CA DOUAI (ch. 1 sect. 1), 24 septembre 2020
CERCLAB - DOCUMENT N° 8579
CA DOUAI (ch. 1 sect. 1), 24 septembre 2020 : RG n° 19/00875
Publication : Jurica
Extrait (motifs) : « Est abusive en ce qu'elle crée, au détriment de l'élève, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties, la stipulation contractuelle qui fait du prix total de la scolarité un forfait intégralement acquis à l'école dès la signature du contrat et qui, sans réserver le cas d'une résiliation pour un motif légitime et impérieux, ne permet pas une dispense partielle du règlement de la formation. […]
En l'espèce, les conditions générales d'inscription au sein du groupe EDHEC prévoient que pendant sa première année, l'étudiant peut librement quitter au cours de l'année scolaire la formation à laquelle il s'est inscrit, et qu'il devra dans cette hypothèse s'acquitter au prorata du temps passé à l'école de ses frais de scolarité. Elles stipulent ensuite : « À partir de la deuxième année, toute année de formation commencée sera due. L'étudiant pourra donc quitter, libre de son choix, en cours d'année scolaire, la formation à laquelle il s'est inscrit mais il reste redevable de l'intégralité des frais de scolarité correspondant à l'année scolaire en cours. »
Cette stipulation contractuelle qui fait du prix total annuel de la scolarité un forfait intégralement acquis à l'école dès le début de la deuxième année sans réserver aucun cas de résiliation pour un cas de force majeure ou pour un motif légitime et impérieux permettant une dispense partielle du règlement de la formation crée au détriment de l'élève un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au sens de l'article L. 132-1 du code de la consommation. En conséquence, elle sera réputée non-écrite par la cour.
Or, il est établi par les courriels produits par M. X. qu'il a informé l'école de commerce le 1er décembre 2016 qu'il devait arrêter sa scolarité dans les plus brefs délais pour des raisons familiales. L'appelant a cessé sa formation à compter de cette date. Par ailleurs, il ressort de la mise en demeure de payer adressée le 15 mai 2017 par l'EDHEC Business School à M. X. que ce dernier a payé ses frais de scolarité jusqu'au mois de décembre 2016 inclus et que la demande en paiement concerne les frais de scolarité relatifs au mois de janvier à mai 2017, soit après que l'élève ait arrêté sa formation.
Dès lors que la clause contractuelle sur laquelle l'EDHEC Business School fonde sa demande en paiement est réputée non écrite, M. X. n'a aucune obligation contractuelle de payer ses frais de scolarité pour une période où il avait arrêté sa formation. »
Extrait (dispositif) : « [Est] Réputée non écrite comme étant abusive au sens de l'article L. 132-1 du code de la consommation la clause des conditions générales d'inscription au sein du groupe EDHEC suivante : « À partir de la deuxième année, toute année de formation commencée sera due. L'étudiant pourra donc quitter, libre de son choix, en cours d'année scolaire, la formation à laquelle il s'est inscrit mais il reste redevable de l'intégralité des frais de scolarité correspondant à l'année scolaire en cours. »
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE DOUAI
CHAMBRE 1 SECTION 1
ARRÊT DU 24 SEPTEMBRE 2020
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 19/00875. N° Portalis DBVT-V-B7D-SE4U. Jugement (R.G. n° 18/00545) rendu le 20 août 2018 par le tribunal d'instance de Roubaix.
APPELANT :
Monsieur X.
né le [date] à [ville], demeurant [adresse] (bénéficie d'une aide juridictionnelle totale numéro XX du [date] accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de Douai), représenté par Maître Matthieu D., avocat au barreau de Douai
INTIMÉE :
L'association EDHEC Business School
prise en la personne de son représentant légal, ayant son siège social, [adresse], [...], représentée par Maître Hélène C., avocat au barreau de Lille
PROCÉDURE SANS AUDIENCE : L'affaire a été retenue sans audience en application de l'article 8 de l'ordonnance 2020-304 du 25 mars 2020, en raison de l'état d'urgence sanitaire, en l'absence d'opposition des parties suite à l'avis de recours à la procédure sans audience, adressé le 6 mai 2020 et mise en délibéré au 24 septembre 2020.
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ : Marie-Hélène Masseron, président de chambre, Emmanuelle Boutié, conseiller, Marie-Laure Aldigé, conseiller
ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé par sa mise à disposition au greffe le 24 septembre 2020, les parties en ayant été préalablement avisées, signé par Marie-Hélène Masseron, président et par Delphine Verhaeghe greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 13 novembre 2019
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Le 24 août 2014, M. X. s'est inscrit à l'EDHEC Business School, école de commerce privée, pour suivre une formation de bachelor of business administration.
Par acte d'huissier de justice en date du 14 mai 2018, l'EDHEC Business School a fait assigner M. X. devant le tribunal d'instance de Roubaix aux fins de le voir condamner au paiement d'un impayé de frais de scolarité.
Par jugement réputé contradictoire en date du 20 août 2018, le tribunal d'instance de Roubaix a :
- condamné M. X. à payer à l'association EDHEC Business School la somme de 5.127,35 euros avec intérêts au taux légal à compter du 14 mai 2018,
- dit n'y avoir lieu d'ordonner l'exécution provisoire du présent jugement,
- condamné M. X. à verser à l'association EDHEC Business School une indemnité de 400 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné M. X. aux dépens.
M. X. a interjeté appel de ce jugement.
Aux termes de ses dernières conclusions notifiées par la voie électronique le 27 mars 2019, il demande à la cour, au visa des articles L. 111-1 et L. 132-1 du code de la consommation, d'infirmer la décision déférée en l'ensemble de ses dispositions et statuant à nouveau, de :
- déclarer abusive la stipulation contractuelle qui fait du prix total de la scolarité un forfait intégralement acquis à l'école dès la signature du contrat ;
- en écarter l'application ;
- en conséquence, infirmer le jugement déféré en l'ensemble de ses dispositions.
Aux termes de ses dernières conclusions notifiées par la voie électronique le 18 juin 2019, l'association EDHEC business school demande à la cour, au visa des articles 1103 et 1104 du code civil, de confirmer la décision déférée sauf en ce qu'elle a dit n'y avoir lieu d'ordonner l'exécution provisoire du jugement et en conséquence, d'ordonner l'exécution provisoire de la décision à intervenir.
Pour l'exposé des moyens des parties, il convient de se référer à leurs dernières écritures conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
MOTIVATION :
Selon l'article L. 132-1 du code de la consommation, sont abusives les clauses qui « ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du non-professionnel ou du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat ». Les clauses abusives sont réputées non écrites.
Est abusive en ce qu'elle crée, au détriment de l'élève, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties, la stipulation contractuelle qui fait du prix total de la scolarité un forfait intégralement acquis à l'école dès la signature du contrat et qui, sans réserver le cas d'une résiliation pour un motif légitime et impérieux, ne permet pas une dispense partielle du règlement de la formation.
Sur ce :
En l'espèce, les conditions générales d'inscription au sein du groupe EDHEC prévoient que pendant sa première année, l'étudiant peut librement quitter au cours de l'année scolaire la formation à laquelle il s'est inscrit, et qu'il devra dans cette hypothèse s'acquitter au prorata du temps passé à l'école de ses frais de scolarité. Elles stipulent ensuite : « À partir de la deuxième année, toute année de formation commencée sera due. L'étudiant pourra donc quitter, libre de son choix, en cours d'année scolaire, la formation à laquelle il s'est inscrit mais il reste redevable de l'intégralité des frais de scolarité correspondant à l'année scolaire en cours. »
Cette stipulation contractuelle qui fait du prix total annuel de la scolarité un forfait intégralement acquis à l'école dès le début de la deuxième année sans réserver aucun cas de résiliation pour un cas de force majeure ou pour un motif légitime et impérieux permettant une dispense partielle du règlement de la formation crée au détriment de l'élève un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au sens de l'article L. 132-1 du code de la consommation. En conséquence, elle sera réputée non-écrite par la cour.
Or, il est établi par les courriels produits par M. X. qu'il a informé l'école de commerce le 1er décembre 2016 qu'il devait arrêter sa scolarité dans les plus brefs délais pour des raisons familiales. L'appelant a cessé sa formation à compter de cette date. Par ailleurs, il ressort de la mise en demeure de payer adressée le 15 mai 2017 par l'EDHEC Business School à M. X. que ce dernier a payé ses frais de scolarité jusqu'au mois de décembre 2016 inclus et que la demande en paiement concerne les frais de scolarité relatifs au mois de janvier à mai 2017, soit après que l'élève ait arrêté sa formation.
Dès lors que la clause contractuelle sur laquelle l'EDHEC Business School fonde sa demande en paiement est réputée non écrite, M. X. n'a aucune obligation contractuelle de payer ses frais de scolarité pour une période où il avait arrêté sa formation.
En conséquence, il y a lieu d'infirmer le jugement déféré en l'ensemble de ses dispositions, et, statuant à nouveau, de débouter l'EDHEC Business School de sa demande en paiement.
Sur les dépens et les frais irrépétibles :
En application des articles 696 et 700 du code de procédure civile, la partie perdante est, sauf décision contraire motivée par l'équité ou la situation économique de la partie succombante, condamnée aux dépens, et à payer à l'autre partie la somme que le tribunal détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
Il y a lieu d'infirmer la décision déférée du chef des dépens et des frais irrépétibles.
L'EDHEC Business School, partie perdante, sera condamnée au paiement des entiers dépens du premier degré et d'appel.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
La cour,
Infirme le jugement déféré en l'ensemble de ses dispositions ;
Statuant à nouveau :
Réputée non écrite comme étant abusive au sens de l'article L. 132-1 du code de la consommation la clause des conditions générales d'inscription au sein du groupe EDHEC suivante : « À partir de la deuxième année, toute année de formation commencée sera due. L'étudiant pourra donc quitter, libre de son choix, en cours d'année scolaire, la formation à laquelle il s'est inscrit mais il reste redevable de l'intégralité des frais de scolarité correspondant à l'année scolaire en cours. » ;
Déboute l'association EDHEC Business School de sa demande en paiement formée à l'encontre de M. X. ;
Condamne l'association EDHEC Business School au paiement des entiers dépens du premier degré et d'appel.
Le greffier Le président,
Delphine Verhaeghe Marie-Hélène Masseron
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