souscrit trois crédits auprès du CRÉDIT LYONNAIS.
Par trois actes d'huissier du 1er octobre 2014, M. X. a fait assigner le CRÉDIT LYONNAIS devant le tribunal de grande instance de LYON à l'effet de contester le taux effectif global de ces trois prêts.
Les instances ainsi introduites ont fait l'objet d'une jonction et par jugement du 6 décembre 2013, le tribunal a débouté M. X. de ses demandes et l'a condamné à payer au CRÉDIT LYONNAIS la somme de 1.500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile et les dépens.
M. X. a interjeté appel.
Au terme de conclusions notifiées le 26 juillet 2018, il demande à la cour d'infirmer le jugement et de :
- prononcer l'annulation des dispositions ayant mis à la charge de l'emprunteur un intérêt contractuel contenu dans l'offre de crédit immobilier en date du 13 août 2010,
- subsidiairement, ordonner la déchéance des intérêts de ce contrat depuis l'origine de l'amortissement,
- ordonner en conséquence la substitution du taux de l'intérêt légal au taux contractuel,
- ordonner la réouverture des débats avec injonction au prêteur de deniers de produire un tableau d'amortissement du crédit accordé rémunéré au taux de l'intérêt légal en vigueur à la date de la décision à intervenir et dire que les paiements effectués s'imputeront selon ledit tableau,
- en tout état de cause, condamner le CRÉDIT LYONNAIS à lui payer la somme de 5.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile et les dépens avec faculté de distraction au profit de Maître V.
Il fait valoir :
- que l'inexactitude du TEG affiché dans un acte de prêt emporte nullité de la clause de stipulation d'intérêts de sorte qu'il doit être substitué aux intérêts au taux conventionnel les intérêts au taux légal,
- que l'offre de crédit contient deux taux effectifs globaux, un taux mensuel de 0,33 et un taux annuel de 3,96, ce qui porte atteinte au principe de l'unicité du taux et ne permet en tout état de cause pas une information loyale du consommateur dès lors qu'il n'est pas fait référence au taux de période,
- qu'en outre l'offre méconnaît le principe selon lequel le taux annuel de l'intérêt doit être calculé par référence à l'année civile de 365 ou 366 jours et non pas sur une année de 360 jours dite année lombarde,
- que la clause d'intérêts conventionnels doit être réputée non écrite s'agissant d'une clause réputée abusive au terme de la recommandation n° 2005-02 émise par la commission des clauses abusives relative aux conventions de comptes de dépôt,
- que le taux effectif global n'intègre pas la totalité des coûts du crédit puisqu'il omet le coût de l'assurance décès-invalidité qui conditionne l'octroi du prêt de sorte que le taux affiché est erroné.
Au terme de conclusions notifiées le 31 juillet 2010, le CRÉDIT LYONNAIS demande à la cour de confirmer le jugement déféré et de condamner M. X. à lui payer la somme supplémentaire de 4.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile et les dépens avec faculté de distraction au profit de Me B., subsidiairement de fixer à une somme symbolique la restitution d'intérêts à sa charge.
Elle fait valoir :
- que le calcul des intérêts sur la base d'une année lombarde rapportée à 30 jours soit 30/360 revient arithmétiquement à un résultat équivalent au calcul des intérêts effectué sur la base d'une année civile rapportée au mois normalisé soit 30,41666/365, soit, autrement dit 1/12ème du taux annuel,
- qu'en l'espèce, le contrat prévoit que les intérêts courus entre deux échéances seront calculés sur la base de 360 jours chaque mois étant compté pour 30 jours rapportés à 360 jours l'an,
- que les intérêts d'une mensualité donnée sont égaux au capital restant dû après paiement de la mensualité précédente multiplié par le douzième du taux conventionnel annuel de 3,30 %,
- que le calcul des intérêts n'est dès lors ni illégal, ni trompeur ni frauduleux,
- que M. X. ne démontre pas que la clause d'intérêts conventionnels crée un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties, qu'elle ne saurait dès lors être qualifiée d'abusive étant relevé que la recommandation invoquée concerne les conventions de comptes de dépôt en application desquelles les intérêts sont calculés quotidiennement,
- qu'en tout état de cause, il y a accord des parties sur le taux d'intérêts nominal de 3,30 % qui devrait trouver à s'appliquer dans l'hypothèse où la clause relative aux modalités de calcul de l'intérêt serait annulée,
- que si la loi impose au prêteur de mentionner le taux de période, elle ne réglemente pas la façon de le nommer, qu'en l'espèce la période de remboursement étant le mois, le taux est mensuel de sorte qu'aucune irrégularité ne résulte de la mention du taux annuel et du taux mensuel,
- que M. X. ne démontre pas que le TEG indiqué dans l'offre serait inexact du fait de l'omission de comptabilisation des frais d'assurance invalidité décès en ce qu'il excéderait la marge de précision réglementaire de 0,1 %,
- que la sanction de l'irrégularité du taux effectif global par la réduction du taux d'intérêt au taux légal est disproportionnée comme aboutissant à une quasi-suppression des intérêts.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
MOTIFS DE LA DÉCISION :
L'article 1907 du code civile édicte que le taux de l'intérêt conventionnel doit être fixé par écrit.
Selon l'article L. 313-1 du code de la consommation dans sa rédaction en vigueur à la date d'émission de l'offre de crédit, « dans tous les cas, pour la détermination du taux effectif global du prêt, comme pour celle du taux effectif pris comme référence, sont ajoutés aux intérêts les frais, commissions ou rémunérations de toute nature, directs ou indirects, y compris ceux qui sont payés ou dus à des intermédiaires intervenus de quelque manière que ce soit dans l'octroi du prêt, même si ces frais, commissions ou rémunérations correspondent à des débours réels.
Toutefois, pour l'application des articles L. 312-4 à L. 312-8, les charges liées aux garanties dont les crédits sont éventuellement assortis ainsi que les honoraires d'officiers ministériels ne sont pas compris dans le taux effectif global défini ci-dessus, lorsque leur montant ne peut être indiqué avec précision antérieurement à la conclusion définitive du contrat.
En outre, pour les prêts qui font l'objet d'un amortissement échelonné, le taux effectif global doit être calculé en tenant compte des modalités de l'amortissement de la créance ».
En application de l'article L. 313-2, le taux effectif global ainsi déterminé doit être mentionné dans tout écrit constatant un contrat de prêt immobilier.
La mention dans l'acte d'un taux inexact équivaut à une absence de taux et constitue une cause de nullité de la clause de stipulation d'intérêts conventionnels justifiant qu'il lui soit substitué l'intérêt au taux légal à compter de la souscription du prêt.
L'annexe § d) de l'article R. 313-1 dispose que le résultat de calcul est exprimé avec une exactitude d'au moins une décimale lorsque le chiffre est arrondi à une décimale particulière.
Il en résulte que l'erreur affectant le taux effectif global n'est sanctionnable que si elle dépasse une décimale.
La charge de la preuve du caractère erroné du taux effectif global appartient à l'emprunteur qui engage l'action en nullité.
C'est par de justes motifs, adoptés par la cour, que le premier juge a estimé que la mention du taux annuel et d'un taux de période mensuel était régulière et qu'il n'y avait pas d'atteinte à l'unicité du taux.
En application de l'article 1907, le taux annuel de l'intérêt doit être déterminé par référence à l'année civile, laquelle comporte trois cent soixante-cinq ou trois cent soixante-six jours.
En l'espèce, le contrat indique que les intérêts courus entre deux échéances seront calculés sur la base de 360 jours, chaque mois étant compté pour 30 jours rapportés à 360 jours l'an.
Selon l'article R. 313-1 du code de consommation dans sa rédaction en vigueur à la date d'émission de l'offre de crédit énonce que « sauf pour les opérations de crédit mentionnées au 3 de l'article L. 311-3 et à l'article L. 312-2 du présent code pour lesquelles le taux effectif global est un taux annuel, proportionnel au taux de période, à terme échu et exprimé pour cent unités monétaires, le taux effectif global d'un prêt est un taux annuel, à terme échu, exprimé pour cent unités monétaires et calculé selon la méthode d'équivalence définie par la formule figurant en annexe au présent code. Le taux de période et la durée de la période doivent être expressément communiqués à l'emprunteur.
Le taux de période est calculé actuariellement, à partir d'une période unitaire correspondant à la périodicité des versements effectués par l'emprunteur. Il assure, selon la méthode des intérêts composés, l'égalité entre, d'une part, les sommes prêtées et, d'autre part, tous les versements dus par l'emprunteur au titre de ce prêt, en capital, intérêts et frais divers [...]. »
L'annexe précise au paragraphe c) que « l'écart entre les dates utilisées pour le calcul est exprimé en années ou en fractions d'années. Une année compte 365 jours, ou, pour les années bissextiles, 366 jours, 52 semaines ou 12 mois normalisés. Un mois normalisé compte 30,416 66 jours (c'est-à-dire 365/12), que l'année soit bissextile ou non. »
Il résulte de cette disposition que, lorsque les dates d'échéance sont fixées au même jour de chaque mois comme c'est le cas en l'espèce, le prêteur peut recourir à la notion de mois normalisé ou plus simplement une fraction du taux annuel mentionné au contrat correspondant à la période pour calculer les intérêts et donc calculer les intérêts sur la base de 1/12ème de l'année civile sans tenir compte du nombre exact de jours ayant couru entre deux échéances et pouvant être de 28, 29, 30 ou 31 jours.
Le calcul des intérêts sur la base d'une année de 360 jours rapportée à 30 jours soit un douzième d'année par mois revient arithmétiquement à un résultat équivalent au calcul des intérêts effectué sur la base d'une année civile rapportée au mois normalisé.
L'application de cette formule permet de vérifier la conformité du taux appliqué en l'espèce par la Banque :
* exemple intérêts de l'échéance n° 7
- calcul par mois normalisé : (305.772 euros x 3,30 %) x 30,41666 /365 = 840,87 euros,
- calcul par un douzième d'année : (305.772 euros x 3,30 %) / 12 = 840,87 euros
* exemple intérêts de l'échéance n° 8
- calcul par mois normalisé : (304.399,35 x 3,30 %) x 30,41666 /365 = 840,87 euros,
- calcul par un douzième d'année : (304.399,35 euros x 3,30 %) / 12 = 840,87 euros
Il en résulte que les modalités de calcul prévues par la clause litigieuse sont conformes aux dispositions légales et rien n'interdit d'y recourir dès lors qu'elles aboutissement au même résultat par un calcul simplifié sans avoir à s'enquérir des dispositions relatives au mois normalisé.
M. X., qui a la charge de la preuve, ne démontre pas que le taux effectif global indiqué dans l'offre serait inexact du fait de l'omission de comptabiliser les frais d'assurance-invalidité décès en ce qu'il présenterait un écart supérieur ou égal à la décimale avec le taux effectif global réel prescrite par l'article R. 313-1 du code de la consommation.
Pas plus il ne démontre pas que la clause d'intérêts conventionnels créerait un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties de sorte qu'elle ne saurait être qualifiée d'abusive.
La recommandation de la commission des clauses abusives invoquée par l'appelant concerne les conventions de comptes de dépôt en application desquelles les intérêts sont calculés quotidiennement et non pas les crédits immobiliers de sorte qu'elle ne saurait faire présumer le caractère abusif de la clause d'intérêts conventionnels du prêt litigieux.
Il convient en conséquence de confirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
LA COUR,
Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions ;
Y ajoutant,
Condamne M. X. à payer au CRÉDIT LYONNAIS la somme de 3.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;
Le condamne aux dépens ;
Autorise Maître B. à recouvrer directement à son encontre les dépens dont il aurait fait l'avance sans avoir reçu provision.
LE GREFFIER LA PRÉSIDENTE
- 5997 - Code de la consommation - Notion de clauses abusives - Cadre général - Normes de référence - Recommandations de la Commission des clauses abusives - Vérification de la pertinence de la recommandation
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