CA DIJON (2e ch. civ.), 18 juin 2020
CERCLAB - DOCUMENT N° 8454
CA DIJON (2e ch. civ.), 18 juin 2020 : RG n° 18/00881
Publication : Jurica
Extrait : « Il convient de constater que la compétence du tribunal de commerce de MÂCON n'est plus contestée en appel et que ne sont pas repris les arguments tirés de l'article L. 442-6 du code de commerce et du déséquilibre entre les droits et obligations des parties au contrat de prêt consenti par la SAS MINOTERIE FOREST à la SARL TEC. »
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE DIJON
DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE
ARRÊT DU 18 JUIN 2020
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 18/00881. N° Portalis DBVF-V-B7C-FBQC. Décision déférée à la Cour : jugement du 9 mars 2018, rendu par le tribunal de commerce de Mâcon – R.G. n° 2017J00007.
APPELANTS :
Monsieur X.
né le [date] à [ville], adresse, [...], [...]
SARL TEC
prise en la personne de ses représentants légaux en exercice, domiciliés de droit au dit siège social sis : [...], [...], représentés par Maître Cécile R. - L. membre de la SELARL ANDRE D. R. B., avocat au barreau de DIJON, vestiaire : 2
INTIMÉE :
SAS MINOTERIE FOREST
prise en la personne de son représentant légal en exercice, domicilié de droit au siège social sis : [...], [...], représentée par Maître Amandine C., avocat au barreau de CHALON-SUR-SAONE
PARTIE INTERVENANTE :
Maître Vincent DE C., es qualités de mandataire judiciaire de la SARL TEC
désigné par jugement du tribunal de commerce d'Aix en Provence du 2 septembre 2018, domicilié : [...], [...], [...], non représenté
COMPOSITION DE LA COUR : En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire à été appelée le 19 mars 2020 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Lucette BROUTECHOUX, Première Présidente, la cour étant alors composée lors du délibéré de : Lucette BROUTECHOUX, Première Présidente, Françoise VAUTRAIN, Présidente de chambre, Anne SEMELET-DENISSE, Conseiller.
GREFFIER À L'AUDIENCE : Sylvie RANGEARD, Greffier.
DÉBATS : l'affaire a été mise en délibéré au 18 juin 2020.
ARRÊT : réputé contradictoire.
PRONONCÉ : publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
SIGNÉ : par Françoise VAUTRAIN, Présidente de Chambre, et par Laurence SILURGUET, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
FAITS ET PROCÉDURE :
La SAS MINOTERIE FOREST exerce une activité de fabrication et de vente de farines alimentaires.
Monsieur X. est le gérant de la SARL TEC qui exerce une activité de boulangerie.
La SAS MINOTERIE FOREST a consenti un prêt de 50.000 euros le 15 septembre 2014 à la SARL TEC destiné à faire face à un besoin de fonds de roulement en contrepartie d'un engagement d'approvisionnement exclusif en farines et du nantissement du fonds de commerce.
Le gérant de la SARL TEC, Monsieur X., s'est porté caution personnelle et solidaire par acte du 15 septembre 2014.
Exposant que le paiement des échéances a été interrompu en janvier 2016 par la SARL TEC, et qu'elle avait vainement mis en demeure Monsieur X. le 23 novembre 2016 et la SARL TEC le 24 novembre 2016 de respecter leurs engagements, la SAS MINOTERIE FOREST leur a fait délivrer, par actes d'huissier des 19 janvier et 23 janvier 2017, une assignation à comparaître devant le tribunal de commerce de MÂCON.
Par ses dernières conclusions en première instance, la SAS MINOTERIE FOREST a demandé au tribunal de :
- Ordonner la disjonction entre les demandes de la SAS MINOTERIE FOREST fondées sur le droit commun de celles de la SARL TEC et de Monsieur X. fondées sur le droit spécial,
- Déclarer irrecevables les demandes de la SARL TEC et de Monsieur X. fondées sur le droit spécial,
En conséquence,
- Dire et juger y avoir lieu de statuer uniquement sur les demandes relevant du droit commun,
- Dire et juger l'acte de cautionnement de Monsieur X. valable,
- Débouter Monsieur X. et la SARL TEC de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions,
- Condamner solidairement Monsieur X. et la SARL TEC à payer à la SAS MINOTERIE FOREST la somme de 20.155,32 euros outre intérêts au taux de 6,1678 % à compter du 24 novembre 2016,
- Ordonner la capitalisation des intérêts sur le fondement de l'article 1343-2 nouveau du code civil,
- Condamner solidairement Monsieur X. et la SARL TEC à lui payer la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, et aux entiers dépens,
- Ordonner l'exécution provisoire.
La SAS MINOTERIE FOREST s'est opposée à l'exception d'incompétence du tribunal de commerce de MÂCON au profit du tribunal de commerce de MARSEILLE soulevée par Monsieur X. et la SARL TEC sur le fondement des articles L. 442-6 et D. 442-3 du code de commerce, s'agissant à son sens de manœuvres dilatoires.
Elle a rappelé que l'attribution de juridiction au tribunal de commerce de MÂCON était prévue expressément au contrat.
Elle a donc demandé au tribunal d'ordonner la disjonction des demandes de ses adversaires soulevant le déséquilibre du contrat et relevant du droit spécial, et de ne statuer que sur les siennes fondées sur le droit commun, en application de l'article 1134 du code civil. Elle a soutenu qu'en conséquence le tribunal devait débouter la société TEC et Monsieur X. de leur demande de dommages intérêts exorbitante évaluée sans même la justifier à 100.000 euros.
Elle a contesté l'argument d'un prétendu déséquilibre financier dans les relations entre les parties, notamment en raison du taux de 6 % pratiqué et de la clause d'exclusivité d'approvisionnement de farine, en faisant valoir qu'elle avait consenti un prêt d'un montant non négligeable à la société TEC qui était en difficulté financière, et qu'il n'était pas excessif de sa part de s'assurer des garanties et un approvisionnement exclusif de farine par celle-ci auprès d'elle ; qu'il s'agissait d'une condition essentielle du contrat que n'ignoraient ni la société TEC ni son gérant ; que la clause d'approvisionnement exclusif ne constituait donc pas une clause abusive et qu'elle avait d'ailleurs été respectée.
La SAS MINOTERIE FOREST a contesté également l'argumentation des défendeurs soulevant la nullité du cautionnement souscrit par Monsieur X. du fait d'une absence de conformité parfaite des termes manuscrits de ce cautionnement aux prescriptions légales. Elle a estimé que le cautionnement de Monsieur X. était parfaitement valable, l'essentiel des mentions nécessaires y figurant même s'il ne répondait pas exactement aux exigences des dispositions de l'article L. 341-2 du code de la consommation ; qu'il constituait en tout état de cause un commencement de preuve par écrit et était valable dans la mesure où l'acte rédigé de la main de Monsieur X. était corroboré par sa qualité de gérant de la société qu'il cautionnait, ce qui démontrait qu'il n'ignorait nullement la portée de son engagement en qualité de caution. Elle a donc conclu au rejet de la demande de dommages intérêts présentée.
Monsieur X. et la SARL TEC ont demandé au tribunal de :
- Se déclarer incompétent au profit du tribunal de commerce de MARSEILLE,
- Subsidiairement, condamner la société demanderesse au paiement de la somme de 100.000 euros à titre de dommages et intérêts sur le fondement de l'article L. 442-6 du code de commerce,
- Dire et juger nul le cautionnement donné par Monsieur X.,
- Condamner la SAS MINOTERIE FOREST à payer la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.
Ils ont soulevé la nullité de la clause contractuelle d'exclusivité créant clairement un déséquilibre significatif entre les parties au regard de l'article L. 442-6 du code de commerce puisque la société avait conclu un crédit à hauteur de 6 % doublement garanti et un engagement d'exclusivité. Ils ont indiqué que le contrat de prêt ne fixait pas les tarifs mais seulement la quantité de farine ; que le prix des farines n'était même pas prévu, et que les quantités allaient bien au-delà des besoins de la SARL TEC.
Ils ont soulevé l'incompétence du tribunal de commerce de MÂCON au profit du tribunal de commerce de MARSEILLE, exclusivement compétent pour statuer en application de l'article D. 442-3 du code de commerce et sur leur demande d'indemnisation de préjudice de 100.000 euros, mais ont demandé la condamnation de la SAS MINOTERIE FOREST à leur verser cette somme si le tribunal refusait de renvoyer le dossier devant la juridiction compétente de droit.
Ils ont enfin conclu à titre subsidiaire à la nullité du cautionnement de Monsieur X. au regard de l'article L. 341-2 du code de la consommation pour défaut de consentement manuscrit dans les termes précis imposés par la loi.
Par jugement du 9 mars 2018, le tribunal de commerce de MÂCON s'est déclaré compétent pour juger de cette affaire et a :
- Dit que l'acte de cautionnement du 15 septembre 2014 signé par le gérant de la société emprunteuse était valide,
- Dit que le contrat de prêt et la caution qui s'y rattache respectent la légalité,
- Condamné solidairement la SARL TEC et Monsieur X. à payer la somme de 20.155,32 euros à la SAS MINOTERIE FOREST et intérêts de retard au taux légal à compter du 24 novembre 2016,
- Condamné solidairement la SARL TEC et Monsieur X. à payer à la SAS MINOTERIE FOREST la somme de 700 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- Rejeté toutes autres demandes, fins et conclusions contraires,
- Condamné solidairement la SARL TEC et Monsieur X. Olivier aux dépens dont frais de greffe liquidés à la somme de 88,94 euros.
Le tribunal a estimé que le cautionnement de Monsieur X. était un cautionnement consenti entre professionnels dans le cadre d'un mandat spécial.
Il a également estimé que les conditions du contrat de prêt, le taux d'intérêts, le nantissement et la caution ne constituaient pas un déséquilibre financier tel qu'il pourrait entacher sa légalité ; que le consentement du professionnel gérant ne pouvait être remis en cause, que les dispositions du code de la consommation n'étaient pas applicables et que les arguments développés ne modifiaient pas le fond de l'affaire.
Il a constaté que le contrat de prêt lui attribuait clairement compétence pour trancher le litige.
* * *
Monsieur X. et la SARL TEC ont interjeté appel du jugement par déclaration du 27 juin 2018.
Par jugement du 20 septembre 2018, le tribunal de commerce d'AIX EN PROVENCE a prononcé l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire à l'égard de la SARL TEC et désigné Maître Vincent de C. en qualité de mandataire judiciaire.
Par acte d'huissier du 16 septembre 2019, la SAS MINOTERIE FOREST a fait signifier à Maître Vincent de C. le jugement, la déclaration d'appel, les conclusions de Monsieur X. et les conclusions d'intimée et d'appel incident de la SAS MINOTERIE FOREST et une assignation en intervention forcée.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 7 janvier 2020 et l'affaire a été appelée à l'audience du 19 mars 2020 à laquelle elle a été retenue.
PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :
Par leurs dernières conclusions transmises par voie électronique le 25 septembre 2018, Monsieur X. et la SARL TEC demandent à la cour de :
« Recevant les concluants en leur appel et réformant le jugement entrepris,
- Débouter la SAS MINOTERIE FOREST de toutes ses demandes, fins et prétentions à l'égard de la société TEC et de Monsieur X. en l'absence de déchéance du terme ;
En tout état de cause,
- Dire et juger que le cautionnement dont se prévaut la société MINOTERIE FOREST est nul ;
En conséquence,
- Débouter la société MINOTERIE FOREST de toutes ses demandes, fins et conclusions à l'encontre de Monsieur X.,
- Condamner la société MINOTERIE FOREST aux dépens, outre une somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile. »
Ils soutiennent tout d'abord que la société MINOTERIE FOREST n'a jamais produit aux débats de déchéance du terme du contrat de prêt accordé à la société TEC ; que la preuve de la résiliation du contrat de prêt n'est donc pas rapportée.
Il soutiennent encore que la mention manuscrite du cautionnement de Monsieur X. ne respecte pas les dispositions de l'article L. 341-2 du code de la consommation dans sa rédaction applicable avant le 1er juillet 2016, qu'y fait défaut également la mention de l'engagement de la caution sur ses biens et revenus ; qu'il ne s'agit pas de bonne ou mauvaise foi mais de respecter la loi qui en l'espèce ne l'a pas été, alors que ce texte s'applique aux cautionnements souscrits par acte sous seing privé au profit des créanciers professionnels par une personne physique ; que les juges du fond n'ont jamais exclu les dirigeants des sociétés du jeu de ces dispositions, ce qui est d'autant plus important que la notion de créancier professionnel fait l'objet d'une interprétation très large par la jurisprudence, un créancier étant professionnel dès lors que la créance est née dans l'exercice d'une activité professionnelle, ce qui est le cas pour la MINOTERIE FOREST.
[*]
Par ses dernières conclusions transmises par voie électronique le 22 août 2019, la SAS MINOTERIE FOREST demande à la cour de :
- Débouter la SARL TEC et Monsieur X. de l'ensemble de leurs prétentions, fins et conclusions,
En conséquence,
- Confirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce de MÂCON le 9 mars 2018 dans l'ensemble de ses dispositions,
Et par là même :
- Condamner solidairement la SARL TEC et Monsieur X. à payer à la SAS MINOTERIE FOREST la somme de 20.155,32 euros, outre intérêts de retard au taux légal à compter du 24 novembre 2016,
- Dire et juger que la somme de 20.155,32 euros en principal et les intérêts de retards au taux légal à compter du 24 novembre 2016 seront admis au passif de la SARL TEC dans le cadre de la procédure collective dont elle fait l'objet,
- Condamner solidairement la SARL TEC et Monsieur X. à payer à la SAS MINOTERIE FOREST la somme de 700 euros au titre des frais irrépétibles de première instance,
- Condamner solidairement la SARL TEC et Monsieur X. aux dépens de première instance
Et de plus :
- Condamner solidairement la SARL TEC et Monsieur X. à payer à la SAS MINOTERIE FOREST la somme de 1.000 euros au titre des frais irrépétibles en cause d'appel,
- Condamner solidairement la SARL TEC et Monsieur X. aux dépens en cause d'appel.
Elle soutient qu'elle n'a jamais entendu se prévaloir d'une déchéance du terme du prêt mais qu'elle réclame le règlement des échéances impayées du prêt de janvier à septembre 2016 ; qu'en tout état de cause, la déchéance du terme est intervenue de plein droit en application des conditions générales du contrat, ou après l'envoi des lettres de mise en demeure préalable les 23 novembre 2016 et 24 novembre 2016.
Elle maintient que la société la SARL TEC n'est pas recevable et fondée à se prévaloir de la nullité du cautionnement de Monsieur X. et demeurerait tenue au paiement de la somme réclamée quand bien même cette nullité serait prononcée.
Elle maintient également que l'ensemble des mentions essentielles relatives au cautionnement y figurent même s'il ne répond pas exactement aux exigences des dispositions de l'article L. 341-2 du code de la consommation ; qu'il constitue en tout état de cause un commencement de preuve par écrit et est valable dans la mesure où l'acte rédigé de la main de Monsieur X. est corroboré par sa qualité de gérant de la société qu'il cautionne, ce qui démontre qu'il n'ignorait nullement la portée de son engagement en qualité de caution ; qu'il s'agit d'un cautionnement commercial et qu'il n'y a pas lieu d'appliquer les dispositions du code de la consommation.
[*]
Maître Vincent C. es qualité de mandataire judiciaire de la SARL TEC n'a pas comparu et n'a pas été représenté.
[*]
Par application de l'article 455 du code de procédure civile, la cour se réfère, pour un plus ample exposé des prétentions et des moyens des parties, à leurs dernières conclusions sus-visées.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
MOTIFS DE LA DÉCISION :
Il convient de constater que la compétence du tribunal de commerce de MÂCON n'est plus contestée en appel et que ne sont pas repris les arguments tirés de l'article L. 442-6 du code de commerce et du déséquilibre entre les droits et obligations des parties au contrat de prêt consenti par la SAS MINOTERIE FOREST à la SARL TEC.
Le jugement sera en conséquence confirmé de ce chef.
Il convient également de relever que la SAS MINOTERIE FOREST a régulièrement assigné en intervention forcée en appel le mandataire judiciaire de la SARL TEC placée en redressement judiciaire.
En application de l'article 1315 du code civil dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016, applicable à la date du contrat de prêt en cause : « celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver. Réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation. ».
Pour démontrer l'existence de sa créance, la SAS MINOTERIE FOREST produit le contrat de prêt souscrit le 15 septembre 2014, l'acte de cautionnement du même jour de Monsieur X., le tableau d'amortissement du prêt par 24 mensualités de 2.239,48 euros, un relevé de compte prêt adressé à la SARL TEC le 28 septembre 2016 faisant état d'échéances impayées du 20 janvier 2016 au 20 septembre 2016 pour un montant de 20 155,32 euros, et enfin les lettres de mise en demeure par recommandé avec accusé de réception adressées le 23 novembre 2016 à Monsieur X. et le 24 novembre 2016 à la SARL TEC pour ce même montant, outre des intérêts échus.
C'est la même somme qui est aujourd'hui réclamée par la SAS MINOTERIE FOREST, dont il résulte notamment qu'elle n'invoque pas une déchéance du terme et ne sollicite pas le paiement du capital restant dû après ces échéances impayées.
La créance a été déclarée le 3 octobre 2018 à Maître Vincent de C. par courrier recommandé avec accusé de réception.
La SARL TEC ou son mandataire et Monsieur X. en revanche n'apportent aucun justificatif du paiement de cette somme.
Il convient de constater que la SARL TEC, débitrice principale placée en redressement judiciaire, ne conteste pas le montant de la créance principale, ni le taux d'intérêts.
La SARL MINOTERIE FOREST ne peut demander une condamnation de la SARL TEC à lui payer cette somme eu égard au placement en redressement judiciaire de celle-ci. Le jugement sera infirmé de ce chef. En revanche, en application des articles L. 622-21 et suivants du code civil et eu égard à la déclaration de créance, celle-ci peut être fixée au passif de la SARL TEC à la somme de 20.155,32 euros représentant les échéances impayées de janvier 2016 à septembre 2016 du prêt du 15 septembre 2014, outre intérêts au taux légal à compter du 24 novembre 2016.
Le débat se concentre donc essentiellement désormais sur la validité du cautionnement de Monsieur X.
L'article L. 341-2 du code de la consommation applicable jusqu'au 1er juillet 2016 prévoyait que : « toute personne physique qui s'engage par acte sous seing privé en qualité de caution envers un créancier professionnel doit, à peine de nullité de son engagement, faire précéder sa signature de la mention manuscrite suivante, et uniquement de celle-ci : « en me portant caution de X...., dans la limite de la somme de ... couvrant le paiement du principal, des intérêts et, le cas échéant, des pénalités ou intérêts de retard et pour la durée de .., je m'engage à rembourser au prêteur les sommes dues sur mes revenus et mes biens si X... n'y satisfait pas lui-même. ».
Ces dispositions s'appliquent au cautionnement fourni par un dirigeant social pour garantir la dette de sa société.
En l'espèce, Monsieur X. a signé l'acte de cautionnement en y apposant la mention manuscrite suivante : « bon pour cautionnement solidaire et indivisible de la SARL TEC pour la somme de cinquante mille trois en soixante euros (50.360 euros) ainsi que toutes les sommes dues ou à devoir à la SAS MINOTERIE FOREST en principal, plus les intérêts, commissions, frais et accessoires qui pourraient en résulter pour une durée illimitée, selon les énonciations ci-dessus relatées au présent acte.» (...) « en renonçant au bénéfice de discussion défini à l'article 2298 du code civil et en m'obligeant solidairement avec la SARL TEC, je m'engage à rembourser la SAS MINOTERIE FOREST sans pouvoir exiger qu'il poursuive préalablement la SARL TEC. ».
Ainsi, la formulation employée par la caution diffère de manière assez sensible de celle exigée par les dispositions rappelées du code de la consommation. Alors que le texte exige la mention d'un montant « couvrant le paiement du principal, des intérêts et, le cas échéant, des pénalités ou intérêts de retard », c'est-à-dire d'un montant maximal incluant, outre le principal, tous les intérêts et pénalités, Monsieur X. s'est engagé pour un montant chiffré ne couvrant que le principal. De plus, son engagement mentionne des commissions, frais et accessoires, qui différent de pénalités.
La violation du formalisme des articles L. 341-2 et L. 341-3 du code de la consommation, qui a pour finalité la protection des intérêts de la caution, est sanctionnée par la nullité. Le cautionnement souscrit par Monsieur X. ne répond certes pas aux énonciations précitées, mais il pourrait constituer en tout état de cause un commencement de preuve par écrit pouvant être corroboré par d'autres éléments extérieurs démontrant qu'il a eu parfaitement conscience de l'étendue et de la portée de son engagement et que l'absence de conformité aux mentions légales n'affectait pas sa compréhension de la portée de son engagement.
Ainsi que le soutient la SAS MINOTERIE FOREST, le cautionnement a été conclu par Monsieur X. en qualité de gérant de la société cautionnée et il est signataire de l'acte de prêt qui a été garanti par son cautionnement. Néanmoins, la conscience de la portée de son engagement ne peut être recherchée dans un acte extérieur au cautionnement lui-même. Peu importe que Monsieur X. soit signataire du contrat de prêt, puisqu'il l'a signé en qualité de représentant de la SARL TEC et pas en son nom personnel, et que l'acte de prêt ne comporte aucune mention quant à l'étendue de l'engagement de caution.
Dans ces conditions, il ne peut être considéré que Monsieur X. a eu suffisamment conscience de la portée de son engagement. Son cautionnement doit être déclaré nul, et le jugement doit être infirmé sur ce point.
Il n'apparaît pas inéquitable de laisser à la charge de chacune des parties ses frais irrépétibles et non compris dans les dépens, et elles seront déboutées de leurs demandes formulées sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Il convient de faire masse des dépens de première instance et d'appel, qui seront supportés pour moitié par la SAS MINOTERIE FOREST et la société TEC.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
La cour,
Confirme le jugement du tribunal de commerce de Mâcon en ce qu'il s'est déclaré compétent pour statuer,
L'infirme pour le surplus,
Statuant à nouveau et le complétant,
Fixe la créance de la SAS MINOTERIE FOREST au passif de la SARL TEC au montant de 20.155,32 euros représentant les échéances impayées de janvier 2016 à septembre 2016 du prêt du 15 septembre 2014, outre intérêts au taux légal à compter du 24 novembre 2016,
Déclare nul et de nul effet l'engagement de caution solidaire souscrit par Monsieur X. en garantie du prêt du 15 septembre 2014,
Déboute en conséquence la SAS MINOTERIE FOREST de l'ensemble de ses prétentions à l'encontre de Monsieur X.,
Fait masse des dépens de première instance et d'appel qui seront supportés par moitié par la SAS MINOTERIE FOREST et par la société TEC,
Vu les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
Déboute les parties de leurs demandes respectives au titre de leurs frais irrépétibles.
Le Greffier, Le Président,