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CA AGEN (1re ch. civ.), 5 juillet 2021

Nature : Décision
Titre : CA AGEN (1re ch. civ.), 5 juillet 2021
Pays : France
Juridiction : Agen (CA), 1re ch. civ.
Demande : 19/01011
Date : 5/07/2021
Nature de la décision : Réformation
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 25/10/2019
Référence bibliographique : 5730 (dispositif des dernières conclusions, art. 954 CPC), 5828 (confirmation)
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CERCLAB - DOCUMENT N° 8943

CA AGEN (1re ch. civ.), 5 juillet 2021 : RG n° 19/01011 

Publication : Jurica

 

Extrait : 1/ « En l'espèce la BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE à sa déclaration d'appel a visé le chef du jugement qui a rejeté ses demandes formulées in limine litis au rang desquelles figuraient celle relative à l'application du code de la consommation qu'elle contestait, demande figurant à ses premières conclusions du 27 janvier 2020, mais non reprise au dispositif de ses dernières conclusions du 26 février 2021 : il n'y a donc plus lieu de statuer sur ce point. »

2/ « Il est de jurisprudence constante que s'agissant d'une action en nullité, la prescription commence à courir à compter du jour où l'acte irrégulier a été passé. Le bon de commande avec la société NRJEF ayant été signé le 20 décembre 2012, le contrat de crédit le 10 janvier 2013, les époux Y. n'ayant assigné l'ensemble des parties que suivant exploits d'huissier du 20 septembre, 3 et 4 octobre 2018 pour voir prononcer la nullité des contrats, leur action est prescrite. »

3/ « Vu les articles 31 et 32 du code de procédure civile, Aux termes des assignations délivrées et des demandes présentées en première instance, l'action intentée par les époux Y. tend à obtenir la nullité des contrats signés par M. Y. seul le 17 août 2017, d'une part avec DBTPRO et d'autre part avec CETELEM/BNP et en conséquence des nullités prononcées, que soient ordonnées les restitutions du matériel et des fonds versés.

Seul M. Y. a qualité pour exercer cette action en nullité des contrats qu'il a signé. En revanche en raison de la solidarité entre époux prévue à l'article 220 du code civil qui rendent communes les dettes souscrites durant le mariage par l'un des époux, Mme X. épouse Y. a un intérêt personnel et légitime à agir eu égard aux conséquences patrimoniales des engagements souscrits par M. Y. Dès lors, c'est à juste titre que le tribunal l'a déclarée recevable à agir sans le reprendre expressément au dispositif de sa décision, puisqu'il a également visé la recevabilité des demandes des époux Y. au regard des dispositions de l'article L. 622-21 du code de commerce. Le jugement sera confirmé sur la recevabilité de l'action de Mme X. épouse Y. »

4/ « Or depuis l'installation de leurs panneaux solaires, les époux Y. se sont plaints de leur manque de productivité, de sorte que cet équipement était de nature à répondre à leur besoin.

Néanmoins, force est de constater que les nombreuses imprécisions qui figurent sur l'exemplaire remis à M. Y., ajoutées à l'irrégularité du bordereau de rétractation retenue par le tribunal qui n'est pas aisément détachable sans amputer une partie du contrat justifie l'annulation prononcée pour motifs substitués. »

5/ « La méconnaissance des articles du code de la consommation susvisés, édictés dans l'intérêt des personnes démarchées à domicile que ces textes ont vocation à protéger, peut être couverte par le consommateur, soit en l'espèce M. Y. qui pouvait renoncer au droit d'invoquer cette nullité.

Or M. Y. en connaissance de ces dispositions légales, a poursuivi l'exécution du contrat en : - acceptant la livraison des marchandises et leur mise en service : celles-ci se déduisent du courrier qu'il a adressé le 19 mars 2018 à DBT-PRO pour se plaindre « d'une panne de l'onduleur installé par vos soins en septembre 2017 » ; - en poursuivant le remboursement du contrat de crédit comme en atteste l'historique de compte édité le 8 janvier 2019 produit par la banque. Dès lors, il a couvert les causes de nullité qu'il invoque. »

 

COUR D’APPEL D’AGEN

CHAMBRE CIVILE

PREMIÈRE CHAMBRE

ARRÊT DU 5 JUILLET 2021

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 19/01011. N° Portalis DBVO-V-B7D-CXQT.

LA COUR D'APPEL D'AGEN, 1ère chambre dans l'affaire,

 

ENTRE :

SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE venant aux droits de BANQUE SOLFEA

RCS de Paris n° XXX [...], [...], Représentée par Maître François D., membre de la SELARL AD LEX, avocat postulant inscrit au barreau D'AGEN, Représentée par Maître Laure R., membre de la SCPA RD AVOCATS & ASSOCIES, avocate plaidante inscrite au barreau de NIMES, APPELANTE d'un Jugement du Tribunal d'Instance de CONDOM en date du 20 Septembre 2019, RG 11-18-0165, D'une part,

 

ET :

Madame X. épouse Y.

née le [date] à [ville], de nationalité Française, [...], [...]

Monsieur Y.

né le [date] à [ville], de nationalité Française

Domiciliés : [...], [...], Représentés par Maître Laurent B., avocat postulant inscrit au barreau D'AGEN, Représentés par Maître François D., avocat plaidant inscrit au barreau de PAU

INTIMÉS

Madame Christine D., en qualité de liquidateur judiciaire de la société EVOSYS, exerçant sous l'enseigne EVO6, venant aux droits de la Sté GROUPE DBT

de nationalité Française [...], [...]

SELARL B. M.J. es qualité de liquidateur de la Société Nouvelle Régie des jonctions des Energies de France

[...], [...]

INTIMÉS n'ayant pas constitués avocats,

D'autre part,

 

COMPOSITION DE LA COUR : L'affaire a été débattue et plaidée en audience publique le 5 mai 2021 devant la cour composée de : Présidente : Claude GATÉ, Présidente de Chambre, qui a fait un rapport oral à l'audience, Assesseurs : Dominique BENON, Conseiller, Jean-Yves SEGONNES, Conseiller.

Greffière : Nathalie CAILHETON

ARRÊT : prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                        (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

FAITS ET PROCÉDURE :

M. Y. a signé avec la société NOUVELLE REGIE DES JONCTIONS DES ENERGIES DE FRANCE, exerçant sous l'enseigne GROUPE SOLAIRE DE FRANCE le 20 décembre 2012, un bon de commande pour la livraison et la pose d'une installation photovoltaïque d'une puissance de 2960 wc au prix de 19.990 €. Le bon de commande précisait à la rubrique « démarches administratives et financement » que « le raccordement de l'onduleur au compteur de production, l'obtention du contrat de rachat de l'électricité produite et la démarche auprès du Consuel d'État (obtention de l'attestation de conformité) » étaient à la charge de Groupe Solaire de France.

Afin de financer cette installation, M. Y. et Mme X. son épouse (les époux Y.) ont souscrit, auprès de BANQUE SOLFEA, aux droits de laquelle vient désormais BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE, un contrat de crédit affecté, selon offre préalable acceptée le 20 décembre 2012, d'un montant de 19.900 € remboursable en 168 mensualités de 181 € sans assurance (hors différé d'amortissement), au taux nominal de 5,60 % l'an.

Le 20 décembre 2012 était également signée une délégation de pouvoir au bénéfice de Groupe Solaire de France aux fins d'effectuer en mairie la demande préalable de travaux, ainsi qu'un mandat de représentation pour le raccordement d'un ou plusieurs sites au réseau public de distribution d'électricité.

Par suite d'une erreur sur la date de validité de l'offre, les époux Y. ont signé un second contrat de crédit affecté le 10 janvier 2013 n° P13674445 aux mêmes conditions d'emprunt.

La société GROUPE SOLAIRE DE FRANCE a procédé à la livraison et la pose de l'installation facturées le 31 décembre 2012.

Le 16 janvier 2013 les époux Y. ont signé l'attestation de fin de travaux aux termes de laquelle ils ont reconnu que les travaux avaient pris fin, hors raccordement au réseau et démarches administratives, et ont demandé le déblocage des fonds au profit du vendeur.

La banque a versé les fonds, sur la base de ce document et de la facture de la société GROUPE SOLAIRE DE FRANCE, le 21 janvier 2013 et en a informé les époux Y. et le vendeur par courrier de la même date.

L'arrêté de non-opposition à travaux a été pris le 5 mars 2013 par le maire de [ville C.].

Le 28 juin 2013 ERDF a fait procéder à une visite au domicile des époux Y. et a indiqué que des travaux étaient à réaliser pour une reprise de l'installation intérieure et un dégagement de l'emplacement du tableau.

Par jugement du 12 novembre 2014, la SAS NRJEF a été placée en liquidation judiciaire par le tribunal de commerce de Bobigny et la SCP M.B. désignée en qualité de mandataire liquidateur.

En novembre 2014, les époux Y. se sont plaint que leur installation n'était en réalité toujours pas raccordée. La banque a mandaté la société SWEETCOM qui a réalisé les dernières prestations permettant le raccordement de l'installation au réseau et la signature du contrat d'achat de l'énergie avec EDF en novembre 2015, à effet du 30 mars 2015.

Le 28 juin 2016 les époux Y. ont signé un avenant au contrat de prêt P13674445 pour réaménager leur crédit, le capital restant dû étant de 18.380,44 €, le taux de 3,50 %, TAEG 3,56 % sur 121 mois, échéance de 212,98 € avec assurance à effet du 5 août 2016.

Mécontents du rendement de l'installation, démarchés par la société GROUPE DBT PRO, les époux Y. se sont engagés pour une solution domotique et M. Y. a signé, le 17 août 2017, un bon de commande pour la livraison et la pose d'un « kit installations photovoltaïques autoconsommation » solution DOMOTIQUE COMWATT au prix de 5.938 €. Pour le financement de cette acquisition il a signé un contrat de crédit affecté le même jour auprès de CETELEM BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE d'un montant initial de 5.938 € remboursable en 180 échéances, de 48,99 € hors assurance, au taux nominal de 5,65 %.

La société GROUPE DBTPRO a procédé à l'installation et la mise en service de la solution vendue, et les fonds ont été versés par la banque le 21 septembre 2017.

Le 24 janvier 2018 l'onduleur est tombé en panne.

Le 19 mars 2018 M. Y. a adressé une lettre recommandée avec accusé de réception à l'attention de DBTPRO, pli refusé, précisant que la production était toujours à l'arrêt.

Les époux Y. ont saisi une association de consommateurs, CLCV, qui a adressé le 9 mai 2018 des courriers recommandés à la BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE, à CETELEM et au GROUPE DBT pour obtenir les documents contractuels signés par ses adhérents.

Suivant exploits d'huissier du 20 septembre, 3 et 4 octobre 2018, les époux Y. ont fait assigner devant le tribunal d'instance de Condom les sociétés BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE, venant aux droits de BANQUE SOLFEA, la SELARL B. MJ, ès qualité de liquidateur judiciaire de la société NOUVELLE REGIE DES JONCTIONS DES ENERGIES DE FRANCE placée en liquidation judiciaire le 18 juin 2014, la BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE, et la société GROUPE DBT, aux fins d'obtenir l'annulation ou la résolution des contrats de vente et de crédit affecté liés, ainsi que voir le prêteur privé de son droit à restitution du capital prêté.

La société GROUPE DBT a été dissoute à la suite de la réunion de toutes les parts sociales au profit de son associé unique, la société EVOSYS, laquelle a fait l'objet d'une procédure de liquidation judiciaire suivant jugement rendu par le Tribunal de Commerce de Montpellier du 19 octobre 2018.

Suivant exploit d'huissier du 15 février 2019, les époux Y. ont appelé en la cause Maître Christine D., ès qualité de liquidateur judiciaire de la société EVOSYS, venant aux droits de GROUPE DBT.

Par jugement du 20 septembre 2019 le tribunal a :

- ordonné la jonction des instances

- rejeté les demandes formulées in limine litis par la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE venant aux droits de la banque SOLFEA et CETELEM

- déclaré recevables les demandes formulées par les époux Y.

- débouté la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE venant aux droits de la banque SOLFEA et CETELEM de toutes ses demandes

- ordonné la nullité des bons de commandes signés le 20 décembre 2012 et le 17 août 2017 par les époux Y.

- ordonné à la SELARLU B. MJ ès qualité de mandataire judiciaire liquidateur de la SAS NOUVELLE REGIE DES JONCTIONS DES ENERGIES DE FRANCE et Maître D., ès qualité de mandataire liquidateur de la SASU EVOSYS venant aux droits de la SARL GROUPE DBT de démonter et enlever chez les époux Y. le matériel afférent aux bons de commande susvisés dans un délai de deux mois à compter du caractère définitif du présent jugement

- dit n'y avoir lieu à prononcer une astreinte

- dit que si la SELARLU B. MJ ès qualité de mandataire judiciaire liquidateur de la SAS NOUVELLE REGIE DES JONCTIONS DES ENERGIES DE FRANCE et Maître D., ès qualité de mandataire liquidateur de la SASU EVOSYS venant aux droits de la SARL GROUPE DBT n'ont pas démonté et enlever le matériel dans un délai d'un an à compter du caractère définitif du présent jugement, ils seront réputés en abandonner la propriété au bénéfice des époux Y.

- dit que si la SELARLU B. MJ ès qualité de mandataire judiciaire liquidateur de la SAS NOUVELLE REGIE DES JONCTIONS DES ENERGIES DE FRANCE et Maître D., ès qualité de mandataire liquidateur de la SASU EVOSYS venant aux droits de la SARL GROUPE DBT devra procéder à la remise en état sans porter préjudice à Mme A. (…)

- condamné la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE venant aux droits de la banque SOLFEA et CETELEM à rembourser les sommes perçues en application du contrat de crédit affecté du 20 décembre 2012, avec intérêts au taux légal à compter de la date du jugement

- condamné la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE venant aux droits de la banque SOLFEA et CETELEM à rembourser les sommes perçues en application du contrat de crédit affecté du 17 août 2017, avec intérêts au taux légal à compter de la date du jugement

- condamné in solidum la SELARLU B. MJ ès qualité de mandataire judiciaire liquidateur de la SAS NOUVELLE REGIE DES JONCTIONS DES ENERGIES DE FRANCE, Maître D., ès qualité de mandataire liquidateur de la SASU EVOSYS venant aux droits de la SARL GROUPE DBT et la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE venant aux droits de la banque SOLFEA et CETELEM à payer la somme de 1.500 euros au bénéfice des époux Y. au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile

- condamné in solidum la SELARLU B. MJ ès qualité de mandataire judiciaire liquidateur de la SAS NOUVELLE REGIE DES JONCTIONS DES ENERGIES DE FRANCE, Maître D., ès qualité de mandataire liquidateur de la SASU EVOSYS venant aux droits de la SARL GROUPE DBT et la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE venant aux droits de la banque SOLFEA et CETELEM aux dépens

- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire

Le tribunal a retenu notamment que le litige relevait des dispositions du code de la consommation, dit que Madame Y. avait qualité à agir en tant qu'épouse de M. Y. et co-emprunteur vis à vis de SOLFEA. Après avoir analysé l'exemplaire du bon de commande du 20 décembre 2012 le tribunal l'a déclaré nul, en considérant qu'il ne comportait pas d'informations précises sur la rentabilité de l'installation, élément essentiel du bien vendu, seule une case sur la puissance de la centrale étant cochée et dans le chapitre « autres observations panneaux photovoltaïques garantie de rendement à hauteur de 90 % pendant 25 ans » aucune information précise n'était donnée pour renseigner l'acheteur sur les caractéristiques essentielles du produit acheté et de la production d' électricité. S'agissant du bon de commande du 17 août 2017, le tribunal a relevé pour l'annuler qu'il ne comportait aucune description du produit acheté, il était simplement indiqué « solutions », et que le bordereau de rétractation ne précisait que les frais de retour du bien livré étaient à la charge du consommateur. Aucune confirmation ne pouvait être retenue avec un commencement d'exécution du contrat. Il a statué sur la reprise du matériel par les mandataires liquidateurs, a retenu la faute de la banque lors de la délivrance des fonds la privant de sa créance de restitution pour ne pas avoir décelé les irrégularités des bons de commande. Le tribunal a rejeté la demande de fixation de sa créance au passif de la liquidation judiciaire de DBT présentée par la BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE pour le même motif.

Par déclaration du 25 octobre 2019 la BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE a relevé appel de la décision en visant les chefs de jugement critiqués, et a intimé les époux Y., la SELARL B. mandataire judiciaire es qualité de liquidateur de la société NRJEF, la SARL GROUPE DBT et Maître D. Christine.

La BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE a fait signifier sa déclaration d'appel le 4 décembre 2019 à la SARL GROUPE DBT prise en la personne de maitre D. en qualité de mandataire liquidateur de la SASU EVOSYS venant aux droits de la SARLU GROUPE DBT.

L'appelante n'a pas justifié avoir dans le délai d'un mois de l'avis du greffe daté du 2 décembre 2019 signifié la déclaration d'appel à la SELARL B. mandataire judiciaire es qualité de liquidateur de la société NRJEF.

Sur saisine d'office du conseiller de la mise en état par ordonnance du 23 septembre 2020 la caducité de la déclaration d'appel a été prononcée à l'égard de cette partie.

 

PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Par dernières conclusions régulièrement déposées au greffe par RPVA le 26 février 2021 la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE venant aux droits de la SA Banque Solféa demande à la Cour (hormis les « dire et juger » qui ne sont pas des prétentions) de :

- réformer le jugement en ce qu'il a prononcé l'annulation des contrats souscrits le 17 août 2017 et retenu l'existence de fautes à l'encontre du prêteur, le privant de son droit à restitution du capital prêté, concernant les deux contrats de crédit souscrits

Statuant à nouveau

Vu l'article 2224 du code civil

- Dire et juger prescrite l'action à voir engager la responsabilité du prêteur concernant les contrats des 20 décembre 2012 et 10 janvier 2013

Vu l'article 31 du code de procédure civile

- Juger que Madame M. ne justifie pas de la qualité à agir concernant les contrats souscrits en 2017 auprès de GROUPE DBT et BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE

Sur le fond

- débouter les époux Y. de l'intégralité de leurs demandes

Subsidiairement, en cas d'annulation des contrats

- condamner solidairement, M. Y. et Mme X. épouse Y. à rembourser à BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE la somme de 19.990 €, correspondant au montant du capital prêté, outre les intérêts au taux légal à compter de la mise à disposition des fonds, concernant le contrat de crédit souscrit le 20 décembre 2012

- condamner M. Y. à rembourser à BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE la somme de 5.938 €, correspondant au montant du capital prêté, outre les intérêts au taux légal à compter de la mise à disposition des fonds, sous déduction des échéances versées

- juger que BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE devra restituer aux époux Y. les échéances versées au titre des contrats de crédit, après justification de leur part de la résiliation du contrat auprès d'EDF, de la restitution des sommes perçues au titre du contrat de revente, ainsi que de la restitution des crédits d'impôts perçus.

- fixer la créance de la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE, au passif de la liquidation judiciaire de la société EVOSYS, à hauteur de 8.818,20 €,

- débouter les époux Y. de toute autre demande, fin ou prétention,

Plus subsidiairement,

- fixer la créance de la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE, au passif de la liquidation judiciaire de la société EVOSYS, à hauteur de 5.938 €,

En tout état de cause

- condamner solidairement M. Y. et Mme X. épouse Y. à porter et payer à BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE, une indemnité à hauteur de 2.500 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile, outre les entiers dépens de première instance et d'appel

La BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE expose l'argumentation suivante :

- la procédure a pour seul objectif de battre monnaie en conservant des matériels qui fonctionnent parfaitement sans en régler le coût

- la prescription concernant les contrats de 2012 :

* le tribunal n'a pas répondu sur cette demande ;

* la nullité n'a pas été soulevée d'office par le tribunal, il a statué ultra petita en opérant une confusion entre les contrats de 2012 et ceux de 2017 ;

* le moyen tiré de la prescription est susceptible de « s'opposer au juge » (sic) ;

* la prescription de 5 ans est acquise tant s'agissant de la régularité du bon de commande que de l'action en responsabilité du prêteur : cette dernière demande ne figurait pas dans l'acte introductif d'instance, et s'agissant d'une procédure orale elle n'a pris date certaine qu'avec les conclusions soutenues oralement le 14 juin 2019.

- l'absence de qualité à agir de Mme X. épouse Y. pour les contrats de 2017

* seul M. Y. a signé les contrats de 2017 ;

* Mme X. épouse Y. ne peut agir en nullité des contrats ni en responsabilité contractuelle, tout au plus en responsabilité délictuelle ce qu'elle n'a pas fait ;

- sur la demande d'annulation du contrat principal :

* le bon de commande comporte l'ensemble des mentions prévues au code de la consommation ;

* la partie adverse produit les conditions générales de vente qu'elle a reconnu avoir accepté ;

* il n'y avait pas lieu de renseigner que la rentabilité de l'installation, ce que la Cour de cassation ne considère de toute façon pas comme une caractéristique essentielle, puisque le matériel vendu était destiné à contrôler la production d'électricité ;

* en cas de rétractation, les conditions générales de vente prévoient que les frais sont à la charge du vendeur il n'y avait donc pas lieu de prévoir une autre information au bordereau de rétractation.

- sur la confirmation :

* le prêteur a qualité pour invoquer la confirmation prévue à l'article 1338 du code civil, puisque de la nullité du contrat de vente dépend celle du contrat de crédit affecté ;

* le contrat a été exécuté, le matériel livré, posé, mis en service, M. Y. a accepté le déblocage des fonds, a utilisé le matériel pendant plusieurs mois après avoir reçu la facture de la société venderesse sans soulever la moindre protestation ;

- sur le dol du contrat du 20/12/2012

* le vendeur en liquidation judiciaire depuis 2014 ne peut rapporter aucune preuve de ce qu'il a rempli ses obligations d'information, ce que les époux Y. n'ignorent pas et ils sont donc de mauvaise foi ;

* il revient aux époux Y. de rapporter la preuve d'un défaut d'information intentionnel ;

* les jurisprudences qu'ils citent ont été rendues en matière de nullité du bon de commande pour manquement à une obligation d'information essentielle sur la rentabilité, ici prescrite, et non en matière de dol ;

* leur position est en tout état de cause contradictoire : ils ne peuvent à la fois soutenir qu'ils n'ont eu aucune information sur la rentabilité, et qu 'une information mensongère leur a été donnée.

- sur la résolution des contrats

* la société NRJE représentée par son mandataire judiciaire n'est plus dans la cause, les époux Y. sont irrecevables en leurs demandes de résolution ;

* il leur appartient de démontrer une inexécution suffisamment grave, or l'installation fonctionne et ils revendent de l'électricité ;

* s'agissant du contrat du 17 août 2017, les époux Y. ne rapportent aucune preuve d'un quelconque manquement et ils tentent de renverser la charge de la preuve ;

- subsidiairement, en cas d'annulation :

* toutes les restitutions doivent être ordonnées, et les époux Y. doivent aussi restituer les sommes perçues d’EDF, résilier le contrat de revente, restituer les avantages fiscaux perçus ;

* les justificatifs des virements au bénéfice des deux sociétés venderesses sont produits ainsi que les historiques de compte ;

* la BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE, sous réserve de la prescription, n'a commis aucune faute dans la remise des fonds, réalisée au vu d'une attestation de fin de travaux lui en donnant l'ordre et elle n'avait pas à vérifier si l'installation financée en 2012 était raccordée au réseau électrique ; le bon de commande de 2017 est régulier, la partie adverse se contente d'invoquer une absence de raccordement qui n'a pas lieu d'être, sans alléguer que le matériel n'a pas été livré posé et mis en service ;

* les époux Y. ne peuvent se prévaloir d'aucun préjudice et sont certains de conserver l'installation du fait de la disparition de la SAS NRJEF ;

* l'absence de rentabilité dont se prévalent les époux X. est sans lien avec les fautes invoquées du prêteur.

- sur la déchéance du prêteur de son droit aux intérêts conventionnels

* la partie adverse demande à la Cour de relever d'office ce moyen au motif de l'irrespect de dispositions d'ordre public : une telle demande se heurte aux dispositions de l'article 564 du code de procédure civile ;

* pour le contrat de crédit de 2013, cette demande est prescrite ;

* elle est mal fondée au vu des justificatifs produits du respect par le prêteur de ses obligations.

- sur la fixation de sa créance à la liquidation judiciaire de EVOSYS :

* si le bon de commande était annulé cela résulterait d'une faute de GROUPE DBT rédacteur du contrat, le tribunal ne pouvait rejeter sa demande de fixation en retenant la faute du prêteur ;

* en tout état de cause le prêteur ne peut être privé du capital.

[*]

Par dernières conclusions régulièrement notifiées par RPVA le 8 mars 2021 M. Y. et Mme X. épouse Y. demandent à la Cour de :

- confirmer le jugement ;

- condamner la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE à leur payer la somme supplémentaire de 4 800,00 euros au titre des frais irrépétibles ;

- condamner la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE aux entiers dépens, avec distraction au profit de maître B., avocat ;

- mettre à la charge de la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE l'intégralité des droits proportionnels de recouvrement et d'encaissement prévus à l'article L 111-8 du code des procédures civiles d'exécution.

les époux Y. font valoir :

- sur l'impossible remise en cause de l'annulation du bon de commande du 20 12 2012 :

* la caducité de la déclaration d'appel à l'égard de la SELARLU B. es qualité de mandataire judiciaire de la société NRJE empêche l'appelante de remettre en cause l'annulation du bon de commande de 2012 ;

* en cas d'indivisibilité du litige l'appel formé à l'égard d'une des parties n'est recevable que si toutes les parties sont appelées à l'instance ;

* la BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE dans ses dernières conclusions a renoncé à ses demandes de réformation du jugement en ce qu'il a prononcé l'annulation du contrat principal et du crédit affecté.

- le bon de commande du 17 août 2017 est nul :

* plusieurs mentions font défaut : contrairement aux dispositions de l'article L. 211-1 du code de la consommation, il ne mentionne pas les éléments suivants : identité du professionnel, forme juridique de la société numéro individuel d'identification d'assujettissement à la taxe sur la valeur ajoutée, nom et coordonnées du démarcheur, lieu de conclusion du contrat, caractéristiques essentielles du bien ou du service, résultats attendus, variations de productivité de l'installation photovoltaïque, le prix unitaire de chacun des biens et services proposés, la date de livraison ou délai d'exécution de la prestation, informations sur les garanties légales et contractuelles ;

* le bordereau de rétractation n'est pas conforme à l'article R. 221-3 du code de la consommation sur les frais en cas de rétractation ;

* la loi applicable au contrat et la juridiction compétente ne sont pas indiquées.

- il n'y a pas eu confirmation :

* faute de connaissance des vices affectant le bon de commande il ne peut y avoir eu intention de couvrir les nullités l'affectant ;

* ils ont au contraire saisi une association de consommateurs pour les soutenir dans leur démarche revendicative ;

* l'exécution du contrat ne vaut pas confirmation ;

- sur les remises en état et les restitutions

* le mandataire judiciaire de la société GROUPE DBT devient propriétaire de la seconde centrale photovoltaïque et pourra procéder à son enlèvement à ses frais ;

* faute de preuve du versement des fonds aux vendeurs, la banque ne peut qu'être déboutée de toute demande à leur encontre ;

* s'agissant de la seconde commande la banque ne peut produire la moindre attestation d'exécution de la prestation par la société DBT lui ordonnant de procéder au déblocage des fonds ;

* la prescription ne vaut pas pour le contrat de crédit de 2013, le délai ne commençant à courir qu'à compter de la révélation à l'emprunteur de la perte de chance de ne pas conclure le contrat financé ;

ils n'ont eu connaissance des vices du bon de commande de 2012 que par la consultation juridique de mai 2018 de la CLCV ;

* par courrier du 26 novembre 2014 le prêteur a reconnu avoir financé le premier bon de commande sans que la prestation du vendeur soit terminée, valant reconnaissance de responsabilité interruptive de prescription ;

* les travaux de la première centrale sont illégaux pour avoir été faits avant l'autorisation du maire ;

* la seconde centrale n'a jamais été mise en service, contrairement à ce que soutient l'appelante ce n'est pas un matériel d'augmentation de puissance de la première ;

* leur préjudice est équivalent au prix de vente qu'ils ne pourront jamais récupérer auprès des vendeurs en raison de leur déconfiture.

Pour un plus ample exposé des faits, des moyens et prétentions de l'appelant et de son argumentation, il est expressément renvoyé a ses écritures en application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, et à la décision déférée.

* * *

Les époux Y. ont signifié leurs dernières conclusions du 8 mars 2021 à Maître D. es qualité de liquidateur de la SASU EVOSYS par acte du 9 mars 2021 à une personne qui s'est déclarée habilitée à les recevoir.

La BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE n'a pas fait signifier ses écritures mais ne présente aucune demande à l'encontre de Maître D. sauf à voir fixée sa créance au passif de la liquidation de la SASU EVOSYS.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 10 février 2021 et l'affaire fixée pour plaider au 10 mars 2021.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIFS :

1/ Sur l'étendue de la saisine de la cour :

En application de l'article 562 du code de procédure civile, l'appel défère à la Cour la connaissance des chefs du jugement qu'il critique expressément, et de ceux qui en dépendent et la dévolution ne s'opère pour le tout que lorsqu'il tend à l'annulation du jugement ou si l'objet du litige est indivisible.

L'effet dévolutif de l'appel est déterminé par la déclaration d'appel et l'étendue de la saisine de la Cour ne peut être élargie que par un appel incident ou provoqué par les premières conclusions de l'intimé.

En l'espèce la BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE à sa déclaration d'appel a visé le chef du jugement qui a rejeté ses demandes formulées in limine litis au rang desquelles figuraient celle relative à l'application du code de la consommation qu'elle contestait, demande figurant à ses premières conclusions du 27 janvier 2020, mais non reprise au dispositif de ses dernières conclusions du 26 février 2021 : il n'y a donc plus lieu de statuer sur ce point.

 

2/ Sur les contrats signés le 20 décembre 2012 et le 10 janvier 2013 :

2-1 Les conséquences de la caducité de la déclaration d'appel à l'égard de la société NRJEF :

Les époux Y. soutiennent, à tort, que par suite de la décision du conseiller de la mise en état du 23 septembre 2020 ayant prononcé la caducité de la déclaration d'appel à l'égard de la société NRJEF pour non-respect des dispositions de l'article 902 du code de procédure civile, l'appelante serait empêchée de remettre en cause l'annulation du bon de commande du 20 décembre 2012 et du contrat de crédit affecté.

Si le litige avait été indivisible comme ils le prétendent, le défaut de signification de la déclaration d'appel à l'un des intimés aurait entrainé l'irrecevabilité de l'appel de la BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE, ce que les époux Y. n'auraient pas manqué de demander dans le cadre de la procédure d'incident alors qu'ils se sont abstenus de conclure, et en tout état de cause le conseiller de la mise en état n'aurait pas manqué de la prononcer.

Ce moyen sera donc rejeté et la BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE en raison de l'interdépendance des contrats de vente et de crédit est en droit de présenter toute défense aux demandes qui sont formulées par les époux Y.

 

2-2 La prescription de l'action en nullité des époux Y.

Vu les articles 122 et suivants du code de procédure civile,

L'article 2224 du Code civil dispose que : « Les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer ».

Il est de jurisprudence constante que s'agissant d'une action en nullité, la prescription commence à courir à compter du jour où l'acte irrégulier a été passé.

Le bon de commande avec la société NRJEF ayant été signé le 20 décembre 2012, le contrat de crédit le 10 janvier 2013, les époux Y. n'ayant assigné l'ensemble des parties que suivant exploits d'huissier du 20 septembre, 3 et 4 octobre 2018 pour voir prononcer la nullité des contrats, leur action est prescrite.

 

2-3 La résolution des contrats

L'article 954 alinéa 2 du code de procédure civile dispose que la cour n'est tenue de statuer que sur les demandes figurant dans le dispositif des conclusions des parties. A défaut de reprendre dans leurs dernières écritures les prétentions et moyens précédemment invoqués dans leurs conclusions antérieures elles sont réputées les avoir abandonnés et la cour ne statue que sur les dernières conclusions régulièrement déposées, soit conformément à l'article 930-1 du même code.

En l'espèce les époux Y. dans leurs premières conclusions d'intimés du 21 avril 2020 ont demandé à titre principal la confirmation du jugement sauf à ordonner à titre subsidiaire la résolution des bons de commande et des crédits affectés si leur nullité était écartée, outre des demandes sur les restitutions.

Au dispositif de leurs dernières conclusions du 8 mars 2021 ils sollicitent uniquement la confirmation du jugement.

Dès lors que le jugement n' a prononcé que la nullité des contrats et non leur résolution, les époux Y. sont donc réputés avoir abandonné leurs demandes de résolution, et ce quand bien même aux motifs de leurs écritures, de façon pour le moins confuse en ce qu'ils indiquent que la discussion ne peut plus porter sur le contrat signé le 20 décembre 2012 par suite de la caducité de la déclaration d'appel à l'égard de la société NJREF, ils développent toute une série d'arguments sur la régularité de cette prestation.

 

2-4 Sur la nullité pour dol du contrat signé le 20 décembre 2012 :

Vu les anciens articles 1116 et 1304 du code civil,

La prescription quinquennale de l'action en nullité pour dol a pour point de départ le jour où le contractant a découvert l'erreur qu'il allègue. Les époux Y. pourraient être recevables à invoquer la nullité pour dol dès lors que l'installation n'a commencé à produire de l'électricité qu'après son raccordement et la signature du contrat d'achat avec EDF en novembre 2015.

Mais le tribunal a déclaré nul le bon de commande du 20 décembre 2012 non pas sur le fondement du dol et de l'article 1116 du code civil, mais en considérant qu'il ne comportait pas d'informations précises sur la rentabilité de l'installation en tant que caractéristique essentielle du bien vendu et que par suite, faisant application de l'article L. 111-5 du code de la consommation, il était irrégulier.

Dès lors que les époux Y. demandent la confirmation du jugement, ils ne sont plus recevables à évoquer des manœuvres dolosives de la société NRJEF quant à la rentabilité de leur installation.

En conséquence, en raison de ce qui précède, le jugement qui a prononcé la nullité du contrat de vente du 20 décembre 2012, et aux motifs de sa décision a constaté la nullité corrélative du contrat de crédit affecté du 10 janvier 2013 sans la rependre au dispositif, tout en ordonnant la remise en état des lieux, les restitutions des sommes perçues par la BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE, sera infirmé.

 

3/ Sur les contrats signés le 17 août 2017 :

3-1 La qualité à agir de Mme X. épouse Y.

Vu les articles 31 et 32 du code de procédure civile,

Aux termes des assignations délivrées et des demandes présentées en première instance, l'action intentée par les époux Y. tend à obtenir la nullité des contrats signés par M. Y. seul le 17 août 2017, d'une part avec DBTPRO et d'autre part avec CETELEM/BNP et en conséquence des nullités prononcées, que soient ordonnées les restitutions du matériel et des fonds versés.

Seul M. Y. a qualité pour exercer cette action en nullité des contrats qu'il a signé.

En revanche en raison de la solidarité entre époux prévue à l'article 220 du code civil qui rendent communes les dettes souscrites durant le mariage par l'un des époux, Mme X. épouse Y. a un intérêt personnel et légitime à agir eu égard aux conséquences patrimoniales des engagements souscrits par M. Y.

Dès lors, c'est à juste titre que le tribunal l'a déclarée recevable à agir sans le reprendre expressément au dispositif de sa décision, puisqu'il a également visé la recevabilité des demandes des époux Y. au regard des dispositions de l'article L. 622-21 du code de commerce.

Le jugement sera confirmé sur la recevabilité de l'action de Mme X. épouse Y.

 

3-2 La nullité du contrat principal

L'article L. 242-1 du code de la consommation en vigueur en août 2017 prévoit que les dispositions de l'article L. 221-9 s'appliquent à peine de nullité du contrat conclu hors établissement.

Ce texte dispose que :

« Le professionnel fournit au consommateur un exemplaire daté du contrat conclu hors établissement, sur papier signé par les parties ou, avec l'accord du consommateur, sur un autre support durable, confirmant l'engagement exprès des parties.

Ce contrat comprend toutes les informations prévues à l'article L. 221-5.

Le contrat mentionne, le cas échéant, l'accord exprès du consommateur pour la fourniture d'un contenu numérique indépendant de tout support matériel avant l'expiration du délai de rétractation et, dans cette hypothèse, le renoncement de ce dernier à l'exercice de son droit de rétractation.

Le contrat est accompagné du formulaire type de rétractation mentionné au 2° de l'article L. 221-5 ».

L’article L. 221-5 prévoit :

Préalablement à la conclusion d'un contrat de vente ou de fourniture de services, le professionnel communique au consommateur, de manière lisible et compréhensible, les informations suivantes :

1° Les informations prévues aux articles L. 111-1 et L. 111-2 ;

2° Lorsque le droit de rétractation existe, les conditions, le délai et les modalités d'exercice de ce droit ainsi que le formulaire type de rétractation, dont les conditions de présentation et les mentions qu'il contient sont fixées par décret en Conseil d'État ;

3° Le cas échéant, le fait que le consommateur supporte les frais de renvoi du bien en cas de rétractation et, pour les contrats à distance, le coût de renvoi du bien lorsque celui-ci, en raison de sa nature, ne peut normalement être renvoyé par la poste ;

4° L'information sur l'obligation du consommateur de payer des frais lorsque celui-ci exerce son droit de rétractation d'un contrat de prestation de services, de distribution d'eau, de fourniture de gaz ou d'électricité et d'abonnement à un réseau de chauffage urbain dont il a demandé expressément l'exécution avant la fin du délai de rétractation ; ces frais sont calculés selon les modalités fixées à l'article L. 221-25 ;

5° Lorsque le droit de rétractation ne peut être exercé en application de l'article L. 221-28, l'information selon laquelle le consommateur ne bénéficie pas de ce droit ou, le cas échéant, les circonstances dans lesquelles le consommateur perd son droit de rétractation ;

6° Les informations relatives aux coordonnées du professionnel, le cas échéant aux coûts de l'utilisation de la technique de communication à distance, à l'existence de codes de bonne conduite, le cas échéant aux cautions et garanties, aux modalités de résiliation, aux modes de règlement des litiges et aux autres conditions contractuelles, dont la liste et le contenu sont fixés par décret en Conseil d'État »

L'article L. 111-1 dispose :

« Avant que le consommateur ne soit lié par un contrat de vente de biens ou de fourniture de services, le professionnel communique au consommateur, de manière lisible et compréhensible, les informations suivantes :

1° Les caractéristiques essentielles du bien ou du service, compte tenu du support de communication utilisé et du bien ou service concerné ;

2° Le prix du bien ou du service, en application des articles L. 112-1 à L. 112-4 ;

3° En l'absence d'exécution immédiate du contrat, la date ou le délai auquel le professionnel s'engage à livrer le bien ou à exécuter le service ;

4° Les informations relatives à son identité, à ses coordonnées postales, téléphoniques et électroniques et à ses activités, pour autant qu'elles ne ressortent pas du contexte ;

5° S'il y a lieu, les informations relatives aux garanties légales, aux fonctionnalités du contenu numérique et, le cas échéant, à son interopérabilité, à l'existence et aux modalités de mise en 'uvre des garanties et aux autres conditions contractuelles ;

6° La possibilité de recourir à un médiateur de la consommation dans les conditions prévues au titre Ier du livre VI.

La liste et le contenu précis de ces informations sont fixés par décret en Conseil d'État ».

En l'espèce l'exemplaire du bon de commande n°27906 produit par les intimés, sous forme de document auto-carboné, particulièrement illisible, permet toutefois de constater qu'il est renseigné de façon sommaire par les indications « photovoltaïque » à la rubrique « caractéristiques essentielles du bien », puis « Solutions » au titre du « descriptif détaillé », sans mention du prix, sans délai de livraison renseigné, avec l'indication d'un financement par crédit dont les caractéristiques sont de 180 mois, mensualité de 48,99 € hors assurance, ni le taux fixe, ni le TAEG ne sont précisés, pour un coût total de 8.818,20 €. Aucun nom ni signature du technicien conseil ne figure à ce document.

Suivent sur deux feuillets faisant corps avec les autres, les textes du code de la consommation des articles L 211-4 et suivants, 1641 à 1648 du code civil sur les défauts de la chose vendue, les textes du code de la consommation sur la garantie commerciale, le formulaire de rétractation avec le nom et l'adresse de DBTPRO SOLER à Gardanne, et les effets de la rétractation notamment quant à la pris en charge des frais afférents, enfin suivent les conditions générales de vente.

La BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE communique l'exemplaire qui lui a été adressé, copie plus lisible, sur laquelle apparaît en dessous de « solutions » l'indication « Domotique COMWATT » ainsi que le prix de 5.938 € avec le taux de taxe sur la valeur ajoutée de 10 %. La rubrique délai de livraison est également renseignée « 2 mois », comme le nom de l'organisme de crédit « Cetelem », la mensualité avec assurance 53,69 €, le taux débiteur fixe de 5,65% et le TAEG de 5,80 %. Au-dessus de la signature de M. Y. figure la reprise manuscrite de la mention pré-imprimée « je déclare et reconnais expressément avoir lu et accepté l'ensemble des informations énoncées ci-dessus ».

Ce document plus complet versé aux débats n'a pas été contesté par M. Y.

Il critique la régularité du bon de commande de façon générale en reprenant les articles du code de la consommation et en particulier fait de longs développements, jurisprudences diverses à l'appui, sur l'information du consommateur sur les variations de la productivité de l'installation photovoltaïque qui relèvent, selon lui, des caractéristiques essentielles du bien. Or comme le fait observer à juste titre la BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE il a acquis un équipement de domotique et non une installation photovoltaïque. En tous cas il n'a rapporté aucune preuve contraire à celle produite par la BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE (pièce 26) décrivant le système COMWATT EASYDOM comme un équipement complémentaire d'une installation photovoltaïque permettant de piloter à distance les appareils pour consommer au maximum l'électricité produite, et revendre facilement le surplus d'énergie produite et non consommée.

Or depuis l'installation de leurs panneaux solaires, les époux Y. se sont plaints de leur manque de productivité, de sorte que cet équipement était de nature à répondre à leur besoin.

Néanmoins, force est de constater que les nombreuses imprécisions qui figurent sur l'exemplaire remis à M. Y., ajoutées à l'irrégularité du bordereau de rétractation retenue par le tribunal qui n'est pas aisément détachable sans amputer une partie du contrat justifie l'annulation prononcée pour motifs substitués.

 

3-2 La confirmation de la nullité

La méconnaissance des articles du code de la consommation susvisés, édictés dans l'intérêt des personnes démarchées à domicile que ces textes ont vocation à protéger, peut être couverte par le consommateur, soit en l'espèce M. Y. qui pouvait renoncer au droit d'invoquer cette nullité.

Or M. Y. en connaissance de ces dispositions légales, a poursuivi l'exécution du contrat en :

- acceptant la livraison des marchandises et leur mise en service : celles-ci se déduisent du courrier qu'il a adressé le 19 mars 2018 à DBT-PRO pour se plaindre « d'une panne de l'onduleur installé par vos soins en septembre 2017 » ;

- en poursuivant le remboursement du contrat de crédit comme en atteste l'historique de compte édité le 8 janvier 2019 produit par la banque.

Dès lors, il a couvert les causes de nullité qu'il invoque.

En conséquence le jugement qui a prononcé l'annulation du contrat principal signé le 17 août 2017, puis celle du contrat de crédit affecté et qui s'est prononcé sur les conséquences de ces annulations, doit être infirmé et ces demandes rejetées.

Par suite le contrat de crédit doit se poursuivre, ce qui rend sans objet la discussion sur la possibilité pour la banque d'obtenir restitution du capital prêté.

Compte tenu de l'issue du litige, les époux Y. seront condamnés aux dépens de première instance et d'appel et à payer à la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE la somme de 2.500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

- la Cour, après en avoir délibéré conformément à la loi, statuant par arrêt rendu par défaut prononcé par mise à disposition au greffe et en dernier ressort,

- INFIRME le jugement du tribunal d'instance de CONDOM SAUF en ce qu'il a

- retenu sa compétence

- rejeté la demande de la BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE visant à écarter les dispositions du code de la consommation

- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire

- PRÉCISE que le jugement est confirmé sur la recevabilité de l'action de Mme X. épouse Y. en nullité du contrat signé le 17 août 2017 avec la société DBT-PRO, et du contrat de crédit affecté signé avec CETELEM BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE ;

STATUANT A NOUVEAU ;

- DECLARE IRRECEVABLES M. Y. et Mme X. épouse Y. en leurs demandes d'annulation des contrats signés le 20 décembre 2012 avec la société NOUVELLE REGIE DES JONCTIONS DES ENERGIES DE FRANCE, exerçant sous l'enseigne GROUPE SOLAIRE DE FRANCE et le 10 janvier 2013 avec la BANQUE SOLFEA aux droits de laquelle intervient la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE ;

- REJETTE la demande de nullité du contrat conclu le 17 août 2017 par M. Y. avec la société DBT-PRO aux droits de laquelle intervient la société EVOSYS et par voie de conséquence REJETTE la demande de nullité du contrat de crédit affecté signé par M. Y. avec CETELEM BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE ;

- CONDAMNE solidairement M. Y. et Mme X. épouse Y. à payer à la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE la somme de 2.500 Euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- CONDAMNE solidairement M. Y. et Mme X. épouse Y. aux dépens de première instance et d'appel.

Le présent arrêt a été signé par Claude GATÉ, présidente de chambre, et par Nathalie CAILHETON, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

La Greffière,                         La Présidente,