CA RENNES (2e ch.), 2 octobre 2020
CERCLAB - DOCUMENT N° 8587
CA RENNES (2e ch.), 2 octobre 2020 : RG n° 17/01774 ; arrêt n° 475
Publication : Jurica
Extrait : « Contrairement à ce qu'a relevé le premier juge, aucune disposition légale ou réglementaire n'impose au professionnel recourant à la technique de commercialisation à distance de ses produits ou de ses prestations de reproduire dans le contrat remis au consommateur les dispositions de l'article L. 121-21-1 devenu L. 221-20 du code de la consommation.
L'information du consommateur sur les conditions, le délai et les modalités d'exercice du droit de rétractation n'incluent en outre nullement la nature et la substance de la sanction applicable en cas de non-respect par le professionnel de ce devoir d'information.
Au demeurant, cette information relative à la prolongation du délai de rétractation en cas de non-respect de l'obligation d'information relative à l'exercice du droit de rétractation n'est pas de celles prévues par le document d'informations type figurant à l'annexe à l'article R. 121-2 devenu R. 221-3 du code de la consommation.
Par ailleurs, les époux X. et le premier juge postulent que le bordereau de rétractation accompagnant le bon de commande ne serait pas conforme au formulaire type figurant à l'annexe à l'article R. 121-1 devenu R. 221-1 du code de la consommation, sans toutefois relever précisément quelles mentions seraient manquantes.
Pourtant, le bordereau figurant au pied du bon de commande invite bien le consommateur, comme le prévoit le formulaire type, à mentionner son nom, son adresse, la nature de la vente ou du service commandé, la date de la commande, puis à dater et signer le document.
D'autre part, il peut être détaché sans amputer la substance du bon de commande, et reproduit à son verso le dénomination sociale, l'adresse géographique ainsi que l'adresse électronique de la société Eco Environnement.
Il s'en évince que, conformément aux dispositions prévues au 2° de l'article L. 121-17 devenu L. 221-5 du code de la consommation, les informations relatives aux conditions, au délai et aux modalités d'exercice du droit de rétractation ont bien été délivrées, et la communication d'un bordereau conforme au formulaire type prévu par l'article R. 121-1 devenu R. 221-1 a bien été réalisée. »
2/ « Or, le bon de commande du 14 mai 2015 ne mentionne pas de délais d'exécution, la ligne du formulaire de commandes utilisé ayant été laissée en blanc. À cet égard, la mention des conditions générales de vente reproduite au dos du bon de commande, selon laquelle « le délai de livraison figurant au recto du présent contrat est donné à titre indicatif et ne peut dépasser une limite de 200 jours à compter de la prise d'effet du contrat » ne saurait pallier l'absence d'indication d'un délai de livraison du matériel et d'exécution des travaux d'installation exigée par le 3° de l'article L. 111-1 du code de la consommation.
La société Eco Environnement soutient que cette irrégularité ne serait sanctionnée que par une nullité relative que l'acquéreur aurait renoncé à invoquer en acceptant de signer l'attestation de fin de travaux caractérisant sa volonté de les recevoir.
Cependant, la confirmation d'une obligation entachée de nullité est subordonnée à la conclusion d'un acte révélant que son auteur a eu connaissance du vice affectant l'obligation et l'intention de le réparer, sauf exécution volontaire après l'époque à laquelle celle-ci pouvait être valablement confirmée. Or, en l'occurrence, aucun acte ne révèle qu'entre la conclusion et l'exécution du contrat, les époux X. ont eu connaissance de la violation du formalisme imposé par le code de la consommation, la seule reproduction des dispositions de ce code au verso du bon de commande énonçant les conditions générales de vente ne suffisant pas à démontrer que l'acquéreur avait pleine connaissance de cette réglementation et, de surcroît, que le contrat de vente la méconnaissait.
En outre, le certificat de livraison ne saurait davantage être regardé comme une exécution volontaire des obligations découlant du contrat de vente manifestant une volonté non équivoque de couvrir les irrégularités de ce document, alors qu'il comportait des ambiguïtés au regard des obligations du fournisseur découlant des énonciations du bon de commande relativement à la prise en charge des frais de raccordement au réseau public en vue de la revente de l'électricité produite à EDF qui n'a pas été réalisé, et que les acquéreurs se sont toujours plaints de la mauvaise exécution de la prestation de la société Eco Environnement ainsi que cela résulte de l'expertise extrajudiciaire de l'installation à laquelle ils ont fait procéder le 27 novembre 2015 pour constater divers désordres et défauts de conformité, du constat d'huissier réalisé le même jour aux mêmes fins, et du courrier de rétractation du 8 avril 2016. »
3/ « Il est à cet égard de principe que le prêteur commet une faute excluant le remboursement du capital emprunté lorsqu'il libère la totalité des fonds, alors qu'à la simple lecture du contrat principal, il aurait dû constater que sa validité était douteuse au regard des dispositions protectrices du code de la consommation relatives à la commercialisation hors établissement. […]
Au surplus, il est aussi de principe que le prêteur commet une faute excluant le remboursement du capital emprunté lorsqu'il libère la totalité des fonds, alors que l'attestation de livraison au vu de laquelle il se libère ne lui permet pas de s'assurer de l'exécution complète du contrat principal. »
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE RENNES
DEUXIÈME CHAMBRE
ARRÊT DU 2 OCTOBRE
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 17/01774. Arrêt n° 475. N° Portalis DBVL-V-B7B- NYUH.
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
Président : Monsieur Joël CHRISTIEN, Président de Chambre, rédacteur,
Assesseur : Monsieur Jean-François POTHIER, Conseiller,
Assesseur : Madame Marie-Odile GELOT-BARBIER, Conseillère,
GREFFIER : Monsieur Régis ZIEGLER, lors des débats et lors du prononcé
DÉBATS : A l'audience publique du 16 juin 2020
ARRÊT : Contradictoire, prononcé publiquement le 2 octobre 2020 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l'issue des débats
APPELANTE :
La SARL ECO ENVIRONNEMENT
dont le siège social est [adresse], [...], Représentée par Maître Christophe L. de la SCP L., Postulant, avocat au barreau de RENNES, Représentée par Maître Chantal A., Plaidant, avocat
INTIMÉS :
Monsieur X.
né le [date] à [ville], [...], Représenté par Maître Caroline A., avocat au barreau de VANNES, Représenté à compter du 23 septembre 2020 par Maître Nathalie F. de S., avocat au barreau de VANNES
Madame X. née Y.
née le [date] à [ville], [...], Représentée par Maître Caroline A., avocat au barreau de VANNES
La SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE
dont le siège social est [adresse], [...], Représentée par Maître Erwan L. de la SCP L., C., avocat au barreau de RENNES
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
EXPOSÉ DU LITIGE :
À la suite d'un démarchage à domicile, M. X. a, selon bon de commande du 14 mai 2015, commandé à la société Eco Environnement la fourniture et l'installation de panneaux photovoltaïques moyennant le prix de 19.900 euros TTC.
En vue de financer cette opération, la société Sygma Banque (la société Sygma) a, selon offre acceptée le même jour, consenti aux époux X. un prêt de 19.900 euros au taux de 5,76 % l'an, remboursable en 120 mensualités de 275,65 euros assurance emprunteur comprise, après un différé de remboursement de 12 mois.
Prétendant avoir usé de leur faculté de rétractation le 8 avril 2016, et soutenant que le bon de commande et son formulaire de rétractation étaient irréguliers, les époux X. ont, par acte du 19 mai 2016, fait assigner devant le tribunal d'instance de Vannes la société Eco Environnement et la société Laser Cofinoga, aux droits de la société Sygma, en constat de l'anéantissement des contrats de vente et de prêt pour rétractation ainsi que, subsidiairement, en annulation de ces contrats.
La société BNP Paribas Personal Finance (la BNP) est intervenue volontairement à la procédure en déclarant se trouver à présent aux droits de la société Laser Cofinoga.
Par jugement du 16 février 2017, le premier juge a :
- constaté que les époux X. se sont rétractés régulièrement et que le contrat principal a été mis à néant,
- condamné avec exécution provisoire la société Eco Environnement à payer aux époux X. la somme de 4.750 euros à titre de dommages-intérêts,
- constaté la fin de plein droit du contrat de prêt,
- débouté la BNP de sa demande en paiement formée contre les époux X.,
- condamné avec exécution provisoire la BNP à restituer aux époux X. la somme de 1.836 euros au titre des mensualités versées au cours de l'exécution du contrat de prêt anéanti,
- condamné solidairement avec exécution provisoire la BNP et la société Eco Environnement à payer aux époux X. une indemnité de 4.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné avec exécution provisoire la société Eco Environnement à payer à la BNP les sommes de 19.900 euros et de 7.802 euros,
- débouté la BNP de sa demande de restitution du capital emprunté,
- condamné la BNP à restituer la somme de 3.799,41 euros au titre des échéances versées durant l'exécution du contrat de prêt, avec intérêts au taux légal à compter du jugement,
- condamné avec exécution provisoire la société Eco Environnement à payer à la BNP une indemnité de 4.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné solidairement la BNP et la société Eco Environnement aux dépens.
[*]
La société Eco Environnement a relevé appel de cette décision le 16 février 2017, pour demander la cour de :
- à titre principal, débouter les époux X. de leur demande d'anéantissement du contrat de vente pour rétractation ou d'annulation de celui-ci,
- à titre subsidiaire, en cas d'anéantissement ou d'annulation du contrat, débouter la BNP de sa demande de restitution et de dommages-intérêts dirigée contre la société Eco Environnement,
- en tout état de cause, condamner tous succombants au paiement d'une indemnité de 3.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens d'appel.
[*]
Ayant formé appel incident, la BNP demande quant à elle à la cour de :
- en cas de rejet des demandes d'anéantissement pour rétractation ou d'annulation du contrat principal, condamner solidairement les époux X. au paiement d'une indemnité de 2.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens de première instance et d'appel,
- en cas de confirmation du jugement attaqué en ce qu'il a constaté la rétractation des acquéreurs, débouter les époux X. et la société Eco Environnement de leurs demandes dirigées contre la BNP,
- condamner in solidum les époux X. à restituer le capital prêté de 19.900 euros,
- condamner la BNP à restituer les échéances réglées en exécution du contrat anéanti,
- dire les créances réciproques des parties se compenseront,
- condamner la société Eco Environnement à garantir les époux X. du remboursement du prêt,
- condamner la société Eco Environnement au paiement de la somme de 7 802 euros au titre de la perte des intérêts du prêt,
- en cas de confirmation du jugement attaqué en ce qu'il a débouté la BNP de sa demande de restitution du capital prêté, condamner la société Eco Environnement au paiement des sommes de 19.900 euros et 7.802 euros.
- en tout état de cause, condamner tout succombant au paiement d'une indemnité de 2.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens de première instance et d'appel.
[*]
Les époux X. concluent quant à eux à titre principal à la confirmation du jugement attaqué ou, subsidiairement, à l'annulation des contrats de vente et de prêt, et, en tout état de cause, à la confirmation de la décision en ce qu'elle a rejeté la demande de la BNP en restitution du capital prêté et en ce qu'elle leur a alloué des dommages-intérêts d'un montant global de 4.750 euros ainsi qu'une indemnité de 4.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
Ils sollicitent en outre la condamnation solidaire de la BNP et de la société Eco Environnement au paiement d'une indemnité complémentaire de 2.000 euros au titre de leurs frais irrépétibles d'appel ainsi qu'aux entiers dépens, en ce compris les frais de constat d'huissier de 446,36 euros et d'expertise amiable de 360 euros.
[*]
Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure ainsi que des prétentions et moyens des parties, la cour se réfère aux énonciations de la décision attaquée ainsi qu'aux dernières conclusions déposées pour la société Eco Environnement le 5 septembre 2017, pour la BNP le 5 juillet 2017 et pour les époux X. le 17 juillet 2017, l'ordonnance de clôture ayant été rendue le 14 mai 2020.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
EXPOSÉ DES MOTIFS :
Sur la rétractation :
Aux termes des articles L. 121-17 § 2°, L. 121-18-1 et L.121-21 devenus L. 221-5 § 2°, L. 221-9, L. 221-18, L. 221-18-1 et L. 242-1 du code de la consommation, les ventes et fournitures de services conclues à l'occasion d'une commercialisation hors établissement doivent faire l'objet d'un contrat dont un exemplaire est remis au client, et notamment comporter, à peine de nullité, les conditions, le délai et les modalités d'exercice du droit de rétractation du consommateur, lorsque celui-ci existe, accompagné du formulaire type de rétractation pouvant être utilisé pour exercer ce droit.
Selon l'article R. 121-1 devenu R. 221-1 du code de la consommation et son annexe, ce formulaire de rétractation devant accompagner le contrat doit comporter en substance le nom, l'adresse géographique et, lorsqu'ils sont disponibles, le numéro de télécopieur et l'adresse électronique du professionnel, ainsi que l'invitation faite au consommateur de mentionner son nom, son adresse, la nature de la vente ou de la prestation de service commandée, la date de la commande ou de la réception, puis de dater et de signer le document.
Selon l'article R. 121-2 devenu R. 221-3 du code de la consommation et son annexe, ces informations relatives à l'exercice du droit de rétractation peuvent être fournies au moyen de l'avis type indiquant en substance au consommateur qu'il a le droit de se rétracter sans donner de motif, au moyen d'une déclaration dénuée d'ambiguïté ou en utilisant le formulaire de rétractation accompagnant le contrat, dans un délai de 14 jours courant, selon l'article L. 121-21 dans sa rédaction applicable à la cause, à compter du jour de la conclusion du contrat pour les contrats de prestation de services, ou à compter de la réception du bien pour les contrats de vente et les contrats de prestation de service incluant la livraison de biens.
Enfin, selon l'article L. 121-21-1 devenu L. 221-20 du code de la consommation, lorsque les informations relatives au droit de rétractation n'ont pas été fournies au consommateur dans les conditions prévues au 2° de l'article L. 121-17 devenu L. 221-5, le délai de rétractation est prolongé de douze mois à compter de l'expiration du délai de rétractation initial.
En l'occurrence, il est constant que les époux X. se sont rétractés par courrier du 8 avril 2016, en dehors de délai de 14 jours à compter de la commande du 14 mai 2015, ou même de la réception des panneaux photovoltaïques constatée par certificat de livraison du 3 juin 2015.
Ils font cependant valoir que le bon de commande ne comportait pas d'informations suffisantes sur l'exercice de cette faculté de rétractation à défaut de reproduction dans le bon de commande de l'article L. 121-21-1 prolongeant le délai en cas d'informations insuffisantes sur l'exercice de ce droit, et que le bordereau de rétractation n'était pas conforme au formulaire type imposé par l'annexe à l'article R. 121-1 devenu R. 221-1 du même code, de sorte que, comme l'a décidé le tribunal d'instance, ils bénéficiaient de la prolongation d'un an pour exercer leur droit.
La société Eco Environnement prétend de son côté que les époux X. étaient parfaitement informés des conditions et modalités d'exercice de leur droit de rétractation par la reproduction, au verso du bon de commande, des articles L. 121-17, L. 121-21 et L. 121-21-2 du code de la consommation dans leur numérotation de l'époque, et que le bordereau de rétractation accompagnant le bon de commande était parfaitement conforme au formulaire type.
Contrairement à ce qu'a relevé le premier juge, aucune disposition légale ou réglementaire n'impose au professionnel recourant à la technique de commercialisation à distance de ses produits ou de ses prestations de reproduire dans le contrat remis au consommateur les dispositions de l'article L. 121-21-1 devenu L. 221-20 du code de la consommation.
L'information du consommateur sur les conditions, le délai et les modalités d'exercice du droit de rétractation n'incluent en outre nullement la nature et la substance de la sanction applicable en cas de non-respect par le professionnel de ce devoir d'information.
Au demeurant, cette information relative à la prolongation du délai de rétractation en cas de non-respect de l'obligation d'information relative à l'exercice du droit de rétractation n'est pas de celles prévues par le document d'informations type figurant à l'annexe à l'article R. 121-2 devenu R. 221-3 du code de la consommation.
Par ailleurs, les époux X. et le premier juge postulent que le bordereau de rétractation accompagnant le bon de commande ne serait pas conforme au formulaire type figurant à l'annexe à l'article R. 121-1 devenu R. 221-1 du code de la consommation, sans toutefois relever précisément quelles mentions seraient manquantes.
Pourtant, le bordereau figurant au pied du bon de commande invite bien le consommateur, comme le prévoit le formulaire type, à mentionner son nom, son adresse, la nature de la vente ou du service commandé, la date de la commande, puis à dater et signer le document.
D'autre part, il peut être détaché sans amputer la substance du bon de commande, et reproduit à son verso le dénomination sociale, l'adresse géographique ainsi que l'adresse électronique de la société Eco Environnement.
Il s'en évince que, conformément aux dispositions prévues au 2° de l'article L. 121-17 devenu L. 221-5 du code de la consommation, les informations relatives aux conditions, au délai et aux modalités d'exercice du droit de rétractation ont bien été délivrées, et la communication d'un bordereau conforme au formulaire type prévu par l'article R. 121-1 devenu R. 221-1 a bien été réalisée.
Dès lors, il n'y a pas matière à prolongation du délai de rétractation, si bien que le courrier de rétractation, adressé hors délai à la société Eco Environnement, est sans effet.
Le jugement attaqué, en ce qu'il a constaté l'anéantissement du contrat principal pour cause de rétractation des consommateurs, sera donc infirmé.
Sur la nullité du contrat principal :
Aux termes des articles L. 121-18-1 et L. 121-17 devenus L. 221-9, L. 221-5, L. 111-1, R. 111-1 et R. 111-2 du code de la consommation, les ventes et fournitures de services conclues à l'occasion d'une commercialisation hors établissement doivent faire l'objet d'un contrat dont un exemplaire est remis au client, et notamment comporter, à peine de nullité, les mentions suivantes :
- le nom du professionnel ou la dénomination sociale et la forme juridique de l'entreprise, l'adresse géographique de son établissement et, si elle est différente, celle du siège social, son numéro de téléphone et son adresse électronique,
- le cas échéant, son numéro d'inscription au registre du commerce et des sociétés ou au répertoire des métiers,
- les informations relatives à ses activités, pour autant qu'elles ne ressortent pas du contexte,
- son éventuelle garantie financière ou l'assurance de responsabilité professionnelle souscrite par lui, ainsi que les coordonnées de l'assureur ou du garant,
- les caractéristiques essentielles du bien ou du service, compte tenu du bien ou service concerné,
- le prix du bien ou du service,
- les modalités de paiement,
- en l'absence d'exécution immédiate du contrat, la date ou le délai auquel le professionnel s'engage à livrer le bien ou à exécuter le service,
- les modalités prévues par le professionnel pour le traitement des réclamations,
- s'il y a lieu, les informations relatives à la garantie légale de conformité, à la garantie des vices cachés de la chose vendue ainsi que, le cas échéant, à la garantie commerciale et au service après-vente,
- la possibilité de recourir à un médiateur de la consommation,
- lorsque le droit de rétractation existe, les conditions, le délai et les modalités d'exercice de ce droit ainsi que le formulaire type de rétractation.
Or, le bon de commande du 14 mai 2015 ne mentionne pas de délais d'exécution, la ligne du formulaire de commandes utilisé ayant été laissée en blanc.
À cet égard, la mention des conditions générales de vente reproduite au dos du bon de commande, selon laquelle « le délai de livraison figurant au recto du présent contrat est donné à titre indicatif et ne peut dépasser une limite de 200 jours à compter de la prise d'effet du contrat » ne saurait pallier l'absence d'indication d'un délai de livraison du matériel et d'exécution des travaux d'installation exigée par le 3° de l'article L. 111-1 du code de la consommation.
La société Eco Environnement soutient que cette irrégularité ne serait sanctionnée que par une nullité relative que l'acquéreur aurait renoncé à invoquer en acceptant de signer l'attestation de fin de travaux caractérisant sa volonté de les recevoir.
Cependant, la confirmation d'une obligation entachée de nullité est subordonnée à la conclusion d'un acte révélant que son auteur a eu connaissance du vice affectant l'obligation et l'intention de le réparer, sauf exécution volontaire après l'époque à laquelle celle-ci pouvait être valablement confirmée.
Or, en l'occurrence, aucun acte ne révèle qu'entre la conclusion et l'exécution du contrat, les époux X. ont eu connaissance de la violation du formalisme imposé par le code de la consommation, la seule reproduction des dispositions de ce code au verso du bon de commande énonçant les conditions générales de vente ne suffisant pas à démontrer que l'acquéreur avait pleine connaissance de cette réglementation et, de surcroît, que le contrat de vente la méconnaissait.
En outre, le certificat de livraison ne saurait davantage être regardé comme une exécution volontaire des obligations découlant du contrat de vente manifestant une volonté non équivoque de couvrir les irrégularités de ce document, alors qu'il comportait des ambiguïtés au regard des obligations du fournisseur découlant des énonciations du bon de commande relativement à la prise en charge des frais de raccordement au réseau public en vue de la revente de l'électricité produite à EDF qui n'a pas été réalisé, et que les acquéreurs se sont toujours plaints de la mauvaise exécution de la prestation de la société Eco Environnement ainsi que cela résulte de l'expertise extrajudiciaire de l'installation à laquelle ils ont fait procéder le 27 novembre 2015 pour constater divers désordres et défauts de conformité, du constat d'huissier réalisé le même jour aux mêmes fins, et du courrier de rétractation du 8 avril 2016.
Il convient donc d'écarter le moyen tiré de la confirmation du contrat irrégulier et, sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres motifs de nullité invoqués, de confirmer le jugement en ce qu'il a prononcé la nullité du contrat conclu le 14 mai 2015 avec la société Eco Environnement.
Sur la nullité du contrat de prêt :
Aux termes des dispositions de l'article L. 311-32 devenu L. 312-55 du code de la consommation, le contrat de crédit affecté est résolu ou annulé de plein droit lorsque le contrat en vue duquel il a été conclu est lui-même judiciairement résolu ou annulé.
Il n'est pas contesté que le crédit consenti par la société Sygma est un crédit accessoire à une vente ou à une prestation de services.
En raison de l'interdépendance des deux contrats, l'annulation du contrat principal conclu avec la société Eco Environnement emporte donc annulation de plein droit du contrat accessoire de crédit conclu avec la société Sygma.
Comme le rappelle à juste titre la BNP, la nullité du prêt a en principe pour conséquence de remettre les parties dans leur situation antérieure, de sorte qu'elle doit, sauf faute du prêteur, entraîner la restitution des prestations reçues de part et d'autre.
Il est à cet égard constant que les échéances honorées durant la période d'exécution du contrat annulé, d'un montant total de 1.836 euros, doivent être restituées aux emprunteurs, de sorte que la disposition du jugement attaqué y relative doit être confirmée.
Par ailleurs, s'agissant la restitution corrélative du capital au prêteur, les époux X. demandent à la cour de confirmer le jugement attaqué en ce qu'il les a dispensés de restituer le capital emprunté, en faisant valoir que le prêteur se serait fautivement dessaisi des fonds au vu d'un bon de commande irrégulier et d'un certificat de livraison ambigu ne rendant pas compte de la complexité de l'opération, alors que les panneaux livrés n'étaient pas de la marque commandée, que l'installation était affectée de malfaçons, et qu'elle n'était pas en état de service.
La BNP soutient de son côté qu'il n'appartenait pas au prêteur de contrôler l'exécution totale de la prestation du fournisseur, alors qu'elle s'est dessaisie du capital prêté au vu du certificat de livraison du 3 juin 2015 par lequel M. X. reconnaissait que le contrat principal était exécuté et acceptait le déblocage des fonds en faveur du vendeur.
Il est à cet égard de principe que le prêteur commet une faute excluant le remboursement du capital emprunté lorsqu'il libère la totalité des fonds, alors qu'à la simple lecture du contrat principal, il aurait dû constater que sa validité était douteuse au regard des dispositions protectrices du code de la consommation relatives à la commercialisation hors établissement.
Or, il a été précédemment relevé que le bon de commande conclu avec la société Eco Environnement, par l'intermédiaire de laquelle la société Sygma faisait présenter ses offres de crédit, comportait des irrégularités formelles apparentes qui auraient dû conduire le prêteur, professionnel des opérations de crédit affecté, à ne pas se libérer des fonds entre les mains du fournisseur avant d'avoir à tout le moins vérifié auprès des époux X. qu'ils entendaient confirmer l'acte irrégulier.
Au surplus, il est aussi de principe que le prêteur commet une faute excluant le remboursement du capital emprunté lorsqu'il libère la totalité des fonds, alors que l'attestation de livraison au vu de laquelle il se libère ne lui permet pas de s'assurer de l'exécution complète du contrat principal.
Or, en l'espèce, il sera observé que le certificat de livraison dont la BNP se prévaut pour justifier le versement des fonds entre les mains du fournisseur présentait un caractère pour le moins équivoque dans la mesure où, si son signataire attestait que « le bien ou la prestation de services a été livrée le 3 juin 2015 », il ne rendait pas compte de la réalisation intégrale de la prestation accessoire de pose et de mise en service que la société Eco Environnement s'était engagée à effectuer, le bon de commande indiquant à cet égard que le vendeur s'engageait à prendre en charge une installation complète des panneaux photovoltaïques, incluant la fourniture des accessoires, les démarches administratives, l'obtention de l'attestation de conformité et du contrat d'achat de l'électricité produite ainsi que les frais de raccordement au réseau public.
Pourtant, il ressort notamment de l'expertise extrajudiciaire à laquelle les époux X. ont fait procéder le 27 novembre 2015 que les travaux ont été réalisés avant l'accord du service de l'urbanisme de la mairie qui ne l'a pas donné, que les compteurs de production d'énergie ne sont pas posés et qu'une proposition technique et financière de rachat de l'électricité produite n'a pas même été soumise aux époux X.
Ces conclusions de l'expert sont en outre corroborées par le constat d'huissier du même jour, confirmant notamment que les compteurs de production d'électricité ne sont pas en place du fait du défaut d'autorisation administrative de travaux, ce dont il se déduit que le raccordement au réseau, dont les frais devaient pourtant être pris en charge par la société Eco Environnement, n'a pas été effectué.
Le prêteur n'avait certes pas à assister les emprunteurs lors de la conclusion et de l'exécution du contrat principal, ni à vérifier le bon fonctionnement d'une installation exempte de vice ou la conformité du matériel livré aux stipulations contractuelles, mais il lui appartenait néanmoins de relever les anomalies apparentes du bon de commande et du certificat de livraison avant de se dessaisir du capital prêté.
Il en résulte qu'en versant les fonds entre les mains du fournisseur, au seul vu de ce certificat ambigu, et sans procéder à des vérifications complémentaires sur la régularité formelle et l'exécution complète du contrat principal, la société Sygma a commis des fautes la privant du droit d'obtenir le remboursement du capital emprunté.
La dispense de remboursement du crédit par les emprunteurs étant fondée sur la faute du prêteur, la contestation relative à leur préjudice, lequel résulte précisément de l'obligation de restitution des prestations reçues de part et d'autre du fait de l'annulation du contrat de prêt en dehors de toute faute de leur part et, au surplus, sans bénéficier en contrepartie de la livraison d'une installation pérenne,, conforme à la commande, exempte de vice et raccordée au réseau en vue de la revente de l'électricité produite, est sans fondement.
Il sera à cet égard observé que la société Eco Environnement pourra exiger la restitution du matériel, celle-ci étant une conséquence de plein droit de l'annulation du contrat, et que, selon le rapport d'expertise extrajudiciaire et le constat d'huissier du 27 novembre 2015, les panneaux photovoltaïques livrés et posés ne sont pas de la marque stipulée au bon de commande, que le montage de l'installation en intégration du bâti n'est pas conforme aux règles de l'art, que l'étanchéité de la toiture est défectueuse et que le raccordement au réseau en vue de la revente de l'électricité produite n'a pas été réalisé.
Il convient donc de confirmer le jugement attaqué en ce qu'il a dispensé les époux X. de rembourser le capital emprunté à la BNP.
Sur les demandes accessoires :
Les époux X. demandent la condamnation de la société Eco Environnement au paiement, à titre de dommages-intérêts :
- d'une somme de 2.750 euros au titre du coût de réparation de la toiture,
- d'une somme de 1.000 euros chacun au titre de leur préjudice de jouissance,
- d'une somme de 1.000 euros chacun au titre de leur préjudice moral.
La nécessité de déposer l'installation, jugée dangereuse par un expert et devant en tout hypothèse donner lieu à restitution au vendeur en conséquence de l'annulation du contrat de vente, exposera les intimés à des frais évalués par devis de la société LTE à la somme de 2.750 euros qui sera mise à la charge de la société Eco Environnement.
Le défaut de fonctionnement de l'installation a en outre causé aux époux X. un préjudice de jouissance qui sera exactement et intégralement réparé par l'allocation de dommages-intérêts d'un montant de 1.000 euros chacun, soit globalement 2.000 euros.
Ces deniers ne démontrent en revanche pas l'existence du préjudice moral allégué.
Il convient donc de confirmer le jugement attaqué en ce qu'il a condamné la société Eco Environnement au paiement de dommages-intérêts d'un montant global de 4.750 euros.
La BNP demande de son côté la condamnation de la société Eco Environnement au paiement, à titre de dommages-intérêts :
- d'une somme de 19 900 euros au titre du capital débloqué entre les mains du fournisseur,
- d'une somme de 7 802 euros au titre de la perte des intérêts du crédit consenti aux époux X.,
ce à quoi l'appelante s'oppose en faisant valoir que ce préjudice ne résulte que de la propre faute du prêteur qui s'est dessaisi des fonds sans procéder aux vérifications lui incombant.
Le vendeur a cependant, en démarchant les acquéreurs sans leur soumettre un bon de commande conforme aux dispositions protectrices du code de la consommation et sans achever sa prestation, commis une faute en lien direct et certain avec le préjudice subi par la banque procédant, indépendamment de sa faute personnelle qui n'a eu pour conséquence que de la priver de la restitution du capital, de ce qu'elle a aussi perdu son droit aux intérêts par le seul effet de l'annulation de plein droit du contrat de prêt subséquemment à l'annulation du contrat de vente.
Il convient donc de confirmer le jugement attaqué en ce qu'il a condamné la société Eco Environnement à payer à la BNP la somme de 7.802 euros au titre du gain manqué des intérêts du crédit.
En revanche, ainsi que la cour l'a précédemment jugé, la perte du droit du prêteur à obtenir la restitution du capital résulte non seulement de la faute du vendeur, qui a démarché les acquéreurs sans leur soumettre un bon de commande conforme aux dispositions protectrices du code de la consommation et sans achever sa prestation, mais aussi de la faute personnelle de la banque, qui a libéré les fonds prêtés sans s'assurer de la régularité et de l'exécution complète du contrat principal.
La cour, considérant que les fautes conjuguées du vendeur et du prêteur sont d'égale gravité, n'admettra donc le recours du second contre le premier qu'à due concurrence de moitié, de sorte que le montant des dommages-intérêts alloués à la BNP sera, au titre de la perte du capital prêté, limité à 9.950 euros.
Il n'y avait pas matière à condamner la société Eco Environnement à payer à la BNP une indemnité de 4.000 euros au titre de ses frais irrépétibles de première instance, de sorte que cette disposition du jugement attaqué sera infirmée.
C'est en revanche par une exacte appréciation de l'équité que le premier juge a condamné la société Eco Environnement et la BNP à payer aux époux X. une indemnité de 4.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
À cet égard, cette indemnité inclut le remboursement des frais d'expertise extrajudiciaire (360 euros) et de constat d'un huissier non commis par le juge (446,36 euros) qui, contrairement à ce que suggèrent les époux X., n'ont pas la nature de dépens au sens de l'article 695 du code de procédure civile.
En outre, il leur sera alloué une indemnité complémentaire de 1.000 euros au titre de leurs frais irrépétibles d'appel.
Les autres demandes d'application de l'article 700 du code de procédure civile formés à hauteur d'appel seront en toute équité rejetées.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS,
LA COUR :
Infirme le jugement rendu le 16 février 2017 par le tribunal d'instance de Vannes en ce qu'il a :
- constaté que les époux X. se sont rétractés régulièrement et que le contrat principal a été mis à néant,
- condamné la société Eco Environnement à la société BNP Paribas Personal Finance la somme de 19.900 euros à titre de dommages-intérêts en réparation de la perte du capital prêté,
- condamné la société Eco Environnement à payer à la société BNP Paribas Personal Finance une indemnité de 4.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;
Dit que la rétractation des époux X. est sans effet ;
Prononce l'annulation du contrat principal et du contrat de crédit affecté du 14 mai 2015 ;
Condamne la société Eco Environnement à payer à la société BNP Paribas Personal Finance la somme de 9.950 euros à titre de dommages-intérêts au titre de la perte du capital prêté ;
Déboute la société BNP Paribas Personal Finance de sa demande en indemnisation de ses frais irrépétibles de première instance ;
Confirme le jugement attaqué en ses autres dispositions ;
Condamne in solidum la société Eco Environnement et la société BNP Paribas Personal Finance à payer aux époux X. une indemnité complémentaire de 1.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel ;
Condamne in solidum la société Eco Environnement et la société BNP Paribas Personal Finance aux dépens d'appel ;
Rejette toutes autres demandes contraires ou plus amples.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT