CEntre de Recherche sur les CLauses ABusives
Résultats de la recherche

CA PARIS (pôle 5 ch. 11), 27 novembre 2020

Nature : Décision
Titre : CA PARIS (pôle 5 ch. 11), 27 novembre 2020
Pays : France
Juridiction : Paris (CA), Pôle 5 ch. 11
Demande : 19/17947
Date : 27/11/2020
Nature de la décision : Confirmation
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 19/09/2020
Décision antérieure : CASS. COM., 9 juillet 2019
Référence bibliographique : 6169 (partenariat commercial)
Décision antérieure :
Imprimer ce document

 

CERCLAB - DOCUMENT N° 8669

CA PARIS (pôle 5 ch. 11), 27 novembre 2020 : RG n° 19/17947

Publication : Jurica

 

Extrait : « Selon les dispositions de l'article L. 442-6 alinéa 2 du code de commerce issues de la loi n° 2010-874 du 27 juillet 2010 applicable au litige : « Engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice causé, le fait, par tout producteur, commerçant, industriel ou personne immatriculée au répertoire des métiers : (...°) 2° De soumettre ou de tenter de soumettre un partenaire commercial à des obligations créant un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties. »

Selon les dispositions de l'article 1-8 4) des conditions générales des deux contrats « En cas de résiliation du contrat avant l'expiration du délai de 3 ans ou avant l'expiration des années suivantes le client sera redevable non seulement de ses factures impayées mais également du montant intégral restant à courir pour cette dite période comprise entre la résiliation et l'échéance du contrat. »

Les dispositions de l'article L 442-6 précitées s'inscrivent dans un dispositif de lutte contre les pratiques anti-concurrentielles entre sociétés partenaires dans une relation de marché, elles sont applicables aux contractants qui travaillent au développement de leur activité économique par la réalisation de bénéfices propres.

Ces dispositions ne peuvent donc valablement être invoquées dans le cadre d'un contrat de prestations de services liant un fournisseur à son client. La société LFPI sera donc déboutée de ce chef. »

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE PARIS

PÔLE 5 CHAMBRE 11

ARRÊT DU 27 NOVEMBRE 2020

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 19/17947 (9 pages). N° Portalis 35L7-V-B7D-CAWBS. Décisions déférées à la Cour : Arrêt du 9 juillet 2019 - Cour de Cassation de PARIS - pourvoi n° U 17-23.729. Arrêt du 1er juin 2017 - Cour d'appel de PARIS – R.G. n° 15/08834. Jugement du 10 mars 2015 - Tribunal de commerce de PARIS – R.G. n° 2013058472.

 

DEMANDERESSE À LA SAISINE :

SAS LFPI REIM

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège, immatriculée au RCS de PARIS sous le n° XXX, [...], [...], Représentée par Maître Christofer C. de la SELAS C. & S., avocat au barreau de PARIS, toque : R175 substitué par Maître Adèle TEULON de la SELAS C. & S., avocat au barreau de PARIS, toque : R175

 

DÉFENDERESSE A LA SAISINE :

SARL RÉSEAUX SOLUTIONS SYSTEMS

agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège, immatriculée au RCS de NANTERRE sous le numéro YYY, [...], [...], Représentée par Maître Jacques B., avocat au barreau de PARIS, toque : G0334, avocat postulant, Assistée de Maître François E. de l'AARPI D. E., avocat au barreau de PARIS, toque : R015, avocat plaidant

 

COMPOSITION DE LA COUR : L'affaire a été débattue le 15 octobre 2020, en audience publique, devant la Cour composée de : Mme Marie-Ange SENTUCQ, Présidente de chambre, M. Denis ARDISSON, Président de la chambre, Mme Isabelle PAULMIER-CAYOL, Conseillère, qui en ont délibéré. Un rapport a été présenté à l'audience dans les conditions prévues par l'article 804 du code de procédure civile.

Greffière, lors des débats : Mme Marie-Gabrielle de La REYNERIE.

ARRÊT : - contradictoire, - par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, - signé par Mme Marie-Ange SENTUCQ, Présidente de chambre et par Mme Saoussen HAKIRI, greffier à laquelle la minute a été présentée par la magistrate signataire.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

La société Réseaux Solutions Systems (la société R&S Systems) a pour objet la vente, la location et la maintenance de matériels bureautiques, informatiques et de logiciels.

Dans le courant de l'année 2011 R&S Systems a démarché la société Foncière LFPI (la société LFPI) pour lui proposer un service d'impression sur mesure avec mise en place d'un contrat de location longue durée d'un photocopieur avec une société tierce, la société G., et la conclusion entre LFPI et R&S Systems de deux contrats de maintenance du matériel.

Le 5 mai 2011, la société LFPI a signé avec la société R&S Systems un contrat de service télécopie-connectique à effet au 20 avril 2011 et un contrat de service de maintenance photocopieur à effet au 24 juin 2011.

Le 22 octobre 2012, LFPI a demandé à R&S Systems que les contrats signés le 5 mai 2011 soient transférés à LFPI REIM, société en cours de constitution et faisant partie intégrante du groupe La Financière Patrimoniale d'Investissement (LFPI).

Après divers échanges, la résiliation des contrats de maintenance a été notifiée par LFPI REIM à R&S Systems par courriel du 19 avril 2013.

Par courrier recommandé en date du 30 mai 2013, LFPI REIM invoquait divers manquements qu'elle imputait à R&S et lui confirmait la résiliation des contrats « avec effet immédiat rétroactif au 19 avril 2013 et aux torts exclusifs de la société R&S et sans frais. »

Le 25 juin 2013, le conseil de la société R&S Systems mettait en demeure LFPI REIM de payer la somme totale de 5.092,07 euros TTC au titre des factures impayées outre les indemnités de résiliation prévues au contrat soit la somme de 31.343,06 euros TTC.

Cette sommation est restée vaine.

La société R&S Systems a assigné LFPI devant le tribunal de commerce de Paris et par jugement rendu le 10 mars 2015, le tribunal a condamné LFPI REIM à verser à la société Réseaux Solutions Systems les sommes de :

- 5.092,07 euros TTC avec intérêts légaux à compter du 25 juin 2013 (factures impayées),

- 25.000 euros avec intérêts légaux à compter du 25 juin 2013 (indemnité de résiliation),

- 2.000 euros au titre de l'article 700,

le tout au bénéfice de l'exécution provisoire, les parties étant déboutées de leurs autres demandes.

Par un arrêt du 1er juin 2017 cette cour a :

- confirmé le jugement déféré uniquement en ce qu'il condamne LFPI à payer à la société Réseaux Solutions Systems la somme de 5.092,07 euros TTC avec intérêts légaux à compter 25 juin 2013.

- L'infirmant pour le surplus, la cour a débouté R&S Systems de toutes ses autres demandes et l'a condamnée à payer à LFPI les sommes de 4.950 euros à titre de dommages et intérêts et 4.000 euros au titre des frais irrépétibles.

Sur le pourvoi formé par Réseaux Solutions Systems, la cour de cassation, par un arrêt rendu le 9 juillet 2019, a cassé et annulé en toutes ses dispositions cet arrêt :

1 - sur le moyen pris en sa première branche de l'obligation pour le juge de ne pas dénaturer l'écrit qui lui est soumis, l'arrêt ayant retenu que R&S Systems n'a pas respecté ses engagements contractuels au regard des volumes prévisibles des deux catégories de copies, le nombre minimum de copies couleur et de copies noir et blanc ayant été fixé contractuellement à 120.000 copies couleurs et 112.000 copies noir et blanc, chiffres qui devaient correspondre à l'utilisation prévisible du photocopieur au vu des besoins du client alors que le contrat, qui fixait la redevance annuelle forfaitaire pour un volume de copies à réaliser soit 120.000 couleur et 112.000 noir et blanc, prévoyait ainsi la facturation des éventuelles copies supplémentaires avec un tarif pour chaque catégorie ce dont il s'évinçait que la société LFPI était susceptible de réaliser un nombre de copies supérieur aux prévisions initiales.

2 - sur le moyen pris en sa septième branche tiré de la violation de l'article 4 du code de procédure civile l'arrêt ayant rejeté les demandes de dommages et intérêts présentées par LFPI REIM tendant au remboursement de la totalité des sommes payées et au paiement de 20.000 euros à titre de de dommages et intérêts faute de justificatif et ayant ensuite retenu que le préjudice subi par celle-ci du fait des manquements commis par R&S Systems peut être évalué au montant du dépassement du nombre des photocopies couleur non contractuellement prévues et facturées en raison du paramétrage par défaut, alors que dans ses dernières conclusions, LFPI REIM ne demandait que la condamnation de R&S Systems à lui rembourser les sommes versées au titre des contrats du 5 mai 2011 soit 47.556,79 euros ou subsidiairement 23.778 euros TTC ainsi que 20.000 euros en réparation de son préjudice.

La société LFPI REIM a saisi cette cour selon déclaration de saisine sur renvoi du 16 septembre 2019, enrôlée le 19 septembre 2020.

[*]

Par ses conclusions signifiées par le RPVA le 25 septembre 2020 LFPI REIM demande à la cour de :

Vu les articles 1134, 1147, 1152 et 1184 anciens du Code civil,

Vu l'article L. 442-6 alinéa 2 du Code de commerce,

DÉCLARER recevable et bien fondée LFPI REIM en son appel du jugement du 10 mars 2015 par le Tribunal de commerce de Paris ;

INFIRMER ledit jugement pour les chefs critiqués ;

DÉBOUTER R&S SYSTEMS de l'intégralité de ses demandes, fins et prétentions ;

Et statuant à nouveau,

À titre principal,

CONSTATER la résolution des contrats de maintenance conclus entre les sociétés R&S SYSTEMS et LFPI REIM du 5 mai 2011 ;

CONDAMNER R&S SYSTEMS au remboursement des sommes versées au titre des contrats conclus avec LFPI REIM, en date du 5 mai 2011, soit à la somme 47.556,79 € TTC ;

À titre subsidiaire,

CONSTATER la résiliation aux torts exclusifs des contrats de maintenance conclus entre les sociétés R&S SYSTEMS et LFPI REIM du 5 mai 2011 ;

DÉBOUTER R&S SYSTEMS de sa demande de paiement des deux factures impayées en raison de l'opposabilité effective d'une exception d'inexécution par LFPI REIM ;

À titre infiniment subsidiaire,

DÉCLARER nulle et non écrite la clause de résiliation anticipée stipulée à l'article 1.8 4) des contrats de maintenance du 5 mai 2011 ;

ou subsidiairement,

RÉDUIRE l'indemnité de résiliation anticipée stipulée à l'article 1.8 4) des contrats de maintenance du 5 mai 2011, en ce qu'elle est manifestement excessive au regard de l'absence de préjudice subi par R&S SYSTEMS, à la somme de 1 € ;

En conséquence,

CONDAMNER R&S SYSTEMS au paiement à LFPI REIM d'une indemnité de 16.162,35 € en réparation de son préjudice financier et son préjudice de jouissance ;

CONDAMNER R&S SYSTEMS à verser à LFPI REIM la somme de 5.000 € en application de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

[*]

Par ses conclusions signifiées le 5 octobre 2020 via le RPVA la SARL RESEAUX SOLUTIONS SYSTEMS demande à la cour de :

Vu les dispositions des articles 1103, 1104, 1184 ancien, 1231-1 et 1231-6 du code civil

Vu les dispositions de l'article 9 du code de procédure civile

Vu l'arrêt rendu le 9 juillet 2019 par la cour de cassation

Juger LFPI REIM mal fondée en son appel

Débouter LFPI REIM de l'ensemble de ses demandes

Confirmer le jugement rendu le 10 mars 2015 en ce qu'il a condamné LFPI REIM à régler :

- la somme de 5.092,07 euros TTC avec intérêts légaux à compter du 25 juin 2013

- la somme de 25.000 euros avec intérêts légaux à compter du 25 juin 2013

Infirmer le jugement en ce qu'il a dit n'y avoir lieu à paiement de dommages et intérêts pour résistance abusive

Condamner LFPI REIM à verser à R&S Systems la somme de 5.000 euros au titre de la résistance abusive

Condamner LFPI REIM à verser à R&S Systems la somme de 5.000 euros au titre des frais irrépétibles.

Condamner LFPI REIM aux entiers dépens dont distraction au profit de maître B. conformament aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

[*]

L'affaire a été fixée à l'audience collégiale du 15 octobre 2020 à laquelle les parties ont présenté leurs observations et mise en délibéré par mise à disposition au greffe au 27 novembre 2020.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

SUR QUOI, LA COUR :

Sur la demande en résolution des contrats et les manquements contractuels :

La société LFPI fait valoir que les nombreuses pannes n'ont jamais eu pour origine une sur-exploitation du volume d'impression, qu'il appartenait à R&S Systems de l'alerter de façon suffisammment claire et anticipée sur les risques liés à cette éventuelle surexploitation, que les courriels envoyés établissent les dysfonctionnements récurrents du copieur 5045 à partir du mois de septembre 2012 et caractérisent la défaillance de R&S Systems dans l'exécution de son obligation de maintenance ; que sa défaillance dans l'exécution de son obligation de conseil est également avérée puisque la société R&S SYSTEMS n'a pas informé son co-contractant de l'inadaptation des volumes d'impression au regard des tarifs pratiqués et ne l'a pas alertée sur le coût de maintenance supérieur engendré par le paramétrage par défaut en mode couleur du copieur ; qu'enfin, le fait qu'une des filiales du groupe ait pu garder pendant 6 ans un contrat de maintenance avec R&S Systems est totalement étranger au présent litige.

La société R&S Systems oppose que c'est l'augmentation du volume de pages imprimées qui a causé une sur-exploitation du matériel lequel n'était pas conçu pour supporter le dit volume et qu' après avoir constaté cette inadaptation à la suite de multiples interventions sur le copieur elle a adressé à la société LFPI le 10 avril 2013, une nouvelle proposition commerciale sur 3 ans, portant sur le remplacement du photocopieur concerné laquelle a été refusée par la société co-contractante, au motif que lui serait appliqué « des tarifs prohibitifs pour une prestation déplorable » ; que les nombreuses fiches d'intervention produites et délibérément omises par la société LFPI établissent la parfaite exécution des obligations dues au titre du contrat de maintenance ; que la mauvaise foi de la société LFPI est évidente lorsqu'elle affirme que R&S SYSTEMS se devait de l'éclairer sur les particularités tarifaires de certains paramétrages alors que le contrat stipulait bel et bien, ainsi que l'arrêt de renvoi le souligne, une facturation pour les éventuelles copies supplémentaires avec un tarif spécifique pour chaque catégorie de copie, couleur et noir et blanc ; que le tableau Excel dont la société LFPI remet en cause la fiabilité des données, reprend les données afférentes au relevé des compteurs qui figurent sur les fiches d'intervention pourtant validées par cette dernière ; que la preuve que ce paramétrage soit le fait de la société R&S SYSTEMS n'est aucunement rapportée, étant observé qu'il n'est pas exclu que ce paramétrage ait été effectué entre le 17 avril 2013 et le jour de la visite de la société concurrente qui en a fait le constat ; que rien n'établit par conséquent la gravité des manquements imputés à la société R&S SYSTEMS; qu'enfin, à supposer que la société R&S SYSTEMS puisse avoir manqué à ses obligations contractuelles, il aurait dès lors fallu que tous les autres contrats soient résolus ce qui n'est pas le cas, une filiale de la société LFPI ayant entretenu une relation commerciale pendant plus de 6 ans avec la société R &S SYSTEMS.

Sur ce,

Deux contrats dit de service-télécopie-connectique, signés le 5 mai 2011, ont été formalisés entre la société Foncière LFPI et la société R&S SYSTEMS, à effet respectif au 20 avril et au 24 juin 2011, ayant pour objet la fourniture et la maintenance d'un matériel d'impression numérique modèle Canon IR ADVANCE C 5045, pour une durée de trois ans, prévoyant une redevance annuelle de 240 euros avec une facturation trimestrielle.

La facturation contractuellement prévue a été calculée à partir du volume de copies réalisé sur la base de 120.000 copies minimum, incluses dans le forfait annuel couleur dit « poly » et 112.000 copies minimum, incluses dans le forfait annuel noir et blanc, le prix hors taxe par copie étant fixé pour les copies couleur à 0,055 euros et pour les copies noir et blanc à 0,0055 euros par copie.

Il est produit aux débats quatre courriels de demande d'intervention sur le matériel, le premier en date du 27 septembre 2012, sollicitant le remplacement du tambour jaune, le second en date du 10 octobre 2012, signalant des dysfonctionnements périodiques, le troisième en date du 12 novembre 2012, faisant état d'une non reconnaissance du tiroir A4 n°1 et le dernier en date du 6 mars 2013, alertant sur la mauvaise qualité de l'impression.

Le relevé de compteur produit par la société R&S SYSTEMS établit que les volumes se sont élevés à 98.554 au 27 juin 2012, à 69.640 au 27 septembre 2012 et à 92.355 au 18 décembre 2012 soit pour la période considérée de moins de six mois, un volume total de 260.549 copies.

Sans qu'il soit permis d'en déduire une surexploitation du matériel, ces chiffres caractérisent néanmoins à partir de 2012 une très nette augmentation des volumes d'impression au regard du plafond annuel compris dans le forfait, dépassement sur lequel l'attention de la société LFPI a été attirée dès le 5 avril 2013, par un mail adressé par le directeur général de la société R& S SYSTEMS, qui sollicitait un rendez-vous auprès de sa cliente : « sur le dossier du photocopieur Canon IR ADVANCE C 5054i dans le but de clarifier trois points importants:

1 - les contrats de location et de maintenance en cours, leur durée, les forfaits copies,

2 - les solutions pratiques que nous pouvons mettre en œuvre pour vous aider à réduire substantiellement le montant de vos factures de maintenance

3 -la rationalisation de votre parc de systèmes d'impression dans le but de réduire la sollicitation permanente d'un seul matériel qui se trouve depuis quelques mois en surcapacité et de facto réduire considérablement le nombre d'interventions curatives sur ce matériel pour revenir à un taux de disponibilité de 100 %, comme nous l'avons connu il y a encore un peu de temps au sein de votre entreprise. »

Il doit par ailleurs être observé qu'aucun de ces courriels ne fait état d'une difficulté liée au paramétrage par défaut de la quantité de copies couleur et de l'inadaptation de ce paramétrage au cahier des charges initialement prévu et qu'en outre, lorsque la société LFPI a sollicité de la société R &S SYSTEMS, par courrier du 22 octobre 2012, son accord sur le transfert desdits contrats au profit de la société LFPI REIM dans le cadre d'une restructuration du groupe, aucune réserve n'a été émise quant à la qualité des prestations fournies par le cocontractant.

Enfin, la société LFPI REIM ne peut sérieusement soutenir ne pas avoir été alertée sur les particularités tarifaires du paramétrage quand d'une part, les deux contrats font expressément référence au surcoût liés à un dépassement des volumes compris dans les forfaits annuels pour chaque type d'impression et que, d'autre part, le dirigeant de la société R&S SYSTEMS a expressément alerté sa cliente, antérieurement à la résiliation, sur la nécessité de réduire la sollicitation permanente du photocopieur en l'invitant à échanger sur des solutions alternatives plus économiques.

Il apparaît donc que la société R&S SYSTEMS a toujours répondu à son obligation de maintenance en conséquence des dysfonctionnements précités lesquels, à raison de quatre demandes d'intervention en deux ans, ont toujours été résolus et n'excèdent pas en tout état de cause, le cadre d'un entretien courant.

Dans ce contexte, le 10 avril 2013 la société R&S SYSTEMS, faisant référence aux dysfonctionnements constatés dans le cadre de l'exécution de ses obligations de maintenance et à la suite de son courriel du 5 avril précédant, a transmis à la société LFPI une proposition commerciale visant à remplacer le matériel par un Canon IR ADVANCE C 7270i, soulignant une économie en coûts de maintenance basée sur le relevé des consommations du 31 mars 2013, de 784,12 euros HT.

Cette proposition prévoyait notamment :

- une garantie maintenance dans un délai d'intervention de 4 heures,

- un coût par copie de 0,0048 euros HT par page en noir et blanc (volume estimé) et de 0,048 euros HT par page couleur,

- une maintenance connectique suivant cahier des charges, avec notamment l'installation des drivers (pilotes) et le paramétrage des postes utilisateurs.

La société LFPI REIM a refusé cette proposition par un courriel du 17 avril 2013 en ces termes : « le photocopieur financé sous forme de crédit-bail pour près du double de sa valeur et compte tenu de vos paramétrages, la quantité de copies couleur est près de 5 fois supérieure aux prévisions au détriment des copies noir et blanc qui sont 10 fois moins chères ».

Le 19 avril 2013, la société LFPI résiliait unilatéralement le contrat en mettant en cause la société R&S SYSTEMS pour avoir « volontairement paramétré nos imprimantes sur des copies couleur 10 fois plus chères que le noir et blanc et proposé un nouveau financement pour un matériel sur une base de plus de 200 % de sa valeur. »

Il sera liminairement observé qu'aucune des parties ne conteste que le paramétrage de la quantité de copies couleur ait été modifiable via le pilote d'impression dans le cadre de la maintenance connectique à laquelle la société R&S SYSTEMS s'était engagée et que la redevance annuelle hors taxe de 240 euros était fixée sur la base d'un volume annuel inclus dans ce forfait de 120.000 pour les copies couleur, et de 112.000 pour les copies noir et blanc, un prix unitaire hors taxe s'appliquant par copie en cas de dépassement des volumes prévus.

Il s'évince de la chronologie des faits rappelés que la société LFPI n'a jamais fait état auprès de son prestataire du grief lié à l'inadaptation du paramétrage par défaut de la quantité de copies couleur avant le 17 avril 2013, que la société R&S SYSTEMS a satisfait à son obligation de maintenance en intervenant en temps et heure pour remédier aux dysfonctionnements signalés à quatre reprise par sa cliente et qu'elle a rempli ses obligations au titre de son devoir de conseil, en proposant à la société LFPI, dès qu'elle a eu connaissance du grief précité entraînant un surcoût tarifaire, une nouvelle solution d'impression sur la base d'un prix unitaire inférieur prévoyant explicitement une maintenance connectique suivant cahier des charges.

Au demeurant, le rapport rédigé par la société ADVANCE BUREAUTIQUE mandatée par la société LFPI le 2 mai 2013 pour examiner le copieur litigieux, auquel se réfère cette dernière, en relevant que le coût d'acquisition du matériel litigieux avoisine 14.000 euros hors taxe, que de nombreuses pièces sont à changer sur le magasin grande capacité pour 1084 euros hors taxe et qu'il a été constaté que le matériel est paramétré par défaut en mode couleur ce qui implique parfois une dépense inutile de consommation couleur engendrant un coût supérieur à ce qu'il devrait être au sein de votre structure' ne caractérise aucun manquement imputable à la société R&S SYSTEMS aux obligations lui incombant tant au titre du contrat de maintenance qu'au titre de son devoir d'information et de conseil. Il tempère bien au contraire l'affirmation selon laquelle le paramétrage par défaut en mode couleur préjudicierait de manière systématique à la société appelante et ne vient donc aucunement au soutien de l'argument selon lequel le paramétrage par défaut en mode couleur procéderait d'une intention délibérée de la société R&S SYSTEMS d'augmenter les tarifs à son profit.

Par conséquent la société LFPI n'est pas fondée à se prévaloir de la condition résolutoire qui n'est sous-entendue, selon les dispositions de l'article 1184 du code civil, dans sa version antérieure à l'ordonnance n°2016-131 du 10 février 2016, applicable au litige, que pour le cas où l'une des deux parties n'a pas satisfait à son engagement.

Elle sera déboutée de ce chef.

La société LFPI n'est pas non plus fondée, au regard des motifs précédemment explicités, à se prévaloir d'un quelconque manquement imputable à la société R&S SYSTEMS au titre de son obligation d'information et de conseil et il ne saurait être fait droit aux demandes d'indemnisation formées de ce chef par la société LFPI qui en sera déboutée.

Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a condamné la société LFPI à régler à la société R & S SYSTEMS la somme de 5.092,07 euros avec intérêts légaux à compter du 25 juin 2013 date de la mise en demeure.

 

Sur la licéité de la clause de résiliation anticipée :

La société LFPI fait valoir que la clause article 1.8 4) des conditions générales de chacun des contrats qui encadre la résiliation anticipée à l'initiative de LFPI, stipule que la résiliation anticipée du contrat à l'initiative de LFPI entraîne pour elle le paiement d'une indemnité égale à la somme des factures impayées, auxquelles s'ajoute le montant intégral des sommes restant à courir entre la résiliation et la prochaine échéance du contrat, peu important l'existence d' une inexécution contractuelle de la part de R & S SYSTEMS ; qu'à l'inverse, le second alinéa de ce même article organise la résiliation anticipée à l'initiative de R &S SYSTEMS en offrant à cette dernière la possibilité de résilier le contrat sans être tenue au versement d'une quelconque indemnité et sans préavis même lorsque le motif est extérieur à LFPI ce qui caractérise un incontestable déséquilibre entre les parties en l'absence de soumission de R&S SYSTEMS à des conditions de résiliation similaires.

La société R&S SYSTEMS oppose que la clause litigieuse n'est pas sanctionnable sur le fondement des dispositions invoquées car elle est, selon la jurisprudence de cette cour, la contrepartie de la possibilité de pouvoir résilier de manière anticipée un contrat à durée déterminé ; qu'il serait injuste que le cocontractant victime de la résiliation brutale du contrat se voit privé du bénéfice attendu en raison de la résiliation anticipée ; qu'enfin toute résiliation unilatérale doit être indemnisée.

Sur ce,

Selon les dispositions de l'article L. 442-6 alinéa 2 du code de commerce issues de la loi n° 2010-874 du 27 juillet 2010 applicable au litige : « Engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice causé, le fait, par tout producteur, commerçant, industriel ou personne immatriculée au répertoire des métiers : (...°) 2° De soumettre ou de tenter de soumettre un partenaire commercial à des obligations créant un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties. »

Selon les dispositions de l'article 1-8 4) des conditions générales des deux contrats « En cas de résiliation du contrat avant l'expiration du délai de 3 ans ou avant l'expiration des années suivantes le client sera redevable non seulement de ses factures impayées mais également du montant intégral restant à courir pour cette dite période comprise entre la résiliation et l'échéance du contrat. »

Les dispositions de l'article L 442-6 précitées s'inscrivent dans un dispositif de lutte contre les pratiques anti-concurrentielles entre sociétés partenaires dans une relation de marché, elles sont applicables aux contractants qui travaillent au développement de leur activité économique par la réalisation de bénéfices propres.

Ces dispositions ne peuvent donc valablement être invoquées dans le cadre d'un contrat de prestations de services liant un fournisseur à son client.

La société LFPI sera donc déboutée de ce chef.

 

Sur la réduction du montant de l'indemnité de résiliation :

La société LFPI soutient que l'indemnisation prévue par les dispositions de l'article 1-8 4) précitée s'analyse en une clause pénale, qu'elle est excessive au regard du préjudice réellement subi par la société cocontractante et doit être réduite à un euro symbolique dans la mesure où la société intimée n'a mobilisé aucun moyen spécifique ni même opéré un investissement particulier et n'aura plus à assumer le coût des consommables et des interventions techniques pour les photocopieurs.

La société R&S SYSTEMS oppose que cette clause n'est que la juste contrepartie de la résiliation unilatérale dont elle est victime et répare justement le préjudice financier causé par cette résiliation.

Sur ce,

Aux termes de l'article 1152 du code civil (dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016) :

« Lorsque la convention porte que celui qui manquera de l'exécuter payera une certaine somme à titre de dommages-intérêts, il ne peut être alloué à l'autre partie une somme plus forte, ni moindre.

Néanmoins, le juge peut, même d'office, modérer ou augmenter la peine qui avait été convenue, si elle est manifestement excessive ou dérisoire. Toute stipulation contraire sera réputée non écrite ».

La clause article 1-8 3) stipule qu'en cas de location financière la durée du contrat de maintenance est réputée conclue pour la durée du contrat de location.

La clause article 1-8 4) stipule une évaluation forfaitaire et par avance des dommages-intérêts dus par le débiteur en cas d'inexécution totale du contrat, elle sanctionne de manière spécifique cette inexécution et elle est donc assimilable à une clause pénale.

La date d'échéance du contrat étant prévue au 24 juin 2014 et la résiliation étant intervenue plus d'un an avant l'échéance contractuelle, le 19 avril 2013, il est démontré que R&S SYSTEM a subi un préjudice lié à la perte du profit auquel elle pouvait légitimement prétendre de sorte que la preuve du caractère manifestement excessif de la clause pénale n'est nullement rapportée, la société R&S SYSTEMS acceptant au demeurant par la confirmation du jugement qu'elle sollicite, que l'indemnité due soit ramenée à 25.000 euros.

La société LFPI sera donc déboutée de sa demande et le jugement confirmé de ce chef.

 

Sur la résistance abusive de LFPI REIM :

La société R&S SYSTEMS demande réparation du préjudice causé par la mauvaise foi de la société LFPI REIM qui a mis un terme à la relation contractuelle sous de faux prétextes ce à quoi la société appelante oppose sa parfaite bonne foi.

Sur ce,

Selon les dispositions de l'article 1153 alinéa 4 du code civil, le créancier auquel son débiteur en retard a causé par sa mauvaise foi un préjudice indépendant de ce retard peut obtenir des dommages et intérêts distincts des intérêts moratoires de la créance.

En l'espèce la société R &S SYSTEMS ne caractérise ni a fortiori ne démontre aucun préjudice distinct du retard dans le paiement causé par la mauvaise foi du débiteur.

Elle sera déboutée de ce chef et le jugement entrepris confirmé en toutes ses dispositions.

 

Sur les frais irrépétibles :

La société LFPI sera condamnée à verser de ce chef à la société R&S SYSTEMS une somme de 5.000 euros.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

La cour,

Confirme en toutes ses dispositions le jugement entrepris ;

Déboute la société LFPI REIM de l'intégralité de ses demandes ;

Condamne la société LFPI REIM à régler à la société R&S SYSTEMS une somme de 5.000 euros au titre des frais irrépétibles ;

Condamne la société LFPI REIM aux entiers dépens de première instance et d'appel et accorde à Maître B. le bénéfice des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER                                LA PRÉSIDENTE