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CA PAU (2e ch. sect. 1), 11 mars 2019

Nature : Décision
Titre : CA PAU (2e ch. sect. 1), 11 mars 2019
Pays : France
Juridiction : Pau (CA), 2e ch. sect. 1
Demande : 17/01289
Décision : 19/998
Date : 11/03/2019
Nature de la décision : Réformation
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 3/04/2017
Numéro de la décision : 998
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CERCLAB - DOCUMENT N° 7794

CA PAU (2e ch. sect. 1), 11 mars 2019 : RG n° 17/01289 ; arrêt n° 19/998 

Publication : Jurica

 

Extraits : 1/ « En l'espèce et comme l'a souligné le tribunal, si la SARL S. ne peut prouver les propos mensongers tenus par le préposé de la société AFDEN quant à sa qualité d'employé de la société EDF ou de la société GDF-SUEZ, elle apporte un commencement de preuve, en produisant deux attestations émanant de messieurs A. et B., tous deux commerçants, lesquels attestent avoir été démarchés par une personne se faisant passer pour un agent EDF qui leur a vanté les économies qu'ils pourraient réaliser sur leur futures factures d'électricité avec la batterie de condensateur proposée par la société AFDEN.

Toutefois, le bon de commande ne contenait aucune mention de nature à prêter à confusion sur la personne du cocontractant, le logo EDF apparaissant avec les logos de trois autres opérateurs de distribution d'électricité, dans la seule rubrique « fournisseur d'énergie ». EDF étant le fournisseur d'électricité de la SARL S., c'est donc fort logiquement la case correspondante qui a été cochée sur le bon de commande. Si comme le soutient la SARL S., la référence à EDF, faite par le préposé de la société AFDEN dans son argumentaire de vente, a pu être présentée comme une recommandation technique, il n'apparaît pas que cet argument ait été déterminant de son consentement.

De même, il est difficile en l'absence d'élément objectif, de distinguer, dans l'argumentaire qui a pu être présenté à la SARL S., ce qui relève de l'exagération commerciale admissible, quant au rendement de l'équipement proposé à la vente, du mensonge ou des manœuvres frauduleuses constitutives d'un dol. »

2/ « En revanche, l'article 2 des conditions générales de vente figurant au verso du bon de commande dispose « qu'en stockant l'énergie active et en la restituant à la demande, les batteries de condensateur permettent à l'abonné soit de diminuer la puissance souscrite et d'optimiser le contrat d'électricité, soit de disposer d'une puissance active supplémentaire sans modifier son contrat, système qui permet de réaliser des économies d'énergie, sous réserve de multiples critères... ». Par ailleurs, sur la brochure de la batterie de condensateur remise à la SARL S. par le commercial de la société AFDEN, l'accent est mis, à plusieurs reprises, sur la réduction des dépenses d'électricité dans les termes suivants « la batterie de condensateur Economie-Energie-Electricité. Prenez le contrôle de vos dépenses d'énergie (...). La batterie de condensateur permet la réduction de la consommation d'électricité et donc le montant de la facture (...) Il faut savoir que 90 % de nos industries sont équipées de batteries de condensateurs afin de réduire leurs factures (...) La solution pour réduire vos factures ».

Il est donc manifeste qu'au-delà des propriétés techniques d'une batterie de condensateur, telles qu'exposées sur cette brochure, c'est avant tout l’intérêt économique d'un équipement propre à réduire les dépenses et factures d'énergie qui est mis en avant sur ce document et qui a été déterminant du consentement de la SARL S. Il est ainsi avéré que sans cette promesse d'une réduction significative de ses dépenses d'électricité, la SARL S. n'aurait pas loué ce matériel qui lui a été proposé, au terme d’un démarchage téléphonique et par conséquent sans qu'elle fût à l'initiative de cette acquisition. Or, comme l'a relevé le tribunal dont le calcul n'est pas remis en cause, les factures produites, afférentes à l'année qui a suivi l'installation de cet équipement, ont montré une économie moyenne de 1.300 euros alors que la location de la batterie, sur la même période s'est élevée à 2.400,00 euros, laissant apparaître une perte financière de 1100 euros. Au final, la location de cet équipement s'est traduit, pour la SARL S., par un surenchérissement du coût généré par sa consommation électrique, sans perspective de dégager une économie nette au terme du contrat de location, faute de pouvoir acquérir le bien loué en levant une option d'achat.

Le consentement de la SARL S. a donc bien été vicié au moment de la formation du contrat, par une erreur sur la substance même de la chose qui en était l'objet, en l'espèce sur une qualité substantielle de la batterie de condensateur proposée par la société AFDEN, déterminante du consentement de la SARL S. qui pensait pouvoir réaliser, à l'aide de cet équipement et au vu des arguments commerciaux présentés, une économie nette sur ses dépenses d'électricité. Cette erreur entraîne la nullité du bon de commande signé le 4 février 2015 entre la SARL S. et la SARL AFDEN qui doit en conséquence être condamnée à retirer la batterie de condensateur installée dans les locaux de la SARL S., et ce à ses frais et dans les 15 jours suivant la signification de la présente décision, sous peine d'une astreinte de 100 euros par jour de retard passé ce délai. »

3/ « La société LOCAM invoque également la clause de « non recours » prévue par l'article 15 des conditions générales du contrat de location, en réalité par l'article 7 du contrat de location financière signé par la SARL S. Aux termes de cette clause et en contrepartie du transfert de des recours contre le fournisseur, le locataire renonce à tout recours contre le loueur, que ce soit pour obtenir des dommages et intérêts, la résiliation ou la résolution du contrat. Il ne peut non plus différer aucun règlement de loyer. Cette clause s'applique notamment en cas de vices rédhibitoires ou cachés ou de mauvais rendement du bien loué.

Il est constant que les contrats concomitants ou successifs qui s'inscrivent dans une opération incluant une location financière, ce qui est le cas en l'espèce, sont interdépendants et que sont réputées non écrites les clauses de ces contrats inconciliables avec cette interdépendance. L'indivisibilité de deux contrats doit par ailleurs conduire à considérer que l'anéantissement de l'un entraîne nécessairement la caducité de l'autre, quoique celui-ci se soit valablement formé

Au cas d'espèce, la nullité du contrat principal passé avec la société AFDEN entraîne par voie de conséquence la caducité du contrat de location financière passé avec la société LOCAM, ce dont il résulte que la clause de non recours et celle prévoyant l'indemnisation du loueur par le locataire, en cas de résolution du contrat principal, prévues par le contrat passé avec la société LOCAM, sont inapplicables. »

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE PAU

DEUXIÈME CHAMBRE SECTION 1

ARRÊT DU 11 MARS 2019