CA SAINT-DENIS DE LA RÉUNION (ch. com.), 6 mars 2020
CERCLAB - DOCUMENT N° 8383
CA SAINT-DENIS DE LA RÉUNION (ch. com.), 6 mars 2020 : RG n° 16/00537
Publication : Jurica
Extrait : « La cour constate que la déclaration d'appel mentionne que la portée de l'appel est un appel total. Eu égard aux prétentions des parties telles qu'elles ressortent du dispositif de leurs dernières conclusions, le champs de l'appel a nécessairement été restreint et ne porte pas sur les demandes formulées au titre de l'article L. 442-6 du code de commerce. »
COUR D’APPEL DE SAINT-DENIS DE LA RÉUNION
CHAMBRE COMMERCIALE
ARRÊT DU 6 MARS 2020
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 16/00537. N° Portalis DBWB-V-B7A-EWDQ. Appel d'une décision rendue par le TRIBUNAL MIXTE DE COMMERCE DE SAINT-DENIS DE LA RÉUNION en date du 17 FÉVRIER 2016 R.G. n° 14/00196 suivant déclaration d'appel en date du 29 MARS 2016.
APPELANTE :
SAS MAERSK FRANCE
[adresse], Représentant : Maître Jean jacques M., Plaidant/Postulant, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION
INTIMÉE :
SAS RAVATE DISTRIBUTION
[adresse], Représentant : Maître Samia S.-D., Plaidant/Postulant, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION
CLÔTURE LE : 12/12/2018
DÉBATS : En application des dispositions de l'article 785 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 4 septembre 2019 devant la cour composée de :
Président : Madame Fabienne KARROUZ, Conseillère
Conseiller : Madame Pauline FLAUSS, Conseillère
Conseiller : Monsieur Laurent CALBO, Conseiller
Qui en ont délibéré après avoir entendu les avocats en leurs plaidoiries.
A l'issue des débats, la présidente a indiqué que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition le 29 novembre 2019 prorogé par avis au 26 février 2020 puis au 6 mars 2020.
Greffier lors des débats et de la mise à disposition : Madame Nathalie BEBEAU, Greffière.
ARRÊT : prononcé publiquement par sa mise à disposition des parties le 6 mars 2020.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
LA COUR :
FAITS ET PROCÉDURE :
La compagnie MAERSK FRANCE est agent maritime de MAERSK LINE entreprise de transport maritime par containers. Pour le déplacement des marchandises la société MAERSK LINE met des containers à disposition de ses clients, cette mise à disposition faisant partie intégrante du transport. La partie contractante au connaissement est responsable des containers et est débitrice de leur restitution dans les délais contractuels. À défaut de restitution à l'issue de la période de franchise, des pénalités de retard appelées « surestaries » sont facturées.
Soutenant que la société RAVATE Distribution (RAVATE) avait laissé impayées 21 factures correspondant aux pénalités de retard facturées, la société MAERSK FRANCE (MAERSK) a saisi le tribunal mixte de commerce de Saint-Denis pour la voir condamner au paiement.
Par jugement du 17 février 2016 le tribunal a :
- condamné la société RAVATE distribution à payer à la société MAERSK la somme de 343,00 € avec intérêts au taux légal à compter du 23 décembre 2013 ;
- débouté la société MAERSK du surplus de ses demandes ;
- condamné la société MAERSK à régler à la société RAVATE distribution la somme de 2.000 € avec intérêts au taux légal à compter de la signification du jugement ;
- ordonné la restitution par la société MAERSK des chèques de caution non encore encaissés, dans le mois de la signification du jugement avec passé ce délai une astreinte de 300,00 € par jour de retard sur 30 jours ;
- s'est déclaré incompétent pour connaître des demandes formulées sur le fondement de l'article L. 442-6 du code de commerce au profit du tribunal de commerce de Paris ;
- dit qu'à défaut de contredit dans les délais légaux le dossier sera transmis à la juridiction désignée ;
- condamné la société MAERSK à régler à la société RAVATE Distribution la somme de 1.500,00 € en application des dispositions de l'article 700 du CPC et aux dépens.
Par déclaration au greffe de la cour formulée par voie électronique le 29 mars 2016 la société MAERSK a relevé appel de cette décision.
PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :
Dans ses dernières conclusions déposées au greffe le 6 novembre 2018 la société MAERSK demande à la cour de :
- réformer le jugement entrepris sauf en ce qu'il a débouté la société RAVATE distribution des demandes suivantes :
* 10.000 € au titre de l'indemnisation du prétendu préjudice subi par elle du fait des demandes indues de chèque de caution ;
* 10.000 € au titre du préjudice subi du fait du déséquilibre significatif ;
* 10.000 € au titre du préjudice subi du fait des menaces abusives exercées à son encontre.
Et statuant à nouveau :
- dire et juger que la computation des surestaries effectuée par l'armateur est conforme tant aux usages maritimes qu'aux relations des parties depuis 10 ans, conformes enfin aux factures émises et que la créance contre la société RAVATE distribution est bien réelle liquide et exigible ;
en conséquence :
- condamner la société RAVATE distribution à lui payer la somme principale de 19.166,00 € augmentés des intérêts au taux légal dus au titre des factures 2013 ;
- constater qu'elle a émis en 2014 un certain nombre de factures pour un montant total de 628,00 € ;
- constaté que dans la mesure où ces factures sont demeurées impayées, elle a à bon droit encaissé les chèques de caution remis par la société RAVATE distribution, pour un montant total de 2.000 €, et qu'il en résulte un différentiel d'un montant de 1.372,00 €, au bénéfice de la société RAVATE distribution ;
- en conséquence ordonner la compensation entre les sommes dues par la société RAVATE distribution au titre des factures de 2013 soit la somme de 19'166 € augmentée du taux d'intérêt légal, avec les sommes dues par elle-même au titre du différentiel entre les sommes correspondant à l'encaissement des chèques de caution et des factures impayées de 2014 ;
- débouter la société RAVATE distribution de l'ensemble de ses demandes et prétentions celles-ci étant infondées et injustifiées,
- condamner la société RAVATE distribution a lui payer la somme de 10.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens distraits conformément à l'article 699 du code de procédure civile.
La société MAERSK FRANCE fait essentiellement valoir :
Sur les surestaries
- que du fait de l'ancienneté des relations commerciales avec la société RAVATE Distribution, ainsi que du volume des containers affrétés pour le compte de cette dernière, elle lui a accordé pour l'année 2012 des tarifs préférentiels ainsi qu'une franchise supérieure à celle généralement pratiquée;
- que cette offre prenait fin de plein droit à compter du 1er janvier 2013 date à laquelle la franchise accordée et le montant des pénalités appliquées redevenaient identiques à ceux appliqués à l'ensemble de ses clients ;
- que cependant à titre exceptionnel et commercial, à compter du 1er janvier 2013, elle a accordé à la société RAVATE une franchise de 22 jours au lieu des 12 jours normalement applicables et ce pour une durée limitée jusqu'au 31 décembre 2013 ;
- qu'elle a transmis à sa clientèle dont faisait partie la société RAVATE un document d'information sur les délais de franchise, la société RAVATE étant parfaitement informée de ce que l'offre de services préférentiels avait pris fin, ce dont en outre elle avait pris connaissance dès le mois de janvier 2013 par le biais des factures qui lui ont été adressées ;
- que ces nouvelles conditions de franchise et de pénalités n'ont jamais été contestées, la société RAVATE continuant à la solliciter en parfaite connaissance de cause tout au long de l'année 2013 ;
- que les pénalités de retard se calculent par jour de détention et non de manière forfaitaire comme soutenu par la société Ravate Distribution, la forfaitisation étant contraire à tous les usages maritimes, et contraire aux habitudes contractuelles des parties ;
Sur les dépôts de garantie effectués par chèques
- que depuis 2014 elle sollicite à titre de garantie avant d'autoriser la sortie d'un container de la zone portuaire, la remise d'un chèque de caution lequel est restitué si le container est restitué sur le terminal dans le délai de franchise ;
- que dans le cas contraire et à défaut de règlement des surestaries le chèque de caution est encaissé ;
- qu'elle a ainsi été amenée à encaisser un certain nombre de chèques de caution remis par la société RAVATE pour un montant total de 2.000 € du fait des factures impayées à compter de 2014 lesquelles n'ont aucun lien avec les factures de 2013 objet du litige ;
- que la mise en place de ce mécanisme de caution n'est nullement prohibée et permet de lui conférer une garantie afin de pouvoir faire face aux nombreux impayés de ses clients s'agissant des surestaries ;
- que le chèque constituant un instrument de paiement elle pouvait le porter à l'encaissement même dans le cas où il lui a été remis à titre de garantie ;
- qu'il ne peut être valablement soutenu que les chèques émis étaient dépourvus de cause dans la mesure où ils étaient destinés à garantir le paiement de prestations futures et qui n'ont été encaissés qu'après constat de l'absence de paiement des factures dans les délais impartis ;
- que l'émission des chèques et leur encaissement étaient pourvus d'une cause s'agissant de l'absence de paiement ;
- que la société RAVATE distribution s'est volontairement acquittée des chèques de caution sans jamais formuler aucune contestation sur la pratique mise en place ;
- que les chèques litigieux n'ont pas été émis sous la menace de ne pas pouvoir réceptionner les containers, puisque le chèque de garantie conditionnait seulement la possibilité pour la société RAVATE de quitter la zone de stockage avec le container afin de pouvoir décharger son contenu dans ses propres locaux, la société RAVATE ayant toujours la possibilité de procéder au déchargement dans la zone de stockage et d'acheminer par ses propres moyens son contenu dans ses locaux ;
- que la société RAVATE a accepté la pratique ainsi mise en place consistant à solliciter la remise de chèques de caution et s'est volontairement acquittée des chèques de caution sans formuler aucune contestation.
* * *
Dans ses dernières écritures déposées et notifiées par voie électronique le 8 décembre 2017 la société RAVATE Distribution demande à la cour de :
A titre principal
- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a :
- condamner la société MAERSK à lui régler la somme de 2.000 € avec intérêts au taux légal à compter de la signification du jugement ;
- ordonné la restitution des chèques de caution non encore encaissés dans le mois de signification du jugement et ce sous astreinte ;
- ordonner l'exécution provisoire ;
- condamner la société MAERSK aux dépens ;
- débouté la société MAERSK du surplus de ses demandes.
En conséquence
- débouter la société MAERSK de la totalité de ses demandes, fins et prétentions ;
statuant à nouveau :
- infirmer le jugement en ce qu'il l'a déboutée du surplus de ses demandes ;
A titre reconventionnel
- dire et juger que les factures émises par la société MAERSK sont non conformes à la législation en vigueur ;
- condamner la société MAERSK au paiement de la somme de 10.000 € au titre de l'indemnisation du préjudice subi du fait des demandes indues de chèque de caution ;
en conséquence :
- enjoindre la société MAERSK à cesser ses pratiques abusives consistant à demander des chèques de caution ;
- condamner la société MARESK à lui payer une somme de 20.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.
La société RAVATE Distribution réplique principalement :
Sur les surestaries
- que le tarif appliqué aux pénalités réclamées par l'appelante, résulte d'un simple dépliant publicitaire, sans que la preuve de la communication du dit document ne soit rapportée et ne correspond pas aux termes de leurs accords commerciaux ;
- que les rapports entre les parties étaient régis par une offre de service proposée en 2012 et acceptée, qui s'est renouvelée aucune nouvelle offre n'ayant été soumise pour l'année 2013, la société MAERSK faisant en outre référence à ce contrat tarifaire par courriel du 28 novembre 2014 ;
- que contrairement à ce qui est soutenu elle a signifié à la société MAERSK son profond désaccord quant à ses pratiques abusives oralement et par écrit ;
- que c'est de manière discrétionnaire injustifiée et abusive que la société MAERSK a décidé de modifier ses conditions commerciales sans même l'en avertir ;
- que le contrat existant entre les parties ne précise nullement que les pénalités de retard se calculent par jour de retard, le montant de la pénalité étant forfaitaire ;
- qu'en outre les frais de détention ont toujours fait l'objet entre les parties d'un traitement spécifique, le montant global des frais faisant l'objet d'une négociation en fin d'année ;
- qu'en tout état de cause le contrat doit être interprété conformément aux dispositions de l'article 1162 du code civil en faveur de celui qui a contracté l'obligation et qu'il doit être retenu que des sommes forfaitaires s'appliquent à toute la période de détention des containers ;
- qu'en outre les délais de détention retenus par la société MAERSK sont erronés.
Sur les dépôts de garantie effectués par chèques
- que la société MAERSK a exigé l'émission de chèques de caution pour un montant total de 7.500,00 €, laquelle ne repose sur aucun fondement contractuel et constitue en réalité une pratique de chantage qu'elle a toujours dénoncée ;
- que l'encaissement des chèques de caution à hauteur de 2.000,00 € ne correspond à aucune dette, ce que la société MAERSK reconnaît en sollicitant une compensation ;
- que la remise des chèques lui a été extorquée, viciant ainsi son consentement, les chèques émis étant en outre dépourvus de cause réelle et sérieuse, puisqu'ils n'ont pas été émis pour garantir le paiement d'une dette préexistante ou future mais pour répondre aux pressions exercées de la société MAERSK, afin de pouvoir récupérer les marchandises contenues dans les containers, ce qui les rend nuls ;
- qu'aucune dette ni aucune stipulation contractuelle entre les parties ne justifiait le paiement des chèques et qu'il y a lieu par conséquent de procéder à la répétition de l'indu ;
- que la compensation sollicitée ne saurait être ordonnée et que la condamnation au remboursement de l'intégralité des chèques de caution indus déjà encaissés devra être confirmée comme la restitution des chèques non encaissés sous astreinte ;
Sur le défaut de conformité des factures
- que les factures émises par la société MAERSK ne sont pas conformes aux dispositions de l'article L. 441-3 du code de commerce dans la mesure où elles ne sont pas rédigées intégralement en langue française, que la désignation du vendeur est incomplète faute d'indication relative au capital social, que le prix unitaire hors taxe des services ou produits ne ressort pas clairement et que le montant de l'indemnité forfaitaire pour frais de recouvrement due au créancier en cas de retard de paiement n'est pas mentionné ;
- que la demande indue de chèques de caution, lesquels sont encaissés au bon vouloir de la société MAERSK est source d'un préjudice réel et sérieux en ce qu'elle a dû immobiliser inutilement une partie de sa trésorerie et qu'elle a été victime d'inquiétudes quotidiennes ce qui fonde sa demande de dommages et intérêts.
* * *
Pour plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, il convient de se reporter à leurs écritures ci-dessus visées figurant au dossier de la procédure.
L'ordonnance de clôture est intervenue le 10 décembre 2018.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
MOTIFS DE LA DÉCISION :
Sur la saisine de la cour :
La cour constate que la déclaration d'appel mentionne que la portée de l'appel est un appel total.
Eu égard aux prétentions des parties telles qu'elles ressortent du dispositif de leurs dernières conclusions, le champs de l'appel a nécessairement été restreint et ne porte pas sur les demandes formulées au titre de l'article L. 442-6 du code de commerce.
Sur les surestaries :
Il ressort des pièces produites qu'au cours de l'année 2013 la compagnie maritime MAERSK a assuré la mise à disposition et l'acheminement de 24 conteneurs pour le compte de la société RAVATE Distribution depuis l'Inde, la Chine, le Pakistan, la France métropolitaine et l'Italie jusqu'à la Réunion.
Les contrats de transports produits contiennent une clause 15.4 aux termes de laquelle :
« si un conteneur n'est pas retourné dans les conditions mentionnées ci-dessus ainsi que dans les délais donnés par les tarifs, le réceptionnaire est redevable de tous les frais d'immobilisation et autres frais qui pourraient résulter de cet état de fait »
Les contrats de transport liant les parties prévoient donc le paiement de frais dénommés surestaries correspondant à la mise à disposition des conteneurs au-delà des délais impartis par le transporteur.
La société MAERSK a rendu destinataire le groupe RAVATE d'un document intitulé -offre de service » (pièce 1 intimée) ayant pour objet l'importation de marchandises en « dry » depuis l'Europe le Moyen Orient, l'Afrique de l'Ouest et l'Asie et ce le 26 janvier 2012.
Ce document détaille le tarif appliqué aux différentes prestations proposées, les délais d'acheminement et les frais de détention des conteneurs. Il mentionne que l'offre est valable du 1er janvier 2012 au 31 décembre 2012. La franchise de détention des conteneurs était fixée à 30 jours calendaires sur tous les conteneurs importés quelle que soit leur provenance. Il n'est pas expressément indiqué que l'offre ainsi faite l'était à titre promotionnel.
Postérieurement à cette offre limitée dans le temps, les parties n'ont conclu aucun accord particulier s'agissant des surestaries. La société MAERSK ne justifie pas avoir communiqué les nouvelles conditions tarifaires des surestaries qu'elle entendait appliquer à compter du 1er janvier 2013. Elle ne peut utilement invoquer un accord tacite pour l'application des nouvelles conditions tarifaires qu'elle revendique, qui résulterait du silence gardé par la société RAVATE à la réception des factures correspondant aux surestaries, dans la mesure où ces factures sont toutes restées impayées et qu'à la suite de la mise en demeure qui lui a été adressée, la société RAVATE a par courrier du 18 décembre 2013 expliqué le défaut de paiement par son désaccord sur les conditions tarifaires.
Par conséquent faute pour la société MAERSK de justifier de conditions et tarifs antérieurs s'étant appliqués entre les parties et qui différeraient de l'exécution de l'offre de service du 26 janvier 2012, il y a lieu d'appliquer les conditions et tarifs de cette offre.
S'agissant du caractère ou non forfaitaire des pénalités de détention, il résulte de l'offre, que la franchise de détention est exprimée en jours calendaires et que le tarif lui-même fait référence à des jours. Le propre même d'une pénalité liée à une détention est de la sanctionner et d'être proportionnelle au délai de détention. Il ne peut dès lors être considéré que le tarif sanctionnerait de manière forfaitaire sans être limitée dans le temps une détention au-delà 90 jours.
Par conséquent il y a lieu de retenir que le tarif est exprimé en jours de détention passé une franchise de 30 jours.
Dès lors pour l'année 2013, sur la base des factures émises et du tableau réalisé par la société RAVATE lesquels concordent sur la durée de détention, la société RAVATE est débitrice des sommes suivantes :
Facture 5071768275 : détention d'un conteneur 40 dry du 12/10/2012 au 15 janvier 2013
Franchise de 30 jours : du 12/10/2012 au 10/11/2012
Surestaries du 11/11/ 2012 au 15/01/ 2013 : 62 jours X 16,00= 992,00€
Facture 5071768395 : détention d'un conteneur 40 dry du 07/09/2012 au 16/01/2013
Franchise de 30 jours : du 07/09/2012 au 06/10/2012
Surestaries de 07/10/2012 au 16/01/2013 : 98 jours X16,00 = 1488,00€
Facture 5802779820 : détention d'un conteneur 20 dry du 06/04/2013 au 23/05/2013
Franchise de 30 jours : du 06/04/2013 au 05/05/2013
Surestaries du 06/05/2013 au 23/05/2013 : 18 jours X 8,00 = 144,00€
La demande étant de 132,00 € ce montant sera retenu
Facture 5802780067 : détention d'un conteneur 20 dry du 13/04/2013 au 16/07/2013
Franchise de 30 jours : du 13/04/2013 au 12/05/2013 appliquée selon facture jusqu'au 19/05/2013
Surestaries du 20/05/2013 au 16/07/2013 : 58 jours (selon facture) X 8,00 = 464,00€
Facture 5802780086 : détention d'un conteneur 40 dry du 17/04/2013 au 19/07/2013
Franchise de 30 jours : du 17/04/2013 au 17/05/2013 appliquée selon facture jusqu'au 23/05/2013
Surestaries du 24/05/2013 au 19/07/2013 : 57 jours (selon facture) X 16,00 = 912,00€
Facture 5802780096 : détention d'un conteneur 40 dry du 03/05/2013 au 24/07/2013
Franchise de 30 jours : du 03/05/2013 au 02/06/2013 appliquée selon facture jusqu'au 08/06/2013
Surestaries du 09/06/2013 au 24/07/2013 : 46 jours (selon facture) X 16,00 = 736,00€
Facture 5802780185 : détention d'un conteneur 40 dry du 11/07/2013 au 06/08/2013
Franchise de 30 jours : du 11/07/2013 au 10/08/2013
Le délai de franchise ayant été respecté aucune somme n'est due.
Facture 5802780225 : détention d'un conteneur 20 dry du 03/07/2013 au 22/08/2013
Franchise de 30 jours : du 03/07/2013 au 02/08/2013
Surestaries du 03/08/2013 au 22/08/2013 : 20 jours X 8,00 = 160,00€
Facture 5802780239 : détention d'un conteneur 20 dry du 08/08/2013 au 30/08/2013
Franchise de 30 jours : du 08/08/2013 au 07/09/2013
Le délai de franchise ayant été respecté aucune somme n'est due.
Facture 5802780395 : détention d'un conteneur 40 dry du 20/09/2013 au 21/10/2013
Franchise de 30 jours : du 20/09/2013 au 20/10/2013
Surestaries du 21/10/2013 : 01 jour X 16,00 = 16,00€
Facture 5802780426 : détention d'un conteneur 40 dry du 14/08/2013 au 23/10/2013
Franchise de 30 jours : du 14/08/2013 au 13/09/2013
Surestaries du 14/09/2013 au 23/10/2013 : 40 jours X 16,00 = 640,00€
Facture 5802780467 : détention d'un conteneur 20 dry du 24/04/2013 au 06/06/2013
Franchise de 30 jours : du 24/04/2013 au 24/05/2013
Surestaries du 25/05/2013 au 06/06/2013 : 13 jours X 8,00 = 104,00€
Facture 5802780504 : détention d'un conteneur 40 dry du 02/10/2013 au 12/11/2013
Franchise de 30 jours : du 02/10/2013 au 31/10/2013
Surestaries du 01/11/2013 au 12/11/2013 : 12 jours X 16,00 = 192,00€
Facture 5046264446 : détention d'un conteneur 40 dry du 25/09/2013 au 21/11/2013
Franchise de 30 jours : du 25/09/2013 au 26/10/2013
Surestaries du 27/10/2013 au 21/11/2013 : 27 jours X 16,00 = 432,00€
Facture 5046265581 : détention d'un conteneur 40 dry du 24/10/2013 au 22/11/2013
Franchise de 30 jours : du 24/10/2013 au 23/11/2013
Le délai de franchise ayant été respecté aucune somme n'est due.
Facture 5046273026 : détention d'un conteneur 40 dry du 09/10/2013 au 04/12/2013
Franchise de 30 jours : du 09/10/2013 au 07/11/2013
Surestaries du 08/11/2013 au 04/12/2013 : 28 jours X 16,00 = 448,00€
Facture 5046273766 : détention d'un conteneur 40 dry du 06/11/2013 au 05/12/2013
Franchise de 30 jours : du 06/11/2013 au 05/12/2013
Le délai de franchise ayant été respecté aucune somme n'est due.
Facture 5046274587 : détention d'un conteneur 40 dry du 31/10/2013 au 06/12/2013
Franchise de 30 jours : du 31/10/2013 au 29/11/2013
Surestaries du 30/11/2013 au 04/12/2013 : 05 jours X 16,00 = 80,00€
Facture 5046278240 : détention d'un conteneur 40 dry du 06/11/2013 au 12/12/2013
Franchise de 30 jours : du 06/11/2013 au 06/12/2013
Surestaries du 07/12/2013 au 12/12/2013 : 06 jours X 16,00 = 96,00€
Facture 5046281765 : détention d'un conteneur 40 dry du 21/11/2013 au 18/12/2013
Franchise de 30 jours : du 21/11/2013 au 21/12/2013
Le délai de franchise ayant été respecté aucune somme n'est due.
Facture 5046286858 : détention du conteneur 40 dry du 21/11/2013 au 26/12/2013
Franchise de 30 jours : du 21/11/2013 au 21/12/2013
Surestaries du 22/12/2013 au 26/12/2013 : 5 jours X 16,00 = 80,00€
La créance de la société MAERSK au titre des surestaries pour l'année 2013 sera fixée à hauteur de 6972,00 €.
Sur les dépôts de garantie effectués par remise de chèques :
Vu les dispositions des articles L. 131-2, L. 131-3, L. 131-31 du code monétaire et financier,
Vu les dispositions de l'article 1147 du code civil devenu
Il est constant que la société MAERSK a mis en place à partir de 2014 un système de dépôts de chèques de garantie préalable à toute sortie d'un conteneur de la zone portuaire, afin de garantir d'une part le retour du conteneur et d'autre part le paiement des surestaries pouvant être facturées.
La pratique des chèques « de garantie » n'est en elle-même pas illicite.
Il ne peut être valablement soutenu que l'émission de chèques par la société RAVATE était dépourvue de cause puisque les chèques étaient émis à titre de dépôt de garantie.
Les chèques litigieux ne sont pas nuls, le chèque étant un instrument de paiement que le bénéficiaire peut faire encaisser même dans le cas où il lui a été remis à titre de garantie, sauf à lui à en restituer le montant si le paiement reçu était indu.
S'agissant des pressions qui auraient été exercées par la société MAERSK pour établir les chèques de garantie litigieux, elles ne ressortent pas des pièces produites. En effet la contrainte dénoncée par la société RAVATE ne saurait être établie par les seuls courriers qu'elle a elle-même adressés à la société MAERSK, étant observé que la société RAVATE pouvait choisir de dépoter les conteneurs ayant permis le transport dans la zone portuaire.
Par conséquent leur restitution ne sera pas ordonnée.
Les parties s'accordent pour indiquer que les chèques émis ont été encaissés à hauteur de 2000,00 €.
S'agissant des factures relatives à l'année 2014 les pièces de 12 à 26 et de 28 à 33, visées au bordereau de pièces n° 3, concernent la société RAVATE PROFESSIONNEL et non la société RAVATE DISTRIBUTION.
Il ressort des pièces 18 et 27 lesquelles concernent la société RAVATE DISTRIBUTION s'agissant de factures pour l'année 2014 que la créance de la société MAERSK est établie à hauteur de 532,00 €.
Il existe par conséquent un trop perçu à hauteur de 1.468,00 €.
Sur la non-conformité des factures :
Vu les dispositions de l'article 954 du code de procédure civile
S'agissant de la non-conformité invoquée des factures de la société MAERSK il n'y a pas lieu de statuer de ce chef qui ne constitue pas une prétention au sens de l'article sus visé.
Sur l'existence d'un préjudice lié aux demandes de chèques à titre de dépôt de garantie :
Il a été analysé ci-dessus que la pratique consistant à solliciter la remise d'un chèque à titre de dépôt de garantie n'était pas illicite et pouvait seulement donné lieu à répétition de l'indu.
Par conséquent il ne saurait en découler un préjudice autonome.
La société RAVATE sera déboutée de ce chef.
Sur les demandes accessoires :
La société RAVATE qui succombe principalement sera condamnée aux dépens de l'instance.
L'équité commande d'allouer à la société MAERSK une somme de 5.000,00 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
La cour statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort, en matière commerciale, par mise à disposition au greffe conformément à l'article 451 alinéa 2 du code de procédure civile,
INFIRME la décision entreprise dans les limites de la saisine de la cour ;
Et statuant à nouveau
CONDAMNE la société RAVATE DISTRIBUTION à payer à la société MAERSK FRANCE la somme de 6.972,00 € en paiement des surestaries relatifs à l'année 2013 ;
CONDAMNE la société MAERSK à verser à la société RAVATE une somme de 1.468,00 € en remboursement de l'indu ;
ORDONNE la compensation entre les créances et dettes réciproques ;
DEBOUTE la société RAVATE DISTRIBUTION de sa demande tendant à la restitution des chèques remis à la société MAERSK ;
DEBOUTE la société RAVATE DISTRIBUTION de sa demande de dommages et intérêts ;
CONDAMNE la société RAVATE DISTRIBUTION aux dépens de première instance et d'appel distraits conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile ;
CONDAMNE la société RAVATE DISTRIBUTION à verser à la société MAERSK une somme de 5.000,00 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Le présent arrêt a été signé par Madame Fabienne KARROUZ, Conseillère, et par Madame Nathalie BEBEAU, Greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LA GREFFIÈRE SIGNE LA PRÉSIDENTE