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CA BORDEAUX (1re ch. civ.), 21 mars 2022

Nature : Décision
Titre : CA BORDEAUX (1re ch. civ.), 21 mars 2022
Pays : France
Juridiction : Bordeaux (CA), 1re ch.
Demande : 19/02044
Date : 21/03/2022
Nature de la décision : Infirmation
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 11/04/2019
Référence bibliographique : 6384 (assurance habitation, indemnisation valeur à neuf)
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CERCLAB - DOCUMENT N° 9496

CA BORDEAUX (1re ch. civ.), 21 mars 2022 : RG n° 19/02044 

Publication : Jurica

 

Extrait : « Les intimés excipent du caractère abusif des articles 3.17 et 5.2.2 précités au regard des dispositions de l'article L. 212-1 du code de la consommation qui dispose : « […] » Ils se prévalent à cet égard de la recommandation n° 85-04 de la commission des clauses abusives concernant les contrats d'assurance dénommés « multirisques habitation », tendant à éliminer desdits contrats les clauses ayant pour objet ou pour effet d'induire l'assuré en erreur sur l 'étendue de la garantie en stipulant d'une part l'indemnisation en « valeur à neuf » et en donnant d'autre part une définition restrictive de la « valeur à neuf » qui laisse place à la prise en compte d'un coefficient de vétusté.

En l'espèce, l'article 3.17 Rééquipement à neuf des conditions générales du contrat d'assurance stipule : « Nous garantissons en cas de dommages garantis subis par les biens assurés : [...] « le rééquipement à neuf des biens mobiliers et des objets de valeur, c'est-à-dire une indemnisation en valeur à neuf sans vétusté quel que soit l'âge des biens, si les conditions suivantes sont remplies : « - les biens endommagés sont en état d'utilisation ou de fonctionnement au jour du sinistre, « - ils sont réparés ou remplacés dans un délai maximal de deux ans à compter du sinistre.« À défaut, l'indemnisation s'effectue suivant les modalités prévues à l'article 5.2.1 des présentes conditions générales. »

L'article 5.2.2 prévoit les modalités de règlement suivantes pour une indemnisation en valeur à neuf : « Elle s'effectue en 2 temps. Nous versons d'abord l'indemnité correspondant à la valeur d’usage du bien sinistré, l'indemnité complémentaire correspondant à la vétusté est ensuite versée : « - pour les bâtiments et les embellissements : sur présentation des pièces justifiant des travaux et leur montant, « - pour les autres biens : sur présentation de l'original de la facture de réparation ou de remplacement. »

Ces clauses ne donnent pas une définition restrictive de la valeur à neuf qui prendrait en compte un coefficient de vétusté, puisque la valeur à neuf est au contraire entendue comme la valeur d'usage complétée par la vétusté. Il résulte des articles précités que si l'assuré ne reconstruit pas ou ne procède pas au remplacement de la chose disparue, il reçoit une indemnité immédiate correspondant à la valeur économique du bien sans aucune condition de réparation, indemnité conforme à l'application du principe indemnitaire, qui garantit à l'assuré une réparation sans perte ni profit.

Les clauses critiquées n'ont donc ni pour objet ni pour effet de créer, au détriment du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat. Les époux X. ne sont pas fondés à en opposer le caractère abusif. »

 

COUR D’APPEL DE BORDEAUX

PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU 21 MARS 2022

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 19/02044. N° Portalis DBVJ-V-B7D-K66D. Nature de la décision : AU FOND. Décision déférée à la cour : jugement rendu le 19 mars 2019 par le Tribunal de Grande Instance de PÉRIGUEUX (R.G. n° 17/01619) suivant déclaration d'appel du 11 avril 2019.

 

APPELANTE :

SA GMF

agissant en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social sis [...], représentée par Maître M. substituant Maître Paola J. de la SCP B. - J., avocats au barreau de BORDEAUX

 

INTIMÉS :

Monsieur X.

né le [date] à [ville], de nationalité Française, demeurant [adresse]

Madame Y. épouse X.

née le [date] à [ville], de nationalité Française, demeurant [adresse]

représentés par Maître Alice D. de la SELARL SELARL P. - DE M. - D. - D., avocat au barreau de PÉRIGUEUX

 

COMPOSITION DE LA COUR : En application des dispositions des articles 805 et 912 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 7 février 2022 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Vincent BRAUD, conseiller, chargé du rapport,

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de : Roland POTEE, président, Vincent BRAUD, conseiller, Bérengère VALLEE, conseiller.

Greffier lors des débats : Véronique SAIGE

ARRÊT : - contradictoire - prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

EXPOSÉ DU LITIGE ET DE LA PROCÉDURE :

M. X. et Mme Y. épouse X. sont propriétaires d'une maison à usage d'habitation sise à [adresse].

Pour garantir notamment le risque de vol et de détériorations, M. X. a souscrit un contrat dénommé Domo Pass n° 87.XXX.65P auprès de la Garantie mutuelle des fonctionnaires et employés de l'État et des services publics et assimilés (GMF).

Le 28 juillet 2015, Mme Y. épouse X. se présentait au commissariat de police de [ville], pour déclarer un vol commis à son domicile la veille, le 27 juillet 2015, entre 13 heures 30 et 16 heures 45. Elle déclarait qu'un coffre-fort, scellé dans un mur de la cave, avait été arraché de son support et volé avec tout son contenu (chéquiers, bijoux, chèques-cadeaux pour environ 7.000 euros et espèces pour environ 27.000 euros). Elle ajoutait qu'avaient été dérobés une armoire-coffre de marque Solognac contenant neuf fusils de chasse, des bijoux de fantaisie et des flacons de parfum. Elle évoquait encore des dégradations commises à l'intérieur de l'habitation.

La plainte déposée faisait l'objet d'un avis de classement sans suite, les auteurs de l'infraction n'ayant pu être identifiés.

M. X. a déclaré le sinistre à son assureur et un relevé estimatif des biens déclarés volés a été établi et signé de l'assuré, le 14 août 2015.

Le 20 novembre 2015, la société GMF mandatait le cabinet Aria Aquitaine, enquêteur auprès des compagnies d'assurances, pour mener une enquête sur les circonstances du sinistre.

À la suite de cette enquête, la société GMF, par lettre recommandée du 4 mai 2017, a informé M. X. qu'elle appliquait une déchéance de garantie sur le fondement de l'article 5.1 des conditions générales du contrat d'assurance, au double motif d'une exagération du montant des dommages et de fausses déclarations sur la nature, les causes ou les circonstances du sinistre.

Par lettre du 13 juin 2017, M. X. contestait ce refus de garantie. Néanmoins, par lettre du 16 juin 2017, la société GMF maintenait sa position.

Par acte d'huissier du 27 octobre 2017, les époux X. ont assigné la société GMF devant le tribunal de grande instance de Périgueux aux fins notamment de juger non fondée la déchéance de garantie opposée par la société GMF le 4 mai 2017 et juger en conséquence qu'elle sera tenue de les indemniser des pertes et dégradations résultant du vol à hauteur de la somme totale de 30.364,68 euros, avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 20 janvier 2016 et capitalisation des intérêts dus pour une année entière, outre la somme de 5.000 euros pour refus abusif de garantie.

Par jugement contradictoire en date du 19 mars 2019, le tribunal de grande instance de Périgueux a :

- Dit que la société GMF est mal fondée à invoquer à l'encontre des époux X. une déchéance de garantie au titre du sinistre de vol en date du 27 juillet 2015, garanti par le contrat Domo Pass n° 87.XXX.65P ;

- Condamné la société GMF à payer aux époux X. la somme de 17.402,28 euros au titre des biens justifiés en existant et en valeur ;

- Condamné la société GMF à payer aux époux X. la somme de 4.798,89 euros au titre de l'indemnisation différée sur justificatifs ;

- Dit que le paiement de cette dernière somme de 4.798,89 euros interviendra dans un délai maximum de trente jours suivant la remise par les époux X. à la société GMF, des factures justificatives des achats et travaux d'un montant au moins égal à celui des dommages constatés et évalués par l'expert du Cabinet B., comme devant donner lieu à une indemnisation différée sur justificatifs ;

- Dit que les intérêts au taux légal sur les condamnations susvisées seront dus à compter du 27 octobre 2017 ;

- Ordonné la capitalisation des intérêts ;

- Débouté les époux X. de leur demande de dommages-intérêts pour refus abusif de garantie ;

- Condamné la société GMF à payer aux époux X. la somme de 2.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- Débouté les parties de toutes autres demandes ;

- Condamné la société GMF aux dépens ;

- Ordonné l'exécution provisoire.

La société GMF a relevé appel partiel de ce jugement par déclaration du 11 avril 2019.

[*]

Aux termes de ses dernières conclusions déposées le 2 mars 2020, la société d'assurance mutuelle Garantie mutuelle des fonctionnaires et employés de l'État et des services publics et assimilés (GMF) demande à la cour de :

- Déclarer 1'appel de la GMF recevable et bien fondé ;

- Infirmer le jugement du tribunal de grande instance de Périgueux du 19 mars 2019 en ce qu'il a :

* dit que la société GMF est mal fondée à invoquer à l'encontre des époux X. une déchéance de garantie au titre du sinistre de vol en date du 27 juillet 2015, garanti par le contrat Demo Pass no 87.XXX.65 P,

* condamné la société GMF à payer aux époux X. la somme de 17.402,28 euros au titre des biens justifiés en existant et en valeur,

- condamné la société GMF à payer aux époux X. la somme de 4.798,89 euros au titre de l'indemnisation différée sur justificatifs,

* dit que le paiement de cette dernière somme de 4.798,89 euros interviendra dans un délai maximum de trente jours suivant la remise par les époux X. à la société GMF des factures justificatives des achats et travaux d'un montant au moins égal à celui des dommages constatés et évalués par l'expert du Cabinet B. comme devant donner lieu à une indemnisation différée sur justificatifs,

* dit que les intérêts au taux légal sur les condamnations susvisées seront dus à compter du 27 octobre 2017,

* ordonné la capitalisation des intérêts,

* condamné la société GMF à payer aux époux X. la somme de 2.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

* débouté la GMF de sa demande reconventionnelle tendant au remboursement des frais d'expertise et d'enquête,

* condamné la GMF aux dépens,

* ordonné l'exécution provisoire ;

- Confirmer le jugement du tribunal de grande instance de Périgueux du 19 mars 2019 pour le surplus et notamment en ce qu'il a débouté les époux X. de leurs autres demandes ;

En conséquence, statuant à nouveau,

À titre principal,

- Dire et juger que la société GMF était bien fondée à invoquer à l'encontre des époux X. une déchéance de garantie au titre du sinistre de vol en date du 27 juillet 2015 garanti par le contrat Domo Pass no 87.XXX.65P laquelle leur a été opposée par courrier recommandé du 4 mai 2017 ;

En conséquence,

- Débouter les époux X. de l'intégralité de leurs demandes en ce qu'elles sont dirigées contre la GMF ;

À titre reconventionnel,

- Condamner les époux X. à rembourser à la GMF la somme de 25.565,38 euros versée en application de l'exécution provisoire attachée au jugement du tribunal de grande instance de Périgueux ;

- Condamner les époux X. à régler à la GMF la somme de 3.019,26 euros, se décomposant comme suit :

* frais d'expertise : 1.512 euros,

* frais d'enquête : 1.507,26 euros ;

- Condamner les époux X. à régler à la GMF la somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens de première instance et d'appel ;

À titre subsidiaire,

- Dire et juger qu'une éventuelle condamnation de la GMF ne saurait excéder la somme de 16.947,28 euros au titre de l'indemnité immédiate ;

- Débouter les époux X. du surplus de leurs demandes et notamment de leur demande au titre de l'indemnité différée, des dommages et intérêts, des intérêts, de la capitalisation des intérêts, de l'indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- Statuer ce que de droit sur les dépens ;

- Condamner les époux X. à rembourser à la GMF la somme de 8.618,10 euros versée en trop en application de l'exécution provisoire attachée au jugement du tribunal de grande instance de Périgueux (soit 25.565,38 – 16.947,28 €).

[*]

Aux termes de leurs dernières conclusions déposées le 6 décembre 2019, M. X. et Mme Y. épouse X. demandent à la cour de :

- Confirmer le jugement entrepris ;

Y ajoutant,

- Juger que la clause d'indemnisation en valeur à neuf, en deux temps, selon l'article 5.2.2 et celle figurant sous l'article 3.17 qui obligent l'assuré à justifier de factures de réparation ou de remplacement dans un délai maximum de deux ans à compter du sinistre, sont des clauses abusives, réputées non écrites, au sens de l'article L. 212-1 du code de la consommation, et subsidiairement, juger qu'il s'agit de clauses potestatives réputées accomplies ;

- Condamner la GMF à payer aux époux X. la somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- Condamner la GMF aux dépens.

[*]

L'instruction a été clôturée par ordonnance du 24 janvier 2022 et l'affaire fixée à l'audience du 7 février 2022.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Sur la déchéance de garantie :

L'article 5.1.2 des conditions générales du contrat d'assurance stipule : « Nous ne prenons pas en charge le sinistre si, de mauvaise foi, l'assuré exagère le montant des dommages, prétend détruits ou volés des objets qui n'existaient pas lors du sinistre, dissimule ou soustrait tout ou partie des biens assurés, emploie sciemment comme justification des moyens frauduleux ou des documents inexacts, ne déclare pas l'existence d'autres assurances portant sur les mêmes risques. »

Il est constant que les époux X. ont déclaré volé un fusil Verney-Carron, lequel avait été acheté le 15 novembre 2005 aux établissements J. moyennant le prix de 1.540 euros. La facture n° 39 émise par le vendeur ne portait pas de date.

Or, l'état des pertes rempli, certifié sincère et véritable, et signé par M. X. le 14 août 2015 mentionne sous le numéro 2 ledit fusil Verney-Carron comme ayant été acheté le 18 août 2014 au prix de 1.540 euros. Les époux X. reconnaissent qu'ils ont joint à cet état des pertes la facture d'achat établie par les établissements J. en y portant la date du 18 août 2014.

Protestant de leur bonne foi, ils prétendent avoir agi de la sorte sur le conseil de l'expert mandaté par l'assureur pour évaluer leur préjudice, qui leur aurait indiqué, lors de sa visite à leur domicile le 9 septembre 2015, qu'ils devaient mentionner une date, peu important laquelle. Rien ne corrobore cette allégation.

Les intimés font également valoir qu'ils ont adressé à la GMF une attestation de M. Y. ainsi qu'une copie de la facture originale non datée. Loin d'être spontanée, cette transmission du 12 septembre 2016 (pièce no 9 de l'appelante) fait suite à l'enquête diligentée par la GMF (pièce no 6 de l'appelante : rapport du 1er mars 2016) et à plusieurs échanges avec son assuré (pièces nos 8 et 9 de l'appelante).

Si M. X. a pu oublier la date précise d'achat du fusil acquis neuf ans plus tôt, il savait assurément que ce ne pouvait être moins d'un an avant le vol. Sa mauvaise foi est démontrée.

L'assuré a ainsi sciemment employé comme justification un document inexact, en remettant à l'assureur une facture falsifiée par lui.

Il a également de mauvaise foi exagéré le montant du dommage, en minimisant la vétusté de l'objet volé.

Les époux X. avaient certes souscrit une garantie de rééquipement à neuf, prévoyant une indemnisation en valeur à neuf, sans vétusté, quel que soit l'âge des biens. Toutefois, en application des articles 3.17 et 5.2.2 des conditions générales du contrat d'assurance, cette indemnisation s'effectue en deux temps : une indemnité immédiate est versée, correspondant à la valeur d'usage du bien sinistré, c'est-à-dire à sa valeur d'achat diminuée de la vétusté ; une indemnité différée la complète ensuite, correspondant à la vétusté, sur présentation des justificatifs de réparation ou de remplacement. Il s'ensuit que la vétusté entre dans l'appréciation du montant du dommage et des indemnités dues par l'assureur. Aussi bien, au vu de l'état des pertes et du relevé estimatif des biens, l'expert commis par la GMF a-t-il appliqué un taux de vétusté de 10 % au prix d'achat du fusil Verney-Carron en cause, un taux de vétusté de 25 % au prix d'un fusil acheté le 19 décembre 2011, et un taux de vétusté de 30 % à un fusil acheté le 28 août 2010 (pièce no 5 de l'appelante).

Les intimés excipent du caractère abusif des articles 3.17 et 5.2.2 précités au regard des dispositions de l'article L. 212-1 du code de la consommation qui dispose :

« Dans les contrats conclus entre professionnels et consommateurs, sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat.

« Sans préjudice des règles d'interprétation prévues aux articles 1188, 1189, 1191 et 1192 du code civil, le caractère abusif d'une clause s'apprécie en se référant, au moment de la conclusion du contrat, à toutes les circonstances qui entourent sa conclusion, de même qu'à toutes les autres clauses du contrat. Il s'apprécie également au regard de celles contenues dans un autre contrat lorsque les deux contrats sont juridiquement liés dans leur conclusion ou leur exécution.

« L'appréciation du caractère abusif des clauses au sens du premier alinéa ne porte ni sur la définition de l'objet principal du contrat ni sur l'adéquation du prix ou de la rémunération au bien vendu ou au service offert pour autant que les clauses soient rédigées de façon claire et compréhensible.

« Un décret en Conseil d'État, pris après avis de la commission des clauses abusives, détermine des types de clauses qui, eu égard à la gravité des atteintes qu'elles portent à l'équilibre du contrat, doivent être regardées, de manière irréfragable, comme abusives au sens du premier alinéa.

« Un décret pris dans les mêmes conditions, détermine une liste de clauses présumées abusives ; en cas de litige concernant un contrat comportant une telle clause, le professionnel doit apporter la preuve du caractère non abusif de la clause litigieuse.

« Ces dispositions sont applicables quels que soient la forme ou le support du contrat. Il en est ainsi notamment des bons de commande, factures, bons de garantie, bordereaux ou bons de livraison, billets ou tickets, contenant des stipulations négociées librement ou non ou des références à des conditions générales préétablies. »

Ils se prévalent à cet égard de la recommandation n° 85-04 de la commission des clauses abusives concernant les contrats d'assurance dénommés « multirisques habitation », tendant à éliminer desdits contrats les clauses ayant pour objet ou pour effet d'induire l'assuré en erreur sur l 'étendue de la garantie en stipulant d'une part l'indemnisation en « valeur à neuf » et en donnant d'autre part une définition restrictive de la « valeur à neuf » qui laisse place à la prise en compte d'un coefficient de vétusté.

En l'espèce, l'article 3.17 Rééquipement à neuf des conditions générales du contrat d'assurance stipule :

« Nous garantissons en cas de dommages garantis subis par les biens assurés : [...]

« le rééquipement à neuf des biens mobiliers et des objets de valeur, c'est-à-dire une indemnisation en valeur à neuf sans vétusté quel que soit l'âge des biens, si les conditions suivantes sont remplies :

« - les biens endommagés sont en état d'utilisation ou de fonctionnement au jour du sinistre,

« - ils sont réparés ou remplacés dans un délai maximal de deux ans à compter du sinistre.

« À défaut, l'indemnisation s'effectue suivant les modalités prévues à l'article 5.2.1 des présentes conditions générales. »

L'article 5.2.2 prévoit les modalités de règlement suivantes pour une indemnisation en valeur à neuf :

« Elle s'effectue en 2 temps. Nous versons d'abord l'indemnité correspondant à la valeur d 'usage du bien sinistré, l'indemnité complémentaire correspondant à la vétusté est ensuite versée :

« - pour les bâtiments et les embellissements : sur présentation des pièces justifiant des travaux et leur montant,

« - pour les autres biens : sur présentation de l'original de la facture de réparation ou de remplacement. »

Ces clauses ne donnent pas une définition restrictive de la valeur à neuf qui prendrait en compte un coefficient de vétusté, puisque la valeur à neuf est au contraire entendue comme la valeur d'usage complétée par la vétusté.

Il résulte des articles précités que si l'assuré ne reconstruit pas ou ne procède pas au remplacement de la chose disparue, il reçoit une indemnité immédiate correspondant à la valeur économique du bien sans aucune condition de réparation, indemnité conforme à l'application du principe indemnitaire, qui garantit à l'assuré une réparation sans perte ni profit.

Les clauses critiquées n'ont donc ni pour objet ni pour effet de créer, au détriment du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat. Les époux X. ne sont pas fondés à en opposer le caractère abusif.

En définitive, les conditions de la déchéance prévues par l'article 5.1.2 des conditions générales du contrat d'assurance étant réunies, le jugement entrepris sera infirmé en ce qu'il dit que la société GMF est mal fondée à invoquer à l'encontre des époux X. une déchéance de garantie au titre du sinistre de vol en date du 27 juillet 2015, garanti par le contrat Domo Pass n° 87.XXX.65 P.

Ce jugement étant assorti de l'exécution provisoire, son infirmation entraîne de plein droit la restitution des sommes versées avec intérêts au taux légal à compter de la signification du présent arrêt, sans qu'il soit besoin de statuer de ce chef.

En revanche, la GMF n'indique pas sur quel fondement elle demande la condamnation des époux X. à lui régler les frais d'expertise du cabinet B., « engagés à tort », ainsi que les frais d'enquête du cabinet Aria Aquitaine. Elle sera déboutée de ce chef.

 

Sur les dépens et les frais irrépétibles :

Aux termes de l'article 696, alinéa premier, du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie. Les intimés en supporteront donc la charge.

En application de l'article 700 du code de procédure civile, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Sur ce fondement, les époux X. seront condamnés à payer la somme de 1.000 euros à la GMF.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

LA COUR, PAR CES MOTIFS,

Infirme le jugement ;

Statuant à nouveau,

Dit et juge que la société GMF est fondée à invoquer à l'encontre d'M. X. et d'Mme Y. épouse X. une déchéance de garantie au titre du sinistre de vol du 27 juillet 2015 garanti par le contrat Domo Pass numéro 87.XXX.65P, laquelle leur a été opposée par lettre recommandée du 4 mai 2017 ;

Déboute M. X. et Mme Y. épouse X. de l'intégralité de leurs demandes en ce qu'elles sont dirigées contre la société GMF ;

Déboute la société GMF de sa demande reconventionnelle de condamnation d'M. X. et Mme Y. épouse X. à payer la somme de 3.019,26 euros ;

Condamne M. X. et Mme Y. épouse X. à payer la somme de 1.000 euros à la société GMF sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne M. X. et Mme Y. épouse X. aux dépens de première instance et d'appel.

Le présent arrêt a été signé par Monsieur Roland POTEE, président, et par Madame Véronique SAIGE, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier,                                       Le Président,