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CA VERSAILLES (1re ch. 1re sect.), 29 juin 2021

Nature : Décision
Titre : CA VERSAILLES (1re ch. 1re sect.), 29 juin 2021
Pays : France
Juridiction : Versailles (CA), 1re ch. sect. 1
Demande : 20/02409
Date : 29/06/2021
Nature de la décision : Réformation
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 4/06/2020
Référence bibliographique : 5889 (L. 221-3)
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CERCLAB - DOCUMENT N° 8990

CA VERSAILLES (1re ch. 1re sect.), 29 juin 2021 : RG n° 20/02409 

Publication : Jurica

 

Extraits : 1/ « Il résulte de l'article L. 221-3 du code de la consommation que les dispositions notamment relatives au droit de rétractation, sont applicables aux relations entre consommateurs et professionnels et étendues aux contrats conclus hors établissement entre deux professionnels dès lors que l'objet de ces contrats n'entre pas dans le champ de l'activité principale du professionnel sollicité et que le nombre de salariés employés par celui-ci est inférieur à cinq.

Le contrat conclu entre M. X. et la société DSL Communication porte sur la mise à disposition d'un site internet avec une application mobile. Il a été signé hors établissement. Si M. X. est photographe et a conclu le contrat litigieux pour les besoins de son activité professionnelle, l'objet du contrat, à savoir la fourniture d'une solution informatique et sa maintenance, destinée à promouvoir son activité, n'entre pas dans le champ de son activité principale, étant précisé que la société DSL Communication n'a pas créé pour lui un logiciel sur mesure mais a adapté un logiciel existant en fonction d'options définies par elle et choisies par M. X.

Les autres conditions d'application du texte susvisé ne font l'objet d'aucun débat.

Il en résulte que M. X. est fondé à se prévaloir du code de la consommation et à invoquer la caducité du contrat conclu avec DSL Communication sur le fondement d'une rétractation.

Il en résulte que M. X. est fondé à se prévaloir du code de la consommation et à invoquer la caducité du contrat conclu avec DSL Communication sur le fondement d'une rétractation.

Toutefois, à supposer que M. X. soit recevable à invoquer la rétraction du contrat conclu avec DSL Communication nonobstant l'absence de mise en cause de cette société, en ce qu'il demande seulement de constater que celle-ci est intervenue, ce que la société Locam est à même de contester, ce qu'elle fait d'ailleurs, étant rappelé que la preuve de la rétractation alléguée lui incombe. M. X. soutient à juste titre qu'en l'absence de remise par son cocontractant d'un bordereau de rétractation et d'information relative à ce droit, le délai de rétractation de 14 jours à compter du jour où le contrat est conclu ou du jour de la réception du bien, prévu par l'article L. 222-7 du code de la consommation, se trouve prorogé de 12 mois à compter de l'expiration du délai de rétractation initial, de sorte que, le bien ayant été livré le 3 mai 2018, le délai s'est poursuivi durant 12 mois et 14 jours à compter de cette date.

Cependant, il incombe à M. X. d'établir par tout moyen la preuve qu'il a exercé son droit de rétractation vis à vis de DSL Communication. Or en l'espèce, M. X. produit en pièce n°2 la copie d'un courriel électronique adressé à « [...] » le 11 juillet 2018. L'en tête du courriel ne mentionne pas l'envoi d'une pièce jointe. Il ne justifie donc pas, faute d'un accusé de réception ou d'une quelconque réponse de son cocontractant, que le texte qui constitue la page 2 de sa pièce n°2, prétendument joint à son courriel, a été envoyé et reçu par DSL communication. Il ne saurait donc être fait droit à sa demande tendant à la caducité du contrat de location financière, par voie de conséquence de la caducité du contrat principal. M. X. sera donc débouté de sa demande tendant à la caducité du contrat de location, par voie de conséquence de la caducité du contrat principal.

M. X. est par ailleurs irrecevable en toute demande visant à faire prononcer la résiliation du contrat conclu avec DSL communication, faute pour lui d'avoir appelé celle-ci en la cause, le cas échéant en la personne de son liquidateur (Cour de cassation La commune.14.11.2014 n°13-24.270).

Enfin, la cour relève que la société Locam invoque l'application de l'article 1186 du code civil issu de l'ordonnance du 10 février 2016 portant réforme du droit des obligations. Selon ce texte, un contrat valablement formé devient caduc si l'un de ses éléments essentiels disparaît. Lorsque l'exécution de plusieurs contrats est nécessaire à la réalisation d'une même opération et que l'un d'eux disparaît, sont caducs les contrats dont l'exécution est rendue impossible par cette disparition et ceux pour lesquels l'exécution du contrat disparu était une condition déterminante du consentement d'une partie. La caducité n'intervient toutefois que si le contractant contre lequel elle est invoquée connaissait l'existence de l'opération d'ensemble lorsqu'il a donné son consentement.

La société Locam soutient que ce texte ne saurait lui être appliqué au motif qu'elle n'avait aucune connaissance du contrat conclu avec DSL Communication, qu'elle découvre en cause d'appel, ce dont elle déduit qu'elle n'avait pas connaissance de l'opération d'ensemble.

M. X. ne développe aucun moyen sur le fondement de ce texte qu'il n'invoque pas au soutien de sa demande, ne demandant la caducité du contrat de location que par voie de conséquence d'une caducité principale et qu'il n'allègue pas la disparition du contrat principal.

Il ne peut donc être fait droit à la demande de caducité du contrat souscrit auprès de la société Locam. »

2/ « Le juge ne peut requalifier un contrat que si son objet ne correspond pas à son intitulé.

En l'espèce, le site internet n'a pas été vendu à M. X. La société Locam l'a acquis auprès de la société DSL Communication et le loue à M. X. moyennant une redevance mensuelle fixe. La facture du site a été établie au nom de Locam, M. X. n'a pas vocation à en devenir propriétaire mais est seulement utilisateur autorisé du logiciel. Le contrat ne comporte aucune stipulation d'intérêts et ne peut voir modifier sa qualification en contrat de crédit, comme le sollicite M. X. Il s'agit d'un contrat de location financière connexe et les règles protectrices du code de la consommation en matière de prêt n'ont pas lieu d'être appliquées. »

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE VERSAILLES

PREMIÈRE CHAMBRE PREMIÈRE SECTION

ARRÊT DU 29 JUIN 2021

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 20/02409. N° Portalis DBV3-V-B7E-T3X6. CONTRADICTOIRE. Code nac : 56B. Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 12 novembre 2019 par le Tribunal de Grande Instance de PONTOISE : R.G. n° 19/02896.

LE VINGT NEUF JUIN DEUX MILLE VINGT ET UN, La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

 

APPELANT :

Monsieur X.

né le [date] à [ville], de nationalité Française, [...], [...], représenté par Maître Célestin F., avocat postulant - barreau de VAL D'OISE, vestiaire : 238 - N° du dossier 4Y, Maître Yaya G. de la SELARL SEVEN AVOCATS, avocat plaidant - barreau de PARIS

 

INTIMÉE :

SAS LOCAM - LOCATION AUTOMOBILES MATÉRIELS

N° SIRET : XXX, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés audit siège, [...], [...], représentée par Maître Véronique B.-R. de la SCP B.-R.-DE C., avocat postulant - barreau de VERSAILLES, vestiaire : 462 - N° du dossier 137/20, Maître Guillaume M. de la SELARL ABM DROIT ET CONSEIL AVOCATS E.B. & M., avocat plaidant - barreau de VAL-DE-MARNE

 

Composition de la cour : En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 10 mai 2021 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Anna MANES, Présidente et Madame Anne LELIEVRE, Conseiller, chargée du rapport.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de : Madame Anna MANES, Présidente, Madame Anne LELIEVRE, Conseiller, Madame Nathalie LAUER, Conseiller.

Greffier, lors des débats : Madame Natacha BOURGUEIL,

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Vu le jugement rendu le 12 novembre 2019 par le tribunal de grande instance de Pontoise qui a :

- condamné M. X. à payer à la société Locam-Location automobiles matériels la somme de 18.691,20 euros avec intérêts égal au taux pratiqué par la Banque centrale européenne à son opération de refinancement la plus récente majoré de 10 points de pourcentage et ce à compter de la mise en demeure du 24 août 2018,

- ordonné la capitalisation des intérêts échus depuis une année entière au moins dans les termes et conditions prévus à l'article 1343-2 du code civil,

- condamné M. X. à payer à la société Locam-Location automobiles matériels la somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné M. X. aux dépens, dont distraction selon l'article 699 du code de procédure civile,

- ordonné l'exécution provisoire ;

Vu l'appel de ce jugement interjeté le 4 juin 2020 par M. X. ;

[*]

Vu les dernières conclusions notifiées le 17 février 2021 par lesquelles M. X. demande à la cour de :

Vu les articles du code monétaire et financier et du code de la consommation précités,

Vu les jurisprudences précitées,

Vu les pièces versées aux débats,

A titre principal

- infirmer le jugement du 12 mai 2020 dans toutes ses dispositions,

- constater que le contrat liant la société Locam et M. X. est un contrat de crédit régi par le code monétaire et financier,

- constater la validité de la rétractation du contrat de prestation de service et par voie de conséquence,

- constater la caducité du contrat de crédit,

- condamner la société Locam au paiement de la somme de 20.000 euros au titre dommages-intérêts,

- rejeter toutes les demandes de la société Locam,

- condamner la société Locam aux entiers dépens,

- condamner la société Locam à la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- dire qu'il y a lieu à exécution provisoire en application de l'article 515 du code procédure civile compte tenu de l'ancienneté de l'affaire et de la nature des faits,

Subsidiairement,

- infirmer le jugement du 12 mai 2020 dans toutes ses dispositions,

- constater que le contrat liant la société Locam et M. X. est un contrat de crédit régi par le code monétaire et financier,

- constater le non-respect de l'obligation d'information précontractuelle de l'emprunteur, de l'obligation d'évaluation de la solvabilité de l'emprunteur et la remise d'un bordereau détachable de rétractation,

- prononcer la déchéance de tous les intérêts,

- condamner la société Locam au paiement de la somme de 20.000 euros au titre dommages-intérêts couvrant l'entier préjudice subi par M. X.,

- rejeter toutes les demandes de la société Locam,

- dire qu'il y a lieu de prononcer la compensation des sommes que les parties se doivent mutuellement,

- condamner la société Locam aux entiers dépens,

- condamner la société Locam à la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

[*]

Vu les dernières conclusions notifiées le 17 février 2021 par lesquelles la société par actions simplifiée (SAS) Locam - Location automobiles matériels demande à la cour de :

Vu les dispositions des articles 1103, 1104 et 1352-3 du code civil,

Vu les pièces versées aux débats,

- dire et juger la société Locam - Location automobiles matériels recevable et bien fondée en l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

- au contraire dire et juger M. X. mal fondé en toutes ses demandes et l'en débouter,

En conséquence,

- confirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions, et y ajoutant,

- condamner M. X. au paiement de la somme de 3.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner M. X. aux entiers dépens de la présente instance dont distraction au profit de la SCP B. R. de C. pour le frais par elle exposés ;

Vu l'ordonnance de clôture rendue le 1er avril 2021 ;

 

FAITS ET PROCÉDURE :

Par contrat en date du 3 avril 2018, M. X. a souscrit auprès de la société Locam-Location automobiles matériels (ci-après la société Locam), pour les besoins de son activité professionnelle de photographe, un contrat de location pour une licence d'exploitation d'un site WEB et d'une application mobile, devant être créée par la société DSL Communication. Le contrat a été conclu pour une durée irrévocable de 60 mois et pour un loyer mensuel de 288 euros toutes taxes comprises (TTC).

Le site WEB et l'application mobile ont fait l'objet d'un procès-verbal de livraison et de conformité en date du 3 mai 2018.

M. X. a cessé de régler le montant de ses loyers à compter du 30 juin 2018.

Par courrier recommandé avec accusé de réception en date du 24 août 2018, la société Locam a mis en demeure M. X. de régulariser le paiement des loyers impayés, précisant qu'en l'absence de régularisation elle procéderait à la résiliation du contrat de location pour défaut de paiement de loyer.

Par courrier recommandé avec accusé de réception en date du 26 septembre 2018, la société Locam a de nouveau mis en demeure M. X. de régulariser le paiement des loyers impayés, précisant qu'en l'absence de régularisation ledit courrier vaudrait résiliation du contrat de location en vertu de la clause résolutoire de plein droit pour non-paiement des loyers.

M. X. n'ayant pas régularisé le paiement des loyers, la société Locam l'a assigné par acte d'huissier du 15 mars 2019 devant le tribunal de grande instance de Pontoise aux fins de le voir condamner au paiement d'une somme de 18.691,20 euros, avec intérêts égal au taux pratiqué par la Banque centrale européenne à son opération de refinancement la plus récente majoré de 10 points de pourcentage et ce à compter de la mise en demeure du 24 août 2018, et capitalisation des intérêts.

C'est dans ces circonstances qu'a été rendu le jugement attaqué ayant condamné M. X. à payer à la société Locam la somme de 18.691,20 euros avec intérêts égal au taux pratiqué par la Banque centrale européenne à son opération de refinancement la plus récente majoré de 10 points de pourcentage et ce à compter de la mise en demeure du 24 août 2018, ordonné la capitalisation des intérêts échus depuis une année entière au moins, et condamné M. X. à lui payer la somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

SUR CE, LA COUR :

Sur la recevabilité des demandes relatives au contrat principal et sur leur bien fondé :

Au soutien de son appel, M. X. fait valoir que le contrat de prestation de service de la société DSL Communication et le contrat de financement de la société Locam sont interdépendants. Il rappelle que les contrats ont été signés concomitamment le 3 avril 2018. Il considère que les sociétés DSL Communication et Locam sont des partenaires commerciaux, la société Locam ayant choisi comme fournisseur la société DSL Communication, dont elle finance directement les prestations de service. L'appelant analyse donc la situation comme une relation tripartite incluant un contrat de location financière. Or, il relève que la Cour de cassation juge que des contrats concomitants qui s'inscrivent dans une opération incluant une location financière sont interdépendants.

M. X. soutient que les contrats sont régis par les dispositions du code de la consommation puisque, photographe professionnel, il a agi à des fins qui n'entrent pas dans le cadre de son activité commerciale en louant une licence d'exploitation d'un site WEB et d'une application mobile. Il ajoute que les contrats ont été signés hors établissements, dans ses bureaux à Cergy-Pontoise.

L'appelant considère disposer d'un droit de rétractation en vertu des dispositions du code de la consommation. Il précise que, s'agissant du contrat signé avec la société DSL Communication, les mentions obligatoires sont absentes, de même que le bordereau de rétractation, obligatoire lui aussi. Il estime donc que le délai de rétractation dont il dispose doit être étendu de 14 jours à 12 mois en application de l'article L. 221-20 du code de la consommation. Il en déduit qu'il avait la faculté de se rétracter jusqu'au 3 mai 2019.

Il indique avoir exercé son droit de rétractation par courriel du 10 juillet 2018 et fait valoir que cette rétractation est valable puisqu'elle est intervenue dans le délai légal, soit avant le 3 mai 2019, et qu'elle est dépourvue d'équivoque.

M. X. se prévaut également du défaut d'information précontractuelle de la part de la société DSL communication.

La société Locam réfute l'argumentaire de l'appelant. Elle expose d'abord que ce n'est pas elle, mais M. X., qui a choisi le fournisseur. En outre, elle indique avoir acquis la propriété du site internet objet du contrat de location et non les prestations de la société DSL Communication que sont la maintenance, l'hébergement, le référencement ou la mise à jour. Elle en déduit n'être tenue qu'à la seule obligation de mise à disposition du site. Elle fait valoir que le contrat conclu avec elle est un contrat de location et non un contrat de crédit affecté ; qu'il s'agit d'un contrat relevant du code monétaire et financier et qu'elle est bien un établissement financier.

Elle conteste que M. X. ait exercé son droit de rétractation en faisant valoir en premier lieu qu'il communique la copie d'un courriel adressé à la société DSL Communication qui n'est pas partie à l'instance, qu'il ne rapporte pas la preuve que ce courriel ait été envoyé et reçu.

Elle se fonde sur l'article 14 du code de procédure civile pour soutenir qu'en l'absence de mise en cause de la société DSL communication, la demande est irrecevable. Elle observe que même si cette société est en liquidation judiciaire, selon jugement du 26 février 2020, elle conserve sa personnalité juridique et est représentée par son liquidateur, que M. X. aurait dû appeler en la cause. Elle se prévaut d'un arrêt de la Cour de cassation rendu par la Chambre commerciale le 14 novembre 2014.

Elle ajoute qu'à supposer que M. X. ait envoyé le courriel dont il se prévaut, il ne saurait s'analyser en une rétractation de sa part mais en une lettre de rupture fondée sur une nullité pour dol et que le régime de ces deux notions est distinct.

 

Appréciation de la cour

Les contrats litigieux ont été conclus le 3 avril 2018, sous l'empire de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016 entrée en vigueur le 1er octobre 2016.

Depuis l'adoption de cette ordonnance, les contrats conclus à distance et hors établissement, ce qui est le cas en l'espèce, font l'objet d'un chapitre spécifique du code de la consommation.

Ce chapitre regroupe les articles L. 221-1 et suivants, la section 1 étant relative aux définitions et à son champ d'application et les sections 2, 3 et 6 traitent de l'obligation d'information précontractuelle, des dispositions particulières applicables aux contrats conclus hors établissement et du droit de rétractation applicable à ces contrats.

Il résulte de l'article L. 221-3 du code de la consommation que les dispositions notamment relatives au droit de rétractation, sont applicables aux relations entre consommateurs et professionnels et étendues aux contrats conclus hors établissement entre deux professionnels dès lors que l'objet de ces contrats n'entre pas dans le champ de l'activité principale du professionnel sollicité et que le nombre de salariés employés par celui-ci est inférieur à cinq.

Le contrat conclu entre M. X. et la société DSL Communication porte sur la mise à disposition d'un site internet avec une application mobile. Il a été signé hors établissement. Si M. X. est photographe et a conclu le contrat litigieux pour les besoins de son activité professionnelle, l'objet du contrat, à savoir la fourniture d'une solution informatique et sa maintenance, destinée à promouvoir son activité, n'entre pas dans le champ de son activité principale, étant précisé que la société DSL Communication n'a pas créé pour lui un logiciel sur mesure mais a adapté un logiciel existant en fonction d'options définies par elle et choisies par M. X.

Les autres conditions d'application du texte susvisé ne font l'objet d'aucun débat.

Il en résulte que M. X. est fondé à se prévaloir du code de la consommation et à invoquer la caducité du contrat conclu avec DSL Communication sur le fondement d'une rétractation.

Toutefois, à supposer que M. X. soit recevable à invoquer la rétraction du contrat conclu avec DSL Communication nonobstant l'absence de mise en cause de cette société, en ce qu'il demande seulement de constater que celle-ci est intervenue, ce que la société Locam est à même de contester, ce qu'elle fait d'ailleurs, étant rappelé que la preuve de la rétractation alléguée lui incombe.

M. X. soutient à juste titre qu'en l'absence de remise par son cocontractant d'un bordereau de rétractation et d'information relative à ce droit, le délai de rétractation de 14 jours à compter du jour où le contrat est conclu ou du jour de la réception du bien, prévu par l'article L. 222-7 du code de la consommation, se trouve prorogé de 12 mois à compter de l'expiration du délai de rétractation initial, de sorte que, le bien ayant été livré le 3 mai 2018, le délai s'est poursuivi durant 12 mois et 14 jours à compter de cette date.

Cependant, il incombe à M. X. d'établir par tout moyen la preuve qu'il a exercé son droit de rétractation vis à vis de DSL Communication.

Or en l'espèce, M. X. produit en pièce n°2 la copie d'un courriel électronique adressé à « [...] » le 11 juillet 2018. L'en tête du courriel ne mentionne pas l'envoi d'une pièce jointe. Il ne justifie donc pas, faute d'un accusé de réception ou d'une quelconque réponse de son cocontractant, que le texte qui constitue la page 2 de sa pièce n°2, prétendument joint à son courriel, a été envoyé et reçu par DSL communication.

Il ne saurait donc être fait droit à sa demande tendant à la caducité du contrat de location financière, par voie de conséquence de la caducité du contrat principal. M. X. sera donc débouté de sa demande tendant à la caducité du contrat de location, par voie de conséquence de la caducité du contrat principal.

M. X. est par ailleurs irrecevable en toute demande visant à faire prononcer la résiliation du contrat conclu avec DSL communication, faute pour lui d'avoir appelé celle-ci en la cause, le cas échéant en la personne de son liquidateur (Cour de cassation La commune.14.11.2014 n°13-24.270).

Enfin, la cour relève que la société Locam invoque l'application de l'article 1186 du code civil issu de l'ordonnance du 10 février 2016 portant réforme du droit des obligations.

Selon ce texte, un contrat valablement formé devient caduc si l'un de ses éléments essentiels disparaît.

Lorsque l'exécution de plusieurs contrats est nécessaire à la réalisation d'une même opération et que l'un d'eux disparaît, sont caducs les contrats dont l'exécution est rendue impossible par cette disparition et ceux pour lesquels l'exécution du contrat disparu était une condition déterminante du consentement d'une partie.

La caducité n'intervient toutefois que si le contractant contre lequel elle est invoquée connaissait l'existence de l'opération d'ensemble lorsqu'il a donné son consentement.

La société Locam soutient que ce texte ne saurait lui être appliqué au motif qu'elle n'avait aucune connaissance du contrat conclu avec DSL Communication, qu'elle découvre en cause d'appel, ce dont elle déduit qu'elle n'avait pas connaissance de l'opération d'ensemble.

M. X. ne développe aucun moyen sur le fondement de ce texte qu'il n'invoque pas au soutien de sa demande, ne demandant la caducité du contrat de location que par voie de conséquence d'une caducité principale et qu'il n'allègue pas la disparition du contrat principal.

Il ne peut donc être fait droit à la demande de caducité du contrat souscrit auprès de la société Locam.

 

Sur la demande subsidiaire de déchéance des intérêts :

M. X. soutient que l'opération économique réalisée doit s'analyser en une opération de crédit soumise aux dispositions protectrices du code de la consommation. Il prétend que la société Locam a procédé au financement d'un site internet et d'une application mobile et que le contrat conclu avec elle est une opération de crédit affecté et qu'elle ne saurait contester sa qualité de prêteur de deniers. Il souligne que le juge, qui dispose de la faculté d'interpréter le contrat, n'est pas tenu par l'intitulé « contrat de location ».

Il invoque l'irrégularité de la qualité du signataire et l'existence d'un démarchage bancaire illicite

Il fait valoir que le code monétaire et financier impose à celui qui effectue du démarchage bancaire l'obligation de disposer d'un agrément. Or, il indique avoir été démarché à son domicile par un employé de la société DSL Communication pour signer les deux contrats le liant à cette dernière et à la société Locam. Il relève que l'intimée ne justifie pas que ledit employé disposait des autorisations nécessaires à cette fin. Il en conclut que la société DSL Communication a agi comme préposé de la société Locam, en violation des règles impératives du code monétaire et financier.

En second lieu, l'appelant expose que les obligations d'information de l'emprunteur et l'obligation d'information du consommateur sur son droit de rétractation n'ont pas été respectées. Il énonce ainsi qu'aucun formulaire détachable permettant l'exercice du droit de rétractation n'était joint au contrat de crédit. Il ajoute que la société Locam n'a pas pris la peine de vérifier son état de solvabilité, alors que cette obligation lui incombait avant l'octroi de tout concours financier.

M. X. en conclut que la société Locam n'a pas respecté les obligations protectrices de l'emprunteur et du consommateur qui s'imposaient à elle. Il affirme que le comportement agressif de l'intimée lui a causé un préjudice.

Il ajoute que la société Locam devait vérifier son état de solvabilité avant l'octroi de tout concours financier, obligation qu'elle n'a pas respectée.

Il en déduit que le contrat a été conclu en violation des dispositions d'ordre public et que la société Locam doit se voir infliger la déchéance des intérêts.

La société Locam réplique que M. X. commet une erreur d'analyse en confondant contrat de crédit affecté et contrat de location financière. Elle indique en effet qu'en présence d'un contrat de crédit, l'appelant serait propriétaire du site internet et qu'elle ne serait qu'un simple prêteur. Or, elle précise être propriétaire du site internet, soulignant que M. X. ne la rembourse pas d'un prêt mais verse une redevance en contrepartie de la concession d'une licence d'utilisation du site internet. Elle relève encore que la facture de la société DSL Communication a été dressée à son nom et non à celui de l'appelant. Elle en conclut que ce sont les dispositions du code monétaire et financier qui ont vocation à s'appliquer, à l'exclusion de celles du code de la consommation.

 

Appréciation de la cour

Le contrat conclu avec la société Locam est intitulé « contrat de location » lequel porte sur la mise à disposition d'une solution informatique, et plus précisément, l'utilisation d'un site internet et d'une application mobile, moyennant paiement de 60 loyers de 288 euros TTC.

Le juge ne peut requalifier un contrat que si son objet ne correspond pas à son intitulé.

En l'espèce, le site internet n'a pas été vendu à M. X. La société Locam l'a acquis auprès de la société DSL Communication et le loue à M. X. moyennant une redevance mensuelle fixe. La facture du site a été établie au nom de Locam, M. X. n'a pas vocation à en devenir propriétaire mais est seulement utilisateur autorisé du logiciel.

Le contrat ne comporte aucune stipulation d'intérêts et ne peut voir modifier sa qualification en contrat de crédit, comme le sollicite M. X.

Il s'agit d'un contrat de location financière connexe et les règles protectrices du code de la consommation en matière de prêt n'ont pas lieu d'être appliquées.

La demande de déchéance des intérêts se trouve ainsi d'autant plus dépourvue de fondement qu'aucun intérêt n'a été stipulé.

 

Sur la demande de confirmation du jugement :

La société Locam sollicite la confirmation du jugement en toutes ses dispositions.

M. X. a été condamné à payer à la société Locam la somme globale de 18.691,20 euros se décomposant ainsi :

- 864 euros au titre des loyers impayés du 30 juin au 31 août 2018,

- 86,40 euros au titre de la clause pénale sur les loyers impayés,

- 16 128 euros au titre des loyers à échoir du 30 septembre 2018 au 30 avril 2023

- 1 612,80 euros au titre de la clause pénale de 10 % sur les loyers à échoir.

Les documents contractuels justifient la demande. Toutefois, l'article 1231-5 du code civil dans sa rédaction applicable au contrat, prévoit que le juge peut, même d'office, modérer ou augmenter la pénalité convenue pour inexécution du contrat, si la pénalité apparaît manifestement excessive ou dérisoire.

En l'espèce, il est établi que la société Locam a acquis le site internet et l'application mobile qu'elle loue à M. X. au prix de 10.463,22 euros. Au titre de l'exécution forcée du contrat, elle a vocation à percevoir des loyers de 17.078,40 euros. Ce différentiel caractérise les pénalités excessives contractuellement fixées à 10 % sur les loyers à échoir. Celle-ci sera réduite à 1 %, soit à la somme de 161,28 euros.

Par conséquent, M. X. sera condamné à payer à la société Locam la somme de 17 239,68 euros, assortie des intérêts au taux légal, à compter de la mise en demeure du 24 août 2018.

Le jugement sera confirmé en ce qu'il a ordonné la capitalisation des intérêts échus depuis une année entière dans les conditions prévues à l'article 1343-2 du code civil.

 

Sur la demande de dommages et intérêts :

Au soutien de son appel, M. X. fait valoir que les violations, par la société Locam, des dispositions du code de la consommation et du code monétaire et financier lui ont causé un préjudice. Il indique en effet n'avoir jamais utilisé les services prévus au contrat initial puisque le site internet et l'application mobile n'ont jamais été fonctionnels. Il ajoute n'avoir perçu aucune somme de la part de l'intimée. Il rappelle en outre qu'en matière de crédit, le juge dispose du pouvoir discrétionnaire de moduler les effets de la sanction. Il sollicite donc le versement d'une somme de 20.000 euros au minimum à titre de dommages et intérêts pour le préjudice moral qu'il a subi du fait des multiples manquements de la société Locam à ses obligations.

En réplique, la société Locam indique que l'appelant ne justifie de son préjudice ni en fait ni en droit, et qu'il doit donc être débouté de sa demande.

 

Appréciation de la cour :

Aucune faute n'étant retenue à l'encontre de la société Locam, M. X. sera débouté de sa demande de dommages et intérêts.

Le tribunal a exactement statué sur les dépens de première instance.

M. X., partie perdante, doit être condamné aux dépens d'appel.

L'équité et la situation économique des parties justifient de ne pas faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, que ce soit en première instance ou en appel.

Dès lors, le jugement sera infirmé en ce qu'il a condamné M. X. au paiement de la somme de 1.500 euros à ce titre.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

La cour statuant par arrêt contradictoire et mis à disposition,

CONFIRME le jugement en ses dispositions relatives aux dépens et en ce qu'il a ordonné la capitalisation des intérêts échus depuis une année entière dans les conditions prévues à l'article 1343-2 du code civil,

L'INFIRME en ses autres dispositions,

Statuant à nouveau et ajoutant au jugement entrepris,

DÉCLARE M. X. irrecevable en sa demande de résiliation du contrat conclu avec la société DSL Communication,

DÉCLARE M. X. mal fondé en sa demande de constatation de la validité de la rétractation du contrat de prestations de service et de sa demande de constatation, par voie de conséquence de la caducité du contrat de crédit,

Le DÉBOUTE de ses autres demandes, y compris subsidiaires,

CONDAMNE M. X. à payer à la société Locam-Location automobiles matériels la somme de la somme de 17.239,68 euros, assortie des intérêts au taux légal, à compter de la mise en demeure du 24 août 2018.

REJETTE toutes autres demandes plus amples ou contraires des parties,

CONDAMNE M. X. aux dépens d'appel qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,

- signé par Madame Anne LELIEVRE, conseiller pour le président empêché et par Madame Natacha BOURGUEIL, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier,                           Le Conseiller,