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CASS. CIV. 1re (avis), 6 avril 2018

Nature : Décision
Titre : CASS. CIV. 1re (avis), 6 avril 2018
Pays : France
Juridiction : Cour de cassation Ch. civile 1
Demande : 18-70001
Décision : 18-15007
Date : 6/04/2018
Numéro ECLI : ECLI:FR:CCASS:2018:C115007
Nature de la décision : Avis
Mode de publication : Legifrance
Date de la demande : 12/12/2017
Numéro de la décision : 15007
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CERCLAB - DOCUMENT N° 7613

CASS. CIV. 1re, 6 avril 2018 : pourvoi n° 18-70001 ; avis n° 15007

Publication : Legifrance ; Bull. civ.

 

Extrait : « 1°/ L’article L. 312-57 du code de la consommation, en ce qu’il reprend la définition énoncée à l’article L. 311-16 du même code, en vigueur lors de la conclusion du contrat, doit être interprété en ce sens qu’il ne permet pas de qualifier de « crédit renouvelable par fractions » un contrat qui, s’il définit un montant maximal d’emprunts accordés à un consommateur, suppose lors de chacun des emprunts successifs, remboursable indépendamment des autres, à un taux fixe qui lui est propre, une négociation quant à ses clauses essentielles, de durée de remboursement, et du taux d’intérêts conventionnels fixe spécifique.

2°/ Chacun des emprunts s’analyse en un prêt, personnel ou affecté, justifiant de l’acceptation d’une offre préalable, ouvrant notamment droit à rétractation. »

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR DE CASSATION

PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE (AVIS)

AVIS DU 6 AVRIL 2018

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION                                       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

N° de pourvoi : 18-70001. Avis n° 15007. Mme Batut (président), président. Maître Le Prado, avocat(s).

Avis sur saisine. LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l’arrêt suivant :

Demande d’avis : n° K 18-70.001

Juridiction : tribunal d’instance de Villefranche-sur-Saône (Caisse de crédit mutuel de Saint-Priest / X.)

Avis du 6 avril 2018 : n° 15007 P+B

 

EXPOSÉ DE LA DEMANDE D’AVIS                                                                 (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Vu les articles L. 441-1 et suivants du code de l’organisation judiciaire et 1031-1 et suivants du code de procédure civile ;

Vu la demande d’avis formulée, le 12 décembre 2017, par le tribunal d’instance de Villefranche-sur-Saône, ainsi libellée :

« - L’article L. 312-57 du code de la consommation doit-il être interprété en ce sens qu’il permet de qualifier de « crédit renouvelable par fractions » un contrat qui, s’il définit un montant maximal d’emprunts accordés à un consommateur, suppose lors de chacun des emprunts successifs, remboursable indépendamment des autres, à un taux fixe qui lui est propre, une négociation quant à ses clauses essentielles, de durée de remboursement, et du taux d’intérêts conventionnels fixe spécifique ?

- Dans la négative, chacun des emprunts opéré s’analyse-t-il en un prêt, personnel ou affecté, justifiant de l’acceptation d’une offre préalable, ouvrant droit à rétractation ? » ;

Vu les observations écrites de Maître Le Prado pour la Caisse de crédit mutuel de Saint-Priest ;

Sur le rapport de M. Avel, conseiller, et les conclusions de M. Ingall-Montagnier, premier avocat général, entendu en ses observations orales ;

 

MOTIFS (justification de la décision)                                                                 (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIFS :

I - Sur la recevabilité de la demande d’avis, contestée par la banque :

Il résulte de l’article L. 441-1 du code de l’organisation judiciaire que la demande d’avis doit porter sur une question de pur droit commandant l’issue du litige, être nouvelle, présenter une difficulté sérieuse et se poser dans de nombreux litiges.

En premier lieu, la demande d’avis a été présentée à l’occasion d’un procès en cours et porte sur une règle de droit qui commande l’issue du litige afférent à la qualification d’un contrat dénommé Passeport crédit conclu le 5 janvier 2012, au regard des dispositions du code de la consommation régissant le contrat de crédit renouvelable.

En effet, si l’article L. 312-57 du code de la consommation a été créé par l’ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016, ce texte reprend néanmoins la définition énoncée à l’article L. 311-16 du même code, en vigueur lors de la conclusion du contrat, selon laquelle constitue un crédit renouvelable une ouverture de crédit qui, assortie ou non de l’usage d’une carte de crédit, offre à son bénéficiaire la possibilité de disposer de façon fractionnée, aux dates de son choix, du montant du crédit consenti.

En deuxième lieu, la Cour de cassation n’a ni statué ni rendu un avis relatif au point de droit sur lequel son avis est sollicité et aucun pourvoi en cours ne pose la question faisant l’objet de la demande.

En dernier lieu, la question a fait l’objet de nombreuses décisions divergentes des juridictions du fond.

La demande d’avis est donc recevable.

 

II - Sur le fond :

Il résulte des dispositions de l’article L. 311-16 du code de la consommation alors en vigueur, que le crédit renouvelable, qu’il soit ou non assorti de l’usage d’une carte de crédit, consiste en la possibilité de bénéficier d’un crédit, d’un montant déterminé dès l’origine, et dont l’utilisation s’effectue de façon fractionnée, aux dates choisies par son bénéficiaire. L’établissement d’un contrat est obligatoire pour la conclusion du crédit initial qui est limité à un an et, dans les mêmes conditions, pour toute augmentation du crédit consentie ultérieurement.

Le crédit renouvelable est un crédit dont le taux d’intérêt est révisable. Un changement de taux d’intérêt peut donc intervenir en cours d’exécution du contrat. Cependant, toute modification du taux est soumise à une information préalable de l’emprunteur, ce qui lui confère le droit de refuser cette modification. Un taux révisable varie à la hausse ou à la baisse, soit selon des indices extérieurs, soit selon le taux de base du prêteur. Les conditions de révision sont précisées dans l’offre de prêt.

Le contrat de crédit renouvelable permet à l’emprunteur de reconstituer le crédit utilisé, à la différence du crédit affecté qui est destiné au financement de l’acquisition de biens particuliers.

Il s’ensuit que ne peut recevoir la qualification de crédit renouvelable un contrat, tel que le Passeport crédit, qui permet de souscrire plusieurs emprunts distincts, combinant la faculté de reconstitution du crédit permanent avec les modalités de remboursement par échéances prédéterminées suivant un tableau d’amortissement établi lors de chaque emprunt d’une fraction de capital disponible, comportant un taux fixe spécifique selon l’affectation des fonds prêtés, et ne prévoyant qu’une acceptation unique donnée par l’emprunteur lors de sa conclusion.

Dans ces conditions, chacun des emprunts doit s’analyser en un prêt personnel ou affecté.

En conséquence,

 

AVIS                                                                                                                      (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

LA COUR EST D’AVIS QUE :

1°/ L’article L. 312-57 du code de la consommation, en ce qu’il reprend la définition énoncée à l’article L. 311-16 du même code, en vigueur lors de la conclusion du contrat, doit être interprété en ce sens qu’il ne permet pas de qualifier de « crédit renouvelable par fractions » un contrat qui, s’il définit un montant maximal d’emprunts accordés à un consommateur, suppose lors de chacun des emprunts successifs, remboursable indépendamment des autres, à un taux fixe qui lui est propre, une négociation quant à ses clauses essentielles, de durée de remboursement, et du taux d’intérêts conventionnels fixe spécifique.

2°/ Chacun des emprunts s’analyse en un prêt, personnel ou affecté, justifiant de l’acceptation d’une offre préalable, ouvrant notamment droit à rétractation.

Fait à Paris et mis à disposition au greffe de la Cour le 6 avril 2018, après examen de la demande d’avis lors de la séance du 5 avril 2018 où étaient présents, conformément à l’article R. 431-5 du code de l’organisation judiciaire : Mme Batut, président, M. Avel, conseiller rapporteur, Mme Kamara, M. Girardet, Mme Duval-Arnould, M. Truchot, Mme Teiller, M. Betoulle, conseillers, Mme Canas, M. Vitse, Mme Le Gall, Mme Kloda, conseillers référendaires, M. Ingall-Montagnier, premier avocat général, Mme Randouin, greffier de chambre ;

Le présent avis a été signé par le conseiller rapporteur, le président et le greffier de chambre.