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CA PARIS (pôle 4 ch. 3), 24 janvier 2019

Nature : Décision
Titre : CA PARIS (pôle 4 ch. 3), 24 janvier 2019
Pays : France
Juridiction : Paris (CA), Pôle 4 ch. 3
Demande : 16/07271
Date : 24/01/2019
Nature de la décision : Infirmation
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 24/03/2016
Référence bibliographique : Juris-Data n° 2019-000607
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CERCLAB - DOCUMENT N° 8096

CA PARIS (pôle 4 ch. 3), 24 janvier 2019 : RG n° 16/07271 

Publication : Jurica ; Juris-Data n° 2019-000607

 

Extraits : 1/ « Sur ce, aux termes de l'article 31 du Code de procédure civile « L'action est ouverte à ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d'une prétention, sous réserve des cas dans lesquels la loi attribue le droit d'agir aux seules personnes qu'elle qualifie pour élever ou combattre une prétention ou pour défendre un intérêt légitime ». En application de ce texte une partie ne peut agir en justice que si elle a la fois intérêt et qualité à agir ; l'intérêt à agir doit être personnel et se définit comme le profit, l'utilité ou l'avantage que l'action est susceptible de procurer au plaideur ; il est apprécié au jour de l'introduction de la demande (Civ. 3e 12 janvier 2002, n° 03-18256 ; Civ. 2e, 9 novembre 2006, n° 05-13484). Au jour de la déclaration au greffe, il n'est pas justifié par l'intimé qu'il ait notifié à Monsieur X. son retrait de sa décision d'appliquer à l'immeuble du [...] 1er ledit accord collectif des 19 mai 2015 en suite de son courrier d'information du 8 juin 2015 l'avisant de l'intervention prochaine de la société Proxiserve dans l'immeuble pour un bilan payant. Monsieur X. avait donc qualité et intérêt à agir pour l'annulation d'un accord qui entraîne des charges locatives supplémentaires et les exceptions d'irrecevabilité de son action sont rejetées en ce qu'elles concernent l'immeuble du [...] 1er. »

2/ « Sur ce, dans la première partie de ses écritures Monsieur X. a précisément argué qu'il était recevable à attaquer l'accord puisque celui-ci lui était opposable comme n'ayant pas été rejeté par 50 % des locataires de l'immeuble de sa propre résidence ; Il s'en déduit qu'il admet qu'une consultation a été menée par Elogie auprès de tous les locataires de son immeuble et dont les résultats ont été communiqués comme étant en faveur de l'application de l'accord. Il ne verse d'ailleurs aucune attestation contraire des autres locataires de l'immeuble. Sa demande de nullité, non fondée, est en conséquence rejetée.

Monsieur X. demande aux motifs de ses écritures l'annulation du contrat passé entre Elogie et Proxiserve en application de l'accord contesté. Cette demande n'étant pas reprise au dispositif des conclusions, la Cour n'en est pas saisie. »

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE PARIS

PÔLE 4 CHAMBRE 3

ARRÊT DU 24 JANVIER 2019

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 16/07271 (5 pages). - N° Portalis 35L7-V-B7A-BYOEJ. Décision déférée à la Cour : Jugement du 15 février 2016 - Tribunal d'Instance de Paris 1er – R.G. n° 11-15-000189.

 

APPELANT :

Monsieur X.

Né le [date] à [ville], représenté et ayant pour avocat plaidant Maître Dimitri D., avocat au barreau de PARIS

 

INTIMÉE :

SA ELOGIE

SIRET : XXX, Prise en la personne de ses représentants légaux, Siège social : sis [adresse], Représentée par Maître Emmanuelle-Karine L. de la SELEURL E.K L., avocat au barreau de PARIS, toque : C2529

 

COMPOSITION DE LA COUR : En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 7 décembre 2018, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Pascale WOIRHAYE, Conseillère, chargée du rapport. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de : M. Daniel FARINA, Président, M. Philippe JAVELAS, Conseiller, Mme Pascale WOIRHAYE, Conseillère.

Greffier, lors des débats : Mme Viviane REA

ARRÊT : CONTRADICTOIRE - par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile. - signé par Daniel FARINA, Président, et par Viviane REA, Greffière présente lors de la mise à disposition.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :

La société Elogie a conclu avec deux associations nationales, la Confédération Nationale du Logement, le 19 mai 2015 et l'association Consommation, Logement et Cadre de Vie le 15 juillet 2015 un accord collectif portant sur la mise en place d'un marché d'entretien des robinetteries et sanitaires sur l'ensemble de son patrimoine.

Par déclaration au greffe en date du 9 juillet 2015, Monsieur X. a demandé l'annulation de cet accord collectif pour défaut de signification datée de l'accord et défaut d'information sur le contrat d'entreprise, clause abusive du paiement de la cotisation, inéquité de la répartition de l'entretien des communs, absence d'amélioration démontrée des charges, contrat d'assurance dénué d'obligation corollaire, et, en conséquence, sa non-application à tout le patrimoine de la société Elogie outre sa condamnation à lui payer la somme de 100 euros en réparation de son préjudice moral et celle de 100 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi que les dépens.

La société Elogie a fait valoir l'irrecevabilité des demandes ainsi que sa renonciation à appliquer l'accord sur l'immeuble du [...] 1er ; à titre reconventionnel, elle a sollicité la condamnation de Monsieur X. à lui payer une indemnité pour action abusive et sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.

Par jugement contradictoire en date du 15 février 2016, le Tribunal d'instance de Paris 1er a déclaré irrecevables les demandes de Monsieur X., faute d'intérêt à agir, débouté la société Elogie des siennes et condamné Monsieur X. à la somme de 1.000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.

La Cour est saisie de l'appel interjeté par Monsieur X. à l'encontre de ce jugement par déclaration en date du 24 mars 2016.

 

Dans le dispositif de ses conclusions d'appel notifiées par la voie électronique le 26 avril 2016, Monsieur X. sollicite de la Cour, au visa des articles 42 et 46 de la loi du 23 décembre 1986 modifiée par la loi du 25 mars 2009, et 1136 du Code civil, qu'elle :

- Le déclare recevable et fondé en son appel à l'encontre du jugement rendu par le tribunal d'instance de Paris 1er le 15 février 2016,

Y faisant droit,

- Infirme la décision entreprise et, statuant à nouveau,

- Le décharge des condamnations prononcées contre lui en principal, intérêts, frais et accessoires,

- Dise et juge l'accord collectif passé par la société Elogie avec la Confédération nationale du logement et l'association Consommation Logement et Cadre de Vie le 19 mai 2015 et le 15 juillet 2015 respectivement nul et nul d'effet,

- Condamne « les intimés » à lui payer la somme de 3.000 euros par application de l'article 700 du Code de procédure civile,

- Condamne « les intimés » aux entiers dépens,

- Dise que ceux d'appel pourront être recouvrés directement par Maitre P.-I., conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile,

- « Prononce l'exécution provisoire de l'arrêt à intervenir ».

 

Dans le dispositif de ses conclusions d'intimée notifiées par la voie électronique le 1er juillet 2016, la société Elogie sollicite de la Cour qu'elle :

- Confirme le jugement du 15 février 2016 rendu par le Tribunal d'instance de Paris 1er en ce qu'il a déclaré irrecevables les demandes de Monsieur X., faute d'intérêt à agir et l'a condamné à lui payer la somme de 1.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- Infirme le jugement en ce qu'il l'a déboutée de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive,

Y ajoutant reconventionnellement,

- Condamne Monsieur X. à lui régler la somme de 2.000euros au titre de dommages-intérêts pour procédure abusive,

- Condamne Monsieur X. à lui régler la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

- Condamne Monsieur X. aux entiers dépens.

 

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 15 novembre 2018.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIFS DE L'ARRÊT :

Sur la qualité et l'intérêt à agir de Monsieur X. :

Au soutien de son appel, Monsieur X. expose que l'accord collectif litigieux conclu conformément aux dispositions de l'article 42 de la loi du 23 décembre 1986 modifiée par la loi du 25 mars 2009 et signé par deux associations nationales revêt un caractère obligatoire pour l'ensemble du patrimoine de la société Elogie, et que, n'ayant pas été rejeté par 50 % des locataires de l'immeuble de sa propre résidence, il devait lui être applicable, conformément à l'avis d'information en date du 8 juin 2015.

Il plaide que la société Elogie a exclu unilatéralement l'immeuble où il réside du champ d'application de l'accord en violation du principe d'intangibilité des conventions au sens de l'article 1134 du Code civil ainsi qu'en méconnaissance des règles posées par la loi du 23 décembre 1986, dans le seul but frauduleux de l'évincer de sa qualité et de son intérêt à agir de sorte qu'il convient de le rétablir dans ce droit.

La société Elogie rappelle que Monsieur X. est locataire de l'immeuble sis [...] 1er et qu'au stade de la tentative de conciliation, elle a proposé de ne pas appliquer l'accord collectif litigieux à cet immeuble, en raison de son caractère procédurier, pour éviter un nouveau contentieux ; elle souligne que Monsieur X. n'a pas pouvoir de se faire le porte-parole de tous les locataires, ni de s'immiscer dans la vie d'un autre immeuble et a fortiori de l'ensemble du patrimoine de la société Elogie.

Sur ce, aux termes de l'article 31 du Code de procédure civile « L'action est ouverte à ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d'une prétention, sous réserve des cas dans lesquels la loi attribue le droit d'agir aux seules personnes qu'elle qualifie pour élever ou combattre une prétention ou pour défendre un intérêt légitime ».

En application de ce texte une partie ne peut agir en justice que si elle a la fois intérêt et qualité à agir ; l'intérêt à agir doit être personnel et se définit comme le profit, l'utilité ou l'avantage que l'action est susceptible de procurer au plaideur ; il est apprécié au jour de l'introduction de la demande (Civ. 3e 12 janvier 2002, n° 03-18256 ; Civ. 2e, 9 novembre 2006, n° 05-13484).

Au jour de la déclaration au greffe, il n'est pas justifié par l'intimé qu'il ait notifié à Monsieur X. son retrait de sa décision d'appliquer à l'immeuble du [...] 1er ledit accord collectif des 19 mai 2015 en suite de son courrier d'information du 8 juin 2015 l'avisant de l'intervention prochaine de la société Proxiserve dans l'immeuble pour un bilan payant.

Monsieur X. avait donc qualité et intérêt à agir pour l'annulation d'un accord qui entraîne des charges locatives supplémentaires et les exceptions d'irrecevabilité de son action sont rejetées en ce qu'elles concernent l'immeuble du [...] 1er.

 

Sur la demande d'annulation de l'accord collectif des 15 mai et 15 juillet 2015 :

Monsieur X. soutient qu'aucune concertation n'a été menée par la société Elogie avec les locataires, en violation des dispositions de l'article 44 quater de la loi d'ordre public du 23 décembre 1986, ce qui nécessite l'annulation de l'accord collectif des 19 mai 2015 et 15 juillet 2015, ainsi que cela a déjà été jugé par le tribunal d'instance de Paris 1er selon décision en date du 26 juin 2014 pour un autre accord relatif à l'installation de compteurs d'eau individuels.

La société Elogie soutient que les allégations de Monsieur X. ne sont pas fondées alors que la preuve lui incombe de les prouver ; elle souligne qu'au contraire de ce qu'il soutient chaque locataire a été informé et que dans sa résidence deux refus sur les dix logements ont été recueillis, de sorte que l'accord aurait été applicable si elle n'y avait pas renoncé, ce qu'elle était en droit de faire.

[*]

Sur ce, dans la première partie de ses écritures Monsieur X. a précisément argué qu'il était recevable à attaquer l'accord puisque celui-ci lui était opposable comme n'ayant pas été rejeté par 50 % des locataires de l'immeuble de sa propre résidence ;

Il s'en déduit qu'il admet qu'une consultation a été menée par Elogie auprès de tous les locataires de son immeuble et dont les résultats ont été communiqués comme étant en faveur de l'application de l'accord. Il ne verse d'ailleurs aucune attestation contraire des autres locataires de l'immeuble.

Sa demande de nullité, non fondée, est en conséquence rejetée.

Monsieur X. demande aux motifs de ses écritures l'annulation du contrat passé entre Elogie et Proxiserve en application de l'accord contesté.

Cette demande n'étant pas reprise au dispositif des conclusions, la Cour n'en est pas saisie.

 

Sur la demande reconventionnelle de dommages et intérêts pour action abusive :

Sur appel incident, la société Elogie plaide qu'il faut faire comprendre à l'appelant que la justice est une affaire sérieuse qui n'a pas à être sans cesse sollicitée.

Or l'intimée ne démontre pas en quoi l'action est abusive, dès lors que Monsieur X. a obtenu d'elle au cours de la présente procédure le retrait de l'accord collectif qu'il contestait.

Le jugement est confirmé en ce qu'il a débouté la société Elogie de ce chef.

 

Sur le surplus des demandes :

Monsieur X. succombant en son appel, il sera condamné aux dépens d'appel et, en considération de l'équité, à verser à la société Elogie une somme de 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile en sus de celle allouée en première instance, le jugement étant confirmé de ce dernier chef et sur les dépens.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

La Cour statuant publiquement,

INFIRME le jugement du tribunal d'instance de Paris 1er en date du 15 février 2016 en ce qu'il a jugé Monsieur X. irrecevable en son action ;

Statuant de nouveau de ce chef,

REJETTE les exceptions d'irrecevabilité de l'action soulevées par la société Elogie ;

DÉBOUTE Monsieur X. de sa demande d'annulation de l'accord collectif en date des 15 mai et 15 juillet 2015 relatif à la mise en place d'un marché d'entretien des robinetteries et sanitaires ;

CONFIRME le jugement sur le surplus ;

Y ajoutant,

CONDAMNE Monsieur X. à verser à la société Elogie la somme de 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ;

REJETTE le surplus ;

CONDAMNE Monsieur X. aux dépens d'appel.

LA GREFFIÈRE                 LE PRÉSIDENT