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CA ORLÉANS (ch. com. écon. fin.), 26 novembre 2020

Nature : Décision
Titre : CA ORLÉANS (ch. com. écon. fin.), 26 novembre 2020
Pays : France
Juridiction : Orléans (CA), ch. fin. et com.
Demande : 19/03276
Décision : 244-20
Date : 26/11/2020
Nature de la décision : Réformation
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 14/10/2019
Numéro de la décision : 244
Référence bibliographique : 6296 (cautionnement, recours personnel)
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CERCLAB - DOCUMENT N° 8712

CA ORLÉANS (ch. com. écon. fin.), 26 novembre 2020 : RG n° 19/03276 

Publication : Jurica

 

Extrait : « Les articles 2305 et 2306 ouvrent en effet à la caution un choix entre deux sortes de recours. Le premier texte, qui énonce que la caution qui a payé a « son » recours contre le débiteur principal, lui reconnaît une action personnelle, autrement dit un droit propre, découlant de sa qualité de caution. Le second fait application des principes de la subrogation énoncés à l'article 1251 du code civil qui, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, applicable à la cause, subroge aux droits du créancier celui qui, étant tenu avec d'autres ou pour d'autres au paiement de la dette, avait intérêt de l'acquitter.

Si les conditions en sont réunies, la caution a le libre choix entre les deux recours, que rien, au surplus, ne lui interdit d'exercer simultanément ou successivement.

Il est de jurisprudence établie que la production d'une quittance subrogative à seule fin d'établir la réalité du paiement est sans incidence sur le choix de la caution d'exercer son recours personnel ou subrogatoire (v. par ex. Civ. 1re, 29 novembre 2017, n° 16-22820 ; 17 mars 2016, n° 15-13893).

Au cas particulier, nonobstant l'application que le premier juge a fait par erreur de l'article 2305 du code civil, la société Interfimo a fait le choix, en première instance comme devant la cour, de n'exercer contre la débitrice principale, la société X., qu'un recours subrogatoire fondé sur l'article 2306.

Pour s'opposer à la demande principale en paiement de la société Interfimo, les appelants soutiennent que la clause de déchéance du terme contenue au contrat de prêt constituerait une clause abusive au sens de l'article L. 132-1 du code de la consommation, que cette clause serait en toute hypothèse abusive, et devrait être réputée non écrite, si elle ne l'est pas en application des prescriptions du code de la consommation, par application de l'article 1176 du code civil pris dans sa nouvelle rédaction et, subsidiairement, que la société Interfimo, en sa qualité de caution, n'avait pas le pouvoir de prononcer la déchéance du terme.

Il est acquis aux débats, en l'espèce, que la déchéance du terme n'a pas été prononcée par le prêteur, mais par la caution de premier rang, la société Interfimo, qui soutient de son côté que, par le seul effet de la subrogation légale dans les droits de la société Crédit Lyonnais, elle avait le droit de se prévaloir de la clause de déchéance du terme stipulée au contrat de prêt au profit du seul prêteur, tout en relevant que la discussion sur la régularité de la déchéance du terme ne présente plus d'intérêt maintenant que le prêt est arrivé à son terme conventionnel.

Sur l'utilité de se prononcer sur la licéité de la clause de déchéance du terme contenue à l'acte de prêt et, le cas échéant, sur la régularité de la déchéance du terme prononcée, non pas par le prêteur, mais par la caution elle-même, la cour observe, de première part, que la débitrice principale ne conteste plus devant elle la qualité de subrogée de la société Interfimo, notamment l'intérêt que cette dernière avait de s'acquitter de la dette, au sens de l'article 1251 ancien ; de seconde part que la discussion sur la déchéance du terme ne présente effectivement plus d'utilité maintenant que le prêt est arrivé à terme, en tous cas au stade de l'examen du recours exercé par la caution contre la débitrice principale.

En effet, lorsqu'une caution paie le créancier avant l'échéance, ce paiement prématuré ne la prive pas de recours, mais l'oblige seulement à n'exercer l'action du créancier qu'au moment où celui-ci aurait pu utilement agir. Il n'a jamais été contesté, en l'espèce, qu'avant de prononcer la déchéance du terme et de régler le capital restant dû, la société Interfimo avait réglé au prêteur, selon quittance subrogative versée aux débats, une somme de 34 190,28 euros correspondant à neuf échéances restées impayées de janvier à septembre 2014. La société Interfimo avait donc intérêt à agir, dès l'introduction de l'instance en janvier 2015, pour recouvrer cette somme, et peut désormais exercer son recours pour l'intégralité de la créance du Crédit Lyonnais, exigible indépendamment du prononcé de la déchéance du terme. Dans ces circonstances, il n'y a pas lieu de statuer sur les exceptions tirées de l'illicéité de la clause de déchéance du terme et de l'irrégularité du prononcé de la déchéance du terme, sans incidence sur le recours exercé par la caution.

A titre surabondant, la cour observe que tout en s'opposant à titre principal à tout paiement de la caution, la débitrice principale n'a jamais excipé des deux seules causes de déchéance prévues par l'article 2308 du code civil en cas de négligence de la caution.

La discussion relative à la licéité de la clause de clause de déchéance du terme contenue au contrat de prêt et à la régularité de la déchéance prononcée par la caution elle-même étant désormais sans emport sur la solution du litige, la société Interfimo se trouve donc fondée, maintenant que le prêt est arrivé au terme initialement convenu, et quand bien même elle aurait réglé le prêteur de manière prématurée, à exercer son recours à hauteur de la totalité de ce qu'elle lui a réglé, sauf à ce que la débitrice principale puisse utilement lui opposer des exceptions qu'elle aurait pu opposer au créancier, autres que celle tirée de l'illicéité de la clause de déchéance du terme. »

 

COUR D’APPEL D’ORLÉANS

CHAMBRE COMMERCIALE ÉCONOMIQUE ET FINANCIÈRE

ARRÊT DU 26 NOVEMBRE 2020

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 19/03276. Arrêt n° 244-20. N° Portalis DBVN-V-B7D-GBFG. DÉCISION ENTREPRISE : Jugement du Tribunal de Grande Instance d'ORLEANS en date du 11 septembre 2019.

 

PARTIES EN CAUSE :

APPELANTS : - Timbre fiscal dématérialisé N°: 1265248720673336

Monsieur X.

né le [date] à [ville], [adresse], Ayant pour avocat postulant Maître Damien P. DU S., membre de la SCP S. P. DU S., avocat au barreau d'ORLEANS, et pour avocat plaidant Maître Daniel B., avocat au barreau de PARIS

SELARL CABINET X.

Prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège social [...], [...], Ayant pour avocat postulant Maître Damien P. DU S., membre de la SCP S. P. DU S., avocat au barreau d'ORLEANS, et pour avocat plaidant Maître Daniel B., avocat au barreau de PARIS

D'UNE PART

 

INTIMÉES : - Timbre fiscal dématérialisé N°: 1265248944794067

La SA INTERFIMO

Représentée par son Président du Directoire, domicilié en cette qualité audit siège [...], [...], Ayant pour avocat postulant Me Pierre-François D., avocat au barreau D'ORLEANS et pour avocat plaidant Maître Denis-Clotaire L., membre de l'AARPI T. G. L. D. associés, avocat au barreau de PARIS

- Timbre fiscal dématérialisé N°:1265249009258812

SA CREDIT LYONNAIS

[...], [...], Ayant pour avocat Maître Delphine C., avocat au barreau d'ORLEANS

D'AUTRE PART

 

DÉCLARATION D'APPEL en date du : 14 octobre 2019

ORDONNANCE DE CLÔTURE du : 17 septembre 2020

COMPOSITION DE LA COUR : Lors des débats à l'audience publique du 15 OCTOBRE 2020, à 14 heures, Madame Carole CAILLARD, Président de la chambre commerciale à la Cour d'Appel d'ORLEANS, et Madame Fanny CHENOT, Conseiller, en son rapport, ont entendu les avocats des parties en leurs plaidoiries, avec leur accord, par application de l'article 786 et 907 du code de procédure civile.

Après délibéré au cours duquel Madame Carole CAILLARD, Président de la chambre commerciale à la Cour d'Appel D'ORLEANS, et Madame Fanny CHENOT, Conseiller, ont rendu compte à la collégialité des débats à la Cour composée de : Madame Carole CAILLARD, Président de la chambre commerciale à la Cour d'Appel d'ORLEANS, Madame Fanny CHENOT, Conseiller, Madame Nathalie MICHEL, Conseiller.

Greffier : Madame Marie-Claude DONNAT, Greffier lors des débats et du prononcé,

ARRÊT : Prononcé publiquement par arrêt contradictoire le 26 NOVEMBRE 2020 par mise à la disposition des parties au Greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

EXPOSÉ DU LITIGE :

Selon acte sous seing privé du 11 septembre 2013, la SA Crédit lyonnais a consenti à la société Xabinet X. (la société X.) un prêt d'un montant de 297.548 euros remboursable en 84 mensualités avec intérêts au taux conventionnel de 2 % l'an, destiné à financer l'acquisition d'un fonds libéral d'avocat (droits de présentation de la clientèle de M. X. à la société du même nom).

La société Interfimo s'est rendue caution solidaire des engagements souscrits par la société X. à hauteur de 100 % et par acte du 27 juillet 2013 donné en garantie de l'engagement pris par la société Interfimo, M. X., gérant de la société X., s'est porté sous-caution solidaire des engagements souscrits par la société X. envers le prêteur, avec le consentement exprès de son épouse et dans la limite de 292.000 euros.

Des échéances du prêt étant restées impayées à compter de janvier 2014, la société Interfimo a réglé à la société Crédit Lyonnais les six échéances échues du 26 janvier au 26 juillet 2014 puis, après avoir mis en demeure la société X. de lui rembourser la somme de 23.539,02 euros par courrier recommandé du 26 août 2014 adressé en copie à M. X., réceptionné le 27 août suivant par la débitrice principale comme par la sous-caution, en les informant qu'à défaut de paiement sous huit jours, elle ferait application de la clause d'exigibilité anticipée prévue au contrat, la société Interfimo a « pris acte », selon ses propres termes, de l'exigibilité anticipée du solde du prêt, et réglé à la société Crédit Lyonnais, selon quittance subrogative en date du 1er octobre 2014, la somme totale de 291.736,86 euros.

Par courrier recommandé du 7 octobre 2014 réceptionné le 9 octobre suivant, adressé en copie à la sous-caution dans les mêmes formes, la société Interfimo a vainement mis en demeure la société X. de lui rembourser la somme de 293.098,90 euros puis l'a fait assigner en paiement, avec la sous-caution, M. X., devant le tribunal de grande instance de Paris, par acte du 8 janvier 2015.

Par ordonnance du 21 juin 2016, le juge de la mise en état du tribunal de grande instance de Paris a renvoyé l'examen du litige, en application de l'article 47 du code de procédure civile, devant le tribunal de grande instance d'Orléans, auquel le dossier de l'affaire a été transmis.

Par ordonnance du 24 octobre 2018, le juge de la mise en état du tribunal de grande instance d'Orléans a rejeté la demande de la société X. et de M. X. tendant à l'organisation d'une expertise judiciaire aux fins de vérification du calcul du TEG mentionné au contrat de prêt.

Par acte du 24 janvier 2019, joint à l'instance principale par ordonnance du 13 mars suivant, la société X. et M. X. ont fait assigner la société Crédit Lyonnais en intervention forcée.

Par jugement du 11 septembre 2019, assorti de l'exécution provisoire sur la moitié des condamnations prononcées, sauf sur l'indemnité procédurale, le tribunal a :

- déclaré irrecevable l'exception de sursis à statuer soulevée par la SELARL X. et Monsieur X.

- rejeté les fins de non-recevoir tirées du défaut du droit agir soulevées par la SELARL X. et Monsieur X. contre la société Interfimo

- déclaré irrecevable l'action en nullité de la stipulation du TEG formée par la SELARL Cabinet X. et Monsieur X. contre le Crédit Lyonnais

- déclaré irrecevable l'action en responsabilité du Crédit Lyonnais pour manquement au devoir de mise en garde introduite par la SELARL Cabinet X. et Monsieur X.

- rejeté l'ensemble des demandes présentées par la SELARL Cabinet X. et Monsieur X. au titre de la déchéance du terme

- rejeté la demande de dommages-intérêts formée par la SELARL Cabinet X. et Monsieur X. contre le Crédit Lyonnais pour majoration d'intérêt en raison de la déchéance du terme prétendument non valablement prononcée

- rejeté l'ensemble des demandes formées par la SELARL Cabinet X. et Monsieur X. sur l'intérêt applicable et sur le devoir de mise en garde dirigées contre la société Interfimo

- rejeté l'ensemble des demandes formées par la SELARL Cabinet X. et Monsieur X. sur l'obligation annuelle de la caution et du conjoint de la caution

- rejeté la demande de dommages-intérêts à hauteur de 257.546,58 euros formée par la SELARL Cabinet X. et Monsieur X. contre la société Interfimo [tirée d'une rupture des négociations] ;

En conséquence :

- condamné la SELARL Cabinet X. à payer à la société Interfimo la somme de 325.161,36 euros majorée des intérêts au taux de 5 % l'an sur le principal de 291.736,86 euros à compter du 7 février 2017

- condamné Monsieur X., solidairement avec la SELARL Cabinet X., à payer à la société Interfimo la somme de 292.000 euros majorée des intérêts au taux légal à compter du 7 octobre 2014

- ordonné la capitalisation annuelle des intérêts

- condamné in solidum la SELARL Cabinet X. et Monsieur X. aux dépens de l'instance et à payer :

> à la société Interfimo, une indemnité de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile

> au Crédit Lyonnais, une indemnité de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

 -rejeté tous autres chefs de demande.

Pour statuer comme il l'a fait, le premier juge a retenu en substance :

- que l'exception de sursis à statuer fondée sur les dispositions de l'article 4 du code de procédure pénale était irrecevable faute d'avoir été soulevée avant toute défense au fond

- que la société Interfimo, en sa double qualité de caution de la société X. et de créancier de M. X., lui-même caution solidaire des engagements souscrits par la société X. envers le Crédit lyonnais, avait qualité et intérêt à agir sur le fondement de l'article 2306 du code de procédure civile

- que l'action en nullité de la stipulation de l'intérêt conventionnel engagée à l'encontre du Crédit Lyonnais était prescrite faute d'avoir été engagée dans les cinq ans du jour où par M. X. et la société X. ont connu ou auraient dû connaître cette erreur, fixé, en relevant que l'emprunteur avocat n'était pas un profane, à la date de la convention de prêt qui mentionnait le taux prétendument erroné

- que l'action en responsabilité engagée contre le Crédit lyonnais, soumise au délai de la prescription quinquennale commune s'agissant d'un prêt de nature professionnelle, était elle aussi irrecevable comme prescrite faute d'avoir été engagée dans les cinq ans de la conclusion du contrat de crédit

- que par l'effet de son paiement, la société Interfimo, légalement subrogée dans les droits du Crédit lyonnais, disposait de toutes les actions du prêteur se rattachant à sa créance et était donc en droit de prononcer la déchéance du terme pour non-paiement par la débitrice principale des mensualités de remboursement du prêt, après l'avoir mise en demeure de s'acquitter des sommes dues

- que la société Interfimo avait également pu légitimement opposer la déchéance du terme à M. X. et à la société du même nom en vertu de son droit propre

- que la déchéance du terme ayant été valablement prononcée par la société Interfimo, la demande de dommages et intérêts dirigée contre le Crédit lyonnais pour majoration d'intérêt était dénuée de fondement

- qu'en application de l'article 2305 du code civil, la société Interfimo se trouvait fondée à exercer contre la débitrice principale un recours tant pour le principal que pour les frais et les intérêts au taux conventionnel majoré de 5 % l'an sur la somme acquittée auprès du Crédit lyonnais

- que la société X., comme son associé unique M. X., avocat spécialisé en droit commercial et des affaires, étaient respectivement des emprunteur et caution avertis, envers lesquels le Crédit lyonnais n'était tenu d'aucun devoir de mise en garde

- qu'en sa qualité de caution, la société Interfimo n'était tenue d'aucune obligation d'information annuelle envers la sous-caution ou son épouse, qui n'était au demeurant pas elle-même caution

- qu'enfin M. X. ne pouvait reprocher à faute à la société Interfimo une rupture de négociations alors que ladite société, qui n'a reçu aucun règlement depuis qu'elle a elle-même payé le Crédit lyonnais, pouvait légitimement s'opposer à de nouveaux délais de paiement

- qu'au regard du contexte et de la durée de la procédure enfin, la demande de médiation ne pouvait qu'être rejetée comme inopportune

[*]

M. X. et la société X. ont relevé appel de cette décision par déclaration en date du 14 octobre 2019, en critiquant expressément tous les chefs du jugement en cause.

Dans leurs dernières conclusions notifiées le 16 septembre 2020, auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé de leurs moyens, la SELARL C. et M. X. demandent à la cour, de :

- dire et juger leur demande de sursis à statuer recevable et bien fondée

A titre principal :

- les déclarer recevables et bien fondés en leur appel

- infirmer le jugement du tribunal de grande instance d'Orléans en date du 11 septembre 2019 en toutes ses dispositions

Statuant à nouveau :

A) Sur le caractère abusif de la clause d'exigibilité anticipée du prêt :

- dire et juger que la société Interfimo ne peut se prévaloir de la clause de déchéance du terme du contrat de prêt signé le 11 septembre 2013 entre le Crédit Lyonnais et SELARL Cabinet X. en ce que celle-ci est réputée non écrite

A la supposer valable :

- constater que la déchéance du terme (ou exigibilité anticipée) du contrat de prêt n'a pas été régulièrement prononcée

- déclarer nulle et de nul effet la déchéance du terme prononcée par la société Interfimo

En conséquence,

- débouter la société Interfimo, en sa qualité de caution, de toutes ses demandes de remboursement des sommes qu'elle a réglées au profit du Crédit Lyonnais pour le paiement de créances non exigibles et ce quel que soit le fondement de sa demande

- débouter la société Interfimo de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions

A titre subsidiaire :

- débouter la société Interfimo de ses demandes en paiement de l'intérêt conventionnel du prêt en sa qualité de créancier subrogé dans les droits du Crédit Lyonnais, seuls des intérêts au taux légal pouvant être appliqués à compter d'une mise en demeure régulière

En conséquence,

- condamner la société Interfimo à rembourser à l'emprunteur tous les intérêts conventionnels indument perçus depuis la première échéance du prêt, soit une somme de 484, 89 euros

A défaut :

- dire et juger que les mentions relatives au TEG au sein du contrat de prêt sont inopposables aux appelants en ce qu'elles sont imprécises et incomplètes

- dire et juger que le TEG du prêt calculé sur une année de 360 jours, dite lombarde, ne peut être opposé aux appelants en ce qu'il est irrégulier

En conséquence,

- dire et juger que la société Interfimo ne peut se prévaloir d'un quelconque intérêt au taux contractuel

- condamner de plus fort la société Interfimo à restituer à l'emprunteur tous les intérêts conventionnels indument perçus depuis la première échéance du prêt, soit une somme de 484, 89 euros

B) sur l'information annuelle de la caution :

- dire et juger que la société Interfimo en qualité de société de financement et en qualité de subrogée a manqué à ses obligations à l'égard de la SELARL Cabinet X. et de M. X. en matière d'information annuelle de la caution

A titre subsidiaire, si la cour jugeait que la société Interfimo était régulièrement subrogée dans les droits du Credit Lyonnais :

- déclarer la société Interfimo tenue de répondre des fautes commises par le Crédit Lyonnais en son obligation d'information annuelle de la caution, conformément à l'article L. 313-22 du code monétaire et financier et en qualité de subrogée dans les droits et actions du Crédit lyonnais

En conséquence,

- dire et juger que M. X. ne peut être tenu au paiement des intérêts du prêt et ordonner que les paiements effectués par la débitrice principale, la SELARL Cabinet X., soient affectés prioritairement au règlement du principal de la dette sur le fondement de l'article 1254, devenu article 1342-10 du code civil

- condamner la société Interfimo au versement de dommages et intérêts à la SELARL Cabinet X. et à M. X. pour un montant de 10.000 euros chacun sur le fondement de l'article 1147 du code civil, devenu article 1231-1, au titre de la perte de chance

En tout état de cause :

- ordonner la poursuite de l'exécution du contrat de prêt convenu entre les parties, à la suite de l'arrêt d'appel, selon les modalités définies par elles-mêmes avant la déchéance du terme irrégulièrement prononcée par la société Interfimo ;

- débouter la société Interfimo de l'intégralité de ses demandes, fins et prétentions plus amples ou contraires

- ordonner une compensation entre les créances réciproques

-condamner la société Interfimo à régler à chacun de la SELARL Cabinet X. et de M. X. la somme de 10 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel en application de l'article 699 du code de procédure civile

[*]

Dans ses dernières conclusions notifiées le 2 septembre 2020, auxquelles il est également renvoyé pour l'exposé de ses moyens, la société Interfimo demande à la cour, au visa des articles 2306 et 1134 du code civil, de :

- confirmer le jugement entrepris en toutes ces dispositions,

- dire et juger irrecevable, comme nouvelle et prescrite, la demande indemnitaire de SELARL Cabinet X. et M. X. tendant à la voir condamner à payer la somme de 10.000 € sur le fondement de la perte de chance

- débouter la SELARL Cabinet X. et M. X. de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions, formées en appel,

- condamner la SELARL Cabinet X. à lui verser la somme de 325.161,36 euros majorée des intérêts au taux de 5 % l'an sur le principal de 291.736,86 € à compter du 7 février 2017 et jusqu'à parfait paiement,

- condamner M. X., solidairement avec la SELARL Cabinet X., à lui verser la somme de 292.000 euros majorée des intérêts au taux légal à compter du 7 octobre 2014 et jusqu'à parfait paiement,

- ordonner la capitalisation annuelle des intérêts,

- condamner la SELARL Cabinet X. solidairement avec M. X. à lui payer la somme de 30.000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la SELARL Cabinet X. solidairement avec M. X. en tous les dépens.

[*]

Dans ses dernières conclusions notifiées le 17 mars 2020, auxquelles il est pareillement renvoyé pour l'exposé de ses moyens, la société Le Crédit lyonnais demande à la cour de :

 -constater que la SELARL Cabinet X. et M. X. ne formulent aucune demande à son encontre,

-les condamner in solidum à lui payer une somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

-les condamner in solidum à supporter les dépens dont distraction au profit de Maître Delphine C., conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile

[*]

L'instruction a été clôturée par ordonnance du 17 septembre 2020, pour l'affaire être plaidée le 15 octobre suivant et mise en délibéré à ce jour.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

SUR CE, LA COUR :

La cour observe à titre liminaire que dans le dispositif de leurs dernières écritures, les appelants commencent par lui demander, avant même de solliciter l'infirmation du jugement entrepris, de « dire et juger [leur] demande de sursis à statuer recevable et bien fondée ».

Compte tenu de l'ordre de présentation de leurs prétentions au dispositif de leurs écritures, étant en outre observé que les appelants ne développent dans le corps de leurs écritures aucune critique du jugement qui les a déclarés irrecevables en la demande de sursis qu'ils avaient formulée en première instance, la demande de sursis présentée devant la cour ne peut s'entendre que comme une nouvelle demande de sursis.

Dès lors que les appelants n'explicitent d'aucune manière cette demande, et ne fournissent pas la moindre explication sur l'évènement dans l'attente duquel il conviendrait de surseoir à statuer, cette nouvelle demande de sursis ne peut qu'être rejetée.

La cour observe par ailleurs que, devant elle, les appelants ne contestent plus le droit à agir de la société Interfimo, et ne forment plus non plus aucune demande indemnitaire contre la société Crédit Lyonnais.

Pour répondre au litige qui lui est soumis, la cour doit examiner successivement et distinctement le recours que la caution (Interfimo) exerce à l'encontre le débitrice principale (la société X.) et celui qu'elle exerce à l'encontre de la sous-caution (M. X.), qui ne sont pas de même nature et n'obéissent donc pas au même régime, se prononcer, pour chacun de ces recours, sur les exceptions opposées par la débitrice principale et par la sous-caution, avant de statuer sur les demandes reconventionnelles formées par chacun des deux appelants.

 

Sur le recours formé par la caution contre la débitrice principale :

Les effets du cautionnement entre la caution et le débiteur principal sont régis par les articles 2305 et 2306 du code civil, qui ouvrent à la caution qui a payé le créancier deux recours, l'un personnel, l'autre subrogatoire.

Les articles 2305 et 2306 ouvrent en effet à la caution un choix entre deux sortes de recours. Le premier texte, qui énonce que la caution qui a payé a « son » recours contre le débiteur principal, lui reconnaît une action personnelle, autrement dit un droit propre, découlant de sa qualité de caution. Le second fait application des principes de la subrogation énoncés à l'article 1251 du code civil qui, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, applicable à la cause, subroge aux droits du créancier celui qui, étant tenu avec d'autres ou pour d'autres au paiement de la dette, avait intérêt de l'acquitter.

Si les conditions en sont réunies, la caution a le libre choix entre les deux recours, que rien, au surplus, ne lui interdit d'exercer simultanément ou successivement.

Il est de jurisprudence établie que la production d'une quittance subrogative à seule fin d'établir la réalité du paiement est sans incidence sur le choix de la caution d'exercer son recours personnel ou subrogatoire (v. par ex. Civ. 1re, 29 novembre 2017, n° 16-22820 ; 17 mars 2016, n° 15-13893).

Au cas particulier, nonobstant l'application que le premier juge a fait par erreur de l'article 2305 du code civil, la société Interfimo a fait le choix, en première instance comme devant la cour, de n'exercer contre la débitrice principale, la société X., qu'un recours subrogatoire fondé sur l'article 2306.

Pour s'opposer à la demande principale en paiement de la société Interfimo, les appelants soutiennent que la clause de déchéance du terme contenue au contrat de prêt constituerait une clause abusive au sens de l'article L. 132-1 du code de la consommation, que cette clause serait en toute hypothèse abusive, et devrait être réputée non écrite, si elle ne l'est pas en application des prescriptions du code de la consommation, par application de l'article 1176 du code civil pris dans sa nouvelle rédaction et, subsidiairement, que la société Interfimo, en sa qualité de caution, n'avait pas le pouvoir de prononcer la déchéance du terme.

Il est acquis aux débats, en l'espèce, que la déchéance du terme n'a pas été prononcée par le prêteur, mais par la caution de premier rang, la société Interfimo, qui soutient de son côté que, par le seul effet de la subrogation légale dans les droits de la société Crédit Lyonnais, elle avait le droit de se prévaloir de la clause de déchéance du terme stipulée au contrat de prêt au profit du seul prêteur, tout en relevant que la discussion sur la régularité de la déchéance du terme ne présente plus d'intérêt maintenant que le prêt est arrivé à son terme conventionnel.

Sur l'utilité de se prononcer sur la licéité de la clause de déchéance du terme contenue à l'acte de prêt et, le cas échéant, sur la régularité de la déchéance du terme prononcée, non pas par le prêteur, mais par la caution elle-même, la cour observe, de première part, que la débitrice principale ne conteste plus devant elle la qualité de subrogée de la société Interfimo, notamment l'intérêt que cette dernière avait de s'acquitter de la dette, au sens de l'article 1251 ancien ; de seconde part que la discussion sur la déchéance du terme ne présente effectivement plus d'utilité maintenant que le prêt est arrivé à terme, en tous cas au stade de l'examen du recours exercé par la caution contre la débitrice principale.

En effet, lorsqu'une caution paie le créancier avant l'échéance, ce paiement prématuré ne la prive pas de recours, mais l'oblige seulement à n'exercer l'action du créancier qu'au moment où celui-ci aurait pu utilement agir. Il n'a jamais été contesté, en l'espèce, qu'avant de prononcer la déchéance du terme et de régler le capital restant dû, la société Interfimo avait réglé au prêteur, selon quittance subrogative versée aux débats, une somme de 34 190,28 euros correspondant à neuf échéances restées impayées de janvier à septembre 2014. La société Interfimo avait donc intérêt à agir, dès l'introduction de l'instance en janvier 2015, pour recouvrer cette somme, et peut désormais exercer son recours pour l'intégralité de la créance du Crédit Lyonnais, exigible indépendamment du prononcé de la déchéance du terme. Dans ces circonstances, il n'y a pas lieu de statuer sur les exceptions tirées de l'illicéité de la clause de déchéance du terme et de l'irrégularité du prononcé de la déchéance du terme, sans incidence sur le recours exercé par la caution.

A titre surabondant, la cour observe que tout en s'opposant à titre principal à tout paiement de la caution, la débitrice principale n'a jamais excipé des deux seules causes de déchéance prévues par l'article 2308 du code civil en cas de négligence de la caution.

La discussion relative à la licéité de la clause de clause de déchéance du terme contenue au contrat de prêt et à la régularité de la déchéance prononcée par la caution elle-même étant désormais sans emport sur la solution du litige, la société Interfimo se trouve donc fondée, maintenant que le prêt est arrivé au terme initialement convenu, et quand bien même elle aurait réglé le prêteur de manière prématurée, à exercer son recours à hauteur de la totalité de ce qu'elle lui a réglé, sauf à ce que la débitrice principale puisse utilement lui opposer des exceptions qu'elle aurait pu opposer au créancier, autres que celle tirée de l'illicéité de la clause de déchéance du terme.

Devant la cour, la société X. n'excipe plus d'aucun manquement du prêteur (ou de la caution) à une obligation de conseil ou de mise en garde, mais maintient sa demande en nullité de la stipulation d'intérêt fondée sur le caractère erroné du calcul du TEG, en soutenant, d'une part que le contrat de prêt ne contient aucune information sur les modalités de calcul du TEG ; d'autre part que les intérêts ont été calculés sur la base d'une année lombarde.

La cour observe que de manière imprécise, voire contradictoire, la société X. lui demande, dans le dispositif de ses dernières écritures, de dire et juger que la société Interfimo « ne peut se prévaloir d'un quelconque intérêt au taux contractuel », et de condamner la société Interfimo à lui « restituer » les intérêts conventionnels indument perçus depuis la première échéance du prêt, soit une somme de 484,89 euros.

L'appelante indique expressément en page 14 de ses écritures que « la sanction de l'erreur affectant le TEG sera la nullité de la stipulation relative aux intérêts conventionnels et la substitution du taux légal au taux conventionnel » et ajoute dans le même le même sens, en page 18, qu'il convient de « prononcer la nullité de la stipulation d'intérêts relative aux intérêts conventionnels et la substitution du taux légal au taux conventionnel, dès l'origine du contrat de prêt ».

Dans ces circonstances, la demande de la société X. ne peut s'entendre comme une simple demande de déchéance des intérêts conventionnels, c'est-à-dire comme un moyen de défense tendant à faire rejeter comme non justifiée une partie de la demande de la société Interfimo, mais bien seulement comme une demande reconventionnelle de nullité de la clause d'intérêts du contrat de prêt, en ce qu'elle tend à la restitution d'intérêts trop perçus, et donc à l'obtention d'un avantage autre que le simple rejet de la prétention de l'intimée.

Le point de départ de la prescription de l'action en nullité de la stipulation de l'intérêt conventionnel engagée par un emprunteur qui a obtenu un concours financier pour les besoins de son activité professionnelle, comme le point de départ de l'exception de nullité de la stipulation de l'intérêt conventionnel contenue dans un acte de prêt ayant reçu un commencement d'exécution, en raison d'une erreur affectant le taux effectif global, court à compter du jour où l'emprunteur a connu ou aurait dû connaître le vice affectant le taux effectif global.

La société X., qui fonde notamment sa demande de nullité sur le fait que le prêt que le Crédit lyonnais lui a consenti stipule que les intérêts seront calculés, non sur une année civile de 365 jours, mais sur la base d'une année bancaire fixée à 360 jours, indique elle-même, en page 17 de ses écritures, qu'il ressort « de manière évidente » de l'article II-4 du contrat de prêt que les intérêts du prêt sont calculés sur la base d'une année lombarde.

Si les modalités de calcul des intérêts peuvent être difficilement compréhensibles lorsque, en dehors de toute clause du prêt le stipulant clairement, les intérêts ont, de fait, été calculés sur la base d'une année de 360 jours et que seuls des calculs mathématiques relativement complexes peuvent permettre de le déceler, le prêt indique très clairement, « de manière évidente » selon les propres termes de l'appelante, que le calcul a été opéré sur la base de l'année dite lombarde.

Dans ces circonstances, la société X., dont le gérant et unique associé se présente sur son site internet comme avocat spécialisé en droit des affaires et en droit commercial, ne peut sérieusement soutenir qu'elle n'aurait pas été en mesure de comprendre, dès la conclusion du contrat de prêt, sans aucun calcul ni recherche complémentaire, que les intérêts étaient calculés sur la base d'une année de 360 jours.

S'agissant de l'allégation d'une erreur de calcul du TEG, l'appelante ne soutient plus, dans ses dernières écritures, que ce taux a été indiqué au contrat de prêt au triple du TEG réel, ce qui reviendrait à concéder que l'erreur éventuellement commise ne l'aurait pas été à son détriment, mais fait valoir que les éléments de calcul du taux effectif global, comme ses modalités de calcul, n'ont pas été détaillés. La cour constate que les éléments de calcul figurent tous à l'acte de prêt et que, si l'on admet pour les besoins du raisonnement que le prêteur aurait dû expliciter à la société X. les modalités de calcul de ce taux, cette dernière a pu se convaincre, dès la signature du contrat de prêt là encore, que le contrat ne contenait aucune indication sur les modalités de calcul du taux effectif global.

Le délai de prescription quinquennale applicable à la demande d'annulation de la clause d'intérêt ayant commencé à courir, dans ces circonstances, le 11 septembre 2013, date de conclusion du prêt, la demande d'annulation de la stipulation d'intérêt formulée pour la première fois le 25 janvier 2019 contre la société Interfimo est irrecevable comme prescrite, comme la demande de restitution des intérêts réglés en application de cette clause.

S'agissant de l'information annuelle de la caution prévue par l'article L. 313-22 du code monétaire et financier, la société X., qui n'a pas la qualité de caution, mais celle de débitrice principale, ne peut sérieusement reprocher à la société Inferfimo, ni à la société Crédit Lyonnais dans les droits de laquelle la société Interfimo est subrogée, de ne pas lui avoir délivré l'information annuelle destinée aux cautions.

La société X. ne peut donc qu'être déboutée de sa demande tendant à entendre juger qu'ensuite de la déchéance du droit aux intérêts conventionnels, ses paiements doivent être affectés prioritairement au règlement du principal de sa dette.

La société Interfimo justifie, selon quittance subrogative, avoir réglé le 1er octobre 2014 à la société Crédit Lyonnais la somme de 291.736,86 euros pour le compte de la société X., en exécution de son engagement de caution.

La société X., qui ne justifie d'aucun fait ni d'aucun paiement libératoire, ne peut qu'être condamnée à rembourser cette somme à la société Interfimo.

Au-delà, la société Interfimo sollicite, par confirmation du jugement entrepris, la condamnation de la société X. à lui verser une somme de 325.161,36 euros majorée des intérêts au taux de 5 % l'an sur le principal de 291.161,36 euros à compter du 7 février 2017, selon un décompte arrêté à la date du 6 février 2017, qu'elle a établi en ajoutant à la somme réglée au créancier une somme de 350 euros au titre de frais de dossier, puis les intérêts de retard majorés prévus au contrat de prêt, calculés sur la somme qu'elle a payée.

L'action subrogatoire prévue à l'article 2306, dont le principal avantage est d'offrir à la caution le bénéfice des sûretés du créancier lorsque celui-ci en avait constituées, ne permet un remboursement que dans la mesure des droits du créancier et limité au montant payé par la caution, sans qu'aucun frais ni indemnités ne puissent être ajoutés.

La société Interfimo ne pouvant solliciter, sur le fondement du recours exclusivement subrogatoire qu'elle a choisi d'exercer, davantage que ce qu'elle a payé au créancier, la société X. relève à raison que la caution ne peut lui réclamer que les intérêts au taux légal, mais de manière inexacte, en revanche, que ces intérêts ne doivent courir qu'à compter de la mise en demeure qui lui a été adressée, alors qu'en application des règles de la subrogation, ces intérêts au taux légal courent de plein droit à compter de la date du paiement (v. par ex. Cass. civ. 1re, 18 mars 2003).

Par infirmation du jugement entrepris, la société X. sera en conséquence condamnée à payer à la société Interfimo la somme de 291 736,86 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 1er octobre 2014, capitalisés annuellement en application de l'article 1154 ancien du code civil à compter du 8 janvier 2015, date de la demande.

La société Interfimo n'ayant perçu aucun intérêt conventionnel, la société X. doit en revanche être déboutée de sa demande tendant à entendre condamner la caution à lui rembourser la somme de 484,89 euros correspondant aux intérêts qu'elle estime que cette dernière aurait indument perçus depuis la première échéance du prêt.

 

Sur le recours formé par la caution contre la sous-caution :

Aux termes de l'article 1134 du même code, pris dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites.

Dans l'hypothèse, comme en l'espèce, d'une action engagée par une caution contre sa sous-caution, la première agit non en qualité de caution, mais en celle de créancier garanti par le sous-cautionnement. Autrement dit, l'action de la caution (Interfimo) contre M. X., qui n'est pas cofidéjusseur mais sous-caution, est une action personnelle qui découle du contrat de sous-cautionnement les liant.

Au cas particulier, le contrat qui oblige M. X. est donc l'engagement de cautionnement qu'il a souscrit le 27 juillet 2013 et par lequel il s'est porté sous-caution solidaire, au profit de la caution de premier rang, la société Interfimo, des engagements souscrits envers le prêteur par la société X., à concurrence de 292.000 euros.

Il en découle que M. X., qui n'a aucun lien de droit avec le créancier principal (le Crédit lyonnais), ne peut opposer à la société Interfimo aucune exception tirée du contrat de prêt et des obligations que le Crédit lyonnais avait souscrites, non pas à son égard, mais envers la société X.

M. X. ne peut donc opposer à la société Interfimo aucune exception tirée d'une éventuelle illicéité de la clause de déchéance du terme stipulée au contrat de prêt, ou d'une éventuelle erreur affectant le calcul du TEG dans ce contrat.

Bien que la question relative à la régularité de la déchéance du terme prononcée par la société Interfimo soit désormais sans emport sur les sommes dues par la débitrice principale comme par la sous-caution, puisque l'intégralité de la créance du Créancier lyonnais est en toute hypothèse devenue exigible depuis septembre 2020, la cour observe que si le droit propre de la société Interfimo, tel qu'il résulte exclusivement du contrat de sous-cautionnement conclu avec M. X., ne lui donnait aucun pouvoir, dans ses rapports avec la sous-caution, d'exiger le remboursement par anticipation du prêt conclu entre la société Crédit Lyonnais et la société X., M. X. a en revanche expressément admis, en page 2 de contrat de sous-cautionnement qui l'oblige, « que la déchéance du terme opposable à l'emprunteur lui soit également opposable dès que la dénonciation lui en [aura été] faite » et renoncé, dans cette hypothèse, « à se prévaloir à l'encontre d'Interfimo du maintien des échéances contractuelles ».

La déchéance du terme ayant été dénoncée à M. X. par courrier recommandé du 7 octobre 2014, réceptionné le 9 octobre suivant, la sous-caution ne peut opposer à la caution l'irrégularité de la déchéance du terme qu'elle a prononcée ou dont, selon ses termes, elle a « pris acte ».

S'agissant de l'information annuelle due à la caution en application de l'article L. 313-22 du code monétaire et financier, M. X. fait valoir, en se prévalant de 1346-5 du code civil, dont il soutient qu'il s'appliquerait par anticipation à la situation litigieuse, qu'il peut opposer à la société Interfimo les exceptions qu'il pouvait opposer au subrogeant. Il en déduit que, n'ayant reçu aucune information du Crédit Lyonnais, il ne peut être tenu des intérêts du prêt et que les paiements effectués par la débitrice principale devront être imputés prioritairement sur le capital de la dette.

M. X. ne peut exciper d'un quelconque manquement de la société Crédit Lyonnais à son égard, alors que, ne s'étant pas porté caution en faveur de la banque, celle-ci n'était débitrice à son égard d'aucune information et que, ainsi qu'on vient de le dire, il ne peut de toute façon opposer à la société Interfimo qui exerce contre lui un recours purement personnel tiré du contrat qui les lie, aucune exception tirée de ses prétendus rapports avec le Crédit lyonnais.

M. X. ne peut pas plus utilement reprocher à la société Interfimo d'avoir elle-même failli à son obligation d'information annuelle à son égard, en faisant valoir que cette société est une société de financement, ce qui est indifférent dans les rapports entre eux.

Les dispositions de l'article L. 313-22 du code monétaire et financier dont se prévaut M. X. ne sont en effet applicables qu'aux seuls concours financiers (v. par ex. Cass. com. 13 février 2007, n° 05-13308 ; 3 décembre 2003, n° 99-12653). En l'espèce la société Interfimo n'a accordé aucun concours financier ; elle a accordé à la société X. un cautionnement qui constitue une garantie, et non une opération de crédit. Elle n'était donc tenue à son égard d'aucune obligation d'information annuelle.

M. X. ne peut donc qu'être débouté de sa demande fondée sur les dispositions de l'article L. 313-22 du code monétaire et financier tendant à entendre ordonner que les paiements effectués par la débitrice principale soit imputés par priorité sur le capital de la dette.

Dès lors qu'elle justifie, selon quittance subrogative du 1er octobre 2014, avoir réglé à la société Crédit Lyonnais, pour le compte de la société X., la somme de 291.736,86 euros en exécution de son engagement de caution de premier rang, la société interfimo est fondée à réclamer à M. X., à raison des effets attachés à son paiement et en exécution de l'engagement de sous-caution de ce dernier, la somme sus-énoncée de 291.736,86 euros.

La société Interfimo sollicite, par confirmation du jugement entrepris là encore, la condamnation de M. X. à lui payer, solidairement avec la société X., et dans la limite de son engagement, la somme de 292.000 euros majorée des intérêts au taux légal à compter du 7 octobre 2014.

Dès lors que la société Interfimo ne justifie d'aucune convention conclue entre elle et la sous-caution stipulant un taux d'intérêt, la caution n'est fondée à réclamer à M. X. que les intérêts au taux légal à compter de son paiement (v. par ex. Cass. com, 16 juillet 2007, n° 05-19902).

Par infirmation du jugement entrepris, M. X. sera donc condamné, solidairement avec la société X., à payer à la société Interfimo la somme de 291.736,86 euros majorée des intérêts au taux légal à compter du 1er octobre 2014, capitalisés annuellement en application de l'article 1154 ancien du code civil à compter du 8 janvier 2015, date de la demande.

 

Sur les demandes reconventionnelles de la débitrice principale et de la sous-caution :

Les appelants demandent à la cour d'ordonner « la poursuite de l'exécution du contrat de prêt convenu entre « les parties », à la suite de l'arrêt, selon les modalités définies par elles-mêmes avant la déchéance du terme prononcée irrégulièrement par la société Interfimo ».

Le prêt souscrit le 11 septembre 2013 par la société X. auprès de la société Crédit Lyonnais est arrivé à terme en septembre 2020.

Dans ces circonstances, la demande des appelants tendant, en tout état de cause, à entendre ordonner la poursuite de l'exécution de contrat selon les modalités conventionnellement définies avant la déchéance du terme discutée, ne peut qu'être rejetée comme étant dénuée d'objet.

Les appelants sollicitent par ailleurs la condamnation de la société Interfimo à payer à chacun d'eux la somme de 10.000 euros, en application de l'article 1147 ancien du code civil, au titre d'une perte de chance.

Au soutien de cette demande nouvelle en cause d'appel, les appelants soutiennent que la déchéance du terme irrégulièrement prononcée par la société Interfimo « a eu des conséquences, non seulement dans l'exigibilité immédiate de l'intégralité de la dette de la société X., mais aussi dans l'aggravation de celle-ci », en expliquant que la société X. a perdu une chance de pouvoir rembourser au Crédit Lyonnais, à compter de la première échéance impayée, les échéances à échoir majorées du taux d'intérêt de 2 %.

En ajoutant que « l'exigibilité immédiate de la dette, comme son aggravation », ont causé à la société X. et à M. X. un « préjudice important », sur la nature et le montant duquel ils ne s'expliquent pas, les appelants sollicitent chacun la somme de 10.000 € à titre de dommages et intérêts, « au titre de la perte de chance ».

La société Interfimo réplique que cette demande de dommages et intérêts doit être déclarée irrecevable, au premier chef comme nouvelle en cause d'appel, par application de l'article 564 du code de procédure civile, à défaut comme étant prescrite par application de l'article L. 110-4 du code de commerce.

Par application de l'article 567 du code de procédure civile, selon lequel les demandes reconventionnelles sont recevables en appel, la demande reconventionnelle en dommages et intérêts des appelants ne peut être déclarée irrecevable comme nouvelle.

Que l'on admette que l'obligation litigieuse soit née à l'occasion du commerce de la société Interfimo, et soit en conséquence soumise au délai de prescription quinquennale de l'article L. 110-4 du code civil, comme le soutient l'intéressée, ou que cette action soit soumise à la prescription quinquennale commune de l'article 2264 du code civil, il est en toute hypothèse certain que l'action en responsabilité engagée par les appelants est soumise à un délai de prescription de cinq ans et que celui-ci a commencé à courir du jour où ils ont connu ou dû connaître les faits leur permettant de l'exercer.

En l'espèce, par courriers recommandés du 7 octobre 2014, réceptionnés le 9 octobre suivant, la société Interfimo a informé chacun de M. X. et de la société X. que ses précédentes mises en demeure, par lesquels elle les avait informés qu'à défaut de paiement, elle ferait application de la clause d'exigibilité anticipée prévue au contrat de prêt et rembourserait le capital restant dû à la société Crédit Lyonnais, étant restées sans suite, elle avait remboursé à la banque le capital restant dû sur le prêt souscrit le 26 septembre 2013 par la société X..

M. X. et la société du même nom, qui ont été informés dès le 9 octobre 2014 que la société Interfimo avait prononcé la déchéance du terme du contrat de prêt conclu entre la société X. et le Crédit lyonnais, et qui pouvaient donc agir en responsabilité contre la société Interfimo, du chef du prononcé de cette déchéance du terme qu'ils estiment fautive, jusqu'au 9 octobre 2019, ont formulé leurs premières prétentions en ce sens devant la cour par conclusions notifiées le 10 juillet 2020 par voie électronique.

Les appelants ne peuvent dès lors qu'être déclarés irrecevables en ces demandes de dommages et intérêts tardives, qui se heurtent à la prescription.

 

Sur les demandes accessoires :

La société X. et M. X., qui succombent au sens de l'article 696 du code de procédure civile, devront supporter in solidum les dépens de l'instance.

Il serait inéquitable de laisser à chacune des sociétés Interfimo et Crédit lyonnais la charge de la totalité de leurs frais irrépétibles.

En application de l'article 700 du code de procédure civile, M. X. et la société X. seront condamnés in solidum à régler à la société Interfimo une indemnité de procédure de 3.500 euros et à la société Crédit Lyonnais une somme de 1.500 euros.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

REJETTE la demande de sursis à statuer présentée par les appelants devant la cour,

INFIRME les dispositions critiquées de la décision entreprise, ce qu'elle a :

- rejeté l'ensemble des demandes présentées par la SELARL Cabinet X. et M. X. au titre de la déchéance du terme

- rejeté l'ensemble des demandes formées par la SELARL Cabinet X. et M. X. sur l'intérêt applicable

- condamné la SELARL Cabinet X. à payer à la société Interfimo la somme de 325.161,36 euros majorée des intérêts au taux de 5 % l'an sur le principal de 291.736,86 euros à compter du 7 février 2017

- condamné M. X., solidairement avec la SELARL Cabinet X., à payer à la société Interfimo la somme de 292.000 euros majorée des intérêts au taux légal à compter du 7 octobre 2014

- ordonné la capitalisation annuelle des intérêts

STATUANT À NOUVEAU sur les chefs infirmés :

DIT n'y avoir lieu de statuer sur les exceptions soulevées par la SELARL Cabinet X. tirées, d'une part de l'illicéité de la clause de déchéance du terme du contrat de prêt ; d'autre part de l'irrégularité de la déchéance du terme prononcée par la société Interfimo,

DIT que M. Frederik-Karel C. ne peut opposer à la société Interfimo aucune exception tirée de l'illicéité de la clause de déchéance du terme ou de l'irrégularité de la déchéance du terme,

DECLARE la SELARL Cabinet X. irrecevable en ses demande tendant à entendre dire et juger que la société Interfimo ne peut se prévaloir d'un quelconque intérêt au taux contractuel et condamner en conséquence la société Interfimo à lui restituer une somme de 484,89 euros sur ce chef,

CONDAMNE solidairement la SELARL Cabinet X. et M. X. à payer à la société Interfimo la somme de 291.736,86 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 1er octobre 2014, capitalisés annuellement selon les modalités de l'article 1154 ancien du code civil à compter du 8 janvier 2015,

CONFIRME la décision pour le surplus de ses dispositions critiquées,

Y AJOUTANT,

REJETTE la demande tendant à la poursuite du contrat de prêt selon les modalités conventionnellement définies avant la déchéance du terme,

DECLARE irrecevables les demandes reconventionnelles en dommages et intérêts de la SELARL Cabinet X. et de M. X. formulées à l'encontre de la société Interfimo et tirées d'une perte de chance,

CONDAMNE in solidum SELARL Cabinet X. et M. X. à payer à la société Interfimo la somme de 3 500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE in solidum SELARL Cabinet X. et M. X. à payer à la société Crédit lyonnais la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE in solidum SELARL Cabinet X. et M. X. aux dépens,

ACCORDE à Maître Delphine C. le bénéfice des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Arrêt signé par Madame Carole CAILLARD, Président de la chambre commerciale à la Cour d'Appel d'ORLEANS, présidant la collégialité et Madame Marie-Claude DONNAT, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER                                LE PRÉSIDENT