CA BORDEAUX (1re ch. civ.), 30 mars 2021
CERCLAB - DOCUMENT N° 8888
CA BORDEAUX (1re ch. civ.), 30 mars 2021 : RG n° 18/03443
Publication : Jurica
Extrait : « L'appelante fait grief au premier juge, après avoir relevé qu'elle produisait des justificatifs de consultation du FICP 13 jours après la conclusion du contrat, d'avoir considéré que « le prêteur ne saurait revenir sur son engagement dans un délai supérieur à celui des emprunteurs, sauf à déséquilibrer les relations contractuelles et à instaurer une clause abusive » et d'en avoir déduit que la consultation FICP produite devait être considérée comme tardive et donc irrégulière, ce qui l'a déterminé à prononcer la déchéance du droit aux intérêts. […]
En application des dispositions de l'article L. 311-9 du code de la consommation, dans sa rédaction issue de la loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010, applicable au contrat en cause, le prêteur doit consulter le FICP « avant de conclure le contrat de crédit ». L'article L. 311-13 du même code dispose : « le contrat accepté par l'emprunteur ne devient parfait qu'à la double condition que ledit emprunteur n'ait pas usé de sa faculté de rétractation et que le prêteur ait fait connaître à l'emprunteur sa décision d'accorder le crédit dans un délai de sept jours (...). La mise à disposition des fonds au-delà du délai de sept jours mentionné à l'article L. 311-14 vaut agrément de l'emprunteur par le prêteur. » En conséquence, comme l'expose l'appelante, à moins que le prêteur ait fait connaître à l'emprunteur sa décision d'accorder le crédit dans le délai de sept jours, l'emprunteur n'est considéré comme agréé et le contrat conclu qu'au jour de la mise à disposition des fonds.
La société Créatis justifie par sa pièce 5 que les fonds ont été mis à disposition des emprunteurs le 5 décembre 2011 (et non le 5/11/2011 comme indiqué par erreur dans ses conclusions). L'appelante justifie aussi par sa pièce 12 qu'elle a consulté le FICP le 1er décembre 2011 pour les deux emprunteurs, étant noté que les pièces 2 et 3 citées pour démontrer une seconde consultation le 5 décembre 2011 ne font nullement état d'une telle consultation. En conséquence, c'est à tort que le premier juge a prononcé la déchéance du droit aux intérêts et l'appelante est ainsi fondée, au vu des justificatifs produits, en ses demandes en principal arrêté à 42.994,77 € au 31 juillet 2017, outre les intérêts calculés au taux contractuel de 6,21 % sur la somme de 40.067,90 € à compter du 27 juin 2017, date de la déchéance du terme et au taux légal sur le surplus au 31 juillet 2017. »
COUR D’APPEL DE BORDEAUX
PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE
ARRÊT DU 30 MARS 2021
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 18/03443. N° Portalis DBVJ-V-B7C-KPN7. Rédacteur : Roland POTEE, président. Nature de la décision : AU FOND. Décision déférée à la cour : jugement rendu le 9 avril 2018 par le Tribunal d'Instance de COGNAC (R.G. n° 11-17-279) suivant déclaration d'appel du 15 juin 2018.
APPELANTE :
SA CREATIS
agissant en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social sis [...], représentée par Maître William M. de la SAS M. M. B., avocat au barreau de BORDEAUX
INTIMÉS :
M. X.
né le [date] à [ville], de nationalité Française, demeurant anciennement [...] et actuellement [...], non représenté, assigné selon procès-verbal de recherches infructueuses (article 659 du code de procédure civile)
Mme Y. épouse X.
née le [date] à [ville], de nationalité Française, demeurant [...], non représentée, assignée selon procès-verbal de recherches infructueuses (article 659 du code de procédure civile)
COMPOSITION DE LA COUR : L'affaire a été débattue le 23 février 2021 en audience publique, devant la cour composée de : Roland POTEE, président, Vincent BRAUD, conseiller, Bérengère VALLEE, conseiller, qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Véronique SAIGE
ARRÊT : - par défaut - prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
EXPOSÉ DU LITIGE ET DE LA PROCÉDURE :
La SA Creatis a conclu le 25 novembre 2011 avec Mme X. née Y. et M. X., une offre de crédit portant sur un montant de 60.300 € moyennant un TAEG de 8,94 % et un remboursement en 84 mensualités d'un montant de 886,98 € hors assurance.
Le 8 novembre 2013, la société prêteuse a accordé aux emprunteurs un aménagement de crédit prévoyant une nouvelle mensualité d'un montant de 691,47 €.
Faute de règlement des échéances, la société Creatis a prononcé la déchéance du terme le 27 juin 2017, sa lettre de mise en demeure du 18 mai 2017 étant restée vaine.
Par acte du 28 septembre 2017, la société Creatis a fait délivrer assignation à M. et Mme X., afin d'obtenir, au visa de l'article L. 311-24 du code de la consommation et avec exécution provisoire, leur condamnation solidaire au paiement des sommes de 42.994,77 € majorée des intérêts au taux de 6,21 % sur 40.067,90 € et au taux légal sur le surplus à compter du 27 juin 2017, au titre du crédit personnel et de 800 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.
M. et Mme X. n'ont pas comparu.
Par jugement réputé contradictoire du 9 avril 2018, le tribunal d'instance de Cognac a :
- rejeté le moyen tiré de la forclusion de l'action de la SA Creatis au titre du contrat de prêt conclu le 25 novembre 2011 entre les parties au litige,
- constaté la déchéance des intérêts au titre du même contrat entre M. X. et Mme X. née Y. et la SA Creatis,
- condamné de ce fait solidairement M. X. et Mme X. née Y. à verser à la SA Creatis la somme de 23.637,47 €, somme qui sera assortie d'intérêts au taux légal à compter du 1er juillet 2017,
- ordonné l'exécution provisoire de la décision,
- rejeté la demande au titre des frais irrépétibles,
- condamné in solidum M. et Mme X. aux entiers dépens de l'instance.
La société Creatis a relevé appel de ce jugement par déclaration du 15 juin 2018.
[*]
Par conclusions du 17 septembre 2018, la société Creatis demande à la cour de :
- infirmer le jugement déféré en ce qu'il l'a déchue de son droit aux intérêts et condamné solidairement M. et Mme X. à lui payer la somme de 23.637.47 € seulement, assortie des intérêts au taux légal à compter du 1er juillet 2017,
Statuant à nouveau sur ce point,
- constater que la société Creatis justifie avoir satisfait à son obligation de consultation du FICP, conformément aux dispositions de l'article L. 311-9 du code de la consommation, dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010 applicable au contrat litigieux,
- condamner solidairement M. et Mme X. sur le fondement de l'article L. 311-24 du code de la consommation, dans sa rédaction issue de la Loi n° 2010-737 du 01-07-2010, applicable au cas d'espèce, à payer à la société Creatis, au titre du dossier n° 100ZZ71 la somme en principal de 42.994,77 €, actualisée au 31/07/2017, assortie des intérêts calculés au taux contractuel de 6,21 % sur la somme de 40.067,90 € à compter du 27 juin 2017, date de la déchéance du terme et au taux légal sur le surplus,
- condamner solidairement M. et Mme X. à payer à la société Creatis la somme de 2.000 €, sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.
[*]
M. et Mme X. n'ont pas constitué avocat. Ils ont été assignés à leur ancienne adresse et des procès-verbaux de recherches ont été dressés les 6 août et 19 septembre 2018, conformément aux dispositions de l'article 659 du code de procédure civile.
[*]
L'affaire a été fixée à l'audience collégiale du 23 février 2021 et l'instruction clôturée par ordonnance du 9 février 2021.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
MOTIFS DE LA DÉCISION :
L'appelante fait grief au premier juge, après avoir relevé qu'elle produisait des justificatifs de consultation du FICP 13 jours après la conclusion du contrat, d'avoir considéré que « le prêteur ne saurait revenir sur son engagement dans un délai supérieur à celui des emprunteurs, sauf à déséquilibrer les relations contractuelles et à instaurer une clause abusive » et d'en avoir déduit que la consultation FICP produite devait être considérée comme tardive et donc irrégulière, ce qui l'a déterminé à prononcer la déchéance du droit aux intérêts.
La société Créatis soutient que la date de formation du contrat de crédit, n'est pas la date à laquelle les emprunteurs ont signé l'offre préalable, mais celle à laquelle le prêteur, ayant reçu ladite offre signée des emprunteurs, les a agréés et a mis les fonds à leur disposition de sorte qu'en l'espèce, si l'offre de prêt a été signée le 25 novembre 2011 par les époux X., le contrat s'est trouvé conclu au jour de la mise à disposition des fonds, soit le 5 décembre 2011, date à laquelle elle a consulté le FICP.
En application des dispositions de l'article L.311-9 du code de la consommation, dans sa rédaction issue de la loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010, applicable au contrat en cause, le prêteur doit consulter le FICP « avant de conclure le contrat de crédit ».
L'article L. 311-13 du même code dispose : « le contrat accepté par l'emprunteur ne devient parfait qu'à la double condition que ledit emprunteur n'ait pas usé de sa faculté de rétractation et que le prêteur ait fait connaître à l'emprunteur sa décision d'accorder le crédit dans un délai de sept jours (...). La mise à disposition des fonds au-delà du délai de sept jours mentionné à l'article L. 311-14 vaut agrément de l'emprunteur par le prêteur. »
En conséquence, comme l'expose l'appelante, à moins que le prêteur ait fait connaître à l'emprunteur sa décision d'accorder le crédit dans le délai de sept jours, l'emprunteur n'est considéré comme agréé et le contrat conclu qu'au jour de la mise à disposition des fonds.
La société Créatis justifie par sa pièce 5 que les fonds ont été mis à disposition des emprunteurs le 5 décembre 2011 (et non le 5/11/2011 comme indiqué par erreur dans ses conclusions)
L'appelante justifie aussi par sa pièce 12 qu'elle a consulté le FICP le 1er décembre 2011 pour les deux emprunteurs, étant noté que les pièces 2 et 3 citées pour démontrer une seconde consultation le 5 décembre 2011 ne font nullement état d'une telle consultation.
En conséquence, c'est à tort que le premier juge a prononcé la déchéance du droit aux intérêts et l'appelante est ainsi fondée, au vu des justificatifs produits, en ses demandes en principal arrêté à 42.994,77 € au 31 juillet 2017, outre les intérêts calculés au taux contractuel de 6,21 % sur la somme de 40.067,90 € à compter du 27 juin 2017, date de la déchéance du terme et au taux légal sur le surplus au 31 juillet 2017.
Il n'y a pas lieu à indemnités au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
LA COUR,
Infirme le jugement entrepris sauf en ce qu'il a rejeté le moyen tiré de la forclusion de l'action de la SA Creatis au titre du contrat de prêt conclu le 25 novembre 2011 entre les parties ;
Statuant à nouveau dans cette limite ;
Condamne solidairement M. X. et Mme Y. épouse X. à payer à la société Creatis la somme en principal de 42.994,77 €, arrêtée au 31 juillet 2017, assortie des intérêts calculés au taux contractuel de 6.21 % sur la somme de 40.067,90 € à compter du 27 juin 2017 et au taux légal sur le surplus au 31/07/2017,
Dit n'y avoir lieu à indemnités au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamne in solidum les époux X. aux entiers dépens.
Le présent arrêt a été signé par Monsieur Roland POTEE, président, et par Madame Véronique SAIGE, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le Greffier, Le Président,