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CASS. CIV. 1re, 9 septembre 2020

Nature : Décision
Titre : CASS. CIV. 1re, 9 septembre 2020
Pays : France
Juridiction : Cour de cassation Ch. civile 1
Demande : 19-21955
Décision : 20-528
Date : 9/09/2020
Numéro ECLI : ECLI:FR:CCASS:2020:C100528
Nature de la décision : Cassation
Mode de publication : Jurica
Numéro de la décision : 528
Référence bibliographique : 6241 (compétence du juge administratif)
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CERCLAB - DOCUMENT N° 8600

CASS. CIV. 1re, 9 septembre 2020 : pourvoi n° 19-21955 ; arrêt n° 528 

Publication : Legifrance ; Bull. civ.

 

Extrait : « 7. Le présent litige, qui n'entre pas dans le champ du transfert de compétence au profit de la juridiction judiciaire résultant de la combinaison des articles L. 410-1, L. 464-7 et L. 464-8 du code de commerce, limité au contentieux relatif aux décisions rendues par l'Autorité de la concurrence en matière de pratiques anticoncurrentielles, présente à juger une question de compétence soulevant une difficulté sérieuse. En effet, si, conformément à la jurisprudence de la Cour de cassation selon laquelle le fait de rompre brutalement une relation commerciale établie engage la responsabilité délictuelle de son auteur (Com., 6 février 2007, pourvoi n° 04-13.178, Bull. 2007, IV, n° 21 - Com., 18 octobre 2011, pourvoi n° 10-28.005, Bull. 2011, IV, n° 160), l'action engagée par la société Entropia-conseil à l'encontre des EPIC SNCF réseau et SNCF paraît ressortir à la juridiction judiciaire, le caractère administratif des marchés antérieurement passés entre les parties, retenu par les juges du fond au regard de certaines de leurs clauses, pourrait conduire à admettre la compétence de la juridiction administrative pour en connaître, dès lors que le Conseil d'Etat et le Tribunal des conflits ont reconnu, en cette matière, un effet attractif de compétence au contrat administratif, cependant limité à la seule phase précontractuelle (CE, 19 décembre 2007, société Campenon-Bernard e.a., n° 268918, Rec. p. 507 ; TC, 16 novembre 2015, Région Ile-de-France, n° 4035). Il y a lieu, en conséquence, de renvoyer au Tribunal des conflits le soin de décider sur cette question de compétence, en application de l'article 35 du décret susvisé. »

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR DE CASSATION

PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU 9 SEPTEMBRE 2020

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION                                       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

N° de pourvoi : H 19-21955. Arrêt n° 528 FS-P+B.

DEMANDEUR à la cassation : SNCF réseau - SNCF

DÉFENDEUR à la cassation : Société Entropia-conseil

Président : Mme Batut (président). Avocat(s) : SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, SCP Spinosi et Sureau.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                                                 (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

1°/ La SNCF réseau, établissement public à caractère industriel et commercial, dont le siège est [adresse],

2°/ la SNCF, établissement public à caractère industriel et commercial, dont le siège est [adresse],

ont formé le pourvoi n° H 19-21.955 contre l'arrêt rendu le 28 juin 2019 par la cour d'appel de Paris (pôle 5, chambre 11), dans le litige les opposant à la société Entropia-conseil, société par actions simplifiée unipersonnelle, dont le siège est [adresse], défenderesse à la cassation.

Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Canas, conseiller référendaire, les observations de la SCP Spinosi et Sureau, avocat des EPIC SNCF réseau et SNCF, de la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de la société Entropia-conseil, et l'avis de M. Chaumont, avocat général, après débats en l'audience publique du 30 juin 2020 où étaient présents Mme Batut, président, Mme Canas, conseiller référendaire rapporteur, Mme Duval-Arnould, conseiller doyen, M. Girardet, Mme Teiller, MM. Avel, Mornet, Chevalier, Mme Kerner-Menay, conseillers, M. Vitse, Mmes Dazzan, Le Gall, Kloda, Champ, Comte, Robin-Raschel, conseillers référendaires, M. Chaumont, avocat général, et Mme Randouin, greffier de chambre,

la première chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

 

RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE                                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Faits et procédure :

1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 28 juin 2019), la société Entropia-conseil, qui a pour activité le conseil en organisation et en management d'entreprises, a réalisé diverses prestations pour le compte de l'établissement public à caractère industriel et commercial (EPIC) SNCF réseau, en exécution de bons de commande soumis aux stipulations du cahier des clauses générales applicables aux marchés de prestations intellectuelles du groupe SNCF.

2. Elle a saisi le tribunal de commerce de Paris, sur le fondement des articles L. 442-6-I-5°, et L. 420-1 et suivants du code de commerce, aux fins d'obtenir la condamnation des EPIC SNCF réseau et SNCF à l'indemniser des préjudices qu'elle aurait subis du fait de la rupture brutale de leurs relations commerciales établies et de pratiques anticoncurrentielles.

3. Les EPIC SNCF réseau et SNCF ont soulevé une exception d'incompétence au profit de la juridiction administrative.

 

Examen du moyen :

MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur)                               (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Sur le moyen, pris en sa cinquième branche, ci-après annexé

4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce grief qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

 

Sur les quatre premières branches du moyen :

MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur)                               (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Enoncé du moyen :

5. Les EPIC SNCF réseau et SNCF font grief à l'arrêt de rejeter leur exception d'incompétence, alors :

« 1°/ que la décision du Tribunal des conflits du 4 mai 2009, n° 3714, Editions Jean-Paul Gisserot, porte sur la compétence du Conseil de la concurrence, désormais Autorité de la concurrence, agissant sous le contrôle de l'autorité judiciaire ; qu'en se fondant sur cette décision, pour juger que le litige relève de la compétence de la juridiction judiciaire, après avoir pourtant constaté que l'action de la société Entropia-conseil porte sur la réparation éventuelle qui résulterait du prétendu préjudice qu'elle aurait subi du fait de la rupture brutale des relations commerciales établies et de pratiques anticoncurrentielles, une telle action n'ayant pas pour objet de saisir l'Autorité de la concurrence aux fins de faire sanctionner des pratiques anticoncurrentielles, la cour d'appel a violé l'article 13 de la loi des 16-24 août 1790, ensemble le décret du 16 fructidor an III et le principe de séparation des autorités administratives et judiciaires ;

2°/ que les litiges nés à l'occasion de la résiliation d'un marché public relèvent de la seule compétence des juridictions administratives en leur qualité de juge du contrat en application du principe d'absorption de la responsabilité délictuelle par la responsabilité contractuelle ; qu'en se fondant néanmoins, pour juger que le litige relève de la compétence de la juridiction judiciaire, sur le caractère délictuel des actions introduites par la société Entropia-conseil, la cour d'appel a violé l'article 13 de la loi des 16-24 août 1790, ensemble le décret du 16 fructidor an III et le principe de séparation des autorités administratives et judiciaires ;

3°/ que le critère de la détachabilité permet de déterminer, en présence d'une pratique anticoncurrentielle, si le juge administratif a ou non vocation à être compétemment saisi en sa qualité de juge du contrat ; qu'en se bornant à constater que les pratiques anticoncurrentielles des personnes publiques sont détachables du régime du contrat qui en est le support, sans rechercher si les pratiques anticoncurrentielles et restrictives de concurrence dont faisait état la société Entropia-conseil étaient « détachables » du contrat, ces pratiques étant pourtant en lien avec l'exécution de ce contrat administratif, et plus particulièrement, avec sa résiliation, dont elles sont intrinsèquement indissociables, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 13 de la loi des 16-24 août 1790, ensemble le décret du 16 fructidor an III et le principe de séparation des autorités administratives et judiciaires ;

4°/ que les dispositions du code de commerce relatives à une rupture brutale des relations commerciales établies ne sont pas applicables aux relations contractuelles nées d'un marché public ; qu'en se fondant néanmoins sur ces dispositions pour juger que le litige relève de la compétence du juge judiciaire, la cour d'appel a violé l'article L. 442-6 du code de commerce, dans sa version applicable au litige, ensemble l'article 13 de la loi des 16-24 août 1790, le décret du 16 fructidor an III et le principe de séparation des autorités administratives et judiciaires. »

 

RÉPONSE DE LA COUR DE CASSATION AU MOYEN                                    (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Réponse de la Cour :

Vu l'article 35 du décret n° 2015-233 du 27 février 2015 relatif au Tribunal des conflits et aux questions préjudicielles :

6. Lorsque la Cour de cassation est saisie d'un litige qui présente à juger, soit sur l'action introduite, soit sur une exception, une question de compétence soulevant une difficulté sérieuse et mettant en jeu la séparation des ordres de juridiction, elle peut renvoyer au Tribunal des conflits le soin de décider sur cette question de compétence. L'instance est suspendue jusqu'à la décision de ce Tribunal.

7. Le présent litige, qui n'entre pas dans le champ du transfert de compétence au profit de la juridiction judiciaire résultant de la combinaison des articles L. 410-1, L. 464-7 et L. 464-8 du code de commerce, limité au contentieux relatif aux décisions rendues par l'Autorité de la concurrence en matière de pratiques anticoncurrentielles, présente à juger une question de compétence soulevant une difficulté sérieuse. En effet, si, conformément à la jurisprudence de la Cour de cassation selon laquelle le fait de rompre brutalement une relation commerciale établie engage la responsabilité délictuelle de son auteur (Com., 6 février 2007, pourvoi n° 04-13.178, Bull. 2007, IV, n° 21 - Com., 18 octobre 2011, pourvoi n° 10-28.005, Bull. 2011, IV, n° 160), l'action engagée par la société Entropia-conseil à l'encontre des EPIC SNCF réseau et SNCF paraît ressortir à la juridiction judiciaire, le caractère administratif des marchés antérieurement passés entre les parties, retenu par les juges du fond au regard de certaines de leurs clauses, pourrait conduire à admettre la compétence de la juridiction administrative pour en connaître, dès lors que le Conseil d'Etat et le Tribunal des conflits ont reconnu, en cette matière, un effet attractif de compétence au contrat administratif, cependant limité à la seule phase précontractuelle (CE, 19 décembre 2007, société Campenon-Bernard e.a., n° 268918, Rec. p. 507 ; TC, 16 novembre 2015, Région Ile-de-France, n° 4035). Il y a lieu, en conséquence, de renvoyer au Tribunal des conflits le soin de décider sur cette question de compétence, en application de l'article 35 du décret susvisé.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                                                              (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS, la Cour :

ORDONNE le renvoi de l'affaire au Tribunal des conflits ;

Sursoit à statuer jusqu'à ce que le Tribunal des conflits ait tranché la question de savoir si le litige opposant la société Entropia-conseil aux établissements publics à caractère industriel et commercial SNCF réseau et SNCF relève ou non de la compétence de la juridiction judiciaire ;

Dit que l'affaire sera de nouveau examinée à l'audience du 2 février 2021 ;

Réserve les dépens ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du neuf septembre deux mille vingt.

 

 

ANNEXE : MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur)             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Moyen produit par la SCP Spinosi et Sureau, avocat aux Conseils, pour les EPIC SNCF réseau et SNCF.

 

RAPPEL DU DISPOSITIF DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé le jugement entrepris, en ce qu'il a notamment dit mal fondée l'exception d'incompétence soulevée par l'EPIC SNCF et l'EPIC SNCF Réseau, et renvoyé l'affaire au tribunal de commerce de Paris ;

 

RAPPEL DES MOTIFS DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Aux motifs propres que « Considérant qu'il résulte de la décision du 4 mai 2009 n° 3714 du Tribunal des conflits « (…) En matière de marchés publics, lesquels ne traduisent pas la mise en œuvre de prérogatives de puissance publique, la compétence du juge administratif (…) ne fait pas obstacle à la compétence du Conseil de la concurrence, sous le contrôle de la Cour d'appel, c'est-à-dire des juridictions de l'ordre judiciaire, pour statuer sur les litiges fondés sur les pratiques anticoncurrentielles, notamment celles définies aux articles L. 420- 1, L. 420-2 et L. 420-5 du code de commerce ; (…) que dès lors le litige introduit sur le fondement des règles de la concurrence, relève de la compétence de la juridiction judiciaire »,

qu'en l'espèce l'action de la société ENTROPIA porte sur la réparation éventuelle qui résulterait du préjudice qu'elle aurait subi du fait de la rupture brutale des relations commerciales établies et des pratiques anti-concurrentielles sur le fondement des dispositions des articles L. 442-6 I 5° du code de commerce et L 420- 1 et suivants du code de commerce, ces fautes ayant valeur de fautes délictuelles et non de fautes contractuelles, que les actions relatives à l'abus de position dominante et à la rupture brutale des relations commerciales sont de nature délictuelle,

qu'ainsi les pratiques anti-concurrentielles des personnes publiques sont détachables du régime du contrat qui en est le support,

qu'il convient également de souligner que l'article L. 442-6-I-5° du code de commerce précise en son paragraphe III que les actions introduites sur son fondement le sont devant la juridiction civile ou commerciale compétente ce qui exclut la compétence du juge administratif,

que l'article L. 410-1 du code de commerce rappelle que le livre concerné s'applique aussi aux activités de production, distribution, services qui sont le fait de personnes publiques,

que c'est donc à juste titre que les premiers juges ont jugé rejeté l'exception d'incompétence soulevée par SNCF RESEAU et par la SNCF,

qu'il convient de confirmer le jugement entrepris […] » (arrêt, 5ème page).

Et aux motifs éventuellement adoptés que « Sur le mérite […] Attendu que SNCF et SNCF RESEAU sont de par la loi des Etablissements Publics, Industriels et Commerciaux (EPIC) et donc des personnes morales de droit public ;

Attendu que SNCF et SNCF RESEAU, s'appuyant sur la décision n° C3949 du 7 avril 2014 du Tribunal des Conflits : « sauf disposition législative contraire, lorsqu'un établissement public tient de la loi la qualité d'établissement industriel et commercial, les contrats conclus pour les besoins de ses activités relèvent de la compétence de la juridiction judiciaire, à l'exception de ceux comportant des clauses exorbitantes du droit commun », justifient que les bons de commande passés entre SNCF Réseau et ENTROPIA-CONSEIL sont soumis aux règles du Cahier des clauses générales applicables aux marchés de prestations intellectuelles du groupe SNCF (« CCG-PI ») ; que plusieurs clauses du « CCG-PI », parmi lesquelles l'article 21 par exemple permettant à SNCF Réseau, par une décision notifiée au prestataire, de suspendre à tout moment l'exécution des prestations, cette suspension pouvant donner lieu à la résiliation du marché sans aucune faute, ou l'article 82.1 du « CCGPI » précisant que la personne publique peut également mettre fin à tout moment au contrat pour des motifs dont elle est seule juge, sont exorbitantes du droit commun puisque SNCF Réseau peut résilier le contrat même en l'absence d'une quelconque faute du titulaire du marché ; que de fait, les marchés conclus entre d'une part ENTROPIA-CONSEIL et d'autre part SNCF ou SNCF RESEAU peuvent être qualifiés de contrats administratifs car comportant ou s'appuyant sur des clauses exorbitantes du droit commun ;

Qu'il est constant que le contentieux de ces contrats, s'il concerne une faute contractuelle, relève exclusivement de la juridiction administrative, le tribunal de céans devant dans ce cas, s'il lui est demandé de statuer sur ce litige, se déclarer incompétent ;

Attendu cependant que le litige qui lui est soumis ne porte ici ni sur le contrat ni sur son exécution mais sur des dommages-intérêts qui pourraient être dus en raison, selon ENTROPIA-CONSEIL, d'une rupture brutale des relations commerciales établies, sur le fondement des dispositions de l'article L. 442-6-I-5° du code de commerce ou en réparation de pratiques anticoncurrentielles telles que l'abus de position dominante ou de dépendance économique visées aux articles L. 420-1 et suivants du code de commerce, ces fautes ayant valeur de fautes délictuelles et non de fautes contractuelles ;

Qu'en particulier, l'article L. 442-6-I-5° du code de commerce qui dispose que : « Engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice causé par le fait par tout producteur, commerçants, industriels ou personne immatriculée au répertoire des métiers : (…) 5° de rompre brutalement même partiellement », ne fait pas obstacle au droit de mettre fin à une relation commerciale mais oblige seulement à faire bénéficier la victime de la rupture d'un délai de préavis ; que l'action couverte est une action délictuelle indifférente aux contrats existants sous réserve que soit reconnue, au travers de ces contrats, une relation commerciale établie, c'est-à-dire ayant un caractère suivi, stable et habituel ;

Qu'il convient également de noter que l'article L. 442-6-I-5° du code de commerce, précise en son paragraphe III que les actions introduites sur son fondement le sont « devant la juridiction civile ou commerciale compétente » ; ce qui exclut la compétence du juge administratif ;

Que cette compétence de la juridiction judiciaire pour des fautes de nature délictuelle est d'ailleurs rappelée par la décision n° 3714 du 4 mai 2009 du Tribunal des Conflits, « En matière de marchés publics, lesquels ne traduisent pas la mise en œuvre de prérogatives de puissance publique, la compétence du juge administratif ne fait pas obstacle à la compétence du Conseil de la concurrence, sous le contrôle de la Cour d'appel, c'est-à-dire des juridictions de l'ordre judiciaire, pour statuer sur les litiges fondés sur des pratiques anticoncurrentielles, notamment celles définies aux articles L. 420-1, L. 420-2 et L. 420-5 du code de commerce ;

que dès lors le litige introduit sur le fondement des règles de la concurrence, relève de la compétence de la juridiction judiciaire ;

 

Qu'en conséquence le tribunal, saisi d'une action sur le fondement des articles L. 420-1, L. 420-2, L. 420-6, D. 442-34 et D. 442-4 du code de commerce, dira que SNCF et SNCF RESEAU sont mal fondées en leur demande d'exception, les déboutera de cette demande et se déclarera compétent » (jugement, pages 4 et 5) ;

 

MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur)                               (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

1°) Alors que la décision du Tribunal des conflits du 4 mai 2009 n° 3714 Editions Jean-Paul Gisserot porte sur la compétence du Conseil de la concurrence, désormais Autorité de la concurrence, agissant sous le contrôle de l'autorité judiciaire ; qu'en se fondant sur cette décision, pour juger que le litige relève de la compétence de la juridiction judiciaire, après avoir pourtant constaté que l'action de la société ENTROPIA-CONSEIL porte sur la réparation éventuelle qui résulterait du prétendu préjudice qu'elle aurait subi du fait de la rupture brutale des relations commerciales établies et de pratiques anticoncurrentielles, une telle action n'ayant pas pour objet de saisir l'Autorité de la concurrence aux fins de faire sanctionner des pratiques anticoncurrentielles, la cour d'appel a violé l'article 13 de la loi des 16- 24 août 1790, ensemble le décret du 16 fructidor an III et le principe de séparation des autorités administratives et judiciaires ;

2°) Alors que les litiges nés à l'occasion de la résiliation d'un marché public relèvent de la seule compétence des juridictions administratives en leur qualité de juge du contrat en application du principe d'absorption de la responsabilité délictuelle par la responsabilité contractuelle ; qu'en se fondant néanmoins, pour juger que le litige relève de la compétence de la juridiction judiciaire, sur le caractère délictuel des actions introduites par la société ENTROPIA-CONSEIL, la cour d'appel a violé l'article 13 de la loi des 16-24 août 1790, ensemble le décret du 16 fructidor an III et le principe de séparation des autorités administratives et judiciaires ;

3°) Alors que le critère de la détachabilité permet de déterminer, en présence d'une pratique anticoncurrentielle, si le juge administratif a ou non vocation à être compétemment saisi en sa qualité de juge du contrat ; qu'en se bornant à constater que les pratiques anticoncurrentielles des personnes publiques sont détachables du régime du contrat qui en est le support, sans rechercher si les pratiques anticoncurrentielles et restrictives de concurrence dont faisait état la société ENTROPIA-CONSEIL étaient « détachables » du contrat, ces pratiques étant pourtant en lien avec l'exécution de ce contrat administratif, et plus particulièrement, avec sa résiliation, dont elles sont intrinsèquement indissociables, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 13 de la loi des 16-24 août 1790, ensemble le décret du 16 fructidor an III et le principe de séparation des autorités administratives et judiciaires ;

4°) Alors que les dispositions du code de commerce relatives à une rupture brutale des relations commerciales établies ne sont pas applicables aux relations contractuelles nées d'un marché public ; qu'en se fondant néanmoins sur ces dispositions pour juger que le litige relève de la compétence du juge judiciaire, la cour d'appel a violé l'article L. 442-6 du code de commerce, dans sa version applicable au litige, ensemble l'article 13 de la loi des 16-24 août 1790, le décret du 16 fructidor an III et le principe de séparation des autorités administratives et judiciaires ;

5°) Alors que dans leurs conclusions d'appel, l'EPIC SNCF et l'EPIC SNCF Réseau faisaient valoir que « […] seul l'EPIC SNCF Réseau a noué des relations avec ENTROPIA-CONSEIL. L'EPIC SNCF n'a pour sa part jamais entretenu de relation, de quelque nature que ce soit, avec ENTROPIA-CONSEIL, de sorte que sa mise en cause par cette dernière est dépourvue de tout fondement » (conclusions d'appel, page 3) ; qu'en ne répondant pas à ce moyen pourtant opérant, de nature à établir que la mise en cause de l'EPIC SNCF était dépourvue de tout fondement, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.