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CA PARIS (pôle 5 ch. 11), 21 janvier 2022

Nature : Décision
Titre : CA PARIS (pôle 5 ch. 11), 21 janvier 2022
Pays : France
Juridiction : Paris (CA), Pôle 5 ch. 11
Demande : 19/12153
Date : 21/01/2022
Nature de la décision : Réformation
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 14/06/2019
Référence bibliographique : 6217 (publicité)
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CERCLAB - DOCUMENT N° 9396

CA PARIS (pôle 5 ch. 11), 21 janvier 2022 : RG n° 19/12153 

Publication : Jurica

 

Extrait : « Pour contester devoir la facturation revendiquée jusqu'au terme de la reconduction du contrat, la société Maguy soutient en premier lieu, et pour la première fois en cause d'appel, que le délai de préavis de 16 mois pour la résiliation du contrat stipulé à l'article 3 précité des conditions générales de vente est disproportionné par rapport à la durée de l'engagement de 48 mois à la lumière de l'article L. 442-6-I-5° du code de commerce dans sa version alors applicable et disposant l'interdiction « De rompre brutalement, même partiellement, une relation commerciale établie, sans préavis écrit tenant compte de la durée de la relation commerciale et respectant la durée minimale de préavis déterminée, en référence aux usages du commerce, par des accords interprofessionnels », stipulant encore que ces dispositions « ne font pas obstacle à la faculté de résiliation sans préavis, en cas d'inexécution par l'autre partie de ses obligations ou en cas de force majeure ».

Cependant, le moyen est radicalement inopérant, alors que la qualification de la rupture de la relation commerciale établie ne peut suppléer ou se substituer à celle tirée des conditions du contrat tenant à son terme et à sa reconduction convenus entre les parties, la société Maguy n'établissant au surplus pas l'exception qui justifiât la rupture anticipée du contrat ainsi que cela est retenu au point 1 de l'arrêt. »

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE PARIS

PÔLE 5 CHAMBRE 11

ARRÊT DU 21 JANVIER 2022

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 19/12153 (6 pages). N° Portalis 35L7-V-B7D-CAEIV. Décision déférée à la Cour : Jugement du 27 mai 2019 - Tribunal de Commerce de PARIS - RG n° 17/068858.

 

APPELANTE :

SAS NEW PLV

prise en la personne de Maître Vincent M., ès qualités d'administrateur provisoire [...], [...], [...], immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de BOBIGNY sous le n° XXX, représentées par Maître Olivier B., avocat au barreau de PARIS, toque : B0753 et Maître Xavier D., avocat au barreau de PARIS, toque : R120

 

INTIMÉE :

SARL MAGUY

prise en la personne de ses représentants légaux [...], [...], immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de COMPIEGNE sous le n° YYY, représentée par Maître Audrey C.-D., avocat au barreau de PARIS, toque : A0201

 

COMPOSITION DE LA COUR : En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 25 novembre 2021, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant M. Denis ARDISSON, Président de chambre, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de : M. Denis ARDISSON, Président de chambre, Mme Marion PRIMEVERT, Conseillère, Mme Marie-Sophie L'ELEU DE LA SIMONE, Conseillère.

Greffier, lors des débats : Mme Saoussen HAKIRI.

ARRÊT : - contradictoire, - par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, - signé par M. Denis ARDISSON, Président de la chambre et par Mme Saoussen HAKIRI, Greffière, présent lors de la mise à disposition.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Vu le jugement du tribunal de commerce de Paris du 27 mai 2019 qui, avec exécution provisoire, a condamné la société Maguy à payer à la société New PLV représentée par son administrateur provisoire, M. M., les sommes de 4.498 euros au titre des factures mises en paiement les 14 mai 2014 et 12 mai 2015, de 4.412,40 euros d'indemnité due au terme de la reconduction du contrat avec intérêts de retard égal au taux d'intérêt appliqué par la Banque centrale européenne pour son opération de refinancement la plus récente, majoré de 10 % à compter de la mise en demeure du 7 juin 2017 et capitalisation des intérêts, outre la somme de 2.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et les dépens ;

Vu l'appel interjeté le 14 juin 2019 par la société New PLV ;

* * *

Vu les conclusions remises par le réseau privé virtuel des avocats le 17 septembre 2021 pour la société New PLV, représentée par son administrateur provisoire, M. Vincent M., afin d'entendre, en application des articles 16 du code de procédure civile, 1315, 1184 et 1134 anciens du code civil, L. 441-6 et L. 442-6-1 du code de commerce :

- confirmer le jugement sauf en ce qu'il a limité le montant de l'indemnité au titre de la clause contractuelle relative aux défauts de paiement,

- condamner la société Maguy à payer à la société New PLV la somme de 12.421,20 euros TTC correspondant aux factures restées impayées au titre des deuxième, troisième et quatrième années du contrat reconduit ainsi que des frais de mise en demeure, avec intérêts de retard de droit calculés à un taux égal au taux d'intérêt appliqué par la Banque centrale européenne à son opération de refinancement la plus récente, majorée de 10 %,

- fixer le point de départ des pénalités de retard à la date d'exigibilité des factures impayées,

- débouter la société Maguy de l'intégralité de ses demandes,

- condamner la société Maguy au paiement d'une somme 8.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile ;

* * *

Vu les conclusions remises par le réseau privé virtuel des avocats le 10 décembre 2019 pour la société Maguy afin d'entendre, en application des articles 1134, 1184 et 1162 anciens du code civil et L. 442-6 du code de commerce :

- infirmer le jugement en toutes ses dispositions,

à titre principal,

- dire que la société New PLV a commis une faute contractuelle manifestement grave en introduisant des inserts commerciaux étrangers au sein des spots publicitaires de la société Maguy et en ne respectant pas le rythme du nombre de passages par jour du spot publicitaire litigieux,

- dire que la société Maguy a valablement résilié le contrat conclu avec la société New PLV par courrier du 25 mai 2015, à effet au 1er juin 2015,

- constater ainsi la résiliation du contrat en date du 20 juin 2012, à effet au 28 juillet 2012, aux torts exclusifs de la société New PLV,

- débouter la société New PLV de l'ensemble de ses demandes,

à titre subsidiaire,

- dire que l'article 3 des conditions générales de vente est abusif en ce qu'il instaure un délai de préavis d'une durée manifestement excessive au regard de la durée du contrat de 48 mois, de la nature du contrat publicitaire et de la durée des relations commerciales existantes entre les deux sociétés,

- dire que la société Maguy a valablement résilié le contrat conclu avec la société New PLV par courrier RAR en date du 25 mai 2015,

- réduire à de plus juste proportion le délai de préavis en le fixant au 28 juillet 2016,

- limiter la dette de la société Maguy aux sommes qui auraient été dues jusqu'au terme du contrat initial, soit 4.158 euros,

- débouter la société New PLV de sa demande tendant au renouvellement du contrat,

en tout état de cause,

- condamner la société New PLV à payer à la somme de 5.000 euros à titre de dommages et intérêts tous postes de préjudices confondus,

à titre subsidiaire,

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a considéré les dispositions de l'article 5 des conditions générales du contrat litigieux ambiguës, et qu'il les a ainsi interprétées favorablement à la société Maguy,

- dire qu'il y aura lieu de limiter les condamnations la somme de 8.610,40 euros TTC, correspondant aux sommes restantes dues arrêtées au 27 juillet 2017,

- débouter la société New PLV du surplus de ses demandes,

en tout état de cause,

- condamner la société New PLV à payer la somme de 4.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

SUR CE, LA COUR,

Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, la cour renvoie à leurs conclusions ainsi que'au jugement.

Il sera ainsi succinctement rapporté que suivant un ordre de publicité du 20 juin 2012, la société Maguy exerçant l'activité de restauration, a confié à la société New PLV la création ainsi que la diffusion, à compter du 28 juillet 2012, de spots publicitaires personnalisés à compter du d'une durée de 10 secondes avec une fréquence comprise entre 40 et 60 par jour sur 15 écrans disposés aux caisses au centre commercial Cora à [ville S.] et pour une durée de 48 mois et le prix annuel de 3.564,08 euros.

L'article 3 des conditions générales de vente stipule que le contrat « se renouvellera par tacite reconduction pour une période de même durée, sauf dénonciation par lettre recommandée avec AR par l'une ou l'autre des parties reçue à l'adresse du siège social de son cocontractant, seize mois au moins avant son échéance pour un contrat de 48 mois » tandis que l'article 5 dispose que « Le non-paiement d'une seule échéance mensuelle, trimestrielle ou annuelle entraînera de plein droit l'exigibilité immédiate et anticipée de la totalité des sommes restant dues à NEW PLV au titre de l'année de diffusion en cours ou jusqu'au terme du contrat ».

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 25 mai 2015, la société Maguy a indiqué à la société New PLV déplorer l'insertion de ses messages publicitaires pour des produits de marque Cora étrangers à sa publicité, estimant qu'elle brouillait la lecture de ses propres messages publicitaires et de son image, et a dénoncé la résiliation du contrat avec effet au 1er juin 2015.

La société Maguy ayant révoqué l'autorisation de paiement des prestations et dénié les mises en demeure que la société New PLV lui a délivrées pour le règlement des factures les 2 octobre 2015 et 15 mars 2016, puis dénié la reconduction tacite du contrat que la société New PLV lui a dénoncée le 16 mai 2016, et enfin, refusé de payer les factures dénoncées les 11 mai, et 7 juin et enfin, le 12 octobre 2017, elle a été assignée en paiement le 22 novembre 2017.

 

1. Sur l'exception d'inexécution :

La société Maguy entend en voir infirmer le jugement en ce qu'il a rejeté pour défaut de preuve, l'exception d'inexécution du contrat qu'elle a opposée aux inexécutions reprochées à la société New PLV dans sa lettre de résiliation, sans cependant produire davantage devant la cour la preuve de ses allégations.

Le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté la société Maguy de ce chef ainsi que de sa demande subséquente en dommages et intérêts.

 

2. Sur le fondement contractuel de l'indemnisation :

Pour contester devoir la facturation revendiquée jusqu'au terme de la reconduction du contrat, la société Maguy soutient en premier lieu, et pour la première fois en cause d'appel, que le délai de préavis de 16 mois pour la résiliation du contrat stipulé à l'article 3 précité des conditions générales de vente est disproportionné par rapport à la durée de l'engagement de 48 mois à la lumière de l'article L. 442-6-I-5° du code de commerce dans sa version alors applicable et disposant l'interdiction « De rompre brutalement, même partiellement, une relation commerciale établie, sans préavis écrit tenant compte de la durée de la relation commerciale et respectant la durée minimale de préavis déterminée, en référence aux usages du commerce, par des accords interprofessionnels », stipulant encore que ces dispositions « ne font pas obstacle à la faculté de résiliation sans préavis, en cas d'inexécution par l'autre partie de ses obligations ou en cas de force majeure ».

Cependant, le moyen est radicalement inopérant, alors que la qualification de la rupture de la relation commerciale établie ne peut suppléer ou se substituer à celle tirée des conditions du contrat tenant à son terme et à sa reconduction convenus entre les parties, la société Maguy n'établissant au surplus pas l'exception qui justifiât la rupture anticipée du contrat ainsi que cela est retenu au point 1 de l'arrêt.

Enfin, la société Maguy conclut à la confirmation des premiers juges qui, par une interprétation de l'article 5 précité des conditions générales de vente qu'ils ont soulevée d'office, ont estimé que le terme qu'il stipule était ambigu et justifiait de limiter le montant de l'indemnité due par l'annonceur à la première année qui a suivi son premier impayé le 16 mai 2016.

Toutefois, la clause de l'article 5 qui stipule l'obligation de payer les annuités dues jusqu'au terme du contrat en cas d'impayé est dépourvue d'équivoque, et tandis qu'il est constant que la société Maguy n'a pas dénoncé la résiliation de la convention dans les délais de l'article 3 des conditions générales de vente et que le terme du contrat était tacitement reconduit au 27 juillet 2020, il convient d'infirmer le jugement de ce chef et de condamner la société Maguy à payer la somme de 12.421,20 euros TTC correspondant aux factures restées impayées au titre des deuxième, troisième et quatrième années du contrat reconduit ainsi que des frais de mise en demeure avec intérêt aux taux égal à celui appliqué par la Banque centrale européenne pour son opération de refinancement la plus récente, majorée de 10 %.

 

3. Sur les factures et le point de départ des intérêts :

La société Maguy ne conteste pas sérieusement le bien fondé des factures mises en paiement les 14 mai 2014 et 12 mai 2015 pour la somme de 4.498 euros TTC, de sorte que le jugement sera aussi confirmé de chef, sauf en ce qu'il fixé le point de départ des pénalités qui doit être fixé à la date d'exigibilité des factures impayées ainsi que cela résulte des dispositions de l'article L. 441-10 du code de commerce.

 

4. Sur les dépens et les frais irrépétibles :

La société Maguy succombant à l'action, le jugement sera confirmé en ce qu'il a statué sur les dépens et les frais irrépétibles, et en cause d'appel, elle sera condamnée aussi aux dépens et à payer la somme de 1.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS,

Confirme le jugement en toutes ses dispositions, sauf celle qui a exclu le paiement des factures au titre des deuxième, troisième et quatrième années du contrat, et celle relative au point de départ des intérêts des factures mises en paiement ;

Statuant à nouveau de ces chefs et y ajoutant,

Condamne la société Maguy à payer à la société New PLV représentée par son administrateur provisoire, M. M., la somme de 12.421,20 euros TTC outre les frais de mise en demeure, avec intérêt de retard égal au taux appliqué par la Banque centrale européenne pour son opération de refinancement la plus récente, majoré de 10 % ;

Dit que les intérêts des factures sont dus à compter du jour de la mise en paiement des factures ;

Condamne la société New PLV aux dépens ;

Condamne la société Maguy à payer à la société New PLV représentée par son administrateur provisoire, M. Vincent M. la somme de 1.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

LE GREFFIER                                LE PRÉSIDENT