CA PARIS (pôle 5 ch. 11), 6 juillet 2018
CERCLAB - DOCUMENT N° 7632
CA PARIS (pôle 5 ch. 11), 6 juillet 2018 : RG n° 18/00145
Publication : Jurica
Extrait : « Qu'au jour du dépôt de la déclaration d'appel devant la cour d'appel de Paris (le 6 février 2017) par la société EVOLUDIS, l'appel précédent interjeté le 16 novembre 2016 par la même société devant la cour d'appel d'Aix en Provence était toujours en cours puisque sa caducité n'avait pas encore été constatée ; Qu'en conséquence, la seconde déclaration d'appel (R.G. n° 17-02836) de la société EVOLUDIS devant la cour de Paris, à l'encontre du même jugement du 18 octobre 2016 du tribunal de commerce de Marseille, en intimant la même partie (la société TELECOM) que dans l'appel interjeté le 16 novembre 2016 devant la cour d'appel d'Aix en Provence, est privée d'effet dès lors qu'au jour de son dépôt au greffe de la cour d'appel de Paris, la première déclaration d'appel du 16 novembre 2016 devant la cour d'Aix en Provence était initialement régulière, avait emporté inscription de l'affaire au rôle de ladite cour et n'était pas encore déclarée caduque ; Que la déclaration d'appel du 6 février 2017 devant la cour d'appel de Paris étant privé d'effet, l'appel correspondant est irrecevable ».
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
PÔLE 5 CHAMBRE 11
ARRÊT DU 6 JUILLET 2018
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 18/00145 (4 pages). Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 8 mars 2018 - Cour d'appel de PARIS - R.G. n°17/02836.
DEMANDEUR AU DÉFÉRÉ :
SA EVOLUDIS
prise en la personne de ses représentants légaux, N° SIRET : XXX (Cahors), représentée par Maître Patricia H. de la SELARL 2H Avocats à la cour, avocat au barreau de PARIS, toque : L0056, assistée de Maître Audrey S., avocat plaidant du barreau de PARIS, toque : L0056
DEFENDEUR AU DÉFÉRÉ :
SAS FUTUR TELECOM
prise en la personne de ses représentants légaux, [adresse], N° SIRET : YYY (Marseille), représentée par Maître Anne G.-B. de la SCP SCP G. B., avocats associés, avocat au barreau de PARIS, toque : K0111, assistée de Maître Elif O., avocat plaidant du barreau de PARIS, toque : K 111
COMPOSITION DE LA COUR : En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 31 mai, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Michèle LIS SCHAAL, Présidente de la chambre et M. Gérard PICQUE, Magistrat honoraire en charge de fonctions juridictionnelles. Un rapport a été présenté à l'audience dans les conditions prévues à l'article 785 du code de procédure civile.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de : Mme Michèle LIS SCHAAL, Présidente de la chambre, M. Gérard PICQUE, Magistrat honoraire en charge de fonctions juridictionnelles, M. Philippe FUSARO, Conseiller, désignée par ordonnance du Premier Président pour compléter l'audience.
Greffier, lors des débats : Mme Saoussen HAKIRI.
ARRÊT : - contradictoire, - par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, - signé par Mme Michèle LIS SCHAAL, présidente et par Mme Saoussen HAKIRI, greffier présent lors de la mise à disposition.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Dans une instance opposant la SA EVOLUDIS et la SAS FUTUR TELECOM (société TELECOM), le tribunal de commerce de Marseille, par jugement du 18 octobre 2016 assorti de l'exécution provisoire, s'est déclaré compétent en raison d'une clause contractuelle d'attribution, en déclarant les conditions générales de la société TELECOM opposables à la société EVOLUDIS, et a condamné cette dernière à payer la somme requise de 9.650,83 euros TTC au titre des frais de résiliation anticipée, majorée des intérêts au taux de 3 fois le taux légal à compter du 15 août 2015 outre la somme de 1.500 euros au titre des frais irrépétibles.
Le 9 novembre 2016, la société EVOLUDIS a interjeté appel devant la cour d'Aix en Provence. Ce recours a été déclaré caduc par ordonnance du 8 mars 2017 du magistrat de la mise en état, en raison du défaut de signification de conclusions de l'appelant dans le délai de 3 mois de la déclaration d'appel.
Entre temps, la société EVOLUDIS a saisi la cour d'appel de Paris d'un nouveau recours le 6 février 2017 à l'encontre du même jugement précité du tribunal de commerce de Marseille en intimant la même partie, soit la société TELECOM.
Sur requête de cette dernière, le magistrat de la mise en état de la cour d'appel de Paris a, par ordonnance du 8 mars 2018, déclaré la société EVOLUDIS irrecevable en sa déclaration d'appel formulée le 6 février 2017 en la condamnant à verser la somme de 4.500 euros au titre des frais irrépétibles.
Vu la requête reçue le 22 mars 2018, par laquelle la société EVOLUDIS a déféré devant la cour, l'ordonnance précitée du 8 mars 2018 du magistrat de la mise en état, et ses dernières écritures télé-transmises le 29 mai 2018 réclamant la somme de 2.000 euros au titre des frais irrépétibles du déféré en priant la cour de rétracter l'ordonnance et de déclarer recevable son appel du 6 février 2017 ;
Vu les dernières conclusions télé-transmises le 28 mai 2018 par la société TELECOM, défenderesse au déféré, réclamant la somme de 4.500 euros au titre des frais irrépétibles et poursuivant la confirmation de l'ordonnance ;
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
SUR CE,
Considérant que prétendant avoir reconventionnellement saisi le tribunal de commerce de Marseille d'une demande de réparation de son préjudice :
- à titre principal, sur le fondement de l'inexécution des obligations contractuelles de la société TELECOM,
- subsidiairement, sur le fondement de l'article L. 442-6-I-2° du code de commerce en raison du déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties,
la société EVOLUDIS soutient que « la cour d'appel d'Aix en Provence n'a pas été régulièrement saisie puisqu'elle était incompétente et partant [que] l'appel interjeté [était] nul, de sorte que [la société EVOLUDIS] avait intérêt à saisir la cour d'appel de Paris », dont la compétence exclusive en la matière est d'ordre public ;
Qu'elle estime aussi qu'on ne peut pas lui faire grief de ne pas avoir soulevé l'incompétence du tribunal de commerce de Marseille sur le fondement de l'article L. 442-6 du code de commerce, puisque cette juridiction fait partie de la liste de celles spécialisées visées à l'annexe 4-2-1 de l'article D. 442-3 du code de commerce ;
Mais considérant que saisie d'un recours, il appartient à la cour d'appel d'Aix en Provence de vérifier sa compétence et qu'il n'est pas établi qu'elle ait statué du chef de sa compétence dans l'appel interjeté devant elle le 16 novembre 2016 par la société EVOLUDIS ;
Qu'il ressort en outre, de la relation de la procédure en première instance par les premiers juges, non critiquée devant la présente cour, que la société EVOLUDIS (alors défenderesse, dont le siège social est dans le Lot) a d'abord décliné la compétence territoriale du tribunal de commerce de Marseille au profit de celui de Cahors puis, sur le fond, a contesté l'opposabilité des conditions générales de la société TELECOM en réclamant reconventionnellement le paiement de la somme de 18.049,76 euros à titre de réfaction de prix ou de dommages et intérêts en faisant état des problèmes de réseau qu'elle avait rencontrés ;
Qu'en invoquant plus subsidiairement les dispositions de l'article L. 442-6-I-2° du code de commerce en faisant valoir que les clauses contractuelles exonératoires de responsabilité invoquées par la société TELECOM « vident le contrat de son objet et sont abusives » en créant « un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties », la société EVOLUDIS a entendu contester la validité des clauses limitatives de responsabilité alors invoquées par la société TELECOM pour s'exonérer des conséquences des problèmes de réseau allégués, mais n'a nullement formulé de demande (de dommages et intérêts) sur le fondement de l'article précité, de sorte qu'en ayant précisé « il y a lieu de débouter la société EVOLUDIS des fins de ses demandes reconventionnelles », le tribunal de commerce de Marseille n'a pas statué sur une demande formulée sur le fondement de l'article L. 442-6-I-2° précité du code de commerce ;
Qu'il convient dès lors de relever que :
- il y a identité de parties, de cause et d'objet entre les deux recours, l'appel devant la cour de Paris ayant été interjeté selon les mêmes modalités que celui antérieurement formulé devant la cour d'Aix en Provence,
- l'appel porté en premier lieu devant la cour d'Aix en Provence l'a été devant une juridiction compétente pour connaître du litige, le tribunal de commerce de Marseille s'étant déclaré compétent, la société EVOLUDIS n'ayant pas conclu à l'incompétence de celui-ci sur le fondement de l'article L. 442-6-I-2° du code de commerce et n'ayant pas tiré de conséquence (autre que la seule nullité invoquée de la clause correspondante) du moyen soulevé au titre du déséquilibre allégué qui résulterait des clauses exonératoires,
- que l'intérêt à relever appel s'apprécie au jour de la déclaration ;
Qu'au jour du dépôt de la déclaration d'appel devant la cour d'appel de Paris (le 6 février 2017) par la société EVOLUDIS, l'appel précédent interjeté le 16 novembre 2016 par la même société devant la cour d'appel d'Aix en Provence était toujours en cours puisque sa caducité n'avait pas encore été constatée ;
Qu'en conséquence, la seconde déclaration d'appel (R.G. n° 17-02836) de la société EVOLUDIS devant la cour de Paris, à l'encontre du même jugement du 18 octobre 2016 du tribunal de commerce de Marseille, en intimant la même partie (la société TELECOM) que dans l'appel interjeté le 16 novembre 2016 devant la cour d'appel d'Aix en Provence, est privée d'effet dès lors qu'au jour de son dépôt au greffe de la cour d'appel de Paris, la première déclaration d'appel du 16 novembre 2016 devant la cour d'Aix en Provence était initialement régulière, avait emporté inscription de l'affaire au rôle de ladite cour et n'était pas encore déclarée caduque ;
Que la déclaration d'appel du 6 février 2017 devant la cour d'appel de Paris étant privé d'effet, l'appel correspondant est irrecevable ;
Que succombant dans son recours, la société EVOLUDIS ne peut pas prospérer dans sa demande d'indemnisation de ses frais irrépétibles, mais qu'il serait en revanche inéquitable de laisser à la société TELECOM la charge des frais irrépétibles supplémentaires qu'elle a dû exposés devant la cour dans sa collégialité ;
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
La Cour,
REJETTE la requête en déféré de la SA EVOLUDIS et maintient les dispositions de l'ordonnance du 8 mars 2018 du magistrat de la mise en état ;
CONDAMNE la SA EVOLUDIS aux dépens du déféré et à verser à la SAS FUTUR TELECOM une indemnité complémentaire d'un montant de 4.500 euros au titre des frais irrépétibles supplémentaires,
ADMET la SCP G. B., avocat postulant, au bénéfice de l'article 699 du code de procédure civile.
Le greffier Le président