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CA DOUAI (8e ch. 1re sect.), 9 janvier 2020

Nature : Décision
Titre : CA DOUAI (8e ch. 1re sect.), 9 janvier 2020
Pays : France
Juridiction : Douai (CA), 8e ch. sect. 1
Demande : 17/05316
Décision : 20/30
Date : 9/01/2020
Nature de la décision : Confirmation
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 25/08/2017
Numéro de la décision : 30
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CERCLAB - DOCUMENT N° 8297

CA DOUAI (8e ch. 1re sect.), 9 janvier 2020 : RG n° 17/05316 ; arrêt n° 20/30 

Publication : Jurica

 

Extrait : « En application combinée de l'article 1907, alinéa 2, du code civil, ensemble les articles L. 313-1, L. 313-2 et R. 313-1 du code de la consommation, le taux de l'intérêt conventionnel mentionné par écrit dans l'acte de prêt consenti à un consommateur ou un non-professionnel doit, comme le taux effectif global être calculé sur la base de l'année civile.

Si le juge ne peut refuser d'examiner une pièce régulièrement versée aux débats et soumise à la discussion contradictoire, il ne peut se fonder exclusivement sur une expertise non judiciaire réalisée à l'initiative de l'une des parties, dont l'autre partie soulève l'inopposabilité à son égard.

Néanmoins pour soutenir le recours de la banque à l'année lombarde, Mme X. épouse Y. ne se fonde pas uniquement, comme l'a retenu le premier juge, sur le rapport d'expertise comme indiqué par le premier juge, mais également sur la clause contractuelle qui prévoit explicitement en page 3 l'utilisation de l'année bancaire de 360 jours pour calculer les intérêts conventionnels : « Durant la phase d'amortissement, les intérêts sont calculés sur le montant du capital restant dû, au taux d'intérêt indiqué ci-dessus sur la base d'une année bancaire de 360 jours, d'un semestre de 180 jours, d'un trimestre de 90 jours et d'un mois de 30 jours. »

Si Mme X. épouse Y. invoque le caractère abusif de la clause contractuelle prévoyant le recours à l'année lombarde et cite la recommandation n° 05-02 du 14 mai 2005 de la commission des clauses abusives, elle ne sollicite pas que la clause soit déclarée non écrite en application des dispositions de l'article L. 132-1 du code de la consommation dans sa version en vigueur lors de l'acceptation de l'offre de crédit. La seule présence de la clause, contrairement à ce que l'appelante prétend, ne saurait justifier à elle seule l'annulation de la stipulation d'intérêts. Il faut que conformément à l'article 1353 du code civil, l'emprunteuse démontre que la banque a bien calculé les intérêts conventionnels sur la base d'une année lombarde de 360 jours et non sur une année civile et que ce calcul a généré à son détriment un surcoût d'un montant supérieur à la décimale prévue à l'article R. 313-1 du code de la consommation.

Il n'est pas prouvé ni même allégué par Mme X. épouse Y. que le calcul des intérêts sur la base de l'année lombarde, à le supposer démontré, a généré à son détriment un surcoût d'un montant supérieur à la décimale prévue à l'article R. 313-1 du code de la consommation. »

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE DOUAI

HUITIÈME CHAMBRE PREMIÈRE SECTION

ARRÊT DU 9 JANVIER 2020

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 17/05316. Arrêt n° 20/30. RG n° 17/05316. Arrêt n° 20/30. N° Portalis DBVT-V-B7B-Q63X. Jugement (R.G. n° 15/10340) rendu le 21 juillet 2017 par le tribunal de grande instance de Lille.

 

APPELANTE :

Madame X. épouse Y.

née le [date] à [ville], de nationalité française, [adresse], Représentée par Maître Hélène C., avocat au barreau de Lille

 

INTIMÉE :

SA Caisse d'Epargne et de Prévoyance Hauts de France

venant aux droits de la SA Cenfe agissant en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège, [adresse], Représentée par Maître Francis D., avocat au barreau de Lille

 

DÉBATS à l'audience publique du 23 octobre 2019 tenue par Maria Bimba Amaral magistrat chargé d'instruire le dossier qui, a entendu seul(e) les plaidoiries, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré (article 786 du code de procédure civile). Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe.

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Betty Moradi

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ : Sylvie Colliere, président de chambre, Hélène Billieres, conseiller, Maria Bimba Amaral, conseiller

ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 9 janvier 2020 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Sylvie Colliere, président et Betty Moradi, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 26 septembre 2019

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

FAITS ET PROCÉDURE - PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :

Selon offre émise le 12 novembre 2010 et acceptée le 26 du même mois, la Caisse d'épargne Nord France Europe aux droits de laquelle vient désormais la Caisse et d'épargne Hauts de France, ci-après dénommée la Caisse d'épargne, a consenti à Mme X. épouse Y. deux prêts immobiliers pour financer l'achat d'un immeuble à usage d'habitation situé [...] :

- un prêt à taux zéro n° 782XXX portant sur la somme de 8.800 euros d'une durée de 252 mois ;

- un « Prêt Primo » n° 782YY, portant sur la somme de 107.000 euros remboursable en 300 mensualités de 555,13 euros assurance incluse, au taux d'intérêt conventionnel de 3,41 % et au taux effectif global de 3,96 % l'an.

Par acte d'huissier du 20 novembre 2015, Mme X. épouse Y. a fait assigner la Caisse d'épargne devant le tribunal de grande instance de Lille se prévalant d'une irrégularité du taux effectif global.

Par jugement contradictoire du 21 juillet 2017, le tribunal de grande instance de Lille a :

- débouté Mme X. épouse Y. de l'ensemble de ses demandes ;

- condamné Mme X. épouse Y. à payer à la Caisse d'Epargne et de Prévoyance Hauts de France la somme de 1.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné Mme X. épouse Y. aux dépens avec recouvrement direct au profit de Maître Francis D. pour les frais dont il aurait fait l'avance sans en avoir reçu provision ;

- débouté les parties du surplus de leurs demandes.

[*]

Le 25 août 2017, Mme X. épouse Y. a interjeté appel total de la décision.

Selon ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 23 avril 2018, elle demande à la cour d'infirmer le jugement déféré et sur le fondement des articles L. 313-1, L. 313-2 et R. 313-1 ancien du code de la consommation et 1907 du code civil, de :

- prononcer la nullité de la clause de stipulation d'intérêts abusive compte tenu de la référence à l'année bancaire de 360 jours au titre du prêt Primo ;

- par conséquent, ordonner la substitution du taux d'intérêt légal à la date de souscription du prêt (0,65 %) au taux conventionnel ;

- condamner la Caisse d'épargne à lui rembourser les sommes trop perçues avec intérêts au taux légal à compter du jugement, somme correspondant à la différence entre le coût total du crédit calculé au taux contractuel et le coût total du crédit calculé au taux d'intérêt légal (0,65 %) ;

- condamner la Caisse d'épargne à appliquer le taux d'intérêt légal (0,65 %) jusqu'au terme du prêt ;

- enjoindre à la Caisse d'épargne, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, de produire un tableau d'amortissement modifié tenant compte du taux d'intérêt légal (0,65 %) ;

- condamner la Caisse d'épargne à lui payer la somme de 4.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens d'instance en ce compris les frais d'expertise dont distraction au profit de Maître Hélène C.

[*]

Selon dernières conclusions notifiées par voie électronique le 9 août 2018, la Caisse d'épargne demande à la cour, au visa des articles 9 et 16 du code de procédure civile, L. 313-1, L. 313-2 et R. 313-1 du code de la consommation, 1134 ancien et 1315 devenu 1353 du code civil, de :

A titre principal :

- confirmer le jugement déféré ;

- constater la carence probatoire de Mme X. épouse Y. ;

- débouter Mme X. épouse Y. de l'intégralité de ses demandes ;

A titre subsidiaire :

- dire que le taux effectif global est exact et n'est affecté d'aucune irrégularité ;

- dire que les intérêts conventionnels ont été calculés sur la base d'une année civile ;

- par conséquence, débouter Mme X. épouse Y. de l'intégralité de ses demandes ;

A titre infiniment subsidiaire :

- dire que l'irrégularité ou l'erreur affectant le taux effectif global ne justifie pas le prononcé d'une déchéance du droit aux intérêts conventionnels et ce, compte tenu de l'absence de justification par Mme X. épouse Y. d'un quelconque préjudice direct ;

En tout état de cause, condamner Mme X. épouse Y. à payer :

- la somme de 3 000 euros au titre des frais irrépétibles exposés en cause d'appel, en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- aux entiers frais et dépens, y compris ceux d'appel qui seront recouvrés par Maître Francis D. conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIFS :

Sur l'année lombarde :

Contrairement à ce qu'indique la Caisse d'épargne, Mme X. épouse Y. ne sollicite pas la nullité de la stipulation d'intérêts conventionnels en raison de la non intégration dans le calcul du taux effectif global des coûts liés à la période de préfinancement mais uniquement la nullité en raison de la référence au calcul des intérêts sur la base de l'année bancaire.

En application combinée de l'article 1907, alinéa 2, du code civil, ensemble les articles L. 313-1, L. 313-2 et R. 313-1 du code de la consommation, le taux de l'intérêt conventionnel mentionné par écrit dans l'acte de prêt consenti à un consommateur ou un non-professionnel doit, comme le taux effectif global être calculé sur la base de l'année civile.

Si le juge ne peut refuser d'examiner une pièce régulièrement versée aux débats et soumise à la discussion contradictoire, il ne peut se fonder exclusivement sur une expertise non judiciaire réalisée à l'initiative de l'une des parties, dont l'autre partie soulève l'inopposabilité à son égard.

Néanmoins pour soutenir le recours de la banque à l'année lombarde, Mme X. épouse Y. ne se fonde pas uniquement, comme l'a retenu le premier juge, sur le rapport d'expertise comme indiqué par le premier juge, mais également sur la clause contractuelle qui prévoit explicitement en page 3 l'utilisation de l'année bancaire de 360 jours pour calculer les intérêts conventionnels :

« Durant la phase d'amortissement, les intérêts sont calculés sur le montant du capital restant dû, au taux d'intérêt indiqué ci-dessus sur la base d'une année bancaire de 360 jours, d'un semestre de 180 jours, d'un trimestre de 90 jours et d'un mois de 30 jours. »

Si Mme X. épouse Y. invoque le caractère abusif de la clause contractuelle prévoyant le recours à l'année lombarde et cite la recommandation n° 05-02 du 14 mai 2005 de la commission des clauses abusives, elle ne sollicite pas que la clause soit déclarée non écrite en application des dispositions de l'article L. 132-1 du code de la consommation dans sa version en vigueur lors de l'acceptation de l'offre de crédit.

La seule présence de la clause, contrairement à ce que l'appelante prétend, ne saurait justifier à elle seule l'annulation de la stipulation d'intérêts. Il faut que conformément à l'article 1353 du code civil, l'emprunteuse démontre que la banque a bien calculé les intérêts conventionnels sur la base d'une année lombarde de 360 jours et non sur une année civile et que ce calcul a généré à son détriment un surcoût d'un montant supérieur à la décimale prévue à l'article R. 313-1 du code de la consommation.

Il n'est pas prouvé ni même allégué par Mme X. épouse Y. que le calcul des intérêts sur la base de l'année lombarde, à le supposer démontré, a généré à son détriment un surcoût d'un montant supérieur à la décimale prévue à l'article R. 313-1 du code de la consommation.

L'appelante doit donc être déboutée de sa demande en nullité de la stipulation d'intérêts conventionnels et le jugement confirmé.

 

Sur les demandes accessoires :

Le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a condamné Mme X. épouse Y. aux dépens et à payer une somme de 1 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Succombant, Mme X. épouse Y. sera condamnée aux dépens d'appel qui seront recouvrés par Maître D. conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

L'équité conduit à condamner Mme X. épouse Y. à payer à la Caisse d'épargne une somme de 3.000 euros au titre des frais irrépétibles d'appel.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

Confirme le jugement déféré ;

Y ajoutant :

Condamne Mme X. épouse Y. à payer à la Caisse d'épargne Hauts de France la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne Mme X. épouse Y. aux dépens d'appel qui seront recouvrés par Maître D. conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Le Greffier                Le Président

B. Moradi                  S. Collière