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CA PARIS (pôle 1 ch. 3), 28 novembre 2018

Nature : Décision
Titre : CA PARIS (pôle 1 ch. 3), 28 novembre 2018
Pays : France
Juridiction : Paris (CA), Pôle 1 ch. 3
Demande : 17/12991
Décision : 18/636
Date : 28/11/2018
Nature de la décision : Confirmation
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 28/06/2017
Numéro de la décision : 636
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CERCLAB - DOCUMENT N° 8021

CA PARIS (pôle 1 ch. 3), 28 novembre 2018 : RG n° 17/12991 ; arrêt n° 636

Publication : Jurica

 

Extrait : « Outre que la société Danco a attendu le 8 novembre 2016, soit plus de trois ans, pour solliciter le paiement de sa rémunération, elle ne justifie, alors même que la société Saint Fargeau, qui n'était pas tenue de la mettre en demeure préalablement, soutient n'avoir bénéficié d'aucun conseil ou service d'assistance de sa part, n'avoir accompli aucune des diligences énumérées dans la convention de nature à caractériser l'exécution de son obligation de conseil et d'assistance envers cette société.

A cet égard, les quelques courriels versés aux débats par la société Danco, par leur caractère succinct, leur contenu et leur objet imprécis, ne permettent pas de caractériser l'exécution de son obligation conseil et d'assistance, étant par ailleurs observé qu'il est justifié par la société Saint Fargeau que le projet de construction de l'hôtel n'a toujours pas abouti, comme en atteste un procès-verbal de visite de la commission communale de sécurité en date du 21 janvier 2018.

En conséquence, il y a lieu de considérer que l'exception d'inexécution invoquée par la société Saint Fargeau et fondée sur l'absence de toute prestation de conseil et d'assistance exécutée par la société Danco caractérise l'existence en l'espèce d'une contestation sérieuse et rend l'existence de l'obligation sérieusement contestable.

Sans qu'il ne soit nécessaire d'examiner les autres moyens, l'ordonnance du premier juge sera en conséquence confirmée en toutes ses dispositions. »

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE

PÔLE 1 CHAMBRE 3

ARRÊT DU 28 NOVEMBRE 2018

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 17/12991. Arrêt n° 636 (5 pages). N° Portalis 35L7-V-B7B-B3UH6. Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 13 juin 2017 - Tribunal de Grande Instance de PARIS : R.G. n° 17/52514.

 

APPELANTE :

SAS DANCO

N° SIRET : XXX, Représentée et assistée par Maître Mathieu C., avocat au barreau de PARIS, toque : C0145

 

INTIMÉE :

N° SIRET : YYY, Représentée et assistée par Maître Philippe S., avocat au barreau de PARIS, toque : R205

 

COMPOSITION DE LA COUR : L'affaire a été débattue le 29 Octobre 2018, en audience publique, devant la Cour composée de : Mme Martine ROY-ZENATI, Première Présidente de chambre, M. François ANCEL, Président, Mme Christina DIAS DA SILVA, Conseillère, Qui ont en délibéré.

Greffier, lors des débats : Mme Anaïs SCHOEPFER

ARRÊT : - CONTRADICTOIRE - par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile. - signé par Martine ROY-ZENATI, Première Présidente de chambre et par Anaïs SCHOEPFER, Greffière.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Le 4 février 2013, M. X., président de la société Danco qui exerce une activité de conseil et autres conseils de gestion, et la société Tyria, société de droit luxembourgeois qui a pour objet la prise de participation sous quelque forme que ce soit, dans des entreprises luxembourgeoises ou étrangères, ont conclu une convention de conseil et d'assistance par laquelle la société Tyria a confié à M. X. la mission de la conseiller et de l'assister dans l'opération de création et de mise en exploitation d'un hôtel quatre étoiles à [ville N.].

Au terme d'un avenant à cette convention conclu le 5 mars 2013, la société Tyria s'est substituée la société Saint Fargeau et M. X. la société Danco, la rémunération forfaitaire de cette dernière ayant été diminuée à 350.000 euros HT payable en deux versements l'un à la date de prise d'effet de cette convention (prévu 20 jours à compter du 5 mars 2013) et l'autre à l'expiration d'un délai de quatre mois à compter de la signature de cette convention.

Par lettre recommandée avec avis de réception du 8 novembre 2016, la société Danco a mis en demeure la société Saint Fargeau de lui payer la somme globale de 418.600 euros TTC en application de la convention conclue le 5 mars 2013.

C'est dans ces conditions, que la société Danco a fait assigner le 25 février 2017, la société Saint Fargeau devant le juge des référés du tribunal de grande instance de Paris afin de demander sa condamnation à lui payer par provision une somme de 418.600 euros outre une indemnité de 2.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et les entiers dépens.

Par ordonnance du 13 juin 2017, le juge des référés du tribunal de grande instance de Paris a dit n'y avoir lieu à référé et condamné la société Danco à payer à la société Saint Fargeau la somme de 1.500 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile outre les dépens.

Par déclaration du 28 juin 2017, la société Danco a interjeté un « appel total » de cette ordonnance.

Aux termes de ses dernières conclusions récapitulatives communiquées par voie électronique le 5 octobre 2018, la société Danco demande à la cour, au visa de l'article 809 du code de procédure civile, de bien vouloir :

- Infirmer la décision déférée en toutes ses dispositions,

- Déclarer la société Danco fondée dans sa demande,

Y faisant droit,

- Condamner la société Saint Fargeau au paiement par provision d'une somme de 418.600 euros à la société Danco,

- Débouter la société Saint Fargeau de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

- Condamner la société Saint Fargeau au paiement de la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.

La société Danco fait valoir en substance que :

- L'obligation de paiement de la société Saint Fargeau n'est pas sérieusement contestable dès lors que la rémunération forfaitaire prévue par la convention du 5 mars 2013 était payable irrévocablement d'avance et à titre définitif en deux versements, la première tranche le 25 mars 2013 et la seconde le 5 juillet 2013 sans que ce versement ne soit conditionné à l'exécution du contrat d'assistance, étant observé qu'un chèque de 350.000 euros avait même été émis mais a été restitué à la société Saint Fargeau parce qu'il avait été établi à l'ordre de M. X. et non de la société Danco ;

- Son action est recevable dans la mesure où en application de l'article L. 210-6 alinéa 2 du code de commerce les associés de la société Danco, immatriculée en juillet 2014, ont voté par assemblée générale ordinaire du 5 septembre 2014 la reprise de la convention d'assistance signée le 4 février 2013 ainsi que son avenant du 5 mars 2013 ;

- La société Saint Fargeau ne peut se prévaloir de la nullité de la convention du 4 février 2013 pour erreur sur les qualités essentielles de M. X. dès lors que M. X. n'est plus partie à cette convention et seule la société Tyria pourrait le cas échéant solliciter la nullité de celle-ci ;

- La société Saint Fargeau ne peut se prévaloir d'une exception d'inexécution d'une part, faute de justifier d'une quelconque mise en demeure envers elle d'exécuter son obligation de conseil et d'assistance et alors d'autre part que conformément à la volonté commune des parties, la rémunération était payable en vertu de la convention d'avance et à titre définitif sans être conditionné à l'exécution d'une quelconque prestation ;

- L'appréciation d'un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties ne relève pas des pouvoirs du juge des référés et ne résiste pas à la chronologie des faits dans la mesure où la rémunération a été prévue dans deux conventions, qu'elle a été diminuée par un avenant et qu'il a été prévu un paiement échelonné, ce qui exclut toute contrainte.

 

Aux termes de ses dernières conclusions communiquées par voie électronique le 8 octobre 2018, la société Saint Fargeau demande à la cour, au visa notamment des articles L. 210-6 et L. 442-6 du code de commerce et des articles 1110 et 1147 du code civil, de :

- Constater que les demandes de la société Danco se heurtent à des contestations plus sérieuses les unes que les autres ;

En conséquence,

- Déclarer la société Danco irrecevable et mal fondée en son appel

En conséquence,

- Confirmer l'ordonnance de référé du président du tribunal de grand instance de Paris du 13 juin 2017, en ce qu'elle a débouté la société Danco de l'ensemble de ses demandes et condamné à la somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Y ajoutant,

- Condamner la société Danco à payer à la société SAS Saint Fargeau la somme supplémentaire de 5.000 euros au titre des frais irrépétibles exposés en appel ;

- La condamner aux entiers dépens de première instance et d'appel qui seront recouvrés par Maître Philippe S. conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

La société Saint Fargeau fait valoir en substance que les demandes de la société Danco se heurtent à des contestations sérieuses dès lors que :

- La convention du 4 février 2013 et son avenant sont nuls dans la mesure où la société Danco n'avait pas de personnalité juridique au moment de la conclusion de l'avenant et que cette irrégularité ne pouvait être régularisée par la reprise des engagements après son immatriculation ;

- La convention du 4 février 2013 et son avenant sont nuls dans la mesure où il y a erreur sur les qualités essentielles de la personne de M. X. qui ne possède en réalité aucune expérience ni connaissance approfondie du secteur de l'hôtellerie ;

- Elle entend se prévaloir de l'exception d'inexécution aucune mission de conseil et d'assistance n'ayant été apportée, étant précisé que si la société Saint Fargeau n'a jamais mis en demeure la société Danco d'exécuter ses obligations, c'est bien parce que la société Danco ne lui a jamais réclamé le paiement de la somme de 350.000 euros, ce qui était une reconnaissance implicite de son incapacité à assurer sa mission ;

- La société Danco revendique en 2017 l’exécution d'une convention devenue caduque depuis le 1er janvier 2016 alors même qu'elle n'a pas exécuté sa mission ;

- Les modalités de paiement du prix prévues au contrat ne pouvaient que créer un déséquilibre significatif entre les parties en garantissant à la société Danco, qui n'exerce aucune activité, le paiement d'avance, irrévocable et définitif de la somme de 418.600 euros TTC.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

SUR CE, LA COUR :

Il convient de rappeler qu'en application de l'article 808 du code de procédure civile dans tous les cas d'urgence, le président du tribunal de grande instance peut ordonner en référé toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l'existence d'un différend et qu'en vertu de l'article 809 de ce même code, le président peut, dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, accorder une provision au créancier, ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire.

En l'espèce, par une convention de conseil et d'assistance conclue le 4 février 2013, M. X., s'est vu confier par la société Tyria, société de droit luxembourgeois, la mission de la conseiller et de l'assister dans l'opération de création et de mise en exploitation d'un hôtel quatre étoiles à Neuilly sur Seine moyennant une rémunération forfaitaire d'un montant de 400.000 euros, « payable irrévocablement d'avance à titre définitif à la date de prise d'effet de ladite convention ».

Par un avenant à cette convention conclu le 5 mars 2013, la société Tyria a décidé de se substituer la société Saint Fargeau et M. X. de se substituer la société Danco, la rémunération forfaitaire de la société Danco pour sa mission d'assistance et de conseil ayant été diminuée à 350.000 euros HT « payable irrévocablement d'avance à titre définitif » en deux versements l'un à la date de prise d'effet de cette convention (prévu 20 jours à compter du 5 mars 2013) et l'autre à l'expiration d'un délai de quatre mois à compter de la signature de cette convention.

Il n'est pas contesté par les parties que la rémunération convenue n'a pas été payée par la société Saint Fargeau à la société Danco malgré une mise en demeure du 8 novembre 2016.

 

Sur l'existence d'une contestation sérieuse tirée de l'exception d'inexécution fondée sur le manquement de la société Danco à son obligation de conseil et d'assistance :

Il ressort des termes de la convention de conseil et d'assistance du 4 février 2013 que si la rémunération de M. X., était fixée forfaitairement et « payable irrévocablement d'avance et à titre définitif » à la date de prise d'effet de la convention, cette rémunération n'a pas été stipulée sans cause mais en contrepartie d'une mission de conseil et d'assistance incombant à M. X., auquel s'est substituée la société Danco.

Au demeurant, la convention a pris soin de décrire avec précision cette mission puisqu'il en ressort que celle-ci portait sur le « développement du Business Plan hôtelier de la société, l'analyse et la vérification des objectifs et moyens mis en œuvre, la réalisation des travaux de rénovation et d'extension de l'immeuble, l'obtention de toutes les autorisations nécessaires et préalables... » et en outre au terme de son article 5 que M. X. « rendra compte périodiquement de sa mission à Tyria ».

Outre que la société Danco a attendu le 8 novembre 2016, soit plus de trois ans, pour solliciter le paiement de sa rémunération, elle ne justifie, alors même que la société Saint Fargeau, qui n'était pas tenue de la mettre en demeure préalablement, soutient n'avoir bénéficié d'aucun conseil ou service d'assistance de sa part, n'avoir accompli aucune des diligences énumérées dans la convention de nature à caractériser l'exécution de son obligation de conseil et d'assistance envers cette société.

A cet égard, les quelques courriels versés aux débats par la société Danco, par leur caractère succinct, leur contenu et leur objet imprécis, ne permettent pas de caractériser l'exécution de son obligation conseil et d'assistance, étant par ailleurs observé qu'il est justifié par la société Saint Fargeau que le projet de construction de l'hôtel n'a toujours pas abouti, comme en atteste un procès-verbal de visite de la commission communale de sécurité en date du 21 janvier 2018.

En conséquence, il y a lieu de considérer que l'exception d'inexécution invoquée par la société Saint Fargeau et fondée sur l'absence de toute prestation de conseil et d'assistance exécutée par la société Danco caractérise l'existence en l'espèce d'une contestation sérieuse et rend l'existence de l'obligation sérieusement contestable.

Sans qu'il ne soit nécessaire d'examiner les autres moyens, l'ordonnance du premier juge sera en conséquence confirmée en toutes ses dispositions.

 

Sur les frais et dépens :

Il y a lieu de condamner la société Danco, partie perdante, aux dépens qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

En outre, elle doit être condamnée à verser à la société Saint Fargeau, qui a dû exposer des frais irrépétibles pour faire valoir ses droits, une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile qu'il est équitable de fixer à la somme de 5.000 euros.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

Confirme l'ordonnance de référé du président du tribunal de grand instance de Paris du 13 juin 2017 en toutes ses dispositions ;

Y ajoutant,

Condamne la société Danco à payer à la société Saint Fargeau la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la société Danco aux dépens d'appel qui seront recouvrés par Maître Philippe S. conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

LA GREFFIERE                             LA PRESIDENTE