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CA CHAMBERY (ch. civ. 1re sect.), 25 janvier 2022

Nature : Décision
Titre : CA CHAMBERY (ch. civ. 1re sect.), 25 janvier 2022
Pays : France
Juridiction : Chambery (CA), ch. civ. sect. 1
Demande : 21/01096
Date : 25/01/2022
Nature de la décision : Confirmation
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 25/05/2021
Référence bibliographique : 6242 (L. 442-6, juridictions spécialisées)
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CERCLAB - DOCUMENT N° 9380

CA CHAMBÉRY (ch. civ. 1re sect.), 25 janvier 2022 : RG n° 21/01096 

Publication : Jurica

 

Extrait : « En l'espèce, M. X. déclare dans ses conclusions devant le tribunal de commerce qu'il entend en défense contester au fond la validité de la clause pénale qui lui est opposée, et demander que cette clause est non écrite et dès lors de nul effet compte tenu de son caractère déséquilibré, ce qui constitue une pratique restrictive de concurrence prévue à l'article L. 442-1-2° du code de commerce.

Une partie ne saurait soulever « l'incompétence » d'une juridiction pour statuer sur les demandes qu'elle « entend » formuler (donc dans le futur) devant la juridiction qu'elle estime compétente, une juridiction ne pouvant se déclarer incompétente qu'au vu de prétentions dont elle se trouve saisie.

D'autre part, le tribunal de commerce de Chambéry, en se bornant dans le dispositif de son jugement à rejeter la demande d'incompétence, n'a pas commis d'excès de pouvoir.

Le jugement ne peut donc qu'être confirmé en ce qu'il a rejeté la demande « d'incompétence » de M. X. »

 

COUR D’APPEL DE CHAMBÉRY

CHAMBRE CIVILE PREMIÈRE SECTION

ARRÊT DU 25 JANVIER 2022

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 21/01096. N° Portalis DBVY-V-B7F-GWVR. Décision attaquée : Jugement du Tribunal de Commerce de CHAMBERY en date du 12 mai 2021, R.G. n° 2020F00215.

 

Appelant :

M. X.

né le [date] à [ville], demeurant [adresse], Représenté par la SCP LE R. B. D., avocats au barreau de CHAMBERY

 

Intimée :

SA CAFES F.

dont le siège social est situé [adresse], Représentée par la SCP M. D. T., avocats au barreau d'ALBERTVILLE

 

COMPOSITION DE LA COUR : Lors de l'audience publique des débats, tenue le 16 novembre 2021 avec l'assistance de Mme Sylvie LAVAL, Greffier,

Et lors du délibéré, par : - M. Michel FICAGNA, Président, qui a procédé au rapport, - Mme Alyette FOUCHARD, Conseiller, - Mme Inès REAL DEL SARTE, Conseiller,

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Selon contrat du 15 novembre 2018, M. X. a souscrit auprès de la société Cafés F. une : convention d'approvisionnement assortie d'une mise à disposition de matériel, pour une durée de 4 ans, prévoyant en cas de résiliation avant terme le paiement à la société F. d'une indemnité de résiliation.

M. X. a rompu ce contrat au profit d'une société concurrente.

Par acte du 17 septembre 2020, la société Cafés F., a assigné M. X. devant le tribunal de commerce de Chambéry aux fins de le voir condamner à lui payer l'indemnité de résiliation.

Par conclusions du 26 février 2021, M. X., invoquant une pratique restrictive de concurrence en application des dispositions de l'article L. 442-1-2° du code de commerce, a conclu à l'incompétence du tribunal de commerce de Chambéry pour en connaître au profit du tribunal de commerce de Lyon.

Par jugement du 12 mai 2021, le tribunal de commerce de Chambéry a :

- dit régulière, recevable mais non fondée l'exception d'incompétence matérielle soulevée par M. X.,

- débouté M. X. de son exception d'incompétence matérielle et se déclare compétent pour juger du litige,

- ordonné la notification de la présente décision par le greffier,

- sauf appel du présent jugement, renvoyé l'affaire à l'audience publique du vendredi 25 juin 2021 à 14 heures et fait injonction à M. X. de conclure au fond pour cette date,

- réservé les demandes d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- réservé le sort des dépens,

- dit qu'il appartiendra à la Société Cafés F. d'avancer les dépens relatifs à la présente décision, dans l'attente de la fixation de leur sort définitif par la décision au fond,

- liquidé les frais de greffe à la somme de 73,22 euros TTC avec TVA = 20 %, comprenant les frais de mise ou rôle et de la présente décision.

Par déclaration du 25 mai 2021, M. X. a relevé appel de ce jugement et sur autorisation, a assigné à jour fixe la société F. par acte du 9 août 2021.

[*]

Aux termes de ses conclusions d'appelant, M. X. demande à la cour :

- d'infirmer le jugement entrepris, et statuant de nouveau,

- de dire régulière, recevable et fondée l'exception d'incompétence matérielle soulevée par M. X. au profit du tribunal de commerce de Lyon,

- de déclarer incompétent le tribunal de commerce de Chambéry pour juger du litige,

- de renvoyer l'affaire devant le tribunal de commerce de Lyon,

- de condamner la société Cafés F. à régler à M. X. une somme de 3.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile et de ses frais irrépétibles de première instance et d'appel,

- de condamner la société Cafés F. aux entiers dépens de première instance et d'appel, avec, pour ceux d'appel, distraction au profit de la Scp Le R. B. D., avocat, en application de l'article 699 du code de procédure civile.

Il soutient :

- que le jugement est manifestement contraire aux règles de droit applicables en matière de pratiques restrictives de concurrence et spécialement aux dispositions des articles L. 442-4 1 et D. 442-3 du code de commerce et de la jurisprudence correspondante consacrant une compétence exclusive en la matière de certaines juridictions spécialisée,

- que le tribunal de commerce de Chambéry pour statuer ainsi sur sa compétence a en outre cru bon, mais à l'évidence contra legem, devoir préjuger de la question de la pratique restrictive de concurrence invoquée en défense par Monsieur X., et ce alors même que ce dernier rappelait expressément au tribunal dans ses conclusions la position très ferme de la Cour de cassation selon laquelle dès lors que l'une quelconque des parties soulève au fond un moyen tiré du droit de la concurrence, les juridictions spécialisées doivent en connaître, sans que la juridiction initialement saisie n'ait à apprécier préalablement les mérites dudit moyen.

[*]

La société Cafés F. aux termes de ses conclusions du 6 août 2021, demande à la cour :

- de confirmer le jugement rendu,

Y ajoutant,

- de condamner Monsieur X. à payer à la société Cafés F. la somme de 3.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens,

- de débouter Monsieur X. de sa réclamation financière.

Elle soutient :

- que la clause indemnitaire litigieuse qui ne crée aucun déséquilibre significatif,

- que les articles L. 442-1 et suivants sont inapplicables à la présente procédure concernant une résiliation anticipée et injustifiée de contrat,

- que si M. X. considère que le contrat signé avec la société Cafés F. crée un déséquilibre significatif au sens de l'article L. 442-1-2° du Code de Commerce, il doit nécessairement saisir directement le tribunal de commerce de Lyon afin de voir ordonner la cessation de la pratique sous le contrôle du Ministère Public et du Ministre chargé de l'économie,

- que cette procédure autonome a un objet différent que celle aujourd'hui engagée au seul visa des articles 1103, 1104, 1193 et 1194 du code civil tel que figurant dans l'assignation,

- que M. X. n'a déposé aucune conclusions au fond devant le tribunal de commerce afin de formuler une demande spécifique de dommages et intérêts ou cessation de la pratique qu'il considère comme illégale au sens des articles L. 442-1 et suivants du code de commerce, ce dont il résulte que qu'aucune demande reconventionnelle n'a été formulée,

- que le tribunal de commerce de Chambéry est donc parfaitement compétent pour statuer sur la demande financière de la société Cafés F. qui relève des dispositions de droit commun.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIFS :

Aux termes de l'article L. 442-1 2° du code de commerce :

« Engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice causé le fait, dans le cadre de la négociation commerciale, de la conclusion ou de l'exécution d'un contrat, par toute personne exerçant des activités de production, de distribution ou de services : (...)

2° De soumettre ou de tenter de soumettre l'autre partie à des obligations créant un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties ; »

Aux termes de l'article L 442-4 I. et III. du code de commerce :

« Pour l'application des articles L. 442-1, L. 442-2, L. 442-3, L. 442-7 et L. 442-8, l'action est introduite devant la juridiction civile ou commerciale compétente par toute personne justifiant d'un intérêt, par le ministère public, par le ministre chargé de l'économie ou par le président de l'Autorité de la concurrence lorsque ce dernier constate, à l'occasion des affaires qui relèvent de sa compétence, une pratique mentionnée aux articles précités ». (...)

Les litiges relatifs à l'application des articles L. 442-1, L. 442-2, L. 442-3, L. 442-7 et L. 442-8 sont attribués aux juridictions dont le siège et le ressort sont fixés par décret.

Aux termes de l'article D. 442-3 du code de commerce :

« Pour l'application du Ill de l'article L. 442-4, le siège et le ressort des juridictions commerciales compétentes en métropole et dans les départements d'outre-mer sont fixés conformément au tableau de l'annexe 4-2-1 du présent livre. »

lequel prévoit que seul le tribunal de commerce de Lyon est compétent pour le ressort des Cour d'appel de Chambéry, Grenoble, Lyon et Riom.

En l'espèce, M. X. déclare dans ses conclusions devant le tribunal de commerce qu'il entend en défense contester au fond la validité de la clause pénale qui lui est opposée, et demander que cette clause est non écrite et dès lors de nul effet compte tenu de son caractère déséquilibré, ce qui constitue une pratique restrictive de concurrence prévue à l'article L. 442-1-2° du code de commerce.

Une partie ne saurait soulever « l'incompétence » d'une juridiction pour statuer sur les demandes qu'elle « entend » formuler (donc dans le futur) devant la juridiction qu'elle estime compétente, une juridiction ne pouvant se déclarer incompétente qu'au vu de prétentions dont elle se trouve saisie.

D'autre part, le tribunal de commerce de Chambéry, en se bornant dans le dispositif de son jugement à rejeter la demande d'incompétence, n'a pas commis d'excès de pouvoir.

Le jugement ne peut donc qu'être confirmé en ce qu'il a rejeté la demande « d'incompétence » de M. X.

 

Sur l'article 700 du code de procédure civile :

Il y a lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

La Cour, statuant publiquement et contradictoirement,

Confirme le jugement en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

Condamne M. X. à payer à la société Cafés F. la somme de 1.500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens d'appel.

Dit que le présent arrêt sera notifié aux parties par lettre recommandée avec demande d'avis de réception par le greffier de la cour d'appel, conformément à l'article 87 du code de procédure civile, et renvoie l'affaire au tribunal de commerce de Chambéry.

Ainsi prononcé publiquement le 25 janvier 2022 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, et signé par Michel FICAGNA, Président et Sylvie LAVAL, Greffier.

Le Greffier,                                       Le Président,