CEntre de Recherche sur les CLauses ABusives
Résultats de la recherche

CA SAINT-DENIS DE LA RÉUNION (ch. com.), 14 décembre 2018

Nature : Décision
Titre : CA SAINT-DENIS DE LA RÉUNION (ch. com.), 14 décembre 2018
Pays : France
Juridiction : Saint-Denis de la Réunion (CA), ch. com.
Demande : 17/00943
Date : 14/12/2018
Nature de la décision : Infirmation
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 24/05/2017
Imprimer ce document

 

CERCLAB - DOCUMENT N° 7806

CA SAINT-DENIS DE LA RÉUNION (ch. com.), 14 décembre 2018 : RG n° 17/00943

Publication : Jurica

 

Extrait : « La clause (page 13) paragraphe « conditions suspensives » qui énonce que la réalisation d'une seule des conditions suspensives entraînera la caducité de la promesse, ne peut être valablement opposée si la non réalisation de la condition est imputable à l'un des contractants. Les dispositions contractuelles relatives à la justification du dépôt de la demande de prêt ou à la justification du dépôt de la demande de prêt dans un certain délai (page 19) permettent au vendeur de se prévaloir de la caducité de la promesse. Ces différentes clauses sont établies en faveur de la société MAUVILAC puisque celle-ci en l'absence de ces différents éléments peut déclarer le compromis caduc et remettre son bien en vente sans attendre le terme fixé par le compromis. Ces clauses ne vident pas de toute substance l'obligation pour l'acquéreur de justifier d'une recherche de financement conforme aux caractéristiques définies dans la promesse. Ces clauses ne font pas obstacles à la demande. »

 

COUR D’APPEL DE SAINT-DENIS DE LA RÉUNION

CHAMBRE COMMERCIALE

ARRÊT DU 14 DÉCEMBRE 2018

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 17/00943. N° Portalis DBWB-V-B7B-E3PN. Appel d'une décision rendue par le TRIBUNAL MIXTE DE COMMERCE DE SAINT-DENIS en date du 26 AVRIL 2017 suivant déclaration d'appel en date du 24 MAI 2017 : R.G. n° 15/00181.

 

APPELANTE :

SAS MAUVILAC REUNION

Représentant : Maître Mickaël N. de la SELAS SOCIETE D'AVOCATS MICKAEL N., avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-RÉUNION

 

INTIMÉE :

SAS LOGISTICS III

Représentant : Maître Jean Pierre L., avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-RÉUNION

 

DATE DE CLÔTURE : 19/02/2018

DÉBATS : en application des dispositions des articles 785 et 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 5 septembre 2018 devant Madame ROUGE Fabienne, Conseillère, qui en a fait un rapport, assistée de Madame Anise DORVAL, Greffière, les parties ne s'y étant pas opposées. Ce magistrat a indiqué, à l'issue des débats, que l'arrêt sera prononcé, par sa mise à disposition au greffe le 7 novembre 2018 prorogé par avis au 14 décembre 2018.

Il a été rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de : Président : Madame Fabienne KARROUZ, Conseillère, Conseiller : Madame Fabienne ROUGE, Conseillère, Conseiller : Madame Cynthia ARICAT, Juge placée affectée à la cour d'appel par ordonnance de Monsieur le premier président de la cour d'appel, Qui en ont délibéré

Arrêt : prononcé publiquement par sa mise à disposition des parties le 14 décembre 2018.

Greffier lors du prononcé : Madame Nathalie BEBEAU, Greffière.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

LA COUR :

Une promesse synallagmatique de vente en date du 13 juin 2013 a été signée entre la SAS MAUVILAC propriétaire et la SAS LOGISTICS III, portant sur une parcelle de terrain à bâtir située au [adresse], cadastrée section XX d'une superficie de 3ha 08a 77ca moyennant le prix de 7.052.169,07 euros TTC, en vue de l'édification d'un bâtiment à usage d'entrepôt et de bureaux d'une surface hors œuvre nette d'environ 8.547 m2, ainsi que des emplacements de stationnement.

La vente a été consentie notamment sous la condition suspensive de l'obtention par la SAS LOGISTICS III, l’acquéreur, d'un prêt d’un montant de 6.500.000 euros, pour une durée de 10 ans, au taux maximal hors assurance de 3,5 % l'an. Cette condition suspensive devait être réalisée au plus tard dans le délai de trois mois à compter de la signature de la promesse.

L'acte prévoyait que « la non réalisation d'une seule des conditions suspensives entraînerait la caducité de la promesse sans indemnité de part ni d'autre.

Un dépôt de garantie de 162.500 euros a été séquestré en l'Etude du notaire rédacteur.

L'acquéreur ne pourra recouvrer le dépôt de garantie versé (...) que s'il justifie de la non-réalisation hors sa responsabilité telle qu'elle est indiquée à l'article 1178 du Code civil, de l'une ou l'autre des conditions suspensives ci-dessus énoncées. »

Une clause pénale était par ailleurs prévue dans les termes suivants :

« Au cas où, alors que les conditions suspensives seraient réalisées ou que leur bénéficiaire y aurait renoncé, l'une des parties, après avoir été mise en demeure, ne régulariserait pas l'acte de vente et ne satisferait pas ainsi aux obligations alors exigibles, devra verser à l'autre partie la somme de 325.000 euros à titre de clause pénale, conformément aux dispositions des articles 1152 et 1226 du Code Civil, indépendamment de tout dommages et intérêts ».

Aux termes d'un avenant en date du 2 octobre 2013 le délai maximum d'obtention du financement a été prorogé jusqu'au 13 octobre 2013.

L'acquéreur n'a pu obtenir le prêt nécessaire à la réalisation de l'opération, suivant lettre recommandée avec accusé de réception en date du 11 octobre 2013 la société SAS LOGISTICS III a informé la société venderesse que ses partenaires bancaires avaient refusé de lui consentir le financement demandé et demandait la restitution de la somme versée à titre de dépôt de garantie.

Cette mise en demeure n'ayant été suivie d'aucun effet, elle faisait assigner par acte d'huissier en date du 22 janvier 2015, la société MAUVILAC REUNION en référé devant le Tribunal mixte de Commerce de Saint-Denis afin d'obtenir la restitution de ce dépôt de garantie.

Par ordonnance de référé en date du 8 juin 2015, le Président du Tribunal Mixte de Commerce de Saint-Denis de la Réunion ordonnait la restitution au profit de la société LOGISTICS III de la somme de 162.500 euros, estimant que cette obligation n'était pas sérieusement contestable, la cour d'appel confirmait cette décision le 17 février 2016. La restitution des fonds intervenait le 16 juin 2015.

Par acte d'huissier en date du 9 mars 2015 la SAS MAUVILAC REUNION a fait assigner la SAS LOGISTICS III en vue de voir constater que cette dernière n'avait pas respecté ses obligations, et elle demandait paiement de la somme de 325.000 euros au titre de la clause pénale stipulée dans la promesse de vente.

Par jugement rendu le 26 avril 2017 le tribunal mixte de commerce de Saint-Denis de la Réunion a :

- rejeté l'ensemble des demandes formulées par la SAS MAUVILAC REUNION,

- condamné la SAS MAUVILAC REUNION au paiement à la SAS LOGISTICS III de la somme de 3.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la SAS MAUVILAC REUNION aux dépens,

- rejeté la demande d'exécution provisoire.

Par déclaration en date du 24 mai 2017, la SAS MAUVILAC REUNION a interjeté appel de cette décision.

 

Aux termes de ses dernières écritures en date du 15 novembre 2017 transmises par RPVA la SAS MAUVILAC REUNION demande à la cour de :

- INFIRMER le jugement déféré,

- CONSTATER qu'il y a eu délivrance d'attestations de refus de prêt de complaisance,

- DIRE ET JUGER que la clause pénale doit sanctionner le comportement de la SAS LOGISTICS Ill qui ne démontre pas avoir rempli tous ses engagements,

- CONSTATER que la SAS LOGISTICS III n'a pas rempli ses obligations au titre de la condition suspensive d'obtention du prêt devant financer l'acquisition du terrain, et qu'elle n'a pas déposé ses demandes de prêts dans les délais convenus,

- CONSTATER que la SAS LOGISTICS III ne produit aucun document relatif à sa demande de prêt,

- DIRE ET JUGER que les refus de financement ne sont pas conformes à la condition suspensive relative au prêt du compromis de vente,

- CONSTATER que le 11 octobre 2013 la SAS LOGISTICS III a signifié à la SAS MAUVILAC les refus de financement de la Société Marseillaise de Crédit et de BNP PARIBAS datés du même jour,

- DIRE ET JUGER que la SAS MAUVILAC a été victime d'une véritable fraude à ses droits de la part de la SAS LOGISTICS III, qui lui a fait sciemment signer un avenant de prolongation de la promesse de vente le 8 octobre 2013, avant de lui signifier le 11 octobre 2013 le refus de 2 banques,

- DIRE ET JUGER que la SAS LOGISTICS III ne pouvait se décharger par avance de ses obligations essentielles, et vider de toute substance ces obligations de réparation,

- DIRE ET JUGER que les clauses limitatives de réparation figurant dans la

promesse de vente en date du 13 juin 2013 seront réputées non écrites et privées de leur validité,

- DIRE ET JUGER que la SAS LOGISTICS III a agi à des fins professionnelles dans le cadre de son activité commerciale,

- DIRE ET JUGER que la SAS MAUVILAC s'est trouvée confrontée à un professionnel, et que les clauses de la promesse de vente du 13 juin supprimant l'obligation de réparer au profit de la SAS LOGISTICS III doivent être considérées comme abusives et non écrites,

- DIRE ET JUGER qu'une mise en demeure de la SAS LOGISTICS III était superflue,

En tout état de cause,

- DIRE ET JUGER que les clauses supprimant les sanctions pécuniaires de la SAS LOGISTICS III sont invalides et réputées non écrites,

- CONDAMNER la société LOGISTICS III à payer à la société MAUVILAC la somme de 325.000 euros, conformément à la clause pénale stipulée dans la promesse de vente en date du 13 juin 2013, ainsi que celle de 162.500 euros au titre du dépôt de garantie,

- CONDAMNER la société LOGISTICS III à payer à la société MAUVILAC la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens,

- DEBOUTER la société LOGISTICS III de toutes ses demandes, fins et conclusions.

A l'appui de ses demandes elle soutient que les refus des deux banques sollicitées par la SAS LOGISTICS III sont de pure complaisance puisque datées du même jour. De plus le refus de la société Marseillaise de Crédit ne mentionne pas le taux d'intérêt et celui de la BNP PARIBAS est tout aussi laconique. Elle rappelle qu'il appartient à l'acquéreur de démontrer que la demande de prêt était conforme aux caractéristiques prévues dans la promesse de vente.

Elle souligne que le délai de dépôt des demandes de prêt n'a pas été respecté et que ce non-respect est sanctionné par la cour de cassation. Les banques sollicitées sont les banques habituelles de la société LOGISTICS III. Elle rappelle que l'article 1304-3 (l'ancien article 1178) du code civil prévoit que la condition est réputée accomplie lorsque c'est le débiteur obligé sous cette condition qui en a empêché l'accomplissement. L'acquéreur avait d'ailleurs indiqué qu'il n'existait aucun obstacle de principe à l'obtention des financements. Au titre des sanctions pour inexécution la sas LOGISTICS III perdra son dépôt de garantie et la clause pénale devra trouver application.

La SAS LOGISTICS III avait l'obligation d'informer la SAS MAUVILAC de ses démarches et de l'évolution de son dossier. La charge de la preuve de l'avancement du dossier pesait sur la SAS LOGISTICS III. Dès lors les différentes clauses limitatives de réparation (celles qui mentionnent qu'à défaut du respect de certaines conditions la promesse devient caduque sans contrepartie financière) doivent être considérées comme non écrites car elles vident de toutes substances l'obligation essentielle du débiteur.

En outre elle indique que la SAS LOGISTICS III est un professionnel de l'immobilier et que toutes ces clauses créent un déséquilibre à son détriment car elle n'est pas un professionnel de l'immobilier. Ces clauses sont abusives car conclues entre un professionnel et un non professionnel et doivent être réputées non écrites. Elle a agi comme un simple particulier et doit donc bénéficier des dispositions des articles L. 241-1 et L. 212-1 du code de la consommation.

Seules ces clauses seront invalidées car elles ont créé un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties. Elle n'a pas mis en demeure la SAS LOGISTICS III de régulariser la vente puisque celle-ci n'a pas obtenu son financement.

 

La SAS LOGISTICS III aux termes de ses écritures demande à la cour de :

- CONSTATER qu'elle a bien accompli les diligences nécessaires à l'obtention d'un prêt,

- CONSTATER que la société appelante ne démontre aucunement que les refus d'octroi d'un prêt seraient de pure complaisance,

- CONSTATER que les parties avaient contractuellement exclu, aux termes d'une clause parfaitement valable, que la non justification par l'acquéreur des diligences relatives à l'obtention d'un prêt puisse entraîner pour lui une quelconque conséquence indemnitaire,

- DIRE ET JUGER en conséquence qu'il n'est pas justifié que l'opération de vente a échoué du fait de l'acquéreur et débouter la société MAUVILAC REUNION de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

- CONSTATER surabondamment que la mise en œuvre de la clause pénale n'a pas été précédée d'une mise en demeure notifiée par le vendeur à l'acquéreur et tendant à la régularisation de l'acte de vente en conformité des termes de la promesse unissant les parties,

- CONFIRMER dès lors en toutes ses dispositions le Jugement dont appel, et débouter la société MAUVILAC REUNION de sa demande tendant à obtenir la condamnation de la société LOGISTICS III au paiement d'une somme de 325.000 euros en application de la clause pénale,

- A TITRE INFINIMENT SUBSIDIAIRE, réduire la demande formée de ce chef par la société MAUVILAC REUNION,

- CONDAMNER la société MAUVILAC REUNION à payer à la Société LOGISTICS III une indemnité de 7.500 euros par application des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile,

- CONDAMNER la société MAUVILAC REUNION au paiement des entiers dépens.

A l'appui de ses prétentions, elle expose qu'elle a bien respectée ses obligations et a justifié du dépôt de demandes de prêt ainsi que le prévoyait leur accord. Elle a également effectué de nombreuses démarches pour obtenir le permis de construire.

Les parties avaient convenu sans aucune équivoque qu'il appartenait à l'acquéreur de déposer ses demandes de prêts dans les 30 jours et d'en justifier, et à défaut pour l'acquéreur d'avoir apporté cette justification, le vendeur pouvait le mettre en demeure de lui la fournir et que le défaut de justification d'un dépôt des demandes de prêt dans le délai contractuel, aboutirait à une caducité de la vente sans indemnité. Si la société MAUVILAC ne lui pas demandé d'en justifier en vertu de cette clause c'est parce qu'elle l'avait fait.

La société MAUVILAC est un professionnel au vu de la définition posée par le Code de la Consommation, elle intervient depuis 45 ans dans le domaine des activités immobilières sur la Réunion.

L'obligation de justification du dépôt des demandes de prêt n'est qu'une obligation très accessoire du contrat de vente immobilière dans laquelle les obligations essentielles sont celles de délivrance et de stipulation d'un prix sérieux, la clause obligeant l'acquéreur à justifier de sa demande de prêt n'est qu'une clause annexe. En cas de manquement, le vendeur n'était pas privé de toute contrepartie, puisqu'il pouvait se prévaloir immédiatement de la caducité de la vente.

La Cour constatera que la société MAUVILAC REUNION n'a nullement mis en demeure la société LOGISTICS III de régulariser l'acte de vente dans les délais prévus, ce qu'elle aurait dû faire si elle estimait que le refus de prêt relevait d'une manœuvre dolosive, la condition suspensive devant être réputée levée. La mise en demeure préalable était obligatoire pour mettre en œuvre le mécanisme de la clause pénale.

A titre infiniment subsidiaire, si la clause pénale avait vocation à s'appliquer, la demande formée par la société MAUVILAC REUNION à hauteur de 325.000 euros devrait être très fortement réduite sur le fondement de l'article 1231-5 du Code Civil, le montant étant manifestement excessif pour une immobilisation inférieure à quatre mois.

Pour plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, il convient de se reporter aux écritures des parties ci-dessus visées et figurant au dossier de la procédure.

L'ordonnance de clôture était rendue le 19 février 2018.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

SUR CE :

Vu les articles 1315 et 1178 devenus 1354 et 1304-3 du code civil

En l'espèce le compromis liant les parties indique au paragraphe conditions suspensives que :

« les présentes sont expressément soumises aux conditions suspensives stipulées en conséquence la non réalisation d'une seule de ces conditions entraînera la caducité des présentes sans indemnités de part ni d'autre sauf dans les hypothèses ci-après où l'acquéreur déclare avoir connaissance des dispositions de l'article 1178 du code civil aux termes desquelles « la condition est réputée accomplie lorsque c'est le débiteur obligé sous cette condition qui en a empêché l'accomplissement. » »

Les obligations de l'acquéreur vis-à-vis du crédit sollicité étaient les suivantes :

« L'acquéreur s'oblige à déposer ses demandes de prêt auprès d'au moins deux établissements bancaires au plus tard dans le délai de 30 jours à compter du présent compromis et à justifier au vendeur de ce dépôt par tous moyens utiles Cette condition suspensive devra être réalisée au plus tard dans le délai de 3 mois à compter de la signature des présentes.

A défaut d'avoir apporté la justification du dépôt de la demande de prêt dans le délai imparti, le vendeur aura la faculté de demander à l'acquéreur par lettre recommandée avec accusé de réception de lui justifier du dépôt du dossier de prêt.

Dans le cas où l'acquéreur n'aurait pas apporté la justification requise dans un délai de 8 jours de l'accusé de réception, le vendeur pourra se prévaloir de la caducité des présentes sans indemnité de part ni d'autre. L'acquéreur devra informer sans retard le vendeur de tout événement provoquant la réalisation ou la défaillance de la condition suspensive. L'acquéreur devra justifier au vendeur de l'acceptation ou du refus de ce prêt par le ou les établissements bancaires par pli recommandé adressé au plus tard dans les cinq (5) jours suivant l'expiration du délai ci -dessus.

A défaut d'envoi dans le délai prévu de la lettre recommandée, le vendeur pourra mettre en demeure l'acquéreur, avec toutes les conséquences y attachées de lui produire une offre de prêt.

Dans le cas où l'acquéreur n'aurait pas apporté la justification requise dans un délai de 8 jours de l'accusé de réception, le vendeur pourra se prévaloir de la caducité des présentes sans indemnité de part ni d'autre. »

 

Sur le comportement des parties :

Il résulte de la convention liant les parties que la vente était consentie sous condition suspensive de l'obtention d'un prêt de 6.500.000,00 euros pour une durée de 10 ans au taux maximal hors assurance de 3,5 % l'an.

Il appartient au bénéficiaire d'une promesse de vente conclue sous condition suspensive de l'obtention d'un prêt de prouver qu'il a bien sollicité un prêt conforme aux caractéristiques définies dans la promesse, faute de quoi il doit être considéré qu'il a fait obstacle à l'accomplissement de la condition et s'expose ainsi aux sanctions contractuelles éventuellement prévues.

Pour rapporter la preuve des diligences accomplies la société LOGISTICS III produit une lettre de refus du prêt émanant de société Marseillaise de Crédit. Cependant ce courrier ne précise pas le taux d'intérêt du crédit sollicité ce qui ne permet pas de vérifier que la demande faite à cette banque correspondait aux conditions prévues. La société LOGISTICS III omet de produire la demande de prêt correspondante au refus opposé.

La société LOGISTICS produit également un courriel du 24 juin 2013 émanant d'un conseiller de la BNP PARIBAS qui ne reprend ni le montant du crédit envisagé ni la durée du remboursement ni le montant du taux d'intérêt, et qui ne fait état que l'intérêt de la banque pour l'opération de défiscalisation envisagée par la SAS LOGISTIC III. La demande de prêt correspondante à cet envoi n'est pas produite.

Par conséquent la société LOGISTICS III est défaillante à rapporter la preuve de l'accomplissement des diligences auxquelles elle s'était engagée. Il doit en être déduit qu'elle a fait obstacle à l'accomplissement de la condition suspensive et s'est ainsi exposés aux sanctions contractuellement prévues.

 

Les clauses limitatives de réparation

La clause (page 13) paragraphe « conditions suspensives » qui énonce que la réalisation d'une seule des conditions suspensives entraînera la caducité de la promesse, ne peut être valablement opposée si la non réalisation de la condition est imputable à l'un des contractants.

Les dispositions contractuelles relatives à la justification du dépôt de la demande de prêt ou à la justification du dépôt de la demande de prêt dans un certain délai (page 19) permettent au vendeur de se prévaloir de la caducité de la promesse.

Ces différentes clauses sont établies en faveur de la société MAUVILAC puisque celle-ci en l'absence de ces différents éléments peut déclarer le compromis caduc et remettre son bien en vente sans attendre le terme fixé par le compromis.

Ces clauses ne vident pas de toute substance l'obligation pour l'acquéreur de justifier d'une recherche de financement conforme aux caractéristiques définies dans la promesse.

Ces clauses ne font pas obstacles à la demande.

 

Le dépôt de garantie

Le contrat conclu entre les parties stipule au paragraphe « dépôt de garantie » : « L'acquéreur ne pourra recouvrer le dépôt de garantie versé (...) que s'il justifie de la non-réalisation hors sa responsabilité telle qu'elle est indiquée à l'article 1178 du Code civil, de l'une ou l'autre des conditions suspensives ci-dessus énoncées.

La responsabilité de la société LOGISTICS III dans la non réalisation de la clause suspensive d'obtention du prêt est retenue. Elle ne pouvait donc prétendre au remboursement du dépôt de garantie, lequel lui a été restitué. Elle doit par conséquent être condamnée au paiement d'une somme de 162.500,00 euros de ce chef.

 

La clause pénale

La clause pénale insérée à la promesse est rédigée en ces termes :

« Au cas où, alors que les conditions suspensives seraient réalisées ou que leur bénéficiaire y aurait renoncé dans les délais, termes et conditions stipulées aux présentes, l'une des parties, après avoir été mise en demeure, ne régulariserait pas l'acte de vente, et ne satisferait pas ainsi aux obligations alors exigibles, elle devra verser à l'autre partie la somme de 325.000 euros à titre de clause pénale conformément aux dispositions des articles 1152 et 1226 du Code civil, indépendamment de tous dommages-intérêts.

Il est ici expressément précisé et convenu entre les parties que cette clause pénale a également pour objet de sanctionner le comportement de l'une des parties dans la mesure où il n'a pas permis de remplir tous ses engagements au titre des présentes et/ou toutes les conditions d'exécution de la vente. La présente clause pénale ne peut priver, dans la même hypothèse, chacune des parties de la possibilité de poursuivre l'autre en exécution de la vente ».

La clause pénale indique expressément qu'elle a pour but de sanctionner le comportement de l'une des parties dans la mesure où il n'a pas permis de remplir tous ses engagements au titre des présentes et/ou toutes les conditions d'exécution de la vente.

Cette deuxième partie de la clause pénale n'impose nullement l'obligation d'une mise en demeure préalable. Sa fonction est de sanctionner un comportement déloyal ou le non-respect des différentes conditions de l'accord.

La responsabilité de la société LOGISTICS III dans la non réalisation de la clause suspensive d'obtention du prêt est retenue. Il y a donc lieu de faire application de cette clause pénale.

Son montant eu égard à la durée d'immobilisation du bien et à la possibilité qu'avait la Société MAUVILAC de se prévaloir de la caducité de la promesse, est manifestement excessif. Il sera limité à la somme de 100.000,00 euros

Il résulte de l'ensemble de ces motifs que la décision entreprise sera infirmée.

La société LOGISTIC III qui succombe sera tenue aux dépens de première instance et d 'appel.

Il ne parait pas inéquitable d'allouer à la société MAUVILAC la somme de 3.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

La Cour, statuant publiquement, contradictoirement en matière commerciale et en dernier ressort, par mise à disposition au Greffe conformément à l'article 451 alinéa 2 du Code de procédure civile,

INFIRME le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

Et statuant à nouveau,

CONDAMNE la SAS LOGISTIC III à payer la SAS MAUVILAC la somme de 165.000 euros en remboursement du dépôt de garantie,

CONDAMNE la SAS LOGISTIC III à payer la SAS MAUVILAC la somme de 100.000 euros en application de la clause pénale,

CONDAMNE la SAS LOGISTIC III aux dépens de première instance et d'appel,

CONDAMNE la SAS LOGISTIC III à payer la SAS MAUVILAC la somme de 3.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Le présent arrêt a été signé par Madame Fabienne KARROUZ, Conseillère, et par Madame Nathalie BEBEAU, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LA GREFFIÈRE                 LA PRÉSIDENTE