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CA PARIS (pôle 5 ch. 5), 1er avril 2021

Nature : Décision
Titre : CA PARIS (pôle 5 ch. 5), 1er avril 2021
Pays : France
Juridiction : Paris (CA), Pôle 5 ch. 5
Demande : 19/21083
Date : 1/04/2021
Nature de la décision : Réformation
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 14/11/2019
Référence bibliographique : 6170 (L. 442-6, notion de soumission), 6151 (1171, application dans le temps)
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CERCLAB - DOCUMENT N° 8923

CA PARIS (pôle 5 ch. 5), 1er avril 2021 : RG n° 19/21083

Publication : Jurica

 

Extrait : « Le contrat litigieux « de collaboration-restauration » ayant été signé après le 1er octobre 2016, mais avant le 1er octobre 2018, est soumis aux dispositions nouvelles issues de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, mais non aux modifications résultant de la loi de ratification n° 2018-287 du 20 avril 2018.

L'article 1110, alinéa 2 du code civil dispose que : « Le contrat d'adhésion est celui dont les conditions générales, soustraites à la négociation, sont déterminées à l'avance par l'une des parties ».

Selon l'article L. 442-6-I-2° du code de commerce dans sa rédaction applicable au litige, engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice causé le fait, par tout producteur, commerçant, industriel ou personne immatriculée au répertoire des métiers de soumettre ou de tenter de soumettre un partenaire commercial à des obligations créant un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties.

La caractérisation de la pratique prohibée par les dispositions de l'article L. 442-6-I-2° du code de commerce suppose d'une part, d'établir une tentative de soumission ou une soumission du partenaire commercial à une clause et d'autre part, de démontrer que cette clause est constitutive de déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties.

Tout d'abord, l'élément de soumission ou de tentative de soumission de la pratique de déséquilibre significatif implique la démonstration de l'absence de négociation effective.

Contrairement à ce que soutient la société Les Relais du Soleil, il ne peut être inféré du seul contenu des clauses, la caractérisation de la soumission ou tentative de soumission exigée par le législateur.

Or la société Les Relais du Soleil, qui qualifie le contrat litigieux de contrat d'adhésion, n'apporte aucun élément de contexte sur les conditions de sa négociation ni ne justifie avoir tenté de faire supprimer la clause critiquée.

Elle succombe donc à la charge de la preuve qui lui incombe et sa demande tendant à voir annuler la clause de « success fees » insérée au contrat concernant le recrutement de M. R. sera écartée. »

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE PARIS

PÔLE 5 CHAMBRE 5

ARRÊT DU 1er AVRIL 2021

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 19/21083 (10 pages). N° Portalis 35L7-V-B7D-CA7X3. Décision déférée à la cour : jugement du 14 octobre 2019 - Tribunal de commerce de PARIS - RG n° 2018069475.

 

APPELANTE :

SARL LES RELAIS DU SOLEIL exerçant sous l'enseigne « HOSTELLERIE DU ROY SOLEIL »

Ayant son siège social [...], [...], N° SIRET : XXX, Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège, Représentée par Maître Sylvie K. T. de l'AARPI Dominique O. - Sylvie K. T., avocat au barreau de PARIS, toque : L0069

 

INTIMÉES :

SAS RED GROUP exerçant sous l'enseigne « PITAYA RECRUTEMENT »

Ayant son siège social [...], [...], N° SIRET : YYY, Représentée par Maître Patricia H. de la SELARL 2H Avocats à la cour, avocat au barreau de PARIS, toque : L0056, Ayant pour avocat plaidant Me Françoise L. J., avocat au barreau de PARIS, toque : C2090

 

PARTIE INTERVENANTE :

SASU BOLT GROUPE venant aux droits et obligations de la SAS RED GROUP

Ayant son siège social [adresse], [...], N° SIRET : ZZZ, Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège, Représentée par Maître Patricia H. de la SELARL 2H Avocats à la cour, avocat au barreau de PARIS, toque : L0056, Ayant pour avocat plaidant Maître Françoise L. J., avocat au barreau de PARIS, toque : C2090

 

COMPOSITION DE LA COUR : En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 27 janvier 2021, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Christine SOUDRY, conseillère, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de : Mme Marie-Annick PRIGENT, présidente de chambre, Mme Christine SOUDRY, conseillère, Mme Camille LIGNIERES, conseillère, qui en ont délibéré.

Greffière, lors des débats : Mme Hortense VITELA-GASPAR.

ARRÊT : - contradictoire - par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile. - signé par Mme Marie-Annick PRIGENT, présidente de chambre et par Mme Yulia TREFILOVA-PIETREMONT, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

FAITS ET PROCÉDURE :

Le 14 septembre 2017, la société Les Relais du Soleil, exploitant un hôtel-restaurant à l'enseigne « Hostellerie du Roy Soleil » dans le Lubéron, a souscrit auprès de la société Red Group, exploitant sous l'enseigne « Pitaya Recrutement » un cabinet spécialisé dans l'hôtellerie et la restauration, un contrat dit « de collaboration-restauration » pour le recrutement d'un chef de cuisine, stipulant des honoraires sous forme de « success fees » d'un montant de 10 % HT du montant de la rémunération brute annuelle du candidat recruté et une clause attributive de compétence au tribunal de commerce de Paris.

Prétendant que trois candidats envoyés par son intermédiaire, M. R., Mme M. et M. C., avaient été embauchés respectivement en qualité de « chef de cuisine », « chef de partie » et de « second de cuisine », la société Red Group a adressé à la société Les Relais du Soleil les factures suivantes :

- facture n° 20180518-00189 du 18 mai 2018, d'un montant de 3.179,52 euros TTC, pour le [...],

- facture n° 20180606-000193 du 6 juin 2018, d'un montant de 4.673,28 euros TTC, pour le placement de M. R.,

- facture n° 20180624-000196 du 24 juin 2018, d'un montant de 3.553,92 euros TTC, pour le placement de M. C.

M. R. et Mme M. ont respectivement démissionné de leurs fonctions les 11 et 12 juin 2018, avant la fin de leur période d'essai.

Les trois factures, totalisant la somme de 11.406,72 euros, sont restées impayées en dépit d'une mise en demeure par lettre recommandée avec demande d'avis de réception datée du 20 septembre 2018.

Le 15 novembre 2018, la société Red Group a attrait la société Les Relais du Soleil devant le juge des référés du tribunal de commerce de Paris aux fins de la faire condamner à lui payer la somme provisionnelle d'un montant de 11.406,72 euros, augmentée des intérêts au taux de trois fois le taux légal à compter de l'émission de chaque facture et anatocisme, outre la somme de 40 euros au titre des frais forfaitaires de recouvrement et la somme de 3.000 euros au titre des frais irrépétibles.

Assignée selon acte délivré « à personne habilitée », la société Les Relais du Soleil n'a pas comparu devant le juge des référés.

Par ordonnance du 13 décembre 2018, le juge des référés s'est déclaré compétent mais, invoquant « un manque de lisibilité des documents produits aux débats » n'a pas fait droit aux demandes provisionnelles de la société Red Group tout en renvoyant l'examen de l'affaire au fond devant le tribunal à l'audience du 1er février 2019, en application de l'article 873-1 du code de procédure civile.

La société Les Relais du Soleil a comparu par l'intermédiaire d'un avocat lors des audiences des 1er et 22 février 2019 du tribunal, en sollicitant un renvoi sans conclure sur le fond, oralement ou par écrit, puis a cessé de comparaître aux audiences ultérieures, son avocat ayant fait savoir qu'il cessait de la représenter.

Retenant essentiellement que :

- la démission des candidats en période d'essai était sans incidence sur la rémunération du cabinet de recrutement, la société Les Relais du Soleil n'ayant pas souhaité faire jouer la clause de remplacement,

- en dépit du défaut de contrat de collaboration pour le poste de « chef de partie » de Mme M., il y avait lieu de faire application du contrat standard de placement de la société Red Group, la société Les Relais du Soleil ayant transmis au cabinet de recrutement la copie de son contrat de travail pour la durée du 15 mai au 30 septembre 2018,

- en revanche, aucun contrat de collaboration ni de travail n'était produit pour le recrutement de M. C. au poste de second de cuisine,

le tribunal, par jugement contradictoire du 14 octobre 2019 assorti de l'exécution provisoire, a :

- condamné la société Les Relais du Soleil à payer à la société Red Group, avec intérêts au taux de trois fois le taux légal à compter de la date d'échéance de la facture correspondante et anatocisme, les sommes en principal de :

* 4.673,28 euros TTC, au titre du recrutement de M. R. en qualité de chef de cuisine, avec intérêts à compter du 26 juin 2018,

* 3.179,52 euros TTC, au titre du recrutement de Mme M. en qualité de chef de partie, avec intérêts à compter du 7 juin 2018,

* outre les sommes de 40 euros au titre des frais forfaitaires de recouvrement et de 1.500 euros au titre des frais non compris dans les dépens,

- débouté la société Red Group de sa demande de paiement de la facture concernant M. C.

La société Les Relais du Soleil a interjeté appel le 14 novembre 2019.

L'intimée a indiqué liminairement que le 5 mai 2020, la société Red Group avait fait l'objet d'une fusion absorption par la société Jobtruster et avait modifié sa dénomination sociale le 6 mai 2020 en devenant la société Bolt Group. C'est dans ces conditions que la société Bolt Group est volontairement intervenue à l'instance en indiquant qu'elle venait aux droits et obligations de la société Red Group.

Sur demande du 2 janvier 2020 de la société Les Relais du Soleil, le premier président de la cour de céans, par ordonnance du 17 juin 2020, a suspendu les effets de l'exécution provisoire initialement ordonnée par les premiers juges.

 

Prétentions et moyens des parties :

La société Les Relais du Soleil réclame, aux termes de ses dernières écritures du 6 janvier 2021, la somme de 2.500 euros au titre des frais irrépétibles et poursuit l'infirmation de la décision en sollicitant, concernant les demandes de la société Bolt Group, de :

- rejeter les demandes d'un montant de 3.179,52 euros TTC en principal, concernant l'embauche de Mme M., et de 3.533,90 euros en principal, concernant l'embauche de M. C.,

- dire « abusive, nulle et de nul effet » la clause de « success fees » insérée au contrat concernant le recrutement de M. R. et de rejeter corrélativement la demande de paiement correspondante.

[*]

La société Bolt Group réclame, aux termes de ses dernières conclusions du 15 décembre 2020, la somme de 3.000 euros au titre des frais irrépétibles, tout en demandant de prendre acte de la fusion absorption de la société Red Group par la société Bolt Group, et de mettre « hors de cause la société Red Group », poursuit :

- la confirmation du jugement en ce qu'il a condamné la société Les Relais du Soleil à lui payer les sommes en principal de 4.673,28 euros et de 3.179,52 euros aux titres des recrutement de M. R. et de Mme M., et de 40 euros au titre des frais forfaitaires de recouvrement,

- mais sa réformation en ce qu'il l'a déboutée de sa demande de paiement concernant le recrutement de M. C., en formulant un appel incident et en sollicitant la condamnation de la société Les Relais du Soleil à lui payer en outre la somme de 3.533,92 euros en principal,

tout en maintenant ses demandes antérieurement formulées en première instance concernant les intérêts de retard et leur capitalisation annuelle en application de l'article 1343-2 du code civil.

[*]

L'instruction de l'affaire a été clôturée par ordonnance du 21 janvier 2021 et l'audience de plaidoirie fixée au 27 janvier 2021.

[*]

Par conclusions « aux fins de renvoi de plaidoirie » du 26 janvier 2021, l'appelante a sollicité le renvoi des plaidoiries à une audience au mois de mai ou juin 2021 en exposant que l'avocat plaidant avignonnais, en raison de la pandémie actuelle, ne pouvait envisager son déplacement d'Avignon à Paris par le train et ainsi s'exposer « pendant 7 heures à un risque de contamination ». L'intimée s'y est fermement opposée en observant que « nous sommes tous confrontés à la pandémie » et en faisant valoir que, « start up », elle attendait depuis 2018 le paiement de ses factures.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIF DE LA DÉCISION :

Sur la demande de renvoi :

Outre que la liaison ferroviaire entre Avignon et Paris ne dure pas 7 heures, il convient d'observer que l'avocat de l'appelante n'indique pas être malade, que sa cliente est aussi représentée par un avocat parisien pour la postulation, qu'au jour de l'audience de plaidoiries, les voyages en chemin de fer ne sont pas suspendus et que les audiences des juridictions ont été maintenues dans le cadre du respect d'un protocole sanitaire. Les mêmes contraintes et conditions sanitaires pesant sur toutes les parties, c'est à tort que l'appelante a invoqué l'article 6 de la CEDH en justification de sa demande de renvoi des plaidoiries, les deux parties ayant eu les mêmes possibilités pour que leur cause soit équitablement entendue. L'affaire a, en conséquence, été retenue lors de l'audience du 27 janvier 2021.

 

Sur la demande de mise hors de cause de la société Red Group :

Dans ses conclusions du 15 décembre 2020, la société Bolt Group a affirmé, sans être démentie par l'appelante dans ses écritures ultérieures du 6 janvier 2021, que la société Red Group a fait l'objet d'une fusion absorption par la société Jobtruster, ensuite nouvellement dénommée Bolt Group. La fusion entraînant la dissolution sans liquidation de la société absorbée et la transmission universelle de son patrimoine à la société absorbante bénéficiaire de l'apport, cette dernière est venue aux droits et obligations de la société Red Group à partir du 5 mai 2020. Il n'y a donc pas lieu de mettre la société Red Group hors de cause, la société Bolt Group l'ayant remplacée de plein droit à l'instance, par le seul effet de la transmission universelle de patrimoine résultant de la fusion absorption.

 

Sur les demandes en paiement :

La société Les Relais du Soleil considère que le seul contrat la liant à la société Red Group a été conclu pour la recherche d'un chef de cuisine au titre de laquelle M. R. lui a été présenté. Elle estime qu'en stipulant un paiement des honoraires dépendant du résultat de l'opération et exigibles avant l'issue de la période d'essai du candidat, le contrat litigieux contient une clause de « success fees » abusive en ce qu'elle déséquilibre significativement les obligations réciproques des parties. Elle prétend en outre que les termes du contrat de collaboration sont « pour le moins confus, indéfinissables et surréalistes » en ne précisant « ni la mission, ni les moyens » et qu'aucune prestation n'a réellement été fournie par la société Red Group.

La société Les Relais du Soleil fait valoir, concernant les contrats de travail de Mme M. et de M. C., qu'aucun contrat de collaboration ou de mission n'a été souscrit avec la société Red Group, pour en déduire que les demandes correspondantes de paiement d'honoraires sont injustifiées à défaut de la fixation préalable d'un prix. Elle soutient qu'en tout état de cause, le cabinet de recrutement lui aurait adressé de faux postulants et ne justifierait pas de l'accomplissement de diligences justifiant le paiement de la rémunération réclamée.

La société Bolt Group conteste les allégations de l'appelante, estime avoir effectué la prestation convenue en présentant trois candidats à la société Les Relais du Soleil qui ont été recrutés par cette dernière. Elle fait valoir que le contrat de collaboration, prévoyant des recrutements multiples, s'applique aux trois embauches litigieuses.

 

Sur la demande en paiement de la facture au titre du recrutement de M. R. :

Sur le déséquilibre significatif :

Le contrat litigieux « de collaboration-restauration » ayant été signé après le 1er octobre 2016, mais avant le 1er octobre 2018, est soumis aux dispositions nouvelles issues de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, mais non aux modifications résultant de la loi de ratification n° 2018-287 du 20 avril 2018.

L'article 1110, alinéa 2 du code civil dispose que : « Le contrat d'adhésion est celui dont les conditions générales, soustraites à la négociation, sont déterminées à l'avance par l'une des parties ».

Selon l'article L. 442-6-I-2° du code de commerce dans sa rédaction applicable au litige, engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice causé le fait, par tout producteur, commerçant, industriel ou personne immatriculée au répertoire des métiers de soumettre ou de tenter de soumettre un partenaire commercial à des obligations créant un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties.

La caractérisation de la pratique prohibée par les dispositions de l'article L. 442-6-I-2° du code de commerce suppose d'une part, d'établir une tentative de soumission ou une soumission du partenaire commercial à une clause et d'autre part, de démontrer que cette clause est constitutive de déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties.

Tout d'abord, l'élément de soumission ou de tentative de soumission de la pratique de déséquilibre significatif implique la démonstration de l'absence de négociation effective.

Contrairement à ce que soutient la société Les Relais du Soleil, il ne peut être inféré du seul contenu des clauses, la caractérisation de la soumission ou tentative de soumission exigée par le législateur.

Or la société Les Relais du Soleil, qui qualifie le contrat litigieux de contrat d'adhésion, n'apporte aucun élément de contexte sur les conditions de sa négociation ni ne justifie avoir tenté de faire supprimer la clause critiquée.

Elle succombe donc à la charge de la preuve qui lui incombe et sa demande tendant à voir annuler la clause de « success fees » insérée au contrat concernant le recrutement de M. R. sera écartée.

 

Sur le droit à honoraires :

Par contrat du 14 septembre 2017, la société Les Relais du Soleil a confié à la société Red Group la mission 'de rechercher et (la) mettre en relation avec des candidats pour mener à bien la recherche citée en objet du présent contrat (recrutement d'un chef de cuisine) ».

L'article 3 du contrat conclu le 14 septembre 2017 intitulé « Honoraires de recrutement » prévoit que :

« 3.1. Généralités

Le client s'engage à prévenir Red Group le jour ou un candidat sélectionné et présenté par Red Group est recruté ou qu'une collaboration salariée ou non salariée est conclue avec ce candidat. Les honoraires sont intégralement dus à la date du démarrage du candidat par le client.

Les honoraires sont ainsi intégralement dus :

(A la date de démarrage ou d'embauche du candidat, de la signature d'un contrat de service, d'association, de franchise, de licence, de portage de partenariat ou de tout autre moyen de collaboration choisi par le client avec le candidat présenté par Red Group).

Dans le cas où le client embaucherait le candidat pour un autre poste que celui pour lequel Red Group a été missionné.

Les honoraires payables à Red Group par le client pour l'embauche d'un candidat sélectionné et présenté par Red Group sont un honoraire au succès (success free) :

Il est fixé et convenu que son montant sera calculé sur la base de 10 % (dix pour cent) HT de la rémunération brute annuelle convenue entre le client et le candidat recruté. »

L'article 7 intitulé « Garantie du contrat de collaboration restauration' stipule que :

« Si le client ou le candidat met fin au contrat de travail dans le premier mois suivant son intégration dans les effectifs du client, pour un motif autre qu'économique, Red Group mettra en œuvre les moyens nécessaires pour présenter un remplaçant sans honoraires supplémentaires pour le client (sauf frais de publicité dont il aurait été convenu préalablement). La mise en œuvre de la garantie est conditionnée au règlement de la facture initiale par le client dans les 15 jours de sa date et l'obligation garantie ne donnera lieu qu'à un seul remplacement, fait sur le même poste, pour un même lieu de travail et avec les mêmes conditions de rémunération que le recrutement initial. Le départ du candidat au cours de la période susmentionnée ne dispense aucunement le client de son obligation de régler les honoraires de recrutement à Red Group, si le client devait renoncer à cette clause de garantie et ne souhaitait pas le remplacement du candidat parti, les honoraires resteraient intégralement acquis à Red Group. Dans tous les cas, il est précisé que la période de garantie est totalement indépendante de la période d'essai légale prévue au contrat de travail du candidat. »

Le contrat conclu entre les deux sociétés s'analyse en un contrat de courtage dès lors que la société Red Group devait servir d'intermédiaire entre son donneur d'ordres, la société Les Relais du Soleil, et les candidats à recruter en vue de la conclusion de contrats de travail entre ces derniers.

En matière de courtage, le fait générateur de la créance de rémunération est, sauf stipulation contractuelle contraire, la signature du contrat entre le donneur d'ordres et le tiers.

C'est ainsi qu'aux termes des dispositions susvisées, la rémunération de la société Red Group était due dès la date de « démarrage du candidat » chez le client.

En l'espèce, il est établi que M. R. a été embauché par contrat à durée déterminée daté du 31 mai 2018 en qualité de chef de cuisine qui a démarré le 4 juin 2018. La rémunération de la société Red Group est donc due peu important qu'il ait démissionné le 11 juin 2018 avec effet le 12 juin 2018.

Pour échapper au paiement de la rémunération convenue, la société Les Relais du Soleil se plaint de manquements de la société Red Group à ses obligations. Tout d'abord, elle affirme que la société Red Group lui aurait présenté des ' candidats complices' qui n'auraient jamais eu l'intention d'être recrutés. Néanmoins, elle n'apporte pas la moindre preuve de cette allégation. Ensuite elle se prévaut d'un manquement de la société Red Group à son obligation de garantie. Or il sera relevé que l'obligation de garantie prévue à l'article 7 susvisé était conditionnée au paiement de la facture d'honoraires dans les 15 jours de sa date, paiement qui n'avait pas été effectué, et qu'en outre, la société Red Group a proposé le remplacement du candidat démissionnaire, ce qui a été refusé par la société Les Relais du Soleil.

Dès lors, aucune inexécution par la société Red Group de ses obligations n'étant démontrée, la société Bolt Group est bien fondée à réclamer les honoraires convenus et le jugement entrepris sera confirmé de ce chef.

 

Sur la demande en paiement de la facture au titre du recrutement de Mme M. et de la facture au titre du recrutement de M. C. :

L'article 5 du contrat intitulé « Recrutements multiples » indique que :

« Si, pour une mission donnée, le client décide de recruter (ou d'entrer en collaboration avec) plusieurs candidats présentés par Red Group, le client devra alors payer à Red Group des honoraires pour chacun des candidats ainsi placés, selon les modalités prévues au paragraphe 3.1.ci-dessus. »

Ainsi contrairement à ce que soutient la société Les Relais du Soleil, le contrat du 14 décembre 2017 s'applique à tous les recrutements faisant suite à la présentation de candidats par la société Red Group dans le cadre de la mission de recherche initialement confiée visant le recrutement d'un chef cuisinier.

Or il résulte des courriels :

- du 21 mai 2018 (17H42) de Mme M. à la société Red Group, que cette dernière l'a adressée à la société Les Relais du Soleil,

- du 12 juin 2018 (19H18) de la société Les Relais du Soleil à la société Red Group, que Mme M. avait été embauchée, puisque l'hôtel-restaurant informe le cabinet de recrutement que celle-ci a démissionné durant sa période d'essai.

Il est en outre versé aux débats un contrat de travail à durée déterminée en date du 15 mai 2018 concernant Mme M..

Par ailleurs, il résulte des courriels des 31 mai 2018 (15H58) et 7 juin 2018 (10H36) que la société Red Group a fait part à la société Les Relais du Soleil de la candidature de M. C.. En outre, la société Les Relais du Soleil ne dénie pas avoir effectivement engagé ce dernier en qualité de second de cuisine mais conteste uniquement le droit à rémunération de la société Red Group en affirmant n'avoir conclu aucun contrat de collaboration avec cette dernière le concernant.

Dans ces conditions, dès lors que le recrutement de Mme M. et de M. C. et leur « démarrage » au sein de la société Les Relais du Soleil sont établis, la rémunération de la société Red Group est due et la société Les Relais du Soleil, qui se plaint de manquements de la société Red Group à ses obligations, sans en rapporter la moindre preuve, ne saurait dénier ce droit.

En conséquence, la demande d'honoraires au titre du recrutement de ces deux candidats est fondée peu important que Mme M. ait démissionné le 12 juin 2018. Le jugement entrepris sera ainsi confirmé en ce qu'il a condamné la société Les Relais du Soleil au paiement d'une somme de 3.179,52 euros TTC, au titre du recrutement de Mme M. et infirmé en ce qu'il a débouté la société Red Group de sa demande de paiement de la facture concernant M. C. Statuant à nouveau de ce chef, la cour condamnera la société Les Relais du Soleil à payer à la société Bolt Group une somme de 3.553,92 euros TTC, au titre de la facture n° 20180624-000196 du 24 juin 2018 correspondant au placement de M. C., avec intérêts au taux égal à trois fois le taux légal à compter de la date d'échéance de la facture et anatocisme outre l'indemnité forfaitaire de 40 euros prévue à l'article L. 441-6 du code de commerce.

 

Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile :

Succombant en appel, la société Les Relais du Soleil sera condamnée aux dépens d'appel qui pourront être recouvrés selon les modalités de l'article 699 du code de procédure civile. Les dispositions du jugement entrepris relatives aux dépens et à l'article 700 du code de procédure civile seront confirmées. La société Les Relais du Soleil sera condamnée à verser une somme complémentaire de 1.500 euros à la société Bolt Group au titre des frais irrépétibles exposés en appel et sa demande de ce chef sera rejetée.

Il n'y a pas lieu de faire application des dispositions de l'article 10 du décret du 8 mars 2001, portant modification du décret du 12 décembre 1996, désormais article R. 631-4 du code de la consommation.

La demande de la société Bolt Group de ce chef sera écartée.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

La cour,

Statuant publiquement et contradictoirement,

DIT n'y avoir lieu de mettre hors de cause la société Red Group,

CONSTATE l'intervention de la société Bolt Group venant aux droits de la société Red Group,

CONFIRME le jugement sauf en ce qu'il a débouté la société Red Group de sa demande de paiement de la facture concernant M. C.,

Statuant à nouveau de ce chef,

CONDAMNE la société Les Relais du Soleil à payer à la société Bolt Group une somme de 3.553,92 euros TTC, au titre de la facture n°20180624-000196 du 24 juin 2018 correspondant au placement de M. C., avec intérêts au taux égal à trois fois le taux légal à compter de la date d'échéance de la facture,

DIT que les intérêts produiront eux-mêmes intérêts dans les conditions de l'article 1343-2 du code civil,

CONDAMNE la société Les Relais du Soleil à payer à la société Bolt Group une somme de 40 euros au titre de l'indemnité forfaitaire prévue à l'article L.441-6 du code de commerce,

CONDAMNE la société Les Relais du Soleil à verser à la société Bolt Group la somme de 1.500 euros au titre des frais irrépétibles,

CONDAMNE la société Les Relais du Soleil aux dépens d'appel qui pourront être recouvrés selon les modalités de l'article 699 du code de procédure civile,

DÉBOUTE les parties de leurs autres demandes.

Yulia TREFILOVA-PIETREMONT                   Marie-Annick PRIGENT

Greffière                                                                   Présidente