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CA TOULOUSE (1re ch. 1re sect.), 25 novembre 2019

Nature : Décision
Titre : CA TOULOUSE (1re ch. 1re sect.), 25 novembre 2019
Pays : France
Juridiction : Toulouse (CA), 1re ch. sect. 1
Demande : 17/02773
Décision : 19/515
Date : 25/11/2019
Nature de la décision : Réformation
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 15/05/2017
Numéro de la décision : 515
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CERCLAB - DOCUMENT N° 8224

CA TOULOUSE (1re ch. 1re sect.), 25 novembre 2019 : RG n° 17/02773 ; arrêt n° 515

Publication : Jurica

 

Extrait : « Cet article 12 définit précisément, de manière claire et compréhensible l'objet principal et les conditions de la garantie « arrêt de travail » à laquelle M. X. a fait le choix d'adhérer, lesquels ne sont définis par ailleurs ni par les conditions particulières ni par l'article 1 de la notice d'information précisant uniquement les intitulés des deux options d'adhésion ouvertes. La garantie arrêt de travail est ainsi sans ambiguïté ouverte à l'assuré qui par suite de maladie ou d'accident est dans l'incapacité totale et continue d'exercer toute activité professionnelle, l'assureur étant tenu de prendre en charge les échéances du prêt garanti à l'expiration de la franchise de quatre-vingt dix jours et tant que l'arrêt de travail est médicalement justifié et reconnu par l'assureur et pouvant soumettre l'assuré à un contrôle médical dans le but d'apprécier son incapacité à exercer une quelconque activité professionnelle auprès d'un médecin désigné par lui.

Dès lors, par application de l'alinéa 7 de l'article L 132-1 susvisé, le caractère abusif de cette clause ne peut être apprécié au sens du premier alinéa dudit article, soit pour déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat, contrairement à ce qu'a retenu le premier juge. Par ailleurs, au regard des dispositions de l'article L. 133-2 susvisé, cette clause n'est pas sujette à interprétation. Elle ne vide au surplus nullement la garantie de sa substance, la garantie étant acquise tant que l'assuré n'est pas en état de reprendre l'exercice d'une activité professionnelle quelconque et se trouve en état d'arrêt de travail médicalement justifié, et après consolidation, et au plus tard dans un délai de trois ans à compter de la date d'incapacité de travail, dès lors que le taux fonctionnel d'invalidité fixé par référence au barème du Concours médical est égal ou supérieur à 70 %. »

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE TOULOUSE

PREMIÈRE CHAMBRE SECTION 1

ARRÊT DU 25 NOVEMBRE 2019

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 17/02773. Arrêt n° 515. N° Portalis DBVI-V-B7B-LUQZ. Décision déférée du 19 avril 2017 - Tribunal de Grande Instance de FOIX (R.G. n° 17/00022).

 

APPELANTE :

SA ALLIANZ VIE

[...], Représentée par Maître Ingrid C.-F., avocat postulant au barreau de TOULOUSE et par Maître Maxime C. de la SELARL DAMC, avocat plaidant au barreau de ROUEN

 

INTIMÉ :

Monsieur X.

[...], Représenté par Maître Marie-Cécile N.-M., avocat au barreau de TOULOUSE

 

COMPOSITION DE LA COUR : En application des dispositions des articles 786 et 907 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 18 juin 2019, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant C. ROUGER, conseiller, chargé du rapport. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de : C. BELIERES, président, C. ROUGER, conseiller, C. MULLER, conseiller.

Greffier, lors des débats : C. PREVOT

ARRÊT : - contradictoire - prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties - signé par C. BELIERES, président, et par C. PREVOT, greffier de chambre.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

EXPOSÉ DU LITIGE :

M. X., maçon de profession, salarié et gérant de la société ABCR, par contrat du 3 février 2012, a souscrit auprès de la société Allianz Vie une police d'assurance emprunteur ayant pour objet le remboursement de prêts en cas de décès ou de perte totale et irréversible d'autonomie et le versement de prestations en cas d'arrêt de travail par la suite de maladie ou d'accident.

Deux prêts ont été ainsi couverts, un prêt immobilier n° 10278XXX souscrit auprès du Crédit Mutuel moyennant des échéances mensuelles de 1.327,29 € et un prêt immobilier n° 10311YYY souscrit auprès de la Société Générale moyennant des échéances mensuelles de 417,12 €.

Suite à des douleurs lombaires, suivies d'interventions chirurgicales pour hernie discale lombaire, puis hématome péridural, M. X. a été placé en arrêt de travail à compter du 15 octobre 2015.

La société Allianz Vie a accordé sa garantie et a pris en charge les mensualités des deux prêts immobiliers jusqu'au 8 juin 2016.

À cette date M. X. a été examiné par le médecin conseil de la société Allianz Vie, lequel a déposé un rapport le 12 juin 2016, estimant qu'au 8 juin 2016, pour sa profession ou toute profession, M. X. n'était pas totalement incapable d'exercer, qu'il pourrait pratiquer une profession de type sédentaire à temps partiel, évaluant l'incapacité temporaire partielle fonctionnelle à 15 %, l'incapacité professionnelle à 70 % en précisant que le patient était uniquement capable d'assurer la gestion de son entreprise et ne pouvait participer aux travaux, aux ports de charges ou trajets sur les chantiers.

Au vu dudit rapport, par lettre du 19 juillet 2016, la société Allianz Vie a notifié à M. X. la cessation de sa garantie au motif que les conclusions de son médecin conseil révélaient que depuis le 8 juin 2016 son état de santé justifiait un taux d'invalidité fonctionnelle de 15 % tandis que les dispositions du contrat d'assurance stipulaient que les prestations versées en cas d'arrêt de travail cessent dès que le taux d'invalidité fonctionnelle constaté par le médecin devient inférieur à 70 %.

M. X. a contesté cette décision par courrier du 28 juillet 2016.

Par courrier recommandé du 16 août 2016, l'assureur a indiqué ne pouvoir donner une suite favorable à sa contestation, précisant qu'après une nouvelle étude du dossier par son service médical, le médecin conseil maintenait la décision notifiée le 19 juillet 2016.

Dûment autorisé par ordonnance présidentielle, M. X., par acte du 22 décembre 2016 a fait assigner à jour fixe la société Allianz Vie devant le tribunal de grande instance de Foix aux fins de voir juger qu'elle doit sa garantie et de l'entendre condamner à lui rembourser les mensualités des prêts immobiliers à compter du 8 juin 2016.

Par jugement contradictoire du 19 avril 2017, le tribunal de grande instance de Foix a :

- déclaré bien fondée l'action de M. X. à l'encontre de la société Allianz Vie ;

- condamné cette dernière à lui verser au titre de la prise en charge des mensualités des deux prêts litigieux la somme de 14.600,19 € pour le premier, n°10278XXX, et celle de 4.588,32 € pour le second, n°10311YYY, ces sommes étant arrêtées au mois d'avril 2017 inclus, outre celles de 1.327,29 € par mois pour le premier des prêts et 417,12 € par mois pour le second des prêts à compter du mois de mai 2017 ;

- rejeté sa demande de dommages et intérêts ;

- condamné la société Allianz Vie à lui verser la somme de 1.200 € en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- rejeté la demande d'exécution provisoire ;

- condamné la société Allianz Vie au paiement des dépens, y compris le coût de la signification du jugement.

Pour statuer ainsi le premier juge a retenu, au visa des dispositions de l'article L. 132-1 du code de la consommation dans sa version antérieure à l'ordonnance 2016-131 du 10 février 2016, que l'article 12 du contrat définissant les conditions de la garantie arrêt de travail donnait de l'incapacité totale de travail personnel une définition tellement étendue, en visant non seulement l'activité exercée par l'assuré mais toute activité professionnelle, qu'il vidait la garantie de sa substance, créant un déséquilibre marqué au détriment de l'assuré de sorte que cette clause devait être réputée non écrite et que la société d'assurance devait couvrir les prêts garantis au-delà du 8 juin 2016.

Par déclaration du 15 mai 2017, la Sa Allianz Vie a interjeté appel total de ce jugement.

[*]

Dans ses dernières écritures transmises par voie électronique le 10 janvier 2018, la Sa Allianz Vie, appelante, demande à la cour, sur le fondement des articles L. 132-1 et suivants du code de la consommation et 1103 et 1104 du code civil, de :

- réformer intégralement le jugement dont appel ;

- statuant à nouveau,

- débouter M. X. de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;

- condamner M. X. à lui verser la somme de 4.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel.

[*]

Dans ses dernières écritures transmises par voie électronique le 12 septembre 2017, M. X., intimé, demande à la cour, sur le fondement des articles L. 132-1 et L. 133-2 du code de la consommation et L. 112-4 du code des assurances, de :

- confirmer le jugement dont appel en toutes ses dispositions ;

- condamner la société Allianz Vie à lui verser la somme de 4.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens ;

- le tout avec intérêt au taux légal à compter de la décision.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

SUR CE, LA COUR :

Selon les dispositions de l'article L. 132-1 alinéa 1er du code de la consommation dans sa version applicable au litige, dans les contrats conclus entre professionnels et non-professionnels ou consommateurs, sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du non-professionnel ou du consommateur un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat. Selon l'alinéa 7 du même article, l'appréciation du caractère abusif des clauses du contrat au sens du premier alinéa ne porte ni sur la définition de l'objet principal du contrat ni sur l'adéquation du prix ou de la rémunération au bien vendu ou au service offert pour autant que les clauses soient rédigées de façon claire et compréhensible.

Par ailleurs, selon les dispositions de l'article L. 133-2 du même code, les clauses des contrats proposés par les professionnels aux consommateurs ou aux non-professionnels doivent être présentées et rédigées de façon claire et compréhensible. Elles s'interprètent, en cas de doute, dans le sens le plus favorable au consommateur ou au non-professionnel.

En l'espèce, au vu des conditions particulières de la police d'assurance collective à adhésion facultative proposée par la société Allianz aux emprunteurs, à laquelle M. X. a adhéré pour les deux prêts sus énoncés, ainsi qu'admis par la société Allianz Vie, M. X. a souscrit aux garanties Décès-Perte Totale et Irréversible d'Autonomie-Arrêt de Travail. La notice d'information Allianz Soluxis Emprunteurs valant conditions générales de la police d'assurance définit en son article 1 les deux options offertes quant à l'objet de l'assurance, à savoir, l'option 1 « le remboursement d'un prêt en cas de décès ou de perte totale et irréversible d'autonomie », et l'option 2 « le remboursement d'un prêt en cas de décès ou de perte totale et irréversible d'autonomie ainsi que le versement de prestations en cas d'arrêt de travail par suite de maladie ou d'accident ». C'est à cette dernière option que M. X. a manifestement adhéré en souscrivant aux garanties Décès-Perte Totale et Irréversible d'Autonomie-Arrêt de travail telles qu'énoncées aux conditions particulières. Les articles 10 à 12 de la notice d'information définissent les modalités de chacune des garanties souscrites : garantie décès (article 10), garantie perte totale et irréversible d'autonomie (article 11), garantie arrêt de travail (article 12).

L'article 12 énonce que « sous réserve des dispositions prévues à l'article 4 « limitations des garanties », lorsque par suite de maladie ou d'accident un assuré est dans l'incapacité totale et continue d'exercer toute activité professionnelle, l'assureur prend en charge les échéances du prêt mentionnées sur le tableau d'amortissement à concurrence de la quotité assurée et au prorata du nombre de jours correspondant à l'arrêt total de travail.

La prise en charge intervient à l'expiration de la franchise de quatre-vingt-dix jours et tant que l'arrêt de travail est médicalement justifié et reconnu par l'assureur.

Pour bénéficier des prestations l'assuré doit, à la date de l'arrêt de travail :

- soit exercer une activité professionnelle fiscalement déclarée et procurant des rémunérations ou des bénéfices ou être conjoint collaborateur d'artisan, de commerçant ou de personne exerçant toute autre profession libérale, avoir la qualité de co-emprunteur et apporter une collaboration effective et régulière à l'emprunteur principal dans le cadre de son activité professionnelle ;

- soit ne pas exercer une activité professionnelle et percevoir des indemnités journalières au titre d'une maladie ou d'un accident ;

- être âgé de moins de 65 ans ;

À tout moment l'assureur peut demander à l'assuré de se soumettre à un contrôle médical dans le but d'apprécier son incapacité à exercer une quelconque activité professionnelle auprès d'un médecin désigné par l'assureur. Lorsque l'affection qui a donné lieu à la prise en charge est consolidée, et au plus tard dans un délai de trois ans à compter de la date d'incapacité de travail, il détermine le taux d'invalidité fonctionnelle, fixée par référence au barème du Concours médical (édition la plus récente au jour de l'expertise). Les prestations sont maintenues si le taux d'invalidité fonctionnelle est égal ou supérieur à 70 %. Elles sont supprimées si le taux d'invalidité fonctionnelle est inférieur à 70 %.

Toute reprise même partielle d'une activité professionnelle entraîne l'interruption du versement des prestations.

Une rechute dans les soixante jours suivant une reprise professionnelle ne donne pas lieu à l'application de la franchise de quatre-vingt dix jours si le nouvel arrêt a les mêmes causes que celui précédemment indemnisé. »

Cet article 12 définit précisément, de manière claire et compréhensible l'objet principal et les conditions de la garantie « arrêt de travail » à laquelle M. X. a fait le choix d'adhérer, lesquels ne sont définis par ailleurs ni par les conditions particulières ni par l'article 1 de la notice d'information précisant uniquement les intitulés des deux options d'adhésion ouvertes. La garantie arrêt de travail est ainsi sans ambiguïté ouverte à l'assuré qui par suite de maladie ou d'accident est dans l'incapacité totale et continue d'exercer toute activité professionnelle, l'assureur étant tenu de prendre en charge les échéances du prêt garanti à l'expiration de la franchise de quatre-vingt dix jours et tant que l'arrêt de travail est médicalement justifié et reconnu par l'assureur et pouvant soumettre l'assuré à un contrôle médical dans le but d'apprécier son incapacité à exercer une quelconque activité professionnelle auprès d'un médecin désigné par lui.

Dès lors, par application de l'alinéa 7 de l'article L 132-1 susvisé, le caractère abusif de cette clause ne peut être apprécié au sens du premier alinéa dudit article, soit pour déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat, contrairement à ce qu'a retenu le premier juge. Par ailleurs, au regard des dispositions de l'article L. 133-2 susvisé, cette clause n'est pas sujette à interprétation. Elle ne vide au surplus nullement la garantie de sa substance, la garantie étant acquise tant que l'assuré n'est pas en état de reprendre l'exercice d'une activité professionnelle quelconque et se trouve en état d'arrêt de travail médicalement justifié, et après consolidation, et au plus tard dans un délai de trois ans à compter de la date d'incapacité de travail, dès lors que le taux fonctionnel d'invalidité fixé par référence au barème du Concours médical est égal ou supérieur à 70 %.

En l'espèce, il est constant que M. X. a été placé en arrêt de travail médicalement constaté le 15 octobre 2015 dans le cadre d'un accident du travail, et qu'il était toujours en arrêt de travail au 8 juin 2016, date à partir de laquelle la société Allianz Vie a cessé le service des prestations au vu du rapport de son médecin conseil ayant considéré que l'arrêt de travail n'était que partiellement médicalement justifié depuis le 8 juin 2016, retenant un taux « d'incapacité temporaire partielle » dit « fonctionnel » à hauteur de 15 % et « professionnel » à hauteur de 70 %, tout en notant que M. X. devait rencontrer un neurochirurgien le 27 juin 2016 pour un projet de thermo-coagulation ou d'arthrodèse lombaire et qu'il pourrait de nouveau être examiné en septembre 2016, examen que la société Allianz Vie n'a manifestement pas sollicité.

La notification de la décision de cessation de prise en charge a été fondée par l'assureur sur le taux d'incapacité temporaire partielle fonctionnelle de 15 % retenu par le médecin conseil, assimilé par l'assureur au taux d'invalidité fonctionnelle pour invoquer les dispositions contractuelles stipulant que « les prestations versées en cas d'arrêt de travail cessent dès que le taux d'invalidité fonctionnelle constaté par le médecin devient inférieur à 70 % ».

Or le taux d'invalidité fonctionnelle de 70 % servant de limite contractuelle au service des prestations ne s'applique, selon l'article 12 de la notice d'information, qu'à compter de la consolidation de l'état de l'assuré ou, au plus tard, dans un délai de trois ans à compter de la date d'incapacité de travail.

A la date du 8 juin 2016, M. X. n'était pas consolidé, le médecin conseil constatant qu'il poursuivait un traitement par voie orale comprenant un AINS et un protecteur gastrique et qu'il devait être revu le 27 juin 2016 en consultation par un spécialiste de neurochirurgie pour envisager une thermo-coagulation ou une arthrodèse lombaire, notant qu'il pourrait être de nouveau examiné en septembre 2016.

Il ne s'était pas non plus écoulé à ladite date plus de trois ans à compter de la date de d'incapacité de travail, cette échéance ne pouvant être atteinte avant le 15 octobre 2018.

Le seul critère de mise en œuvre de la garantie contractuelle arrêt de travail ne pouvait dès lors être que celui de l'incapacité totale et continue de l'assuré d'exercer toute activité professionnelle.

M. X., lequel sollicite la confirmation du jugement entrepris en ce qu'il a condamné la société Allianz à prendre en charge les mensualités des deux prêts objets de l'assurance, soutient être dans l'impossibilité tant d'exercer son activité professionnelle de maçon que de gérer sa société.

Le rapport du médecin conseil sur lequel s'est fondé la société Allianz Vie comporte des ambiguïtés et des notions non définies contractuellement.

Il retient que l'arrêt de travail lui-même ne serait médicalement que partiellement justifié. Or M. X. était au moment de l'examen du médecin conseil en prolongation d'arrêt de travail accident du travail établie sur imprimé Cerfa par le docteur M. pour lombocruralgie gauche sur hernie discale. Le docteur L., neurochirurgien, a indiqué le 27 juin 2016 que les suites de cruralgie hyperalgique sur hernie discale éjectée intraforaminale étaient difficiles sur le plan radiculaire et que les douleurs du patient étaient liées à la sévérité de l'atteinte radiculaire initiale tout autant qu'à l'instabilité rachidienne résultant de la lombalgie. Il a précisé qu'il n'était pas impossible qu'il faille encore envisager des suites neurochirugicales chez le patient, que son état de santé était encore loin d'être consolidé et qu'il n'était pas en capacité d'assumer son métier de maçon. Le 5 septembre 2016 il proposait une solution sur le long terme par mise en place d'une arthrodèse dynamique sur L3-L4, le patient ne pouvant vivre sous corset.

Le 7 octobre 2016 l'arthrodèse proposée était réalisée, M. X. étant hospitalisé à compter du 6 octobre 2016 et transféré au centre de rééducation fonctionnelle de la clinique des Cèdres le 12 octobre jusqu'au 15 novembre 2016. Suite à la persistance des lombalgies et à des blocages survenus en janvier 2017, une nouvelle intervention chirurgicale s'est avérée nécessaire, réalisée le 21 avril 2017 à la clinique Occitanie par le docteur B. pour enlèvement de l'appareillage d'ostéosynthèse mis en place en octobre 2016 et pose d'une nouvelle arthrodèse avec réalisation de greffons. Sorti de la clinique le 27 avril 2017 avec un lombostat à garder de jour en position debout et assise pendant au minimum un mois il lui était prescrit des soins post-opératoires avec interdiction de se pencher en avant, faire des efforts en torsion, soulever du poids, faire des inclinaisons latérales ou faire de la voiture, une reprogrammation motrice du rachis étant envisagée. Il était hospitalisé à compter du 27 avril 2017 à la clinique de soins de suite et de réadaptation de Verdaich où il se trouvait encore en hospitalisation complète le 19 juin 2017 selon le certificat du docteur I. en raison d'une problématique infectieuse apparue en cours de soins, et ce pour une durée indéterminée.

Les arrêts de travail ont donc été médicalement prolongés sans discontinuité depuis l'arrêt initial, la dernière prolongation à la date des dernières écritures de M. X. datant du 29 mai 2017 pour une prolongation jusqu'au 29 juin 2017.

Les documents médicaux et compte rendus d'interventions produits établissent que des suites de son affection révélée dans le cadre de son activité professionnelle de maçon le 15 mars 2015 M. X. se trouvait manifestement dans l'impossibilité d'exercer cette activité professionnelle, la reprise des efforts physiques liés à cette activité étant inenvisageable.

Le médecin conseil mandaté par l'assureur retient à ce sujet au 8 juin 2016 : des douleurs lombaires permanentes justifiant un traitement en continu, des difficultés à l'habillage, des épisodes de blocage à la marche imposant le repos, une diminution des douleurs en position assise, des alternances de périodes de repos tout au long de la journée, de la fatigue après chaque séance de kinésithérapie. Il a observé chez l'assuré une marche antéfléchie, de la difficulté à se redresser, une hyperextension très algique, des transferts difficiles et précautionneux, une douleur lombo-radiculaire à 30° de flexion, une diminution de la force musculaire au niveau L5 du membre inférieur gauche, une douleur lombaire basse au niveau de la charnière lombo-sacrée, des douleurs dans le territoire L4, une raideur importante du segment lombaire invalidante et des manifestations en territoire L5-S1 avec discret déficit distal des fléchisseurs-extenseurs. Il a conclu que M. X. ne pouvait ni participer aux travaux, ni aux ports de charges ou trajets sur les chantiers.

A la date du 8 juin 2016 et au moins jusqu'au 29 juin 2017, date d'échéance de la dernière prolongation d'arrêt de travail justifiée, M. X. se trouvait donc médicalement dans l'incapacité totale d'exercer sa profession de maçon, emploi pour l'exercice duquel il était salarié de la société ABCR (Ariège Bâtiment Construction Rénovation) depuis le 15 octobre 2012 selon le bulletin de paie produit au débat.

Retenant néanmoins des taux différents, dits d'incapacité temporaire partielle « fonctionnelle » d'une part, et « professionnelle » d'autre part, auxquels l'article 12 de la notice contractuelle d'information ne fait aucune référence, et compte tenu de la déclaration de M. X. selon laquelle il se chargeait de la gestion de son entreprise, le médecin conseil a néanmoins conclu qu'il pourrait (au conditionnel) pratiquer une profession « de type sédentaire à temps partiel », qu'il était uniquement capable d'assurer la gestion de son entreprise, sans indication de la nature des tâches réalisables ni déterminer le temps de travail potentiellement admissible, déduisant de ce seul élément un taux d'incapacité temporaire partielle « fonctionnelle » de 15 % et un taux d'incapacité temporaire partielle « professionnelle » de 70 %. M. X. n'étant pas consolidé, il ne s'est pas prononcé sur le taux d'invalidité fonctionnelle à déterminer par référence au barème du concours médical (édition la plus récente au jour de l'expertise).

Affecté de douleurs persistantes invalidantes, porteur d'un corset, de nouveau hospitalisé pour une longue période à compter du 6 octobre 2016, contraint à des séances de rééducation du rachis lombaire à compter du 2 décembre 2016, présentant une instabilité résiduelle associée à des douleurs évoluant depuis l'intervention du 7 octobre 2016 et résistant à tout traitement conservateur selon compte rendu opératoire du docteur B. du 21 avril 2017, hospitalisé de nouveau du 21 avril 2017 au 27 avril 2017 à la clinique Occitanie puis, à compter du 27 avril 2017, en hospitalisation complète à la clinique Verdaich pour une durée encore indéterminée au 19 juin 2017, avec traitements anti-inflammatoires et morphiniques et arrêt de travail de nouveau prolongé jusqu'au 29 juin 2017, le certificat médical d'évolutivité et de déclaration d'invalidité établi le 3 mai 2017 par le docteur I., docteur en médecine physique et réadaptation de la clinique Verdaich, précisant une durée probable de prolongation de l'arrêt de travail en cours de plus de six mois, M. X. se trouvait manifestement depuis le 8 juin 2016 dans l'incapacité totale et continue d'exercer une activité professionnelle quelconque, y compris de gestion de son entreprise, ce que ne fait que confirmer l'embauche à cette fin d'une salariée à temps plein à compter du 25 mai 2016, de sorte que la société Allianz Vie ne pouvait arrêter la prise en charge des prêts à compter du 8 juin 2016.

Le jugement entrepris doit dès lors être confirmé en ce qu'il a condamné l'assureur à prendre en charge les mensualités des deux prêts assurés du 8 juin 2016 à avril 2017 inclus, puis à compter de mai 2017, en versant les sommes correspondantes à M. X., sauf à limiter, compte tenu des éléments produits, cette condamnation au 29 juin 2017, date extrême du dernier arrêt de travail justifié et, avant dire droit sur la continuation de cette prise en charge postérieurement à ladite date, à ordonner une expertise médicale aux fins de vérifier la poursuite ou non des arrêts de travail postérieurement au 29 juin 2017, dans l'affirmative, de vérifier si postérieurement à ladite date, M. X. se trouve médicalement dans l'incapacité d'exercer toute activité professionnelle, s'il est ou non consolidé, et, en cas de consolidation ou, au plus tard, à la date du 15 octobre 2018, de déterminer, conformément au contrat, si M. X. se trouve en état d'invalidité fonctionnelle, fixée par référence au barème du Concours médical (édition la plus récente au jour de l'expertise) et à hauteur de quel taux.

Cette mesure d'instruction s'effectuera aux frais avancés de l'assureur qui s'est abstenu malgré la contestation de M. X., la proximité annoncée d'une nouvelle consultation en neurochirurgie pour envisager une nouvelle intervention, et la transmission de la lettre du docteur L. du 11 octobre 2016 attestant d'une nouvelle intervention sur les racines et la mise en place d'un système d'ostéosynthèse postéro-latéral dynamique suivie d'un transfert en centre de soins de suites et de rééducation, de lui proposer la mise en place de l'expertise amiable et contradictoire prévue par l'article 14 de la notice d'information en cas de désaccord.

En application des dispositions de l'article 1231-7 du code civil, les sommes confirmées au titre du remboursement des échéances d'emprunt porteront intérêts au taux légal à compter du prononcé du jugement de première instance, soit du 19 avril 2017, pour celles échues à cette date, et pour le surplus à compter du règlement par M. X. de chacune des échéances échues en mai et juin 2017.

M. X. sollicitant la confirmation pure et simple du jugement de première instance, la disposition par laquelle le premier juge l'a débouté de sa demande de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat ne peut qu'être confirmée.

Confirmé pour l'essentiel de ses dispositions principales, le jugement entrepris doit aussi être confirmé en ses dispositions relatives aux dépens de première instance et à l'indemnité allouée à M. X. sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Les dépens exposés jusqu'à ce jour en appel seront supportés par la société Allianz Vie, partie succombante, laquelle se trouve redevable envers M. X. d'une indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile dans les conditions définies au dispositif du présent arrêt et ne peut prétendre à une indemnité sur ce même fondement.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

La Cour,

Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions, sauf à limiter la condamnation au remboursement par la société Allianz Vie des échéances d'emprunts au 29 juin 2017,

Statuant à nouveau sur le chef infirmé et y ajoutant,

Dit que les sommes allouées par le premier juge au titre du remboursement des échéances d'emprunt porteront intérêts au taux légal à compter du 19 avril 2017 pour celles échues à cette date, et, pour celles échues en mai et juin 2017, à compter de leur paiement par M. X.,

Avant dire droit sur la prise en charge des échéances d'emprunt par la société Allianz Vie postérieurement au 29 juin 2017, ordonne une expertise médicale,

Désigne pour y procéder :

M. G., [...]

ou à défaut,

M. M., [...]

L'expert commis ayant pour mission de :

1°/ Se faire remettre toutes pièces utiles à l'accomplissement de sa mission et notamment l'entier dossier médical de M. X.

2°/ Prendre connaissance de la définition de l'incapacité d'exercer une activité professionnelle et de l'invalidité fonctionnelle figurant à l'article 12 des conditions générales du contrat d'assurance (notice d'information) concernant les conditions de la garantie arrêt de travail

3°/ Procéder à l'examen de M. X. et l'entendre en ses doléances

4°/ Vérifier si M. X. a fait l'objet de prolongation(s) de son arrêt de travail postérieurement au 29 juin 2017 ; dans l'affirmative, identifier les périodes de prolongation

5°/ Déterminer si, postérieurement au 29 juin 2017, M. X., au regard de son état, de ses aptitudes, et de son âge reste toujours dans l'incapacité totale et continue d'exercer toute activité professionnelle au sens de l'article 12 du contrat

6°/ Dire si l'état de M. X. est ou non consolidé

7°/ En cas de consolidation, en déterminer la date et dire si M. X. reste atteint d'une invalidité fonctionnelle ; dans l'affirmative en déterminer la nature et le taux par référence au barème du Concours médical (édition la plus récente au jour de l'expertise)

8°/ En l'absence de consolidation, déterminer si, à la date du 15 octobre 2018, M. X. reste atteint d'une invalidité fonctionnelle ; dans l'affirmative en déterminer la nature et le taux par référence au barème du Concours médical (édition la plus récente au jour de l'expertise)

9°/ Donner toutes précisions utiles à l'information de la cour

Dit que l'expert communiquera ses pré-conclusions aux parties lors d'une réunion de synthèse, recevra leurs dires et y répondra,

Dit que la société Allianz Vie versera par chèque libellé à l'ordre du Régisseur des avances et des recettes de la cour d'appel une consignation de 900 € à valoir sur la rémunération de l'expert dans le délai de UN MOIS à compter du présent arrêt et que ce chèque sera adressé avec les références du dossier (n° RG) au service expertises de la cour d'appel de Toulouse,

Rappelle qu'à défaut de consignation dans ce délai, la désignation de l'expert sera caduque selon les modalités fixées par l'article 271 du code de procédure civile,

Dit que l'expert devra déposer au service expertises de la cour d'appel de Toulouse un rapport détaillé de ses opérations dans le délai de TROIS MOIS à compter de l'avis de versement de la consignation qui lui sera donné par le greffe et qu'il adressera copie complète de ce rapport -y compris la demande de fixation de rémunération- à chacune des parties, conformément aux dispositions de l'article 173 du code de procédure civile,

Précise que l'expert adressera une photocopie du rapport à l'avocat de chaque partie,

Précise que l'expert doit mentionner dans son rapport l'ensemble des destinataires à qui il l'aura adressé,

Dit que la mesure d'expertise sera suivie par Mme Christine ROUGER, conseiller,

Renvoie la cause à la mise en état du 2 avril 2020 à 9 heures,

Condamne la société Allianz Vie à payer à M. X. une indemnité de 2.500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles exposés devant la cour jusqu'à ce jour,

Condamne la société Allianz Vie aux dépens d'appel exposés jusqu'à ce jour,

Réserve les dépens pour le surplus.