CA MONTPELLIER (1re ch. B), 31 octobre 2018
CERCLAB - DOCUMENT N° 7706
CA MONTPELLIER (1re ch. B), 31 octobre 2018 : RG n° 15/08316
Publication : Jurica
Extrait : « Sur la clause portant indemnité de résiliation et sur l'application des dispositions de l'article 1152 du code civil : La clause prévue aux dispositions de l'article 2.2 du contrat est une clause usuelle qui ne constitue aucunement une clause abusive au sens des dispositions du code de la consommation. Elle est conforme aux dispositions de l'article L. 311-25 du code de la consommation. »
COUR D’APPEL DE MONTPELLIER
PREMIÈRE CHAMBRE B
ARRÊT DU 31 OCTOBRE 2018
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 15/08316. Décision déférée à la Cour : Jugement du 24 SEPTEMBRE 2015, TRIBUNAL D'INSTANCE DE MONTPELLIER : R.G. n° 15/000018.
APPELANTS :
Madame X. épouse Y.
née le [date] à [ville], de nationalité Française, représentée par Maître Claire L., avocat au barreau de MONTPELLIER substituée par Maître Claire-Lise B. avocat au barreau de MONTPELLIER
Monsieur Y.
né le [date] à [ville], de nationalité Française, représenté par Maître Claire L., avocat au barreau de MONTPELLIER substituée par Maître Claire-Lise B. avocat au barreau de MONTPELLIER
INTIMÉE :
SA DIAC
inscrite au RCS de BOBIGNY sous le n° XXX prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié ès qualités audit siège [adresse], représentée et assistée par Maître Michel S. de la SCP S. / C., avocat au barreau de MONTPELLIER
ORDONNANCE DE CLÔTURE DU 4 juin 2018
COMPOSITION DE LA COUR : En application des dispositions des articles 786 et 907 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 25 JUIN 2018, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Chantal RODIER, Conseiller, chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de : Monsieur Georges TORREGROSA, Président de chambre, M. Christian COMBES, Conseiller, Madame Chantal RODIER, Conseiller
Greffier, lors des débats : Madame Marie-Lys MAUNIER
L'affaire mise en délibéré au 12 septembre 2018 a été prorogé au 31 octobre 2018
ARRÊT : - contradictoire - prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile ; - signé par Monsieur Georges TORREGROSA, Président de chambre, et par Madame Marie-Lys MAUNIER, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :
Selon offre préalable émise le 2 juin 2014 et acceptée le même jour, la SA DIAC a consenti à Monsieur Y. et Madame X. épouse Y. un contrat de location avec option d'achat d'un véhicule, de marque Nissan Juke 5 portes, 1.5 DCI 110 ch, Stop Start Ultimate Edition, pour un coût total de 19.292,95 euros.
Les époux Y. s'engageaient à régler 37 loyers mensuels d'un montant de 331,80 euros chacun, à compter du 30 juin 2014 jusqu'au 30 juin 2017, la valeur résiduelle du véhicule en fin de contrat, le 31 juillet 2017, étant fixée au montant de 11.146,76 euros.
Madame X. épouse Y. prenait possession du véhicule le 1er juillet 2014.
Les deux premiers loyers de juin et juillet étaient régulièrement honorés, mais celui du 30 août, prélevé le 1er septembre était rejeté dès le 4 septembre 2014.
C'est ainsi que le 23 septembre 2014 - seulement trois mois après la conclusion du contrat - la SA DIAC adressait à Madame Y. une lettre de mise en demeure d'avoir à régler la somme de 358,56 euros représentant l'arriéré, lui précisant qu'à défaut de règlement sous 8 jours, conformément aux dispositions contractuelles, le contrat serait résilié et que le véhicule loué devrait être restitué chez le concessionnaire Nissan le plus proche de son domicile.
La même mise en demeure était adressée à Monsieur Y., en qualité de cotitulaire du contrat.
L'échéance du 30 septembre 2014 était rejetée le 1er octobre 2014.
La SA DIAC prononçait alors la résiliation du contrat le 4 octobre 2014.
Le 21 octobre 2014, la SA DIAC saisissait le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Montpellier d'une requête aux fins d'appréhension du véhicule.
Par ordonnance du 23 octobre 2014, le juge de l'exécution ordonnait aux époux Y. de restituer le véhicule.
Cette ordonnance était signifiée le 5 novembre 2014 par acte d'huissier, avec sommation d'avoir à restituer le véhicule.
Il y était formé opposition, reçue au greffe le 19 novembre 2014, à l'encontre de cette ordonnance.
Par acte d'huissier en date du 23 décembre 2014, la SA DIAC faisait délivrer assignation à Monsieur Y. et Madame X. épouse Y. devant le tribunal d'instance de Montpellier, aux fins d'obtenir leur condamnation au paiement de la somme principale de 17.147,85 euros.
À l'audience du 25 juin 2015, le juge a soulevé d'office des moyens tendant à la déchéance du droit aux intérêts, sur lesquels la SA DIAC s'en est rapportée.
Par jugement contradictoire en date du 24 septembre 2015, le tribunal d'instance de Montpellier a :
- Condamné Monsieur Y. et Madame X. épouse Y. à payer à la SA DIAC la somme principale de 17 147,85 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 18 décembre 2014,
- Dit qu'il sera fait application de l'article 1154 du code civil,
- Ordonné à Monsieur Y. et Madame X. épouse Y. de restituer à la SA DIAC le véhicule de marque Nissan, modèle « Juke 5 portes, 1.5 DCI 110 ch, Stop Start Ultimate Edition », muni de toutes ses pièces et accessoires, dans un délai d'un mois suivant la signification du jugement et ce, sous astreinte provisoire de 15 euros par jour de retard commençant à courir à l'expiration de ce délai,
- Condamné Monsieur Y. et Madame X. épouse Y. à payer à la SA DIAC la somme de 400 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- Condamné Monsieur Y. et Madame X. épouse Y. aux entiers dépens,
- Débouté la SA DIAC de sa demande tendant à voir mettre à la charge des époux Y. le droit proportionnel de l'article 10 du décret du 12 décembre 1996,
- Ordonné l'exécution provisoire,
- Débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.
APPEL
Monsieur Y. et Madame X. épouse Y. ont relevé appel de ce jugement par déclaration en date du 9 novembre 2015.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 4 juin 2018.
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Vu les dernières conclusions de Monsieur Y. et Madame X. épouse Y. en date du 12 avril 2018, auxquelles il est expressément référé pour plus ample et complet exposé des motifs et du dispositif ;
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Vu les dernières conclusions de la SA DIAC en date du 30 mai 2018 auxquelles il est expressément référé pour plus ample et complet exposé des motifs et du dispositif ;
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
SUR CE :
Sur la demande en nullité de la déchéance du terme :
Les époux Y. font valoir :
- qu'ils n'ont jamais réceptionné la mise en demeure, et que la SA DIAC est dans l'incapacité de démontrer qu'elle a été portée à leur connaissance ;
- qu'il ne peut donc s'agir d'une interpellation suffisante pour entraîner la déchéance du terme ;
- qu'en revanche dès la signification de l'ordonnance sur requête de restitution du véhicule, qui constitue la première interpellation suffisante, Madame Y. a régularisé les échéances impayées dans un délai de 12 jours, de sorte que la société DIAC ne démontre pas que la mise en demeure est restée infructueuse.
Cependant, la DIAC justifie s'être étonnée auprès de la poste de recevoir un accusé de réception sans mention du motif de retour. Les résultats de la recherche démontrent que :
- le 24 septembre 2014 la lettre est partie de Bobigny,
- le 26 elle était en cours de traitement à [ville C.],
- le même jour le pli a été présenté, un avis de passage a été déposé par le facteur de [ville C.],
- le 27 septembre la lettre attendait d'être retirée au guichet de [ville C.],
- le 13 octobre 2014 elle a été retournée à l'expéditeur pour cause de refus à l'adresse [ville C.].
Par la suite, une seconde lettre a été adressée à Madame Y. le 15 octobre 2014, lui rappelant qu'une lettre de mise en demeure lui avait été adressée par lettre recommandée avec accusé de réception et que le courrier a été renvoyé avec la mention « refusé le 13 octobre 2014 ». Il lui était encore précisé : à défaut de régulariser les impayés pour le règlement de 717,27 euros à recevoir au plus tard le 21 octobre 2014, ce dossier sera confié à un huissier de justice aux fins d'appréhension.
C'est à juste titre que le premier juge a retenu que les dispositions contractuelles, comme les dispositions légales de l'article 1139 du code civil, n'obligent pas le prêteur à rapporter la preuve de la réception par le débiteur de la lettre de mise en demeure, mais seulement de son envoi.
La mise en demeure était parfaitement régulière et valable. C'est donc à bon droit que la société DIAC a prononcé la déchéance du terme.
Le moyen sera en voie de rejet.
Sur l'absence de renonciation à la déchéance du terme :
Par la suite, seuls deux loyers ont été réglés les 30 novembre et 30 décembre 2014.
Le seul fait pour la société DIAC d'avoir accepté le paiement de ces deux sommes ne peut caractériser une renonciation expresse et non équivoque.
En effet, pour être valable, la renonciation doit être expresse et non équivoque : elle ne peut être tacite.
Dès lors, les débiteurs ne peuvent utilement se prévaloir de ces seuls paiements pour établir une renonciation du créancier à la déchéance du terme.
Il est bien évident que le prêteur peut accepter des paiements après le prononcé de la déchéance du terme, lesquels viennent alors s'imputer en déduction de la créance.
Le moyen sera en voie de rejet.
Sur la clause portant indemnité de résiliation et sur l'application des dispositions de l'article 1152 du code civil :
La clause prévue aux dispositions de l'article 2.2 du contrat est une clause usuelle qui ne constitue aucunement une clause abusive au sens des dispositions du code de la consommation. Elle est conforme aux dispositions de l'article L. 311-25 du code de la consommation.
Il est constant que l'indemnité de résiliation réclamée présente à la fois un caractère indemnitaire pour réparer le préjudice financier subi par la société DIAC à raison de la rupture anticipée du contrat et le manque-à-gagner de celle-ci, mais également le caractère d'une clause pénale dissuasive pour le débiteur de se dérober à ses obligations.
En l'espèce, l'indemnité de résiliation, qui était initialement de 16.620,72 euros, s'est trouvée ramenée à la somme de 6.870,72 euros, le véhicule ayant été restitué et revendu par la SA DIAC pour le prix de 9.750 euros HT.
La DIAC fait valoir qu'elle a avancé le prix d'achat du véhicule pour un montant de 15.888,70 euros HT et qu'elle n'a en réalité perçu que la somme totale de 11.077,20 euros, représentant le prix de revente de 9.750 euros HT ainsi que le montant des échéances perçues au titre des loyers les 30 juin, 30 juillet, et des versements effectués après déchéance du terme les 30 octobre et 1er décembre 2014. Elle estime donc qu'elle subit un préjudice quantifiable de 4.811,50 euros que l'indemnité de résiliation est destinée à couvrir.
Elle fait valoir en sa qualité d'organisme financier qu'elle était en droit d'attendre 111,23 % du prix d'achat, et que l'indemnité de résiliation doit compenser également son manque à gagner.
Dès lors, en réclamant la somme de 6.870,72 euros au titre de l'indemnité de résiliation, la DIAC estime que cette indemnité, soumise au pouvoir d'appréciation du juge, n'apparaît pas comme manifestement excessive.
La charge de la preuve du caractère manifestement excessif pèse sur les débiteurs, lesquels n'apportent aucun élément susceptible de contrer la partie adverse dans sa démonstration. Ils se contentent au contraire sur ce point de généralités.
D'ailleurs, si en l'espèce la clause pénale avait été manifestement excessive dans son application, les débiteurs - qui étaient déjà assistés d'un avocat en première instance - n'auraient pas manqué d'en faire la démonstration. Or, cette question n'était pas même abordée dans les débats devant le premier juge.
Le moyen sera en voie de rejet.
Sur le montant de la créance :
À l'indemnité de résiliation de 6.870,72 euros, s'ajoutent les échéances échues impayées, indemnités sur impayés, intérêts de retard, frais de vente du véhicule, de sorte que les débiteurs seront condamnés au paiement de la somme réclamée de 7.136,98 euros, conformément au décompte produit en pièce n° 31 par la DIAC et repris en page 6 de ses écritures.
Cette somme portera intérêts au taux contractuel à compter du dernier décompte du 12 février 2016, ainsi qu'il est demandé par l'intimée.
Sur les autres demandes :
Le jugement sera confirmé sur les frais irrépétibles et les dépens.
Il n'y a pas lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.
Les appelants qui succombent en toutes leurs prétentions supporteront les dépens de l'appel.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS,
Vu les dispositions des articles 1134 et 1315 du code civil, des articles L. 311-8 et suivants du code de la consommation, des articles L. 311-25 et L. 311-52 du même code,
Vu les dispositions contractuelles,
Vu les pièces produites,
LA COUR, statuant par arrêt contradictoire et mis à disposition au greffe,
CONFIRME le jugement en toutes ses dispositions, sauf à l'actualiser pour prendre en compte dans le montant de la condamnation, la déduction du prix de vente du véhicule litigieux,
Et statuant à nouveau de ce chef infirmé, pour actualiser le jugement,
Condamne Monsieur Y. et Madame X. épouse Y. à payer à la SA DIAC la somme principale de 7.136,98 euros, intérêts au taux contractuel à compter du dernier décompte du 12 février 2016.
Y ajoutant,
Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel,
Condamne Monsieur Y. et Madame X. épouse Y. aux dépens.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT
MM/CR