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CASS. CIV. 1re, 25 novembre 2020

Nature : Décision
Titre : CASS. CIV. 1re, 25 novembre 2020
Pays : France
Juridiction : Cour de cassation Ch. civile 1
Demande : 19-17997
Décision : 20-716
Date : 25/11/2020
Numéro ECLI : ECLI:FR:CCASS:2020:C100716
Nature de la décision : Sursis à statuer
Mode de publication : Legifrance
Numéro de la décision : 716
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CERCLAB - DOCUMENT N° 8686

CASS. CIV. 1re, 25 novembre 2020 : pourvoi n° 19-17997 ; arrêt n° 716

Publication : Legifrance

 

Extrait : « 4. Par arrêt distinct rendu ce jour sur le pourvoi n° 19-17.996, il est sursis à statuer jusqu'au prononcé de la décision de la Cour de justice de l'Union européenne dans les affaires C-609/19 et C-776/19 à C-782/19 relatives aux questions posées par le tribunal d'instance de Lagny-sur-Marne par jugement du 2 août 2019 et par le tribunal de grande instance de Paris par sept jugements du 1er octobre 2019 et une ordonnance de mise en état du jour suivant.

6. Au regard des griefs formulés par le moyen et des questions préjudicielles posées, la décision de la Cour de justice de l'Union européenne à intervenir est de nature à influer sur la solution du présent pourvoi. Il y a lieu, dès lors, de surseoir à statuer jusqu'au prononcé de celle-ci. »

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR DE CASSATION

PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU 25 NOVEMBRE 2020

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION                                       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

N° de pourvoi : S 19-17997. Arrêt n° 716 FS-D.

DEMANDEUR à la cassation : Monsieur X. – Madame Y. épouse X.

DÉFENDEUR à la cassation : Société BNP Paribas Personal Finance

Président : Mme Batut (président). Avocat(s) : Maître Laurent Goldman, SCP Spinosi et Sureau.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                                                 (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

1°/ M. X., 2°/ Mme Y., épouse X., tous deux domiciliés [adresse], ont formé le pourvoi n° S 19-18.997 contre l'arrêt rendu le 13 février 2019 par la cour d'appel de Paris (pôle 5, chambre 6), dans le litige les opposant à la société BNP Paribas Personal Finance, société anonyme, dont le siège est [adresse], défenderesse à la cassation.

Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Champ, conseiller référendaire, les observations de Me Laurent Goldman, avocat de M. et Mme X., de la SCP Spinosi et Sureau, avocat de la société BNP Paribas Personal Finance, et l'avis de M. Lavigne, avocat général, après débats en l'audience publique du 6 octobre 2020 où étaient présents Mme Batut, président, Mme Champ, conseiller référendaire rapporteur, Mme Duval-Arnould, conseiller doyen, M. Girardet, Mme Teiller, MM. Avel, Mornet, Chevalier, Mmes Kerner-Menay, Darret-Gourgeon, conseillers, M. Vitse, Mmes Dazzan, Le Gall, Kloda, M. Serrier, Mmes Comte, Robin-Raschel, conseillers référendaires, M. Lavigne, avocat général, et Mme Randouin, greffier de chambre,

la première chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

 

RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE                                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Faits et procédure :

1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 13 février 2019), suivant offre de prêt acceptée le 18 février 2009, la société BNP Paribas Personal Finance (la banque) a consenti à M. et Mme X. (les emprunteurs) un prêt libellé en francs suisses et remboursable en euros, dénommé Helvet Immo, destiné à financer l'acquisition d'un appartement à usage locatif.

2. Se prévalant du caractère erroné du taux effectif global du contrat de prêt, les emprunteurs ont assigné la banque en annulation de la stipulation d'intérêts conventionnels par acte du 15 octobre 2014 et invoqué, en cause d'appel, le caractère abusif de certaines clauses. Leur demande en annulation de la stipulation d'intérêts conventionnels a été rejetée.

 

Examen du moyen :

MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur)                               (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Enoncé du moyen

3. Les emprunteurs font grief à l'arrêt de déclarer irrecevables comme prescrites leurs demandes relatives à la reconnaissance du caractère abusif de certaines clauses des contrats ainsi que les demandes subséquentes, alors :

« 1°/ que la demande du consommateur tendant à voir déclarer non écrite une clause abusive n'est pas soumise à la prescription quinquennale ; qu'en retenant, pour les déclarer irrecevables, que les demandes des emprunteurs tendant à voir déclarer non écrites les clauses abusives des contrats de prêt Helvet Immo étaient soumises à la prescription quinquennale, la cour d'appel a violé les articles L. 110-4 du code de commerce et L. 132-1, devenu L. 212-1 et L. 241-1, du code de la consommation ;

2°/ qu'aucune limite temporelle n'est fixée à l'obligation pour le juge d'examiner d'office le caractère abusif d'une clause contractuelle dès qu'il dispose des éléments de droit et de fait nécessaires à cet effet ; qu'en décidant néanmoins, pour refuser d'examiner le caractère abusif des clauses des contrats de prêt dont elle était saisie, que le juge était soumis aux mêmes conditions de temps et de délais que les parties elles-mêmes, la cour d'appel, qui a méconnu son office, a violé l'article L. 132-1, devenu L. 212-1 et L. 241-1, du code de la consommation. »

 

RÉPONSE DE LA COUR DE CASSATION AU MOYEN                                    (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Réponse de la Cour :

4. Par arrêt distinct rendu ce jour sur le pourvoi n° 19-17.996, il est sursis à statuer jusqu'au prononcé de la décision de la Cour de justice de l'Union européenne dans les affaires C-609/19 et C-776/19 à C-782/19 relatives aux questions posées par le tribunal d'instance de Lagny-sur-Marne par jugement du 2 août 2019 et par le tribunal de grande instance de Paris par sept jugements du 1er octobre 2019 et une ordonnance de mise en état du jour suivant.

6. Au regard des griefs formulés par le moyen et des questions préjudicielles posées, la décision de la Cour de justice de l'Union européenne à intervenir est de nature à influer sur la solution du présent pourvoi. Il y a lieu, dès lors, de surseoir à statuer jusqu'au prononcé de celle-ci.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                                                              (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS, la Cour : SURSOIT à statuer sur le pourvoi jusqu'au prononcé de la décision de la Cour de justice de l'Union européenne dans les affaires C-609/19 et C-776/19 à C-782/19 ;

Renvoie la cause et les parties à l'audience du 19 octobre 2021 ;

Réserve les dépens ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq novembre deux mille vingt.

 

 

ANNEXE : MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur)             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Moyen produit par Maître Laurent Goldman, avocat aux Conseils, pour M. et Mme X.

 

RAPPEL DU DISPOSITIF DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Les époux X. font grief à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré irrecevables comme prescrites leurs demandes relatives à la reconnaissance du caractère abusif de certaines clauses des contrats Helvet Immo ainsi que les demandes subséquentes ;

 

RAPPEL DES MOTIFS DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

AUX MOTIFS QUE : Considérant que la banque soulève la fin de non-recevoir tirée de la prescription, ce qu'elle est autorisée à faire, en tout état de cause, en application de l'article 123 du code de procédure civile ; que les époux X. n'ont pas répondu sur les fins de non-recevoir ;

Considérant tout d'abord qu'aucun texte en droit français ne prévoit l'imprescriptibilité de l'action tendant à voir réputer non écrite une clause qui serait abusive ;

Considérant que le contrat est soumis, par sa date, aux dispositions de la loi n° 208-561 du 17 juin 2008, entrée en vigueur le 19 juin 2008, portant réforme de la prescription en matière civile ;

Considérant que cette loi a eu parmi ses objectifs essentiels, celui de raccourcir le temps et modifier la durée de la prescription jugée le plus souvent excessive, celui d'harmoniser les délais, et d'intégrer les enjeux européens pour rendre le système juridique français plus sécurisé, plus performant et attractif pour les opérateurs économiques et le droit contractuel plus attrayant aux yeux des investisseurs ;

Considérant qu'il y a lieu, notamment, de rappeler que les deux délais de prescription de l'action en nullité absolue et relative ont été unifiés, par cette loi, en un seul délai de 5 ans, de sorte qu'il n'existe plus, du point de vue du délai de la prescription, aucune différence entre l'ordre public de direction et l'ordre public de protection , et de souligner que les conséquences du prononcé de la nullité d'une clause et de la qualification de clause abusive sont identiques, puisque la clause nulle est réputée n'avoir jamais existé ;

Considérant que la cour de Strasbourg a jugé, dans l'arrêt Stubbings et autres contre Royaume-Uni du 22 octobre 1996, (n° 22083/93 et 22095/93) que les délais de prescription poursuivent un but légitime, celui de garantir la sécurité juridique, et que s'ils ne sont pas exagérément courts, ils ne constituent pas une entrave à l'accès au juge ;

Considérant que l'arrêt Cofidis de la CJCE du 21 novembre 2002 (C-473/00) ne consacre pas la thèse du caractère imprescriptible de l'action tendant à faire déclarer non écrite une clause qualifiée d'abusive mais dit simplement qu'il ne peut être opposé à un consommateur, défendeur à l'action intentée par un professionnel, l'exception de prescription, la cour examinant expressément l'hypothèse que le professionnel ait attendu l'expiration du délai de prescription pour agir ;

Considérant en effet que la cour a dit pour droit : «…» ;

Considérant que dans le cas d'espèce, les époux X. sont demandeurs à l'action et non pas défendeurs ;

Considérant en définitive et compte tenu de ce qui précède, qu'il y a lieu de dire que l'action engagée par les époux X. pour voir déclarer non écrites des clauses qualifiées d'abusives relève du droit commun des contrats ; qu'elle est donc soumise, comme les demandes, à la prescription quinquennale ;

Considérant que le point de départ du délai est la date de conclusion du contrat, soit le 18 février 2009, date d'acceptation de l'offre de prêt par l'emprunteur ; que le délai quinquennal de prescription a donc expiré le 19 février 2014, de sorte que la demande formulée pour la première fois dans des conclusions régularisées le 14 septembre 2018 tel prescrite ;

Considérant ainsi que la fin de non-recevoir tirée de la prescription doit être accueillie et que les demandes formées par les époux X. doivent être déclarées irrecevables ;

 

MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur)                               (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

1°) ALORS QUE la demande du consommateur tendant à voir déclarer non écrite une clause abusive n'est pas soumise à la prescription quinquennale ; qu'en retenant, pour les déclarer irrecevables, que les demandes des époux X. tendant à voir déclarer non écrites les clauses abusives des contrats de prêt Helvet Immo étaient soumises à la prescription quinquennale, la cour d'appel a violé les articles L. 110-4 du code de commerce et L. 132-1, devenu L. 212-1 et L. 241-1, du code de la consommation ;

2°) ALORS QUE, en outre, aucune limite temporelle n'est fixée à l'obligation pour le juge d'examiner d'office le caractère abusif d'une clause contractuelle dès qu'il dispose des éléments de droit et de fait nécessaires à cet effet ; qu'en décidant néanmoins, pour refuser d'examiner le caractère abusif des clauses des contrats de prêt dont elle était saisie, que le juge était soumis aux mêmes conditions de temps et de délais que les parties elles-mêmes, la cour d'appel, qui a méconnu son office, a violé l'article L. 132-1, devenu L. 212-1 et L. 241-1, du code de la consommation.