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CA VERSAILLES (16e ch.), 26 mars 2020

Nature : Décision
Titre : CA VERSAILLES (16e ch.), 26 mars 2020
Pays : France
Juridiction : Versailles (CA), 16e ch.
Demande : 18/07957
Date : 26/03/2020
Nature de la décision : Réformation
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 23/11/2018
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CERCLAB - DOCUMENT N° 8389

CA VERSAILLES (16e ch.), 26 mars 2020 : RG n° 18/07957 

Publication : Jurica

 

Extrait : « M et Mme X. demandent que soit considérée comme non écrite la clause intitulée « CONDITIONS FINANCIERES » figurant aux conditions générales de l'offre de prêt qui stipule que « les intérêts seront calculés sur le montant du capital restant dû au taux d'intérêts indiqué ci-dessus sur la base d'une année bancaire de 360 jours d'un semestre de 180 jours, d'un trimestre de 90 jours, et d'un mois de 30 jours ».

D'une part, le tribunal a justement rappelé que la recommandation n° 0502 du 22 septembre 2005 de la commission des clauses abusives, dont les époux X. se revendiquent, ne concernait que les conventions de compte de dépôt et modalités de calcul journalier des agios en cas de découvert en compte, et ne peut donc être étendue aux crédits immobiliers remboursables par échéances mensuelles fixes.

D'autre part, la clause critiquée dite du douzième mensuel se borne à exposer le calcul théorique de l'amortissement du prêt, de manière uniforme sur toute sa durée, mais elle n'implique pas par elle-même que l'amortissement ait été conçu sur la base de l'année dite lombarde.

Elle ne peut donc être déclarée clause abusive en tant que telle, la sanction étant recherchée soit au titre du caractère erroné du TEG dans l'offre de prêt soit au stade de l'exécution du prêt pour le cas où après déblocage des fonds, le calcul des intérêts nominaux aurait été fait au détriment des emprunteurs, sur une base illicite. »

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE VERSAILLES

SEIZIÈME CHAMBRE

ARRÊT DU 26 MARS 2020

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 18/07957. N° Portalis DBV3-V-B7C-SZLB. Code nac : 53B. CONTRADICTOIRE. Décision déférée à la cour : Jugement rendu(e) le 25 octobre 2018 par le Tribunal de Grande Instance de VERSAILLES : R.G. n° 16/04620.

LE VINGT SIX MARS DEUX MILLE VINGT, La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

 

APPELANTS :

Madame X.

née le [date] à [ville], de nationalité Française, [adresse], Représentant : Maître Fiona B. de la SELARL BFB Avocats, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : G0169 - Représentant : Maître Mandine B., Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 689

Monsieur Y.

né le [date] à [ville], de nationalité Française, [adresse], Représentant : Maître Fiona B. de la SELARL BFB Avocats, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : G0169 - Représentant : Maître Mandine B., Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 689

 

INTIMÉE :

La BANQUE POPULAIRE VAL DE FRANCE

Société Anonyme coopérative de Banque Populaire à capital variable, dont le siège social est [...], immatriculée au Registre du Commerce de VERSAILLES sous le n° XXX, agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège. N° SIRET : XXX, [...], Représentant : Maître Thierry P. de l'AARPI B.P. ASSOCIES, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 710 - N° du dossier 0027650

 

Composition de la cour : En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 19 février 2020 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Caroline DERYCKERE, Conseiller chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de : Madame Patricia GRASSO, Président, Madame Sylvie GUYON-NEROT, Président, Madame Caroline DERYCKERE, Conseiller

Greffier, lors des débats : Madame Nazia KHELLADI,

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

EXPOSÉ DU LITIGE :

Selon offre préalable émise le 12 juillet 2011, la société coopérative Banque populaire Val de France a consenti à M. Y. et Mme X. trois prêts immobiliers :

- un prêt de 30.000 euros à taux zéro d'une durée de 180 mois,

- un prêt « PTZ » de 106.000 euros à taux zéro d'une durée de 276 mois,

- un prêt de 227.000 euros remboursable en 300 mensualités de 1.217,07 euros, moyennant un taux d'intérêts nominal de 4,15 % l'an et un taux effectif global (TEG) annoncé de 4,50 % l'an et 0,375 % par mois.

Les emprunteurs ont consulté la société Humania consultants, qui dans un rapport du 17 juillet 2015, estime que le taux de période et le TEG annuel sont erronés et que la banque a indûment prélevé la somme de 114,18 euros d'intérêts.

Par courrier du 20 novembre 2015, le conseil des emprunteurs a mis en demeure la banque de rembourser la somme de 35.000 euros au titre des intérêts indûment perçus au taux conventionnel et de substituer le taux légal de 0,38 % au taux conventionnel.

Par courrier du 31 décembre 2015, la banque a répondu que l'offre de prêt était conforme aux dispositions légales et règlementaires.

Par exploit d'huissier du 27 mai 2016, M. Y. et Mme X. ont fait assigner la société Banque populaire Val de France devant le tribunal de grande instance de Versailles en déclaration de clause abusive d'une clause de calcul des intérêts sur la base d'une année lombarde, en nullité de la stipulation d'intérêts et substitution de l'intérêt légal à l'intérêt conventionnel.

Par jugement rendu le 25 octobre 2018, le tribunal de grande instance de Versailles a :

- déclaré recevables en la forme les demandes de M. Y. et Mme X. ;

- débouté M. Y. et Mme X. de l'intégralité de leurs demandes ;

- débouté la société Banque populaire Val de France de sa demande de dommages et intérêts ;

- condamné solidairement M. Y. et Mme X. aux dépens et à payer à la société Banque populaire Val de France la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- dit que Maître Thierry P. pourra recouvrer directement les dépens conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile ;

- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire.

[*]

Le 23 novembre 2018, M. Y. et Mme X. ont interjeté appel de la décision.

Aux termes de leurs dernières conclusions transmises au greffe le 25 janvier 2020 auxquelles il est expressément renvoyé, les appelants demandent à la cour de :

- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il les a déboutés de l'intégralité de leurs demandes, les a condamné solidairement aux entiers dépens et à verser à la société Banque Populaire Val de France la somme de 3000 Euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- constater les erreurs de calcul du taux de période du prêt litigieux ;

- constater les erreurs de calcul du TEG du prêt litigieux ;

- constater les erreurs de calcul du coût du crédit du prêt litigieux ;

- constater que les intérêts sont calculés sur la base d'une année bancaire ;

- déclarer abusive et par conséquent réputer non écrite la clause figurant en page 31 de l'offre de prêt intitulée « Conditions financières » prévoyant le calcul des intérêts sur la base d'une année bancaire de 360 jours, chaque mois étant compté pour 30 jours rapportés à 360 jours l'an ;

- prononcer la nullité de la clause de stipulation d'intérêts du prêt litigieux ;

- prononcer, la substitution du taux légal applicable au jour de la conclusion du contrat de prêt, soit 0,38 %, au taux d'intérêt conventionnel ;

- condamner la société Banque Populaire Val de France à leur payer la somme de 38.000,00 euros correspondant aux intérêts indûment versés au titre du prêt depuis sa conclusion jusqu'au jour de la présente, sauf à parfaire ;

- enjoindre la société Banque Populaire Val de France sous astreinte de 200 euros par jour de retard à compter du 8ème jour suivant la signification de la décision à intervenir, de produire un avenant accompagné d'un nouveau tableau d'amortissement, prenant en considération cette substitution du taux d'intérêt légal soit 0,38 %, au taux conventionnel ;

À titre infiniment subsidiaire,

- prononcer la déchéance des intérêts conventionnels du prêt litigieux à hauteur du taux d'intérêt légal applicable au jour de la conclusion du contrat de prêt, soit 0,38 % ;

- condamner la société Banque Populaire Val de France à leur payer la somme de 38.000,00 euros correspondant à la différence entre le montant des intérêts versés en application du taux conventionnel depuis la conclusion du contrat et le montant des intérêts au taux légal applicable au jour de la conclusion du contrat de prêt, soit 0,38%, jusqu'au jour de la présente, sauf à parfaire ;

- enjoindre, sous astreinte de 200,00 euros par jour de retard à compter du 8ème jour suivant la signification du jugement à intervenir la Banque Populaire Val de France de produire un avenant accompagné d'un nouveau tableau d'amortissement prenant en compte cette déchéance du droit aux intérêts et l'application du taux de 0,38 % ;

En tout état de cause,

- débouter la société Banque Populaire Val de France de l'ensemble de ses demandes fins et prétentions ;

- condamner la société Banque Populaire Val de France à leur payer la somme de 15.000,00 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi du fait de son manquement à son obligation d'information, de loyauté et d'honnêteté ;

- condamner la société Banque Populaire Val de France à leur payer la somme de 5.000,00 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner la société Banque Populaire Val de France aux entiers dépens, en application de l'article 699 du code de procédure civile.

Ils font valoir que la sanction d'un TEG erroné est la nullité de la clause de stipulation des intérêts conventionnels ; que le rapport de la société Humania consultants est opposable à la banque en ce qu'il est contradictoire ; que le calcul du taux de période et par conséquent du TEG, est erroné ; que la banque a dérogé au principe d'égalité prescrit par l'alinéa 2 de l'article R. 313-1 du code de la consommation en ce qu'elle a retenu un taux de période de 0,375 % ; qu'aucun texte ne permet à la banque d'afficher un taux de période arrondi ; qu'aucun texte ne permet aux établissements bancaires de calculer les intérêts sur la base d'un mois normalisé ; que le calcul sur la base de 360 jours entraîne la modification des échéances, un décalage sur le tableau d'amortissement ainsi qu'une modification du calcul du TEG, et que l'utilisation d'une base de calcul de 360 jours est sanctionnée sans qu'un impact de la première décimale ne soit exigé ; que les frais de notaire se sont élevés à 1.135,32 euros et devaient être inclus dans l'assiette du TEG ; que la sanction de ces erreurs est la nullité de la clause de stipulation d'intérêts conventionnels et la substitution du taux légal au taux conventionnel ou la déchéance du droit aux intérêts ;

[*]

Par dernières conclusions transmises au greffe le 17 février 2020 auxquelles il est expressément renvoyé, la Banque Populaire Val de France demande à la cour de :

- confirmer le jugement entrepris ;

- constater que M. Y. et Mme X. ne démontrent pas l'inexactitude du TEG figurant dans le contrat de prêt du 26 juillet 2011 ni ne justifient d'aucun préjudice ;

- constater que M. Y. et Mme X. ne précisent nullement le TEG qui serait selon eux appliqué par la banque ;

- que leur indemnisation ne pourrait être que des intérêts trop perçus en tenant compte de cette différence de TEG ; qu'à défaut de cette démonstration ils doivent être déboutés de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions ;

- débouter M. Y. et Mme X. de leur demande d'application du taux légal en vigueur en 2011, la nature même du taux légal étant d'être un taux révisable fixé par décret ;

- débouter M. Y. et Mme X. de leur demande d'établissement d'un nouveau tableau d'amortissement tenant compte du taux légal applicable au jour de la conclusion des prêts litigieux ;

- débouter M. Y. et Mme X. de leur demande de dommages et intérêts totalement injustifiée tant dans son principe que dans son quantum ;

- condamner M. Y. et Mme X. au paiement de la somme de 3.000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive et injustifiée, outre la somme de 3.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner M. Y. et Mme X. aux entiers dépens qui seront recouvrés par Maître Thierry P., avocat, et ce conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

Au soutien de sa position, la banque fait valoir que la demande en nullité de la stipulation d'intérêts conventionnels est irrecevable dès lors que la seule sanction applicable à un éventuel manquement du prêteur au titre des taux mentionnés dans l'offre de prêt en matière immobilière, est la déchéance du droit aux intérêts dans la proportion fixée par le juge ; que les intérêts ont été calculés sur un mois normalisé, ce qui est parfaitement prévu par la loi en cas de prêts immobiliers ; que dans cette hypothèse, le rapport 30/360 étant égal au rapport 30,41666/365, il n'affecte pas le montant des intérêts mensuels ; que les emprunteurs ne rapportent d'ailleurs pas la preuve d'une erreur dans le calcul des intérêts conventionnels ni d'un calcul qui aurait été fait sur la base d'une année de 360 jours ; que les emprunteurs ne rapportent non plus pas la preuve du préjudice qu'ils auraient subi en raison d'une erreur ; que les frais notarié du prêt litigieux ont été estimés à 3.536,90 euros alors que les emprunteurs n'ont réglé que 1.135,32 euros ce qui leur a nécessairement été plus favorable dans l'affichage du TEG ; qu'enfin, le rapport de la société Humania consultants lui est inopposable au motif qu'il n'est pas contradictoire et qu'en tout état de cause, il ne présente aucune valeur probante puisqu'il retient une base de calcul erronée à savoir un capital disponible de 224.036,09 euros alors que le capital prêté est de 227.000 euros. Elle insiste sur le fait que cette procédure engagée dans de telle conditions est abusive et injustifiée.

[*]

La clôture de l'instruction a été prononcée le 18 février 2020.

L'audience de plaidoirie a été fixée au 19 février 2020 et le prononcé de l'arrêt au 26 mars 2020 par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

 

MOTIFS (justification de la décision)                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIFS DE LA DÉCISION :

A titre liminaire la cour rappelle qu'en application des dispositions de l'article 954 du code de procédure civile, elle ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et que les « dire et juger » et les « constater » ne sont pas des prétentions, mais des rappels des moyens invoqués à l'appui des demandes, ne conférant pas - hormis les cas prévus par la loi - de droit à la partie qui les requiert, de sorte qu'il n'y a pas lieu de statuer sur ces points.

Il doit être observé au préalable pour fixer le cadre juridique de la discussion, que sur les trois prêts souscrits par M et Mme X. pour financer leur opération immobilière, deux ont été consenti à taux zéro suivant les modalités et conditions définies par l'article 224 quater V du code général des impôts et L 31-10-1 et suivants du code de la construction et de l'habitation, le troisième sous forme d'un crédit immobilier standard soumis expressément aux articles L. 312-1 et suivants du code de la consommation, d'un montant de 227.000 € , le coût total du crédit ayant été estimé à 376.733,66 €. Ils ne contestent QUE le mode de calcul du TEG mentionné dans l'OFFRE de prêt émise le 12 juillet 2011, la date d'acceptation au vu des dossiers des parties étant ignorée.

 

Sur le caractère abusif de la clause de stipulation d'intérêts :

M et Mme X. demandent que soit considérée comme non écrite la clause intitulée « CONDITIONS FINANCIERES » figurant aux conditions générales de l'offre de prêt qui stipule que « les intérêts seront calculés sur le montant du capital restant dû au taux d'intérêts indiqué ci-dessus sur la base d'une année bancaire de 360 jours d'un semestre de 180 jours, d'un trimestre de 90 jours, et d'un mois de 30 jours ».

D'une part, le tribunal a justement rappelé que la recommandation n° 0502 du 22 septembre 2005 de la commission des clauses abusives, dont les époux X. se revendiquent, ne concernait que les conventions de compte de dépôt et modalités de calcul journalier des agios en cas de découvert en compte, et ne peut donc être étendue aux crédits immobiliers remboursables par échéances mensuelles fixes.

D'autre part, la clause critiquée dite du douzième mensuel se borne à exposer le calcul théorique de l'amortissement du prêt, de manière uniforme sur toute sa durée, mais elle n'implique pas par elle-même que l'amortissement ait été conçu sur la base de l'année dite lombarde.

Elle ne peut donc être déclarée clause abusive en tant que telle, la sanction étant recherchée soit au titre du caractère erroné du TEG dans l'offre de prêt soit au stade de l'exécution du prêt pour le cas où après déblocage des fonds, le calcul des intérêts nominaux aurait été fait au détriment des emprunteurs, sur une base illicite.

 

Sur la demande de nullité de la stipulation des intérêts et substitution du taux légal au taux conventionnel :

S'agissant d'un prêt à la consommation ou d'un prêt immobilier consenti à un consommateur, la nullité de la clause d'intérêts figurant dans l'offre de prêt n'est pas légalement prévue à l'article L. 312-33 devenu L. 341-34 du code de la consommation qui sanctionne par la déchéance éventuelle du droit aux intérêts conventionnels les irrégularités de l'offre telles que la mention erronée du TEG dans l'offre de crédit en méconnaissance de l'article L. 312-8 devenu L. 313-25 du même code. (Civ. 1re, 6 juin 2018, n° 17-16300).

L'irrégularité de l'offre de prêt, pour les motifs invoqués par M et Mme X., qu'elle résulte de l'omission de certains frais impactant le coût du crédit, ou d'une non-conformité du taux calculé sur la base d'une année bancaire de 360 jours au lieu de le déterminer sur la base d'une année civile de 365 jours, en méconnaissance des prescriptions résultant des articles L. 313-1 et R. 313-1 et suivants (désormais L. 314-1 à L. 314-4 et R. 314-1 et suivants) du code de la consommation dans leur rédaction en vigueur à la date de souscription de l'offre litigieuse, auxquels renvoie l'article L. 312-8 ancien, ne peut dès lors faire l'objet le cas échéant que d'une action en déchéance du droit aux intérêts.

Par conséquent, la demande tendant à l'annulation de la stipulation d'intérêts et à la substitution du taux légal relative qui n'est pas applicable dans le cas d'espèce est bien irrecevable. Le jugement doit être infirmé sur ce point.

 

Sur la demande subsidiaire de déchéance du droit aux intérêts de la banque :

M et Mme X. prétendent que le TEG serait erroné au motif tout d'abord que les frais d'acte relatifs à l'octroi du prêt auraient été simplement estimés à un montant ne correspondant pas aux frais de prise d'hypothèque, et ensuite qu'il aurait été calculé sur une base ne correspondant pas à l'année civile.

Sur le premier de ces points, M et Mme X. se prévalent de la facture du notaire laissant apparaitre des frais de 1.135 €. La cour observe que ce relevé de factures du notaire porte sur l'opération globale dont on sait qu'elle a été financée au moyen de trois prêts, et que la somme de 1.135,32 € dont se prévalent les demandeurs correspond à la ligne « émoluments prêt 363.000 € ». Or sur le seul prêt dont le TEG est critiqué par les époux X., la banque a retenu une estimation au titre des seuls frais de prise d'hypothèque, de 1.636,91 €, ce qui leur était nécessairement plus favorable au regard de la seule finalité du TEG qui a une vocation comparative pour favoriser le libre jeu de la concurrence et le choix par les consommateurs de l'offre la plus attractive.

Sur le second point, les époux X. échouent à démontrer que le calcul du TEG reposerait sur une prise en compte erronée de l'équivalence des flux comme fondée sur l'année bancaire de 360 jours. En effet, comme l'a justement fait remarquer la banque, le rapport de la société Humania Consultant sur lequel ils ont fondé leur recours, fait partir tous ses calculs d'une somme de 224.036,09 € qui ne correspond ni au capital mis à disposition des emprunteurs, de 227.000 € ni du coût total du crédit accepté par les emprunteurs de 376.733,66 €. Dès lors la démonstration est dénuée de toute pertinence.

En outre, la banque se prévaut d'un calcul fait sur la base du mois normalisé. Contrairement à ce qu'affirment M et Mme X., en vertu des articles R. 313-1 désormais R. 314-3 du code de la consommation, pour les prêts destinés aux consommateurs ou non professionnels qu'ils soient mobilier ou immobiliers l'annexe visée prévoit expressément le recours au mois normalisé de 30,41666 jours permettant un calcul sur la base d'une année civile pour les prêts est remboursables mensuellement, que l'année soit bissextile ou pas.

Dans leurs conclusions (p. 13), M et Mme X., reprenant à leur compte les calculs ci-dessus critiquables du rapport Humania Consultant soutiennent que le taux de période exact aurait dû être de 0,37542 %. Or ce montant revient à un TEG annuel de 4,50504 %, et ils ne démontrent pas en quoi le TEG indiqué dans l'offre à 4,5000 % aurait faussé leur appréciation au moment d'accepter l'offre de la banque. Ils ne produisent d'ailleurs aucune offre concurrente plus favorable qu'ils auraient refusée à raison des mentions indiquées par la Banque populaire Val de France dans l'offre qu'ils critiquent.

Il n'y a donc pas matière à prononcer une déchéance même partielle du droit aux intérêts pour la banque.

 

Sur la demande de dommages et intérêts au titre du préjudice subi :

Si la critique était relative à une utilisation à leur détriment de l'année lombarde dans le calcul des intérêts mis réellement à leur charge lors de l'amortissement du prêt, ils seraient en droit de réclamer à titre de dommages et intérêts sanctionnant la mauvaise exécution de ses obligations contractuelles par la banque, la restitution d'un trop versé. Cependant, force est de constater qu'ils ne fournissent pas le tableau d'amortissement d'exécution du prêt qui aurait permis d'apprécier concrètement en fonction des dates de déblocage des fonds, et des périodes éventuelles de différé d'amortissement, l'exactitude des calculs mois par mois. En outre, ils ne fondent leur demande de dommages et intérêts que sur une responsabilité contractuelle de la banque pour manquement à son obligation d'information, de loyauté et d'honnêteté.

Dès lors qu'il n'a pas été démontré de faute de la banque dans le processus précontractuel constitué par l'élaboration de l'offre de prêt seul objet de la critique des emprunteurs, leur demande de dommages et intérêts ne peut prospérer.

C'est sur les motifs ci-dessus exposés que le rejet de l'intégralité des demandes de M et Mme X. par le tribunal sera confirmé.

 

Sur la demande de dommages et intérêts pour procédure abusive :

La Banque populaire Val de France appuie sa demande sur la mauvaise foi des demandeurs et appelants qui se seraient fondés sur des textes et recommandations inapplicables au cas d'espèce. Cependant l'erreur commise par un justiciable dans l'appréciation de ses droits ne suffit pas à elle seule à caractériser un abus dans l'exercice d'une action en justice. Le jugement devra être confirmé en ce qu'il a rejeté la demande de dommages et intérêts.

M et Mme X. supporteront les dépens d'appel et l'équité commande d'allouer à la partie intimée la somme de 2. 000 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS,

LA COUR

Statuant publiquement par décision contradictoire rendue en dernier ressort,

CONFIRME la décision entreprise sauf en ce qu'elle a déclaré recevable la demande tendant à l'annulation de la stipulation d'intérêts et à la substitution du taux légal,

Statuant à nouveau,

DÉCLARE irrecevable la demande formulée à titre principal tendant à l'annulation de la stipulation d'intérêts et à la substitution du taux légal,

CONDAMNE M. Y. et Mme X. à payer à la société Banque populaire Val de France la somme de 2.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE M. Y. et Mme X. aux dépens d'appel, qui pourront être recouvrés directement dans les conditions posées par l'article 699 alinéa 2 du code de procédure civile.

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Caroline DERYCKERE, Conseiller pour le Président empêché et par Madame KHELLADI, Greffier placé, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.