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CA PARIS (pôle 5 ch. 11), 29 octobre 2021

Nature : Décision
Titre : CA PARIS (pôle 5 ch. 11), 29 octobre 2021
Pays : France
Juridiction : Paris (CA), Pôle 5 ch. 11
Demande : 20/00485
Date : 29/10/2021
Nature de la décision : Confirmation
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 20/12/2019
Référence bibliographique : 6207 (L. 442-1 C. com., informatique, logiciel)
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CERCLAB - DOCUMENT N° 9215

CA PARIS (pôle 5 ch. 11), 29 octobre 2021 : RG n° 20/00485 

Publication : Jurica

 

Extrait : « Au demeurant, si effectivement les conditions générales de vente ne sont pas opposables, à défaut pour la société ADCI d'apporter la preuve qu'elle les a notifiées à la société Europamiante, il se déduit sans équivoque que les facturations désignaient sous les noms « Maintenance Solutions BTP », pour les licences dédiées aux postes fixes, et « Maintenance Modules Mobilité BTP », pour celles des tablettes, des prestations sans lesquelles la société ADCI ne pouvait garantir l'exploitation et l'intégrité permanente des fonctionnalités de son application dont la société Europamiante a bénéficié, et tandis, d'une part, que les factures ont été payées au fur et à mesure de la mise à disposition des licences et des prestations essentielles à leur exploitation, et que d'autre part, la société Europamiante ne critique plus sérieusement les tarifs qu'elle a accepté de payer depuis l'origine du contrat jusqu'en septembre 2017, les premiers juges ayant dûment relevé que les prix n'étaient affectés d'aucun excès ni de dérive à la hausse, il ne se déduit la preuve d'aucun déséquilibre dans les prestations et les prix que les parties ont réciproquement acceptés depuis l'origine de la mise à disposition des licences, ni dans la négociation sur leurs conditions ultérieures, de sorte que le moyen sera écarté. »

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE PARIS

PÔLE 5 CHAMBRE 11

ARRÊT DU 29 OCTOBRE 2021

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 20/00485 (5 pages). N° Portalis 35L7-V-B7E-CBHLS. Décision déférée à la Cour : Jugement du 12 novembre 2019 - Tribunal de Commerce de PARIS - RG n° 2018005779.

 

APPELANTE :

SAS EUROPAMIANTE

prise en la personne de ses représentants légaux [...], [...], immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de MEAUX sous le n° XXX, représentée par Maître Milijana J. de la SELARL MJ AVOCAT, avocat au barreau de MEAUX, toque : 97

 

INTIMÉE ;

SAS AGENCE DE DÉVELOPPEMENT ET CONSEIL INFORMATIQUE BTP (ADCI)

prise en la personne de ses représentants légaux [...], [...], immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de REIMS sous le n° YYY, représentée par Maître Patricia Djomou DE C., avocat au barreau de SEINE-SAINT-DENIS

 

COMPOSITION DE LA COUR : En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 22 septembre 2021, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant M. Denis ARDISSON, Président de chambre, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de : M. Denis ARDISSON, Président de la chambre, Mme Marion PRIMEVERT, Conseillère, Mme Marie-Sophie L'ELEU DE LA SIMONE, Conseillère.

Greffier, lors des débats : Mme Saoussen HAKIRI.

ARRÊT : - contradictoire, - par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, - signé par M. Denis ARDISSON, Président de chambre et par Mme Saoussen HAKIRI, Greffière présente lors de la mise à disposition.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Vu le jugement du tribunal de commerce Paris du 11 décembre 2019 qui a :

- condamné la société Europamiante à payer à la société Agence de développement et conseil informatique BTP ('société ADCI') la somme de 4.500 euros TTC au titre des factures impayées,

- débouté la société Europamiante de sa demande de la somme de 50.000 euros à titre de dommages et intérêts,

- débouté la société ADCI de sa demande de la somme de 20.000 euros à titre de dommages et intérêts,

- condamné la société Europamiante à payer à la société ADCI la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

- débouté les parties de leurs demandes autres, plus amples ou contraires,

- ordonné l'exécution provisoire,

- condamné la société Europamiante aux dépens.

Vu l'appel interjeté le 20 décembre 2019 par la société Europamiante ;

* * *

Vu les conclusions remises par le réseau privé virtuel des avocats le 20 avril 2021 pour la société Europamiante afin d'entendre, en application des articles L. 441-1, L. 442-1 du code de commerce et 1119 du code civil :

- déclarer recevable et bien fondé l'appel interjeté par la SAS Europamiante,

- infirmer la décision en ce qu'elle a condamné la société Europamiante à payer à la société ADCI la somme de 4.500 euros TTC au titre des factures impayées, débouté la société Europamiante de sa demande de la somme de 50.000 euros à titre de dommages et intérêts et l'a condamnée à payer à la société ADCI la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens,

- constater le caractère déloyal des pratiques commerciales de la société ADCI,

- constater la brutalité de la rupture des relations commerciales initiée par la société ADCI,

- condamner la société ADCI à payer à la société Europamiante la somme de 50.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice,

- condamner la société ADCI à payer à la société Europamiante la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la société Europamiante aux entiers dépens de l'instance,

- ordonner l'exécution provisoire de la décision à intervenir.

* * *

Vu les conclusions remises par le réseau privé virtuel des avocats le 21 mai 2021 pour la société Agence de développement et conseil informatique BTP afin d'entendre, en application de l'article L. 442-1 du code du commerce :

- déclarer la société Europamiante recevable mais mal fondée en son appel et ses demandes,

- confirmer en son intégralité,

- débouter la société Europamiante de l'ensemble de ses demandes,

- condamner la société Europamiante à verser la somme de 5.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, et aux entiers dépens.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

SUR CE, LA COUR,

Pour un exposé complet des faits et de la procédure, la cour renvoie expressément au jugement déféré et aux écritures des parties.

Il sera succinctement rapporté que, suivant une facturation régulière et continue depuis décembre 2010, la société Europamiante, qui a pour activité le désamiantage dans le bâtiment, a obtenu de la société ADCI, la mise à disposition de son logiciel d'inventaire de gestion de planning et de suivi de chantiers qu'elle développe, et déclinée sous deux licences, l'une dédiée à une exploitation sur les postes fixes de la société Europamiante, l'autre, sur des tablettes utilisées par les salariés de la société, la société ADCI ayant par ailleurs convenu et facturé ponctuellement des prestations distinctes de formation des personnels de la société Europamiante à son logiciel, notamment les 17 juin 2013 et 24 novembre 2015, ainsi que pour le déploiement de mises à jour et la migration de fichiers, notamment le 17 juin 2017, ou encore pour la programmation procédures de calcul.

A compter d'un premier courriel du 26 septembre 2017, la société Europamiante a retourné à la société ADCI les facturations des trois dernières années pour contester la souscription de la maintenance spécifique pour l'exploitation du logiciel dédiée aux tablettes numériques facturée depuis 2016, et refuser de payer la facturation des prestations à venir en sorte qu'à la suite d'échanges de courriels sur les explications que la société ADCI a données sur sa facturation, et aux termes desquels elle réclamait le paiement des factures, et en suite de la communication par la société ADCI, le 10 octobre 2017, d'un premier projet de contrat détaillant la prestation de la maintenance, et menaçant de suspendre l'accès aux fonctionnalités des tablettes des salariés, la société Europamiante a obtenu du président du tribunal de commerce de Meaux, le 17 octobre 2017, l'injonction à la société ADCI de « maintenir sous astreinte les relations commerciales et notamment le maintien du logiciel ERP et les licences sur les postes des salariés et du support technique ».

Après avoir fait relever des obstacles à l'accès de certaines tablettes selon un constat d'huissier du 7 novembre 2017, la société Europamiante a assigné la société ADCI, le 9 janvier 2018, devant la juridiction commerciale pour le rétablissement des connexions aux tablettes et en dommages et intérêts fondés sur les dispositions de l'article L. 442-6, 1°, 2° et 5° du code de commerce, devenu L. 442-1.

 

1. Sur la déloyauté et les pratiques restrictives de concurrence :

Pour entendre infirmer le jugement en ce qu'il l'a déboutée de sa demande de dommages et intérêts, la société Europamiante oppose, aux termes de la discussion de ses conclusions, en premier lieu, l'inopposabilité des conditions générales de vente qui ne lui ont jamais été notifiées par la société ADCI et conclut à la déloyauté avec laquelle celle-ci lui a, d'une part, refusé de répondre sur la part des prestations qui correspondait dans la facturation à la maintenance de l'application dédiée au tablettes informatiques, et dont elle lui avait indiqué vouloir être dispensée, et de deuxième part, refusé de communiquer un mode d'emploi du logiciel, la société Europamiante déduisant de ces refus, ou du manquement de la société ADCI à son obligation d'information préalable sur l'objet des prestations qu'elle a facturées, la violation des dispositions de l'article 442-6 I du code de commerce, devenu L. 442-1-I, qui prohibe le fait « 1° D'obtenir ou de tenter d'obtenir de l'autre partie un avantage ne correspondant à aucune contrepartie ou manifestement disproportionné au regard de la valeur de la contrepartie consentie » et « 2° De soumettre ou de tenter de soumettre l'autre partie à des obligations créant un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties ».

Au demeurant, si effectivement les conditions générales de vente ne sont pas opposables, à défaut pour la société ADCI d'apporter la preuve qu'elle les a notifiées à la société Europamiante, il se déduit sans équivoque que les facturations désignaient sous les noms « Maintenance Solutions BTP », pour les licences dédiées aux postes fixes, et « Maintenance Modules Mobilité BTP », pour celles des tablettes, des prestations sans lesquelles la société ADCI ne pouvait garantir l'exploitation et l'intégrité permanente des fonctionnalités de son application dont la société Europamiante a bénéficié, et tandis, d'une part, que les factures ont été payées au fur et à mesure de la mise à disposition des licences et des prestations essentielles à leur exploitation, et que d'autre part, la société Europamiante ne critique plus sérieusement les tarifs qu'elle a accepté de payer depuis l'origine du contrat jusqu'en septembre 2017, les premiers juges ayant dûment relevé que les prix n'étaient affectés d'aucun excès ni de dérive à la hausse, il ne se déduit la preuve d'aucun déséquilibre dans les prestations et les prix que les parties ont réciproquement acceptés depuis l'origine de la mise à disposition des licences, ni dans la négociation sur leurs conditions ultérieures, de sorte que le moyen sera écarté.

En second lieu, la société Europamiante reproche à la société ADCI la rupture brutale de leur relation commerciale établie, régie par l'article L. 442-1-II du code de commerce, en lui faisant grief d'avoir suspendu l'accès à la gestion de ses données et ceci, malgré la décision de son rétablissement par la juridiction commerciale de Meaux du 19 octobre 2017, et ainsi qu'elle l'a fait constater par un huissier le 7 novembre suivant, la société Europamiante se prévalant du préjudice qui est résulté pour elle de n'avoir pu réaliser le pointage des 70 salariés présents sur les chantiers depuis le 26 octobre 2017, son impossibilité de mettre à jour les tableaux de bord, l'interruption de l'accès des responsables de chantiers aux informations nécessaires à l'accomplissement de leur mission, l'impossibilité de remettre à l'inspection du travail les documents obligatoires à l'occasion du contrôle de l'entreprise et enfin, l'impossibilité, à ce jour, de passer des commandes au moyen des tablettes.

Toutefois, ainsi que cela est retenu ci-dessus, les parties se sont réciproquement opposées sur les conditions de prix et des prestations pour la poursuite des mises à disposition des licences sans qu'une faute ne soit imputable à la société ADCI, et alors par ailleurs qu'il est constant que la société Europamiante a refusé les trois offres de devis que lui a soumises ultérieurement la société ADCI, que les observations abstraites et générales de la société Europamiante sur ses préjudices ne permettent pas d'inférer la preuve de la brutalité de la relation commerciale et tandis enfin, qu'elle ne démontre pas avoir perdu le bénéfice de ses données et ne conteste pas avoir conservé, sans bourse délier, l'exploitation des données sous les licences de la société ADCI, en particulier sur les postes fixes, jusqu'en août 2018, il ne se déduit pas la preuve de la brutalité de la rupture.

Le jugement sera en conséquence confirmé en ce qu'il a écarté les moyens et rejeté la demande de dommages et intérêts.

 

2. Sur les frais irrépétibles et les dépens :

La société Europamiante succombant à l'action, le jugement sera confirmé en ce qu'il a statué sur les frais irrépétibles ainsi que sur les dépens, et en cause d'appel, elle supportera les dépens et sera condamnée à verser la somme de 4.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

Confirme le jugement en toutes ses dispositions déférées ;

Y ajoutant,

Condamne la société Europamiante aux dépens ;

Condamne la société Europamiante à payer à la société Agence de développement et conseil informatique BTP à la somme de 4.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

LE GREFFIER                                LE PRÉSIDENT