CA LYON (1re ch. civ. B), 30 mars 2021
CERCLAB - DOCUMENT N° 8903
CA LYON (1re ch. civ. B), 30 mars 2021 : RG n° 19/07644
Publication : Jurica
Extrait : « Le principe posé par cette clause consistant à calculer les intérêts sur la base de mois comptés pour 30 jours rapportés à 360 jours l'an, soit 30/360, revient arithmétiquement au même que le calcul des intérêts effectué sur la base d'une année civile rapportée au mois normalisé (30,416666/365) ou sur la base de 1/12.
Le calcul des intérêts pourrait poser un problème uniquement sur la première échéance et, le cas échéant, sur l'échéance de remboursement anticipé, et ce exclusivement dans le cas où le nombre de jours entre le début de l'amortissement et la première échéance et/ou entre la dernière échéance et le remboursement anticipé, serait inférieur à 30, soit à la marge.
Dans tous les cas, il appartient à l'emprunteur non seulement de démontrer que les intérêts ont été calculés sur la base d'une année de 360 jours, mais également que ce calcul a généré à son détriment un surcoût d'un montant supérieur à la décimale prévue à l'article R. 313-1 du code de la consommation dans sa rédaction applicable à l'espèce.
Tel n'est pas le cas en l'espèce, M. X. ne proposant dans ses écritures aucun calcul pour soutenir l'existence d'une erreur et qui plus est supérieure à la décimale et se bornant à affirmer, à tort, […], que la seule présence d'une clause de calcul des intérêts sur la base de 360 jours suffit à entraîner la nullité de la stipulation des intérêts. Dès lors, à supposer même que les intérêts du prêt litigieux aient été calculés sur la base d'une année de 360 jours, ce qui n'est pas établi au vu des pièces produites, il n'est ni allégué ni démontré que ce calcul a généré au détriment de M. X. un surcoût d'un montant supérieur à la décimale.
Il convient de relever que si M. X. évoque en page 6 de ses conclusions que la pratique consistant à calculer les intérêts sur la base d'une année de 360 jours et non de 365 jours a été reconnue non seulement irrégulière mais également abusive par la jurisprudence, il ne demande toutefois pas que la clause précitée du contrat de prêt litigieux relative au calcul des intérêts soit analysée sous cet angle et déclarée abusive et ne fonde nullement sa demande sur l'article L. 132-1 du code de la consommation. Dans tous les cas, à supposer que la clause litigieuse ne porte ni sur la définition de l'objet principal du contrat ni sur l'adéquation du prix ou de la rémunération au bien vendu ou au service offert, il n'est pas démontré qu'elle a entraîné un déséquilibre et qui plus est, significatif, entre les droits et obligations des parties. »
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE LYON
PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE B
ARRÊT DU 30 MARS 2021
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 19/07644. N° Portalis DBVX-V-B7D-MVXE. Décision du Tribunal de Grande Instance de LYON (ch. n° 4), au fond du 29 octobre 2019 : R.G. n° 17/4409.
APPELANT :
M. X.
né le [date] à [ville], [adresse], [...], Représenté par Maître Gérald P., avocat au barreau de LYON, toque : 861, Assisté de Maître Florence H., avocat au barreau de BORDEAUX
INTIMÉE :
La SA CRÉDIT LYONNAIS
représentée par son directeur général en exercice [...], [...], Représentée par Maître Pierre B., avocat au barreau de LYON, toque : 140
Date de clôture de l'instruction : 14 janvier 2021
Date des plaidoiries tenues en audience publique : 15 février 2021
Date de mise à disposition : 30 mars 2021
Audience présidée par Laurence VALETTE, magistrat rapporteur, sans opposition des parties dûment avisées, qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, assisté pendant les débats de Myriam MEUNIER, greffier.
Composition de la Cour lors du délibéré :- Agnès CHAUVE, président,- Dominique DEFRASNE, conseiller, - Laurence VALETTE, conseiller
Arrêt : Contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties présentes ou représentées en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile, Signé par Agnès CHAUVE, président, et par Myriam MEUNIER, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
EXPOSÉ DE L'AFFAIRE :
Selon offre du 4 mai 2012, acceptée le 13 juin 2012, la SA Crédit Lyonnais (la banque) a consenti à M. X. un prêt immobilier d'un montant de 226.000 euros, remboursable en 300 mensualités, au taux d'intérêt conventionnel de 4,60 % et au taux effectif global (TEG) annoncé de 5,09 %.
Par acte du 12 mai 2017, M. X. a assigné le Crédit lyonnais devant le tribunal de grande instance de Lyon aux fins de voir juger que les clauses d'intérêt de son prêt immobilier sont nulles, ordonner la substitution dès le premier jour du taux légal de 0,71 % de 2012 au taux conventionnel, condamner la banque à lui payer les sommes correspondant à la différence entre les intérêts conventionnels perçus à ce jour et les intérêts calculés sur la base d'un taux légal de 0,71 % dans un délai de 30 jours à compter de la décision sous astreinte provisoire de 50 euros par jour de retard pendant 6 mois passés lesquels il devra à nouveau être statué, condamner la banque à lui présenter un nouveau tableau d'amortissement au taux légal de 0,71 % l'an pour les échéances restant à courir, les autres conditions restant inchangées, condamner la banque à lui payer la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, et ordonner l'exécution provisoire.
Par jugement du 29 octobre 2019, le tribunal de grande instance de Lyon a :
- débouté M. X.,
- condamné M. X. à payer au Crédit lyonnais la somme de 1.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné M. X. aux dépens, avec droit de recouvrement direct dans les conditions prévues à l'article 699 du code de procédure civile au profit de l'avocat adverse.
Par déclaration du 7 novembre 2019, M. X. a interjeté appel.
[*]
Au terme de conclusions notifiées le 14 septembre 2020, M. X. demande à la cour, au visa des articles 1907 du code civil, L. 313-1, L. 313-2 et R. 313-1 du code de la consommation, de :
- réformer le jugement entrepris du 29 octobre 2019,
Et statuant à nouveau,
- dire M. X. recevable et bien fondé en son appel,
- statuer sur les clauses d'intérêts du prêt immobilier LCL du 4/05/2012 en ordonnant leur nullité,
- ordonner la substitution dès le premier jour du taux légal de 0,71 % l'an aux taux conventionnels des intérêts du prêt immobilier accepté par M. X.,
- condamner la défenderesse à verser à M. X. les sommes correspondant à la différence entre les intérêts conventionnels perçus à ce jour au titre des prêts susvisés et les intérêts calculés sur la base d'un taux légal de 0,71 % (2012) dans un délai de 30 jours à compter de la décision à intervenir sous astreinte provisoire de 50 euros par jour de retard pendant 6 mois passés lesquels il devra à nouveau être statué,
- condamner la société LCL à présenter à M. X. un nouveau tableau d'amortissement au taux légal de 0,71% l'an pour les échéances restant à courir, les autres conditions restant inchangées,
- condamner le Crédit lyonnais à verser à M. X. la somme de 4.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et la condamner aux entiers dépens de première instance et d'appel conformément à l'article 695 du code de procédure civile.
[*]
Au terme de conclusions notifiées le 29 octobre 2020, le Crédit lyonnais demande à la cour de :
- confirmer le jugement déféré en ce qu'il a rejeté les demandes de M. X.,
- confirmer aussi le jugement déféré quant à l'application de l'article 700 du code de procédure civile et à la condamnation aux dépens,
- débouter M. X. de toutes autres demandes,
- le condamner à payer au Crédit lyonnais 4.000 euros supplémentaires au titre de l'article 700 du code de procédure civile et les dépens d'appel avec application de l'article 699 du même code au bénéfice de Maître B., avocat,
Subsidiairement, limiter la restitution d'intérêts mise à la charge du Crédit lyonnais à une somme forfaitaire symbolique,
Plus subsidiairement, dire que le taux d'intérêt légal substitué au taux conventionnel est sujet aux variations que la loi lui apporte.
[*]
Il convient de se référer aux conclusions des parties pour plus ample exposé de leurs prétentions et moyens.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
MOTIFS :
M. X. soutient, comme en première instance, que la banque a calculé les intérêts sur la base d'une année dite « Lombarde » comptant 360 jours alors que ce mode de calcul est prohibé et qu'il résulte de la combinaison des articles 1907 du code civil et L. 313-1, L. 313-2 et R. 313-1 du code de la consommation, que le taux de l'intérêt conventionnel doit comme le TEG être calculé sur la base de l'année civile de 365 jours, sous peine de se voir substituer le taux légal.
Le taux de l'intérêt conventionnel qui en application de l'article 1907 du code civil doit être fixé par écrit, ne résulte pas d'un calcul mais est librement négocié entre les parties au contrat de prêt de sorte qu'il ne peut pas, en lui-même, être inexact. Seuls le calcul des intérêts et le calcul du TEG peuvent être inexacts.
L'offre de prêt litigieuse mentionne que « Les intérêts courus entre deux échéances seront calculés sur la base de 360 jours, chaque mois étant compté pour 30 jours rapportés à 360 jours l'an. En cas de remboursement anticipé, les intérêts courus depuis la dernière échéance seront calculés sur la base du nombre de jours exact de la période écoulée, rapportée à 360 jours l'an. Nous vous précisons que le taux effectif global des prêts est indiqué sur la base du montant exact des intérêts rapportés à 365 jours l'an.
Ajustement de la première échéance : la première échéance du prêt est toujours calculée en jours exacts. De ce fait, son montant peut être différent des autres mensualités en raison des intérêts intercalaires et des cotisations d'assurance (le cas échéant) qui peuvent être perçues et donc rajoutées et ce, dans le cas où le nombre de jours entre le début de l'amortissement et la première échéance n'est pas égal à 30 jours. »
Le principe posé par cette clause consistant à calculer les intérêts sur la base de mois comptés pour 30 jours rapportés à 360 jours l'an, soit 30/360, revient arithmétiquement au même que le calcul des intérêts effectué sur la base d'une année civile rapportée au mois normalisé (30,416666/365) ou sur la base de 1/12.
Le calcul des intérêts pourrait poser un problème uniquement sur la première échéance et, le cas échéant, sur l'échéance de remboursement anticipé, et ce exclusivement dans le cas où le nombre de jours entre le début de l'amortissement et la première échéance et/ou entre la dernière échéance et le remboursement anticipé, serait inférieur à 30, soit à la marge.
Dans tous les cas, il appartient à l'emprunteur non seulement de démontrer que les intérêts ont été calculés sur la base d'une année de 360 jours, mais également que ce calcul a généré à son détriment un surcoût d'un montant supérieur à la décimale prévue à l'article R. 313-1 du code de la consommation dans sa rédaction applicable à l'espèce.
Tel n'est pas le cas en l'espèce, M. X. ne proposant dans ses écritures aucun calcul pour soutenir l'existence d'une erreur et qui plus est supérieure à la décimale et se bornant à affirmer, à tort, comme le service technique de la SARL L'expertiseur à laquelle il a fait appel - et dont le « compte rendu » du 30 novembre 2016 comporte de nombreuses références jurisprudentielles pas toujours à jour et une sorte de convention d'honoraires mais aucun calcul relatif aux intérêts autre qu'un « calcul de réajustement de votre crédit au taux légal » -, que la seule présence d'une clause de calcul des intérêts sur la base de 360 jours suffit à entraîner la nullité de la stipulation des intérêts.
Dès lors, à supposer même que les intérêts du prêt litigieux aient été calculés sur la base d'une année de 360 jours, ce qui n'est pas établi au vu des pièces produites, il n'est ni allégué ni démontré que ce calcul a généré au détriment de M. X. un surcoût d'un montant supérieur à la décimale.
Il convient de relever que si M. X. évoque en page 6 de ses conclusions que la pratique consistant à calculer les intérêts sur la base d'une année de 360 jours et non de 365 jours a été reconnue non seulement irrégulière mais également abusive par la jurisprudence, il ne demande toutefois pas que la clause précitée du contrat de prêt litigieux relative au calcul des intérêts soit analysée sous cet angle et déclarée abusive et ne fonde nullement sa demande sur l'article L. 132-1 du code de la consommation. Dans tous les cas, à supposer que la clause litigieuse ne porte ni sur la définition de l'objet principal du contrat ni sur l'adéquation du prix ou de la rémunération au bien vendu ou au service offert, il n'est pas démontré qu'elle a entraîné un déséquilibre et qui plus est, significatif, entre les droits et obligations des parties.
Il convient en conséquence de confirmer le jugement en ce qu'il a débouté M. X. de ses demandes.
M. X. doit être condamné aux dépens et à payer à la banque la somme de 3.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
La cour,
Confirme le jugement déféré ;
Y ajoutant,
Condamne M. X. à payer au Crédit lyonnais la somme de 3.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamne M. X. aux dépens d'appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
LE GREFFIER LA PRÉSIDENTE