CA RENNES (3e ch.), 26 janvier 2021
CERCLAB - DOCUMENT N° 8770
CA RENNES (3e ch.), 26 janvier 2021 : RG n° 18/01232 ; arrêt n° 40
Publication : Jurica
Extraits : 1/ « M. X. demande l'annulation du jugement en faisant valoir que le premier juge l'aurait envoyé à mieux se pouvoir pour ce qui concerne ses demandes fondées sur les dispositions de l'article L. 442-6 du code de commerce alors qu'en application des dispositions de l'article 96 du code de procédure civile, il aurait dû désigner la juridiction qu'il retenait comme compétente.
Les dispositions de l'article L. 442-6 prévoient que les litiges relatifs à son application sont attribués aux juridictions dont le siège et le ressort sont fixés par les articles D. 442-3 et D. 442-4 du code de commerce. Il ne s'agit pas d'une règle de compétence mais d'une règle d'attribution du pouvoir juridictionnel et les dispositions de l'article 96 du code de procédure civile sur la désignation de la juridiction de renvoi compétente ne sont pas applicables. La demande de nullité du jugement sera rejetée. »
2/ « M. X. demande à la cour d'ordonner un sursis à statuer dans l'attente de la décision du tribunal de commerce de Rennes qu'il a saisi sur le fondement des dispositions de l'article L. 442-6 du code de commerce.
Si M. X. justifie avoir assigné la société Locam devant le tribunal de commerce de Rennes par acte du 30 mars 2018, il ne justifie pas de l'état d'avancement de cette procédure.
Il résulte des termes de l'assignation en question que M. X. a demandé au tribunal de Rennes le paiement de dommages-intérêts en réparation d'un préjudice qu'il aurait subi du fait du déséquilibre significatif qui existerait entre les droits et obligations des parties au détriment de M. X. Il n'apparaît pas opportun d'ordonner le sursis à statuer dans la présente instance. »
3/ « La société Locam présente une demande subsidiaire d'irrecevabilité de l'appel. Même s'il est fait droit à la demande principale de la société Locam, il convient d'examiner cette demande, la cour d'appel étant tenue d'examiner l'étendue de ses pouvoirs au regard des dispositions de l'article L. 442-6 du code de commerce. En l'espère, les premiers juges n'ont pas statué sur les dispositions de l'article L.442-6 du code de commerce. L'appel formé contre le jugement devait donc être formé devant la juridiction d'appel de droit commun du tribunal de commerce de Nantes et non pas devant la cour d'appel de Paris. Il y a lieu de dire que l'appel formé devant la cour d'appel de Rennes est recevable. »
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE RENNES
TROISIÈME CHAMBRE COMMERCIALE
ARRÊT DU 26 JANVIER 2021
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 18/01232. Arrêt n° 40. N° Portalis DBVL-V-B7C-OUJE.
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
Président : Monsieur Alexis CONTAMINE, Président de chambre, rapporteur
Assesseur : Madame Olivia JEORGER-LE GAC, Conseillère,
Assesseur : Monsieur Dominique GARET, Conseiller,
GREFFIER : Madame Isabelle GESLIN OMNES, lors des débats et lors du prononcé
DÉBATS : A l'audience publique du 8 décembre 2020
ARRÊT : contradictoire, prononcé publiquement le 26 janvier 2021 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l'issue des débats
APPELANT :
Monsieur X., exerçant sous l'enseigne EUROP'AUTO
immatriculé au répertoire SIRENE sous le n° XXX, [...], [...], [...], Représenté par Maître G. Guillaume, substituant Maître Jérôme B. de la SELARL BRG, plaidant/postulant, avocats au barreau de NANTES
INTIMÉE :
LOCAM SAS
immatriculée au RCS de SAINT-ETIENNE sous le n° YYY prise en la personne de ses représentants légaux, domiciliés en cette qualité au siège, [...], [...], Représentée par Maître D. Éric, substituant Maître Christophe L. de la SCP G., D. & L., postulant, avocats au barreau de RENNES, Représentée par Maître Michel T. de la SELARL LEXI CONSEIL ET DEFENSE, plaidant, avocat au barreau de SAINT-ÉTIENNE
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
FAITS ET PROCÉDURE :
M. X. a commandé le 12 avril 2016 auprès de la société Aerial Group la fourniture d'un site web, pour le financement duquel il a conclu un « contrat de licence d'exploitation de site internet ».
La société Locam est intervenue en qualité de cessionnaire de cette convention conclue pour une durée ferme et irrévocable de 48 mois jusqu'au 30 juin 2020 moyennant le règlement de 48 loyers mensuels de 180 euros TTC chacun, destiné à financer le site internet.
Plusieurs échéances sont demeurées impayées et n'ont pas été réglées dans les huit jours de la mise en demeure adressée en date du 16 octobre 2016 par la société Locam le 23 novembre 2016, elle a déposé une requête aux fins d'injonction de payer.
Par ordonnance du 5 décembre 2016, le président du tribunal de commerce de Nantes a enjoint à M. X. de payer à la société Locam la somme principale de 8.640 euros outre la clause pénale d'un montant de 864 euros.
M. X. a formé opposition à l'encontre de cette décision et, estimant avoir subi un déséquilibre significatif dans ses droits et obligations, a présenté une demande reconventionnelle de dommages-intérêts.
Par jugement du 5 février 2018, le tribunal de commerce de Nantes a :
- Reçu la société Locam en sa demande et l'a dite partiellement fondée,
- Déclaré irrecevable la demande reconventionnelle de M. X. et l'a invité à mieux se pourvoir,
- Condamné M. X. à payer à la société Locam la somme de 8.640 euros,
- Condamné M. X. a payer a la société Locam la somme de 172,80 euros au titre de la clause pénale,
- Condamné M. X. à payer à la société Locam la somme de 1.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- Rejeté la demande d'exécution provisoire de la société Locam,
- Condamné M. X. aux entiers dépens de l'instance,
- Condamné M. X. aux frais du jugement,
- Dit que le jugement se substitue à l'ordonnance d'injonction de payer rendue le 5 Décembre 2016.
M. X. a interjeté appel le 19 février 2018.
Les dernières conclusions de M. X. sont en date du 24 septembre 2018. Les dernières conclusions de la société Locam sont en date du 24 décembre 2018.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 19 novembre 2020.
PRÉTENTIONS ET MOYENS :
M. X. demande à la cour de :
A titre principal :
- Prononcer la nullité du jugement,
- Débouter la société Locam de toutes ses demandes, fins et conclusions,
A titre subsidiaire :
- Surseoir à statuer dans l'attente de la décision à intervenir par-devant le tribunal de commerce de Rennes, statuant au fond,
En tout état de cause :
- Condamner la société Locam à payer à M. X. une somme de 2.000 euros au visa des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- Condamner la société Locam aux entiers dépens.
[*]
La société Locam demande à la cour de :
- Rejeter comme non fondé et subsidiairement irrecevable l'appel de M. X.,
- Le débouter en tout état de cause de toutes ses demandes,
- Réformer le jugement en ce qu'il a cru devoir réduire la clause pénale de 10 % sur les sommes dues (864 euros) à 2 % (172,80 euros),
- Allouer à ce titre à la société Locam la somme complémentaire de 691,20 euros,
- Condamner M. X. à régler à la société Locam une nouvelle indemnité de 2.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- Le condamner aux entiers dépens d'instance et d'appel.
[*]
Pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties il est renvoyé à leurs dernières conclusions visées supra.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
DISCUSSION :
Sur la nullité du jugement :
M. X. demande l'annulation du jugement en faisant valoir que le premier juge l'aurait envoyé à mieux se pouvoir pour ce qui concerne ses demandes fondées sur les dispositions de l'article L. 442-6 du code de commerce alors qu'en application des dispositions de l'article 96 du code de procédure civile, il aurait dû désigner la juridiction qu'il retenait comme compétente.
Les dispositions de l'article L. 442-6 prévoient que les litiges relatifs à son application sont attribués aux juridictions dont le siège et le ressort sont fixés par les articles D. 442-3 et D. 442-4 du code de commerce.
Il ne s'agit pas d'une règle de compétence mais d'une règle d'attribution du pouvoir juridictionnel et les dispositions de l'article 96 du code de procédure civile sur la désignation de la juridiction de renvoi compétente ne sont pas applicables.
La demande de nullité du jugement sera rejetée.
Sur la clause pénale :
M. X. demande dans le dispositif de ses conclusions le rejet de toutes les demandes de la société Locam.
Dans les motifs de ses conclusions, il fait valoir que le tribunal a, à bon droit, réduit la clause pénale à 2 % des loyers à échoir, soit 172,80 euros, et qu'il y aura lieu d'approuver la décision des premiers juge sur ce point.
Au vu des écrits des parties devant la cour, qu'il y a lieu d'interpréter en raison de leur ambiguïté, seule la fixation du montant de la clause pénale de 10 % des échéances restant à courir est en cause. Le montant de la dette principale de M. X. n'est pas expressément critiqué par ce dernier dans ses écritures et il ne fait valoir aucun moyen à l'appui d'une éventuelle demande de rejet du principal restant dû.
En tout état de cause, il résulte des dispositions contractuelles que le défaut de paiement d'une seule mensualité à son échéance et l'absence de règlement dans les huit jours d'une mise en demeure rend la totalité des sommes dues immédiatement exigible.
Le principal de la dette dont se prévaut la société Locam est dû.
Il n'est pas contesté que la clause prévoyant cette majoration de 10 % constitue une clause pénale. La société Locam bénéficie d'une créance au titre du montant de l'arriéré et des loyers à échoir à la date de la résiliation du contrat. La fixation d'une clause pénale de 10 % de ces loyers à échoir apparaît manifestement excessive au vu du préjudice subi par la société Locam et non déjà pris en compte par l'allocation de la totalité des loyers à échoir. Il y a lieu de réduire cette clause pénale à 2 % des sommes dues. Le jugement sera confirmé sur ce point.
Sur la demande de sursis à statuer :
M. X. demande à la cour d'ordonner un sursis à statuer dans l'attente de la décision du tribunal de commerce de Rennes qu'il a saisi sur le fondement des dispositions de l'article L. 442-6 du code de commerce.
Si M. X. justifie avoir assigné la société Locam devant le tribunal de commerce de Rennes par acte du 30 mars 2018, il ne justifie pas de l'état d'avancement de cette procédure.
Il résulte des termes de l'assignation en question que M. X. a demandé au tribunal de Rennes le paiement de dommages-intérêts en réparation d'un préjudice qu'il aurait subi du fait du déséquilibre significatif qui existerait entre les droits et obligations des parties au détriment de M. X.
Il n'apparaît pas opportun d'ordonner le sursis à statuer dans la présente instance.
Sur la demande de la société Locam tendant à l'irrecevabilité de l'appel :
La société Locam présente une demande subsidiaire d'irrecevabilité de l'appel. Même s'il est fait droit à la demande principale de la société Locam, il convient d'examiner cette demande, la cour d'appel étant tenue d'examiner l'étendue de ses pouvoirs au regard des dispositions de l'article L. 442-6 du code de commerce.
En l'espère, les premiers juges n'ont pas statué sur les dispositions de l'article L.442-6 du code de commerce. L'appel formé contre le jugement devait donc être formé devant la juridiction d'appel de droit commun du tribunal de commerce de Nantes et non pas devant la cour d'appel de Paris. Il y a lieu de dire que l'appel formé devant la cour d'appel de Rennes est recevable.
Sur les frais et dépens :
Il y a lieu de condamner M. X. aux dépens d'appel et de rejeter les demandes formées au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
La cour :
- Rejette la demande d'annulation du jugement,
- Dit recevable l'appel formé devant la cour d'appel de Rennes,
- Confirme le jugement,
Y ajoutant :
- Rejette les autres demandes des parties,
- Condamne M. X. aux dépens d'appel.
LE GREFFIER LE PRESIDENT