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CA VERSAILLES (16e ch.), 20 décembre 2018

Nature : Décision
Titre : CA VERSAILLES (16e ch.), 20 décembre 2018
Pays : France
Juridiction : Versailles (CA), 16e ch.
Demande : 17/01955
Date : 20/12/2018
Nature de la décision : Réformation
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 9/03/2017
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CERCLAB - DOCUMENT N° 7904

CA VERSAILLES (16e ch.), 20 décembre 2018 : RG n° 17/01955 

Publication : Jurica

 

Extraits : 1/ « Sur la clause de déchéance du terme : Il résulte de la lecture du contrat de prêt en date du 15 novembre 2013 et plus spécifiquement de la clause « exigibilité » que le prêteur peut exiger le remboursement anticipé sans que l'emprunteur soit défaillant dans le remboursement de son crédit notamment dans l'hypothèse « de manœuvres dolosives ou frauduleuses notamment en cas de fausse déclaration ou déclaration ou omission intentionnelle sur la situation personnelle, professionnelle, patrimoniale ayant servi de base à l'octroi du présent financement à l'emprunteur ». Dans ce cas, le préteur peut se prévaloir de l'exigibilité immédiate du prêt en capital, intérêts et accessoires sans qu'il soit besoin d'aucune formalité judiciaire et après mise en demeure restée infructueuse pendant 15 jours.

Il est rappelé que la commission des clauses abusives par recommandation 04.03 a précisé : « Que les clauses qui autorisent la banque à exiger immédiatement la totalité des sommes dues, dès lors, notamment, que l'emprunteur n'a pas observé une quelconque obligation, même mineure, résultant du contrat de prêt ou que l'une quelconque des déclarations faites par l'emprunteur ont été reconnues fausses ou inexactes sont de nature à créer un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties, dans la mesure où, elles tendent à laisser penser que l'établissement de crédit dispose d'un pouvoir discrétionnaire pour apprécier, d'une part l'existence d'une inobservation commise par l'emprunteur et, d'autre part une inexactitude dans les déclarations de l'emprunteur, et qu'au surplus, elles laissent croire que le consommateur ne peut recourir au juge pour contester le bien-fondé de cette déchéance, que ces clauses apparaissent significativement déséquilibrées ».

Contrairement à ce que soutient la banque, les bulletins de paye et tout document permettant d'établir l'assiette financière du client, sa solvabilité, le risque qu'il présente sont autant d'éléments essentiels à la conclusion du contrat de prêt. Par conséquent, la clause est reconnue comme abusive et par voie de conséquence non écrite. Le jugement est sur ce point confirmé. »

2/ « Sur la nullité du contrat pour manœuvres frauduleuses de l'emprunteur : Il est rappelé qu'aux termes de l'article 1116 du code civil dans sa version applicable à l'espèce, « le dol est une cause de nullité de la convention lorsque les manœuvres pratiquées par l'un des parties sont telles qu'il est évident que, sans ces manœuvres, l'autre partie n'aurait pas contracté. Il ne se présume pas et doit être prouvé ».

La CRCAM rapporte la preuve que les documents versés par M. X. pour obtenir le prêt sont des faux en ce que ce dernier a reconnu les faits lors de son audition par les services de police du 12 mars 2014 puis a été condamné à une peine d'amende d'un montant de 1.500 euros sur une prévention de faux et usage de faux (et tentative d'escroquerie s'agissant de la demande de prêt déposée auprès de la Société Générale). La circonstance que M. X. paie mensuellement et sans incident de paiement les échéances fixées au tableau d'amortissement de la CRCAM n'est pas de nature à occulter la tromperie à l'origine de l'octroi du crédit et ne peut effacer celle-ci sauf à fragiliser toute relation entre un établissement de prêt et ses clients.

Contrairement à ce que soutient l'intimé, le fait que la banque ait régulièrement prélevé après l'octroi du prêt, le montant des échéances, conformément au tableau de remboursement, ne vaut pas renonciation par celle-ci à son droit de se prévaloir des manquements commis par M. X., ce y compris si des échéances ont été prélevées après découverte des faux.

M. X. a communiqué à la banque, pour obtenir un prêt, des documents faux laissant croire au banquier que sa situation financière était plus florissante qu'elle ne l'était réellement ; il a trompé la banque sur sa solvabilité, sur les risques encourus par celle-ci en termes de défaillance et d'une façon générale a tronqué la relation de confiance et loyauté qui est la règle-étalon de toute relation contractuelle. C'est au vu des justificatifs fournis quant à la situation financière que la banque a donné son consentement au prêt. C'est donc en suite de manœuvres - production de documents inexacts - que la banque a donné son consentement au crédit. Le consentement a été vicié de sorte qu'il y a lieu de prononcer la nullité du contrat.

Le contrat n'a donc jamais existé entre les parties lesquelles doivent être remises en l'état qui était le leur avant qu'une demande de prêt soit déposée. M. X. est condamné à restituer à la banque le capital emprunté soit la somme de 185.642 euros assortie des intérêts au taux légal à compter de l'assignation en justice (et non aux intérêts conventionnels auxquels le préteur pourrait prétendre dans l'hypothèse d'une déchéance du terme du contrat qui ne dépende pas de son avis discrétionnaire) sous déduction des sommes qui ont été payées au titre du prêt.

Il s'ensuit que les demandes de l'intimé portant sur l'examen de l'ensemble des clauses du contrat sont sans objet. »

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE VERSAILLES

SEIZIÈME CHAMBRE

ARRÊT DU 20 DÉCEMBRE 2018