CA LYON (1re ch. civ. B), 3 septembre 2019
CERCLAB - DOCUMENT N° 8191
CA LYON (1re ch. civ. B), 3 septembre 2019 : RG n° 18/01134
Publication : Jurica
Extrait : « Attendu que l'action en nullité de la stipulation d'intérêts conventionnels est soumise à la prescription quinquennale de l'article 1304 du code civil dans sa rédaction applicable en l'espèce, que le même délai de prescription est prévu pour l'action en déchéance des intérêts par l'article L. 110-4 du code de commerce,
Attendu que la prescription quinquennale de l'action en nullité de la stipulation de l'intérêt conventionnel en raison d'une erreur affectant le TEG, de même que l'exception de nullité d'une telle stipulation contenue dans un acte de prêt ayant reçu un commencement d'exécution, ainsi que l'action en déchéance du droit aux intérêts court à compter du jour où l'emprunteur a connu ou aurait dû connaître cette erreur, c'est à dire de la convention de prêt lorsque l'examen de sa teneur permettait de constater l'erreur,
Attendu qu'à l'appui de sa demande d'annulation de la stipulation contractuelle d'intérêts, et subsidiairement de déchéance des intérêts, elle fait valoir : - que la clause d'intérêts calculée sur une année de 360 jours est une clause abusive, - l'absence de lisibilité de la stipulation de convention de calcul, l'emprunteur profane n'étant pas en mesure de comprendre pourquoi le taux d'intérêts sera calculé sur une période de 360 jours alors que le TEG est indiqué « sur la base du montant exact des intérêts rapportés à 365 jours par an », - une disproportion entre le taux annuel et le taux de période, (TEG mensuel 0,48, TEG annuel 5,79 alors que 0,48X12=5,76)
Attendu que l'offre de prêt mentionne clairement page 5 que les intérêts sont calculés sur la base d'une année de 360 jours, de même pour la disproportion entre le taux annuel et le taux de période évoquée ci-dessus qui apparaît en faisant une simple multiplication, que dès lors la simple lecture de l'offre, qui ne nécessite pas de compétence particulière, permettait à l'appelante de constater les erreurs alléguées, Qu'en conséquence, l'emprunteur connaissait ou aurait dû connaître l'erreur qu'il invoque dès l'offre de prêt acceptée le 30 janvier 2009 de sorte que la demande introduite par assignation en date du 12 janvier 2016 est prescrite, la prescription étant acquise depuis le 30 janvier 2014,
Qu'au vu de ces éléments, il convient de confirmer le jugement déféré qui a déclaré irrecevables comme prescrites les demandes en nullité et déchéance de Mme X. ».
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE LYON
PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE B
ARRÊT DU 3 SEPTEMBRE 2019
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 18/01134. N° Portalis DBVX-V-B7C-LQ4V. Décision du Tribunal de Grande Instance de LYON (4e ch.), Au fond du 16 janvier 2018 : RG n° 16/01216
APPELANTE :
Mme X. divorcée Y.
née le [date] à [ville], [...], [...],Représentée par Maître Marie S., avocat au barreau de LYON, Assistée de Maître Nejma L., avocat au barreau de PARIS
INTIMÉE :
La SA CRÉDIT LYONNAIS
représentée par son directeur général en exercice, [...], [...], Représentée par Maître Pierre B., avocat au barreau de LYON
Date de clôture de l'instruction : 21 mars 2019
Date des plaidoiries tenues en audience publique : 6 juin 2019
Date de mise à disposition : 3 septembre 2019
Audience présidée par Florence PAPIN, magistrat rapporteur, sans opposition des parties dûment avisées, qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, assisté pendant les débats de Myriam MEUNIER, greffier.
Composition de la Cour lors du délibéré : - Françoise CARRIER, président, - Michel FICAGNA, conseiller, - Florence PAPIN, conseiller
Arrêt Contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties présentes ou représentées en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile, Signé par Françoise CARRIER, président, et par Myriam MEUNIER, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
EXPOSÉ DE L'AFFAIRE :
Par assignation du 12 janvier 2016 devant le tribunal de grande instance de Lyon puis conclusions, Mme X., prétendant que le taux effectif global (TEG) indiqué par le CRÉDIT LYONNAIS dans l'offre de prêt immobilier de 320.000 euros qu'il lui avait faite, ainsi qu'à son ex-mari, le 16 janvier 2009, serait inexact et le calcul des intérêts irrégulier, demandait à la fois la déchéance des intérêts et l'annulation de la stipulation d'intérêts.
Par jugement du 16 janvier 2018, le tribunal a jugé irrecevables comme atteintes par la prescription les demandes d'annulation de la stipulation d'intérêts et de déchéance des intérêts de Mme X
Mme X. a relevé appel.
Elle demande à la cour, aux termes de ses conclusions récapitulatives, de :
Vu les dispositions de l'article 1907, 1116, 1134, 2224 et 2233 du Code Civil ;
Vu les dispositions de l'article L. 312-1 et suivants du Code de la Consommation ; spécialement celles de l'article L. 312-8 de ce Code ;
Vu les dispositions des articles L. 313-1, L. 313-2, R. 313-1 - et son Annexe -, et 1907 du Code Civil concernant la définition du TEG et son mode de calcul ;
Vu les dispositions des articles L. 312-8 et L. 312-33 du code de la consommation.
- Déclarer recevable et fondé l'appel interjeté par Mme X.,
- Infirmer le jugement du 16 janvier 2018 en ce qu'il a :
* Déclaré irrecevables les demandes de Mme X. comme étant prescrites ;
* Condamné Mme X. à payer au CRÉDIT LYONNAIS la somme de 1.000,00 euros au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;
ET, STATUANT A NOUVEAU :
- Dire et juger que l'offre de crédit immobilier du 19 janvier 2009 méconnaît formellement les exigences issues des dispositions des articles 1907 du Code civil et celles des articles L. 111-1 et L. 312-1 et suivants du Code de la consommation ;
- Dire et juger que l'offre de crédit immobilier du 19 janvier 2009 méconnaît formellement les exigences issues des dispositions de l'article L. 312-14-1 du Code de la consommation ;
- Dire et juger que le TEG mentionné à l'offre de crédit immobilier émise par la SA CRÉDIT LYONNAIS, et porté à la connaissance de l'emprunteur, est erroné ;
- Dire et juger que la clause d'intérêts calculée sur une année de 360 jours est une clause abusive,
- Dire et juger en conséquence la clause d'intérêts conventionnels sur 360 jours non écrite,
En conséquence :
- Prononcer l'annulation de la stipulation contractuelle d'intérêts, sans substitution à l'intérêt légal à titre de sanction effective du CRÉDIT LYONNAIS, et subsidiairement la substitution de l'intérêt légal à l'intérêt conventionnel ;
- Dire et juger non écrite la clause d'intérêts conventionnels ;
- Ordonner la réouverture des débats avec injonction au prêteur de deniers de produire, un tableau d'amortissement du crédit accordé rémunéré au taux de l'intérêt légal en vigueur à la date de l'acceptation de l'offre de crédit, et dire que les paiements effectués s'imputeront sur le capital emprunté selon ledit tableau ;
- Ordonner les restitutions qui s'imposent ;
- Ordonner subsidiairement la déchéance des intérêts de l'émetteur de l'offre de son droit aux intérêts contractuels en application des dispositions des articles L. 312-8 et L. 312-33 du code de la consommation, dans leur version applicable au présent litige ;
En tout état de cause :
- Condamner la SA CRÉDIT LYONNAIS à payer à Mme X. la somme de 3.000 euros au titre des frais irrépétibles visés aux dispositions de l'article 700 Code de procédure civile ;
- Condamner la SA CRÉDIT LYONNAIS aux entiers dépens de l'instance.
[*]
Le CRÉDIT LYONNAIS demande à la cour, aux termes de ses conclusions récapitulatives, de :
- Confirmer le jugement attaqué en ce qu'il a écarté les demandes de Mme X., soit par adoption de motifs en jugeant ces demandes irrecevables, soit par substitution de motifs en les jugeant mal fondées ;
- Confirmer aussi le jugement attaqué quant à l'application de l'article 700 du Code de procédure civile et à la condamnation aux dépens ;
Y ajoutant, condamner Mme X. à payer au CRÉDIT LYONNAIS 3.000 euros supplémentaires au titre de l'article 700 du Code de procédure civile et les dépens d'appel avec application de l'article 699 du même code au bénéfice de Maître B., avocat ;
Subsidiairement, fixer à une somme symbolique la restitution d'intérêts à la charge du CREDIT LYONNAIS ;
Plus subsidiairement, dire que le taux d'intérêt légal substitué au taux conventionnel subira les variations périodiques auxquelles la loi le soumet.
[*]
En application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile il est expressément renvoyé pour les faits, prétentions et arguments des parties aux conclusions récapitulatives déposées.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
MOTIFS DE LA DÉCISION :
Sur l'étendue de la saisine :
Attendu qu'en application de l'article 954 du code de procédure civile, la cour ne doit statuer que sur les prétentions énoncées au dispositif ;
Attendu que ne constituent pas des prétentions au sens de l'article 4 du code de procédure civile les demandes des parties tendant à voir « constater » ou « donner acte » ;
Sur la prescription :
Attendu que l'action en nullité de la stipulation d'intérêts conventionnels est soumise à la prescription quinquennale de l'article 1304 du code civil dans sa rédaction applicable en l'espèce, que le même délai de prescription est prévu pour l'action en déchéance des intérêts par l'article L. 110-4 du code de commerce,
Attendu que la prescription quinquennale de l'action en nullité de la stipulation de l'intérêt conventionnel en raison d'une erreur affectant le TEG, de même que l'exception de nullité d'une telle stipulation contenue dans un acte de prêt ayant reçu un commencement d'exécution, ainsi que l'action en déchéance du droit aux intérêts court à compter du jour où l'emprunteur a connu ou aurait dû connaître cette erreur, c'est à dire de la convention de prêt lorsque l'examen de sa teneur permettait de constater l'erreur,
Attendu qu'à l'appui de sa demande d'annulation de la stipulation contractuelle d'intérêts, et subsidiairement de déchéance des intérêts, elle fait valoir :
- que la clause d'intérêts calculée sur une année de 360 jours est une clause abusive,
- l'absence de lisibilité de la stipulation de convention de calcul, l'emprunteur profane n'étant pas en mesure de comprendre pourquoi le taux d'intérêts sera calculé sur une période de 360 jours alors que le TEG est indiqué « sur la base du montant exact des intérêts rapportés à 365 jours par an »,
- une disproportion entre le taux annuel et le taux de période, (TEG mensuel 0,48, TEG annuel 5,79 alors que 0,48X12=5,76)
Attendu que l'offre de prêt mentionne clairement page 5 que les intérêts sont calculés sur la base d'une année de 360 jours, de même pour la disproportion entre le taux annuel et le taux de période évoquée ci-dessus qui apparaît en faisant une simple multiplication,
que dès lors la simple lecture de l'offre, qui ne nécessite pas de compétence particulière, permettait à l'appelante de constater les erreurs alléguées,
Qu'en conséquence, l'emprunteur connaissait ou aurait dû connaître l'erreur qu'il invoque dès l'offre de prêt acceptée le 30 janvier 2009 de sorte que la demande introduite par assignation en date du 12 janvier 2016 est prescrite, la prescription étant acquise depuis le 30 janvier 2014,
Qu'au vu de ces éléments, il convient de confirmer le jugement déféré qui a déclaré irrecevables comme prescrites les demandes en nullité et déchéance de Mme X.,
Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile :
Attendu que Mme X. est condamnée aux dépens et à payer au CRÉDIT LYONNAIS la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
Confirme en toutes ses dispositions la décision entreprise,
Y ajoutant,
Condamne Mme X. à verser au CRÉDIT LYONNAIS une indemnité de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne Mme X. aux dépens de l'appel qui seront recouvrés par le conseil de la partie adverse conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile,
Déboute les parties de toutes demandes plus amples ou contraires.
LE GREFFIER LA PRÉSIDENTE