CA MONTPELLIER (ch. com.), 29 mars 2022
CA MONTPELLIER (ch. com.), 29 mars 2022 : RG n° 19/06845
Publication : Jurica
Extrait : « Si les actions de chaque partie sont fondées sur l'exécution de la même relation contractuelle et si la solution des deux litiges présente un lien, le litige pendant devant le tribunal de commerce de Montpellier devant être résolu préalablement à celui pendant devant le tribunal judiciaire de Marseille, comme l'a relevé le juge de la mise en état de ce tribunal dans une ordonnance du 22 novembre 2021, il s'agit, pour la première instance, de faire juger que la résiliation de la relation contractuelle est fautive (ou pas) et pour la seconde, que, postérieurement à cette résiliation, ont été commis des manquements constitutifs de contrefaçon et de concurrence déloyale, les deux litiges étant ainsi parfaitement distincts de sorte qu'aucune connexité au sens des dispositions rappelées ci-dessus n'est caractérisée, le tribunal de commerce de Montpellier étant compétent pour statuer. »
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE MONTPELLIER
CHAMBRE COMMERCIALE
ARRÊT DU 29 MARS 2022
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 21/06845. N° Portalis DBVK-V-B7F-PHBU. Décision déférée à la Cour : Jugement du 17 NOVEMBRE 2021, TRIBUNAL DE COMMERCE DE MONTPELLIER : R.G. n° 2020011136.
APPELANTE :
SARL HORIZONS IMMOBILIER
agissant poursuites et diligences de son gérant en exercice, domicilié en cette qualité audit siège [...], [...], Représentée par Maître Arnaud L. de la SCP SVA, avocat au barreau de MONTPELLIER
INTIMÉE :
SARL IMMOVANCE
agissant poursuites et diligences de son gérant en exercice, domicilié en cette qualité audit siège [...], [...], Représentée par Maître Jean-Baptiste G., avocat au barreau de MONTPELLIER, Ordonnance d'assignation à jour fixe du 2 décembre 2021
COMPOSITION DE LA COUR : En application de l'article 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 01 FEVRIER 2022, en audience publique, Madame Anne-Claire BOURDON, Conseiller ayant fait le rapport prescrit par l'article 804 du même code, devant la cour composée de : Monsieur Jean-Luc PROUZAT, Président de chambre, Mme Anne-Claire BOURDON, Conseiller, Mme Marianne ROCHETTE, Conseiller, qui en ont délibéré.
Greffier, lors des débats : Madame Audrey VALERO
ARRÊT : - Contradictoire - prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ; - signé par Monsieur Jean-Luc PROUZAT, Président de chambre, et par Madame Audrey VALERO, Greffière.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
FAITS, PROCÉDURE - PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :
La SARL Immovance (dont le gérant est M. W.) exerce une activité de transaction, gestion immobilière, syndic de copropriété et en règle générale, d'agence immobilière, dans la commune de Montpellier et ses environs ; elle a développé un réseau en proposant son concept à d'autres agences immobilières de cette même région.
Elle est titulaire de la marque figurative « Immovance vos projets à vos côtés », marque déposée le 5 novembre 2020 sous le numéro 4698168 et a signé le 24 avril 2017 avec M. X., un contrat de licence de marque lui concédant l'exploitation de la marque verbale « Immovance », elle-même déposée le 15 décembre 2014 sous le numéro 4142077.
Par acte sous seing privé du 11 juin 2014, la société Immovance a conclu un contrat de partenariat avec la SARL Horizons Immobilier (dont le gérant est M. Y.), ayant son siège social à [ville C.], pour une durée de 5 années, renouvelé le 11 juin 2019 pour une nouvelle durée de 5 années.
La SAS IDB (dont le dirigeant est M. W.), exploitant une activité d'agence immobilière sur le secteur de [ville M.], a également signé un contrat de partenariat avec la société Immovance le 10 mars 2017.
Par acte sous seing privé du 27 juillet 2018, la société Immovance [ville M.] (dont le gérant est M. Z.) a acquis auprès de la société IDB le fonds de commerce à l'enseigne Immovance [ville M.].
Les sociétés Horizons Immobilier et Immovance [ville M.] ont souhaité se rapprocher dans le cadre de l'absorption de la société Immovance [ville M.] par la société Horizons Immobilier par le biais d'une transmission universelle de patrimoine (TUP).
Le 27 juillet 2020, la société Horizons Immobilier a acquis les parts sociales détenues par Monsieur Z. dans la société Immovance [ville M.], devenant associée unique de celle-ci, qui, de ce fait, a fait l'objet d'une dissolution suite à cette réunion de toutes les parts sociales en une seule main, à compter du 31 août 2020.
Par lettre recommandée en date du 1er octobre 2020, reçue le 6 octobre par la société Immovance [ville M.] et le 5 octobre par la société Horizons Immobilier, le conseil de la société Immovance a notifié à la société Horizons Immobilier la résiliation immédiate du contrat de partenariat avec interdiction d'utiliser des signes distinctifs caractérisant le réseau Immovance à compter du 5 octobre aux motifs que la fusion avait été effectuée en méconnaissance des dispositions de l'article 5 du contrat de partenariat, conclu intuitu personae, lequel est incessible et intransmissible à titre gratuit ou onéreux sans l'accord préalable écrit d'Immovance.
Le 7 octobre 2020, la société Horizons Immobilier a contesté cette résiliation.
Saisi par acte d'huissier en date du 8 janvier 2021 délivré par la société Immovance et M. X., le président du tribunal judiciaire de Marseille statuant en référé a, par ordonnance du 30 avril 2021,
- Dit n`y avoir lieu à surseoir à statuer dans l'attente de la décision ayant acquis force de chose jugée statuant sur la poursuite forcée du contrat de partenariat conclu entre la société Horizons Immobilier et la société Immovance,
- Interdit à la société Horizons Immobilier et à la société Immovance [ville M.] de faire usage et/ou de concéder tout droit d'usage de la marque verbale figurative Immovance dans son nom commercial, enseigne, publications ou informations sur fichiers informatiques et/ou sur supports papiers sous quelque forme et à quelque titre et nature que ce soit et ce sous astreinte de 300 euros par jour de retard à l`issue d`un delai de huit jours à compter de la signification de l'ordonnance,
- Débouté M. X. et la SARL Immovance de leurs demandes de provisions,
- Condamné la société Horizons Immobilier et à la société Immovance [ville M.] à payer chacune une somme de 1.000 euros à M. X. et à la SARL Immovance au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- Condamné la société Horizons Immobilier et la société Immovance [ville M.] aux dépens,
- Rappelé que la décision est exécutoire par provision de droit.»
Un procès-verbal de constat d'huissier en date du 22 février 2021 atteste que les agences immobilières de [ville M.] et de [ville C.] ont procédé à un changement d'enseigne utilisant l'enseigne EFKA.
Par acte d'huissier en date du 21 janvier 2021, la société Immovance et M. X. ont saisi le tribunal judiciaire de Marseille d'une action en contrefaçon de marque à l'encontre de la société Horizons Immobilier et de la société Immovance et concurrence déloyale.
Par ordonnance d'incident en date du 22 novembre 2021, le juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Marseille a, à la demande de la société Horizons Immobilier, prononcé un sursis à statuer sur les prétentions de M. X. et de la société Immovance dans l'attente d'une décision définitive sur la contestation du bien-fondé de la rupture contractuelle dont a été saisi le tribunal de commerce de Montpellier.
Auparavant, saisi par acte d'huissier en date du 21 octobre 2020, délivré par la société Horizons Immobilier et la société Immovance [ville M.] en poursuite forcée du contrat de partenariat et en indemnisation, le tribunal de commerce de Montpellier a, par jugement du 17 novembre 2021 :
«- vu l'article 101 du code de procédure civile,
- Considéré recevable et bien fondée l'exception de connexité soulevée,
- Dessaisit la juridiction de céans et renvoyé en l'état la connaissance du litige au profit du tribunal judiciaire de Marseille,
- Dit que le dossier de l'affaire sera transmis à la juridiction ainsi désignée à telles fins que de droit à l'issue du délai d'appel conformément aux dispositions de l'article 82 du code de procédure civile,
- Réservé les dépens et l'application de l'article 700 du code de procédure civile. »
Pour statuer comme il l'a fait, le tribunal a retenu la compétence exclusive du tribunal judiciaire de Marseille concernant les actions relatives à des questions de propriété intellectuelle, y compris lorsqu'elles portent également sur une question connexe de concurrence déloyale, il a considéré que le lien de connexité entre l'instance dont il est saisi et celle pendante devant le tribunal judiciaire de Marseille est caractérisé à deux égards, à savoir que les deux actions concernent les mêmes parties et tendent aux mêmes fins ayant le même objet dans la mesure où l'issue de l'une fait dépendre l'issue de l'autre.
Par déclaration motivée reçue le 25 novembre 2021, la société Horizons Immobilier a régulièrement relevé appel contestant ce jugement sur la compétence et sollicité, par requête du 26 novembre 2021, une autorisation d'assigner à jour fixe.
Par acte d'huissier de justice en date du 6 décembre 2021, délivré sur autorisation d'assigner à jour fixe du 2 décembre 2021, elle a assigné la société Immovance à comparaître, devant la chambre commerciale de cette cour le 1er février 2022 à 14 heures.
[*]
La société Horizons Immobilier demande à la cour, en l'état de ses conclusions déposées et notifiées par voie électronique le 31 janvier 2022, de
«- vu les articles 101 et 104 et les articles 83 et s. du code de procédure civile,
- réformer le jugement rendu (...) dans toutes ses dispositions, quoi faisant rejeter l'exception de connexité soulevée par la société Immovance,
- dire et juger que le tribunal de commerce de Montpellier est compétent pour statuer sur le mérite de ses demandes, avec toutes conséquences que de droit,
- vu les articles 89 et 104 du code de procédure civile, dire et juger que la cour évoquera le fond du litige, quoi faisant, vu les articles 1103, 1104 et 1171 du code civil,
- en ce qui concerne l'agence immobilière de [...] :
- ordonner la poursuite forcée du contrat de partenariat en date du 11 juin 2019, liant la SARL Immovance à la société Horizons Immobilier, portant sur l'agence immobilière située à Castelnau-Le-Lez exploitée par Horizons Immobilier, sous astreinte de 1.000 euros par jour de retard, passé le délai de 8 jours à compter de la signification de la décision à intervenir,
- en ce qui concerne l'agence immobilière de [ville M.], [...] :
- au principal, dire et juger que la société Horizons Immobilier venant aux droits de la SARL Immovance [ville M.] est en droit d'utiliser l'enseigne et le nom commercial « Immovance [ville M.] », par suite de l'acquisition de ces éléments composant le fonds de commerce de l'agence immobilière suivant acte du 27 Juillet 2018,
- subsidiairement, ordonner la poursuite forcée des relations d'affaires liant la SARL Immovance à la société Horizons Immobilier venant aux droits de la société Immovance [ville M.], portant sur l'agence immobilière exploitée par cette dernière, emportant le droit d'utiliser les signes distinctifs caractérisant le réseau Immovance sauf à ordonner la poursuite forcée du contrat de partenariat en date du 10 mars 2017 initialement conclu entre la SARL Immovance et la SARL Immovance [ville M.].
- Condamner la société Immovance à lui payer la somme de 400.000 euros à titre de dommages et intérêts, à parfaire,
- Condamner la société Immovance à payer à Horizons Immobilier et Immovance [ville M.] (sic) la somme de 10.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.»
Au soutien de son appel, elle fait essentiellement valoir que :
- la société Immovance [ville M.] ayant disparu du fait de la TUP, elle agit seule à titre personnel au titre du contrat de partenariat dont elle était titulaire ainsi qu'au titre du contrat de partenariat dont était titulaire la société Immovance [ville M.],
- la rupture brutale des relations commerciales n'est fondée ni sur les dispositions de l'article L. 442-6-I-5° (rupture de relations commerciales établies), ni sur celle de l'article L. 442-1-I-2° (déséquilibre significatif) du code de commerce,
- le juge des référés en sa qualité de juge de l'évidence a pris des mesures conservatoires, sans valider la rupture des contrats de partenariat effectuée par la société Immovance,
- il n'y a pas de lien de connexité entre les deux actions : l'action en contrefaçon de marque a été intentée postérieurement et les deux actions n'ont pas le même objet ;
- la présente action porte sur la validité de la résiliation des contrats de partenariat sur le fondement de la violation de leurs dispositions relatives à l'intuitu personae et ce, sans relation avec les conditions dans lesquelles elle (et la société Immovance [ville M.] ) a utilisé la marque Immovance avant même que les contrats de partenariat ne soient rompus,
- l'action devant le tribunal judiciaire de Marseille a pour objet de déterminer si postérieurement à la rupture des contrats de partenariat, elle a utilisé la marque Immovance de manière abusive,
- sur le fond, en cas d'évocation, il n'y a aucune violation de l'article 5 du contrat de partenariat, la fusion-absorption n'a entraîné aucun changement de personnalité morale du partenaire de la société Immovance, au demeurant la société Horizons Immobilier, était déjà partenaire, de même que son dirigeant M. Y., la société Immovance [ville M.] était également membre du réseau Immovance ainsi que son dirigeant M. Z., aucun tiers n'est entré dans le capital de la société Horizons Immobilier ; M. Y. et M. Z. étant chacun titulaire de 50 % des parts,
- la société Horizons Immobilier, venant aux droits de la société Immovance [ville M.], a parfaitement le droit d'utiliser l'enseigne Immovance (et le nom commercial Immovance [ville M.]), qui constituait l'un des éléments incorporels du fonds de commerce cédé par acte du 27 juillet 2018 ; il n'y a aucun conflit entre l'enseigne et la marque et aucune revendication portant sur le droit d'usage de la marque,
- en tout état de cause, le contrat de partenariat de 2017 n'est pas visé dans les éléments incorporels cédés en 2018 ; il n'a pas été cédé à la société Immovance [ville M.] et l'article 5 de ce contrat de partenariat relatif à l'intuitu personae ne peut pas être opposé à la société Horizons Immobilier, les relations d'affaires entre la société Immovance et Immovance [ville M.] se sont nouées sans contrat de partenariat,
- les clauses intuitu personae doivent s'apprécier strictement, en l'espèce les deux dirigeants de la société Horizons Immobilier après la TUP sont les personnes physiques déjà agréées par le réseau,
- la violence de la rupture constitue un abus dans l'exercice d'un droit ; aucune réponse n'a été apportée au courrier explicatif adressé à la société Immovance en date du 22 septembre 2020,
- par ailleurs, la société Immovance a signé un nouveau contrat de partenariat avec une société tierce (par acte sous seing privé du 26 novembre 2020, la société H & C Transaction Gestion), située à quelques mètres de son lieu d'exercice dans le cadre d'un débauchage de ses anciens agents commerciaux ou collaborateurs alors que cette société ne détenait pas de carte professionnelle,
- les contrats de partenariat litigieux sont des contrats d'adhésion auxquels s'appliquent les dispositions de l'article 1171 du code civil relatives au déséquilibre significatif ; la clause litigieuse doit être réputée non écrite en ce qu'elle est unilatérale, aucune réciprocité n'étant prévue en cas de modification dans le capital du franchiseur et en ce que, notamment, il n'est pas distingué une modification mineure ou majeure du capital du franchisé,
- elle a subi un préjudice important ayant été totalement dépouillée de tout accès aux fichiers, aux annonces immobilières' et de ses collaborateurs.
[*]
La société Immovance sollicite de voir, aux termes de ses conclusions déposées et notifiées par voie électronique le 19 janvier 2022 :
«- vu les articles 83 et suivants et 101 et 700 du code de procédure civile, l'article L .716-5 du code de propriété intellectuelle, les articles 1225 et 1240 du code civil, l'article D. 442-3 du code de commerce (...)
- confirmer le jugement (...) dans toutes ses dispositions et notamment en ce qu'il s'est déclaré incompétent au profit du tribunal judiciaire de Marseille pour connexité,
- vu les articles 89 et 104 du code de procédure civile, dire et juger que la cour n'évoquera pas le fond du litige,
- par extraordinaire si la cour devait évoquer le fond du litige, débouter la requérante de toutes ses demandes à titre principal et subsidiaire, constater le bien-fondé de la rupture du contrat de partenariat,
- condamner la requérante au paiement d'une somme de 3.000 euros à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive et dilatoire,
- en tout état de cause, condamner l'appelante au paiement de la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et la condamner aux entiers dépens d'appel et de première instance.»
Elle expose en substance que :
- le lien de connexité existe puisque les deux actions concernent les mêmes parties et tendent aux mêmes fins ; en effet, l'issue de l'une des actions dépend de l'issue de l'autre,
- la compétence spéciale prévue par l'article L.716-5 du code de la propriété intellectuelle (la demande soulevant un conflit entre une enseigne et une marque déposée dans les mêmes classes de produits et services que l'activité exercée au sein de cette enseigne) met en échec la compétence de la juridiction commerciale, le tribunal judiciaire étant compétent pour les actions relatives à des questions de propriété intellectuelle y compris lorsqu'elles portent également sur une question connexe de concurrence déloyale,
- l'ordonnance de référé en date du 30 avril 2021 est devenue définitive et a rejeté la demande de sursis à statuer formée par la société Horizons Immobilier, alors que le juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Marseille, lui, a sursis à statuer en infraction à une bonne administration de la justice,
- les conditions d'évocation ne sont pas remplies ; une bonne administration de la justice nécessitant que les parties fassent valoir au fond leurs dossiers devant le tribunal,
- sur le fond, l'article 5 du contrat de partenariat a été violé : la transmission universelle de patrimoine a entraîné une modification dans la personne du cocontractant ainsi que dans la répartition des droits sociaux ; la société Horizons Immobilière étant devenue associée en lieu et place de M. Z. et la société Horizons Immobilière étant devenue le partenaire d'Immovance sur le secteur de [ville M.] pour lequel elle n'a jamais été agréée,
- la résiliation immédiate du contrat était prévue par celui-ci,
- le rapprochement des deux agences s'est fait en catimini dans l'intention d'un futur départ du réseau (tous les mandats de la franchise Immovance ayant été relevés afin de prévenir une perte d'accès au logiciel du réseau et ce, avant même toute résiliation), la société Horizons Immobilier a exercé des actes de contrefaçon en utilisant l'enseigne après la notification de rupture, en profitant de l'image de marque et en exerçant une concurrence déloyale à son égard par parasitisme sans s'acquitter d'une redevance,
- les dispositions de l'article 1171 du code civil ne sont pas applicables puisqu'elles concernent les professionnels agissant en dehors de leur activité et alors que doit être appliqué le dispositif spécial prévu par les dispositions de l'article L. 442-1-I-2° du code de commerce sur le fondement desquelles la présente cour n'est pas compétente,
- au demeurant, le caractère unilatéral d'une clause intuitu personae ne peut constituer un déséquilibre significatif,
- le juge des référés, bien que sa décision soit provisoire, a condamné la société Horizons immobilier et la société Immovance [ville M.] pour contrefaçon et concurrence déloyale en constatant l'absence de lien contractuel, et la cour ne pourra que constater la rupture des relations contractuelles à la date de réception du courrier mettant fin au contrat,
- le départ des agents commerciaux pour une société concurrente ne constitue pas un acte de concurrence déloyale, ceux-ci n'ayant pas méconnu l'obligation de non-concurrence figurant dans leur contrat et aucun débauchage n'est établi, les agents commerciaux étant partis pour des raisons personnelles,
- la preuve du préjudice réclamé n'est pas rapportée.
Il est renvoyé, pour l'exposé complet des moyens et prétentions des parties, aux conclusions susvisées, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
MOTIFS de la DÉCISION :
1 - Selon l'article 100 du code de procédure civile, si le même litige est pendant devant deux juridictions de même degré également compétentes pour en connaître, la juridiction saisie en second lieu doit se dessaisir au profit de l'autre si l'une des parties le demande. A défaut, elle peut le faire d'office.
Selon l'article 101 suivant, s'il existe entre des affaires portées devant deux juridictions distinctes un lien tel qu'il soit de l'intérêt d'une bonne justice de les faire instruire et juger ensemble, il peut être demandé à l'une de ces juridictions de se dessaisir et de renvoyer en l'état la connaissance de l'affaire à l'autre juridiction.
L'article 105 du même code prévoit que la décision rendue sur l'exception soit par la juridiction qui en est saisie, soit à la suite d'un recours s'impose tant à la juridiction de renvoi qu'à celle dont le dessaisissement est ordonné.
En l'espèce, la société Horizons Immobilier et la société Immovance [ville M.] ont saisi le tribunal de commerce de Montpellier le 21 octobre 2020 d'une action destinée à obtenir la poursuite forcée du contrat de partenariat du 11 juin 2019 liant la société Horizons Immobilier à la société Immovance et en indemnisation à l'encontre de la société Immovance, qui, par actes d'huissier des 8 et 21 janvier 2021, a choisi de saisir le tribunal judiciaire de Marseille, spécialement compétent, d'abord en référé, puis au fond, en contrefaçon et concurrence déloyale.
Les parties, qui sont les mêmes dans les deux instances (à l'exception de M. X.), étaient liées par une convention de partenariat, en date du 11 juin 2014, renouvelée le 11 juin 2019, entre la société Horizons Immobilier et la société Immovance et, en date du 10 mars 2017, entre la société IDB, ayant cédé son fonds de commerce à la société Immovance [ville M.] par acte du 27 juillet 2018, et la société Immovance, que cette dernière a résiliée par courrier en date du 1er octobre 2020 à effet le 5 octobre suivant, cette résiliation étant contestée par sa cocontractante devant le tribunal de commerce, considérant avoir été, concomitament ou suite à cette rupture, victime d'actes de contrefaçon et de concurrence déloyale.
Si les actions de chaque partie sont fondées sur l'exécution de la même relation contractuelle et si la solution des deux litiges présente un lien, le litige pendant devant le tribunal de commerce de Montpellier devant être résolu préalablement à celui pendant devant le tribunal judiciaire de Marseille, comme l'a relevé le juge de la mise en état de ce tribunal dans une ordonnance du 22 novembre 2021, il s'agit, pour la première instance, de faire juger que la résiliation de la relation contractuelle est fautive (ou pas) et pour la seconde, que, postérieurement à cette résiliation, ont été commis des manquements constitutifs de contrefaçon et de concurrence déloyale, les deux litiges étant ainsi parfaitement distincts de sorte qu'aucune connexité au sens des dispositions rappelées ci-dessus n'est caractérisée, le tribunal de commerce de Montpellier étant compétent pour statuer.
Le jugement sera donc infirmé.
2 - L'article 88 du code de procédure civile prévoit que la cour, juridiction d'appel relativement à la juridiction qu'elle estime compétente, peut évoquer le fond si elle estime d'une bonne justice de donner à l'affaire une solution définitive (...).
En l'espèce, si la demande principale formée devant le tribunal de commerce tend à la poursuite d'une relation contractuelle, aucun élément ne permet de retenir que la cessation de cette relation a placé la société appelante dans une situation économique et financière compromise, la demande de dommages-intérêts fondée sur le « dépouillement » de celle-ci étant purement forfaitaire et non étayée par la moindre pièce comptable, susceptible de caractériser une urgence particulière justifiant que le principe du double degré de juridiction soit écarté de sorte que la cour n'évoquera pas le litige.
3 - La société Immovance, qui succombe, sera condamnée aux dépens d'appel (le jugement ayant réservé le sort des frais répétibles) et au vu des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, à payer la somme de 1.500 euros, sa demande sur ce fondement étant rejetée.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire,
Infirme dans toutes ses dispositions le jugement du tribunal de commerce de Montpellier en date du 17 novembre 2021 et statuant à nouveau,
Rejette l'exception de connexité soulevée par la SARL Immovance et dit n'y avoir lieu à évocation,
Renvoie l'affaire et les parties devant le tribunal de commerce de Montpellier, compétent pour connaître du litige,
Condamne la SARL Immovance à payer à la SARL Horizons Immobilier la somme de 1.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
Rejette la demande de la société Immovance fondée sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne la société Immovance aux dépens d'appel.
le greffier, le président,