CA AGEN (1re ch. civ.), 13 avril 2022
CERCLAB - DOCUMENT N° 9536
CA AGEN (1re ch. civ.), 13 avril 2022 : RG n° 21/00144
Publication : Jurica
Extrait : « En premier lieu, les intimés reprochent à la SA Banque Solféa d'avoir débloqué les fonds sur la base d'une attestation pré-imprimée et ambiguë, avant que les autorisations administratives n'aient été accordées.
Le tribunal a retenu le caractère incomplet de cette attestation. Mais la SA Banque Solféa a versé les fonds empruntés à la SARL Universel Energie au vu du document intitulé « attestation de fin de travaux, à adresser à la Banque Solféa après exécution des travaux », daté du 22 mars 2013, signé par M. Y. après la formule suivante, peu important qu'elle soit pré-imprimée : « Je soussigné M. Y., Atteste que les travaux objets du financement visé ci-dessus (qui ne couvrent pas le raccordement au réseau éventuel et autorisations administratives éventuelles) sont terminés et sont conformes au devis. Je demande en conséquence à la Banque Solféa de payer la somme de 22.000 Euros représentant le montant du crédit à l'ordre de l'entreprise visée ci-dessus, conformément aux conditions particulières du contrat de crédit. »
Dès lors que dans l'attestation de livraison, qui contient toutes les informations nécessaires à l'identification de l'opération financée, M. Y. a certifié que les travaux étaient terminés et conformes au contrat, c'est à dire que le contrat principal était entièrement exécuté, et qu'il a donné un ordre de paiement sans réserve à la SA Banque Solféa, M. Y. et Mme X. sont d'autant moins recevables à reprocher à la banque d'avoir versé les fonds alors que la déclaration de travaux n'avait pas encore été déposée en mairie ou que l'installation n'était pas raccordée au réseau public de distribution de l'électricité, que cette attestation exclut ces éléments.
Enfin, les co-emprunteurs étant engagés solidairement, la validité de l'ordre de paiement donné par M. Y. n'était pas subordonnée à la signature de Mme X. sur l'attestation de fin de travaux.
Aucune faute ne peut, sur ce point, être imputée à la banque.
En deuxième lieu, les intimés invoquent le caractère abusif de la clause suivante stipulée au contrat de crédit : « L'emprunteur autorise le prêteur à régler le professionnel dès la livraison du bien ou l'exécution de la prestation de service et après expiration du délai de rétractation. »
Mais n'est abusive au sens de l'ancien article L. 132-1 du code de la consommation, applicable au contrat souscrit le 15 février 2013, que les clauses qui ont pour objet ou pour effet dans les contrats conclus entre professionnels et non-professionnels ou consommateurs, de créer, au détriment du non-professionnel ou du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat. Le décret visé par ce texte, qui détermine une liste de clauses présumées abusives, ne mentionne pas la clause en litige.
Ensuite, les fonds empruntés dans le cadre d'un crédit affecté ne sont pas à la libre disposition des emprunteurs et ne sont destinés qu'à financer le contrat principal. Ils ont donc vocation à être versés exclusivement au co-contractant des emprunteurs dans le contrat principal.
En outre, la clause en litige ne permet pas à la banque de les verser librement, mais subordonne, au contraire, ce versement, à un ordre de l'emprunteur constatant que la prestation du contrat principal a été exécutée.
Ainsi, le contrat stipule également : « Condition de mise à disposition des fonds : à la livraison du bien, par chèque ou virement au bénéficiaire mentionné dans l'attestation de fin de travaux. » L'emprunteur a donc toute possibilité, tant que le bien commandé n'a pas été livré, ou que la prestation de service n'a pas été réalisée, ou même qu'elle n'a pas été réalisée correctement, de s'abstenir de signer l'attestation de fin de travaux. Par suite, la clause en litige est étrangère à toute notion de déséquilibre au détriment du consommateur.
En troisième lieu, dès lors que M. Y. et Mme X. sont en possession de la centrale photovoltaïque installée par la SARL Universel Energie qui fonctionne et produit de l'électricité qu'ils vendent à EDF depuis plusieurs années, ils ne justifient d'aucun préjudice en relation avec les fautes qu'ils imputent à la SA Banque Solféa. »
COUR D’APPEL D’AGEN
CHAMBRE CIVILE PREMIÈRE CHAMBRE
ARRÊT DU 13 AVRIL 2022
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 21/00144. N° Portalis DBVO-V-B7F-C3NJ.
LA COUR D'APPEL D'AGEN, 1ère chambre dans l'affaire,
ENTRE :
SA SOLFINEA
RCS de Nanterre n° XXX, [...], [...], Représentée par Maître François D., membre de la SELARL AD LEX, avocat postulant inscrit au barreau d'AGEN et par Maître Laure R., membre de la SCPA RD AVOCATS & ASSOCIES, avocate plaidante inscrite au barreau de NIMES, APPELANTE d'un Jugement du tribunal judiciaire d'AGEN en date du 12 janvier 2021, R.G. 17/01655, D'une part,
ET :
Madame X.
née le [date] à [ville], de nationalité Française
Monsieur Y.
né le [date] à [ville], de nationalité Française
Domiciliés ensemble : [...], [...], Représentés par Maître Gilles H., avocat inscrit au barreau d'AGEN, INTIMÉS, D'autre part
COMPOSITION DE LA COUR : L'affaire a été débattue et plaidée en audience publique le 12 janvier 2022 devant la cour composée de :
Présidente : Claude GATÉ, Présidente de Chambre
Assesseurs : Dominique BENON, Conseiller qui a fait un rapport oral à l'audience, Jean-Yves SEGONNES, Conseiller
Greffières : Lors des débats : Nathalie CAILHETON
Lors de la mise à disposition : Charlotte ROSA, adjoint administratif faisant fonction de greffier
ARRÊT : prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
FAITS :
Selon bon de commande signé le 15 février 2013 dans le cadre d'un démarchage à domicile, M. Y. a passé commande auprès de la SARL Universel Energie de la fourniture et de l'installation, sur la maison dont il est propriétaire à [ville L.], d'une centrale solaire photovoltaïque de 3 Kwc en intégration toiture pour un prix total de 22.000 Euros.
L'électricité produite par la centrale était destinée à être vendue à EDF.
Il était stipulé que le raccordement de l'installation au réseau public de distribution de l'électricité était à la charge de la SARL Universel Energie à hauteur de 500 Euros TTC.
Pour financer cette installation, le même jour, M. Y. et Mme X. ont souscrit un emprunt affecté d'une somme de 22.000 Euros auprès de la SA Banque Solféa, remboursable en 120 mensualités de 280,20 Euros, après différé d'amortissement d'un an, au taux débiteur annuel fixe de 5,79 %.
La centrale a été livrée le 20 mars 2013, installée et facturée le 29 mars 2013.
Le 22 mars 2013, M. Y. a signé une « attestation de fin de travaux » donnant instruction à la banque de verser le capital emprunté.
Le 30 mai 2013, il s'est plaint de problèmes d'étanchéité de la toiture suite à la pose des panneaux.
La SARL Universel Energie s'est déplacée et a procédé à des réfections.
Par lettre du 14 mars 2014, M. Y. s'est plaint du caractère inesthétique de l'installation et de l'absence de raccordement.
Après diverses interventions, la centrale a été raccordée au réseau public de distribution de l'électricité, le contrat de vente de l'électricité produite a été signé avec EDF, et l'électricité produite vendue.
Le 9 juin 2015, la SARL Universel Energie a été placée en liquidation judiciaire.
En fin d'année 2015, M. Y. a également acquis deux autres centrales photovoltaïques d'une puissance de 3 Kwc chacune financée par la souscription de deux autres emprunts.
En fin d'année 2016, M. Y. et Mme X. ont remboursé par anticipation l'emprunt souscrit auprès de la SA Banque Solféa par souscription d'un nouvel emprunt auprès du Crédit Agricole.
Par acte du 4 octobre 2017, ils ont fait assigner la SA Banque Solféa devant le tribunal de grande instance d'Agen en lui reprochant un manquement à son obligation de conseil et de mise en garde, l'existence d'une clause abusive dans le contrat tenant au versement direct du capital emprunté à la SARL Universel Energie, une faute dans le versement des fonds alors que la prestation n'était pas encore exécutée.
Ils ont sollicité la condamnation de la banque à leur verser des dommages et intérêts.
Par jugement rendu le 12 janvier 2021, le tribunal judiciaire d'Agen a :
- dit qu'est abusive et par conséquent réputée non écrite la clause suivante : « l'emprunteur autorise le prêteur à régler le professionnel dès la livraison du bien ou l'exécution de la prestation de contrat et après expiration du délai de rétractation »,
- condamné la SA Banque Solféa à payer à M. Y. et Mme X. la somme de 6.538,51 Euros en réparation de ses divers manquements contractuels,
- condamné la SA Banque Solféa aux dépens,
- condamné la SA Banque Solféa à payer à M. Y. et Mme X. la somme de 2.500 Euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- rejeté le surplus des demandes.
Le tribunal a relevé que la banque ne justifiait pas que le préposé de la SARL Universel Energie avait été formé à la distribution du crédit à la consommation et à la prévention du surendettement ; que les mensualités du crédit affecté ne généraient aucun risque d'endettement ; que la clause autorisant le prêteur à verser les fonds à l'installateur était abusive au sens de l'article L. 132-1 du code de la consommation compte tenu de sa généralité, de l'absence de possibilité de formuler des réserves et de mentionner que les travaux étaient intégralement terminés, en parfait état, conformes à la commande et acceptés sans aucune réserve ; que l'attestation de fin de travaux aurait également dû être signée par Mme X. et que les fonds avaient été débloqués alors que la prestation n'était pas entièrement exécutée et l'installation non raccordée ; que la banque devait être déchue des intérêts versés (3.962,38 Euros) et condamnée à indemnisation d'une année de production perdue (1.176,13 Euros) et d'un préjudice moral (1.500 Euros).
Par acte du 18 février 2021, la SA Banque Solféa a régulièrement déclaré former appel du jugement en désignant M. Y. et Mme X. en qualité de parties intimées et en indiquant que l'appel porte sur la totalité du dispositif du jugement, qu'elle cite dans son acte d'appel.
La clôture a été prononcée le 8 décembre 2021 et l'affaire fixée à l'audience de la Cour du 12 janvier 2022.
PRÉTENTIONS ET MOYENS :
Par dernières conclusions notifiées le 30 novembre 2021, auxquelles il est renvoyé pour le détail de l'argumentation, la SA Solfinéa (anciennement Banque Solféa) présente l'argumentation suivante :
- L'action en responsabilité intentée à son encontre est prescrite :
* elle peut opposer la prescription en cause d'appel conformément à l'article 123 du code de procédure civile.
* le tribunal l'a déchue du droit aux intérêts contractuels (en retenant un montant de 3.962,38 Euros au lieu de 3.394,51 Euros) alors qu'une telle demande n'était pas présentée et qu'elle se heurte à la prescription quinquennale pour être invoquée plus de 5 ans après la signature du contrat de crédit.
- Elle n'a commis aucune faute :
* la SARL Universel Energie n'est pas un intermédiaire en opération de crédit et ne dispose d'aucune délégation pour signer les contrats.
* les contrats portant sur les services financiers sont soumis au code monétaire et financier et non au code de la consommation.
* seul l'employeur du commercial doit détenir l'attestation de formation.
* elle a versé les fonds au vu d'une attestation de livraison signée par un co-emprunteur lui en donnant instruction.
* le crédit a été accordé après remise des documents obligatoires et vérification de la solvabilité des emprunteurs qui disposaient mensuellement de 2.200 Euros sans charge particulière.
- La clause retenue par le tribunal n'a aucun caractère abusif :
* l'emprunteur ne peut disposer librement des fonds d'un crédit affecté.
* elle ne crée aucun déséquilibre significatif et ne figure pas parmi les clauses déclarées abusives par le code de la consommation.
* les fonds ne sont versés que sur demande de l'emprunteur, comme un courrier le lui a rappelé.
- M. Y. et Mme X. ne subissent aucun préjudice : l'installation financée fonctionne et l'électricité produite est vendue à EDF.
Au terme de ses conclusions, (abstraction faite des multiples « juger » qui constituent un rappel des moyens et non des prétentions) elle demande à la Cour de :
- réformer le jugement,
- débouter M. Y. et Mme X. de leurs demandes,
- subsidiairement, en cas de déchéance du droit aux intérêts,
- limiter la condamnation au montant des intérêts versés, soit 3.394,51 Euros,
- très subsidiairement,
- limiter toute indemnisation de préjudice à 1.176,10 Euros,
- en tout état de cause,
- condamner in solidum les appelants à lui payer la somme de 2.500 Euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et à supporter les dépens.
* * *
Par conclusions d'intimés notifiées le 26 juillet 2021, auxquelles il est renvoyé pour le détail de l'argumentation, M. Y. et Mme X. présentent l'argumentation suivante :
- La banque n'a pas respecté ses obligations de conseil et de mise en garde :
* elle ne démontre pas avoir vérifié leur solvabilité, point sur lequel elle supporte la charge de la preuve conformément à l'arrêt rendu le 18 décembre 2014 par la Cour de justice de l'Union Européenne, alors qu'ils ne percevaient au total que 1.386 Euros par mois, ni avoir exécuté l'obligation de formation de l'intermédiaire de crédit prévue à l'ancien article L. 311-8 du code de la consommation.
* la banque devait d'autant plus être attentive qu'ils avaient été démarchés à domicile et que les informations recueillies pouvaient être sujettes à caution, surtout dans le domaine du photovoltaïque.
* la prescription de l'action en déchéance du droit aux intérêts contractuels ne peut être acquise, le contrat ayant pris fin et la somme ayant été allouée à titre de dommages et intérêts.
* la fin de non-recevoir tirée de la prescription est nouvelle en appel et se heurte à la prohibition de l'article 564 du code de procédure civile.
- Le contrat contient une clause abusive au sens de l'ancien article L. 132-1 du code de la consommation :
* cette clause est la suivante : « l'emprunteur autorise le prêteur à régler le professionnel dès la livraison du bien ou l'exécution de la prestation de service et après expiration du délai de rétractation ».
* elle figure dans un contrat suite à un démarchage à domicile, pratique pouvant donner lieu à des abus et ayant donné lieu à des multiples contentieux et les empêche d'avoir la libre disposition des fonds.
* en fait, l'autorisation de versement des fonds est donnée par l'installateur et non par l'emprunteur.
- La banque a commis des fautes dans la délivrance des fonds :
* elle a versé les fonds à l'installateur sur la base d'une clause abusive et d'une attestation de fin de travaux pré-imprimée et ambiguë, signée par le seul M. Y., avant que les autorisations administratives aient été données.
* elle devait vérifier que la prestation était entièrement exécutée.
- Ils ont été préjudiciés :
* ils ont été privés de la perte de chance de ne pas contracter ou de ne pas payer le prix de vente, qui doit être évaluée à 99 %.
* ils ont payé 9.526,80 Euros à la SA Banque Solféa et 25.200 Euros + 300 Euros + 2.160,49 Euros au Crédit Agricole.
[*]
Au terme de leurs conclusions, (abstraction faite des multiples « dire et juger, constater » qui constituent un rappel des moyens et non des prétentions) ils demandent à la Cour de :
- déclarer le moyen tiré de la prescription de leurs demandes irrecevable,
- confirmer le jugement sauf à condamner la SA Solfinéa à leur payer 36.815,42 Euros en réparation de leur préjudice financier outre 3 000 Euros en réparation de leur préjudice moral,
- subsidiairement,
- déclarer le moyen tiré de la prescription de leurs demandes irrecevables,
- confirmer le jugement sauf à corriger une erreur matérielle sur le montant alloué, qui est de 6.538,51 Euros,
- en tout état de cause,
- condamner l'appelante à leur payer la somme supplémentaire de 2.500 Euros en application de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
MOTIFS :
1) Sur l'obligation de mise en garde :
a - Recevabilité de l'action :
En premier lieu, aux termes de l'article 123 du code de procédure civile, les fins de non-recevoir peuvent être proposées en tout état de cause.
Il s'ensuit que la banque peut opposer la prescription de l'action pour la première fois en cause d'appel.
En second lieu, s'agissant de la prescription de l'action, il résulte de l'article 2224 du code civil que l'action en responsabilité de l'emprunteur non averti à l'encontre du prêteur au titre d'un manquement à son devoir de mise en garde se prescrit par cinq ans à compter du jour du premier incident de paiement, permettant à l'emprunteur d'appréhender l'existence et les conséquences éventuelles d'un tel manquement.
Il en résulte que la prescription de l'action de M. Y. et de Mme X. pour manquement de la SA Banque Solféa à son obligation de mise en garde lors de la souscription du crédit affecté le 15 février 2013, a commencé à courir le 15 octobre 2016, date à laquelle une mensualité d'emprunt n'a pas été payée, avant que les emprunteurs ne régularisent la situation en soldant totalement le crédit affecté en décembre 2016.
Par suite, leur action intentée par acte du 4 octobre 2017 n'est pas atteinte par la prescription.
b - Au fond :
L'obligation de mise en garde à laquelle le banquier est tenu envers son client consiste seulement à vérifier que, lors de la conclusion du contrat, le crédit est adapté au regard des capacités financières de l'emprunteur et du risque de l'endettement né de l'octroi du prêt sollicité.
En l'absence d'un tel risque, le banquier n'est tenu d'aucune obligation de mise en garde.
En l'espèce, avant d'accorder l'emprunt en litige, la SA Banque Solféa a remis à M M. et Mme X., qui y ont apposé leurs signatures, une « fiche d'informations précontractuelles européennes normalisées en matière de crédit aux consommateurs' détaillant l'emprunt proposé, et indiquant dans son en-tête en caractères gras et particulièrement lisibles 'un crédit vous engage et doit être remboursé, vérifiez vos capacités de remboursement avant de vous engager. »
Elle leur a également fait remplir et signer une déclaration de situation, intitulée « fiche de solvabilité » et recueilli des justificatifs (pièces d'identité, bulletins de paye, avis d'imposition sur le revenu, taxes foncières).
Elle a également consulté le Fichier des Incidents de remboursement des Crédits aux Particuliers (FICP) dans lequel les emprunteurs ne sont pas inscrits.
Dans cette déclaration de situation, M. Y. et Mme X. ont indiqué leurs revenus (1.300 Euros/mois pour M. Y. qui exerce la profession d'inséminateur et 1.000 Euros/mois de revenus fonciers pour Mme X. qui est femme au foyer), et n'ont mentionné aucune charge, précisant par l'apposition d'un trait dans la rubrique correspondante qu'ils ne remboursaient plus d'emprunt immobilier.
Ces déclarations sont conformes aux pièces jointes à la demande de crédit : le bulletin de paye de M. Y. de décembre 2012 mentionne des revenus sur l'année 2012 d'un total de 15.845 Euros.
En tout état de cause, les intimés ne sauraient se prévaloir de leurs déclarations inexactes dans ce document, comme par exemple le fait qu'ils remboursaient alors un emprunt souscrit auprès du Crédit Agricole à hauteur de 148,32 Euros.
Au vu de la déclaration de situation en possession de la SA Banque Solféa, l'emprunt souscrit était par conséquent en adéquation avec la situation financière déclarée par M. Y. et Mme X. et ne générait aucun risque d'endettement, ce qui excluait toute obligation de mise en garde.
C'est ainsi à juste titre que le tribunal a écarté l'argumentation présentée par les emprunteurs sur ce point.
2) Sur la régularité de la situation de la SARL Universel Energie et de son commercial :
En premier lieu, l'appelante dépose aux débats une convention conclue en avril et juin 2012 avec la SARL Universel Energie selon laquelle elle a agréé cette dernière pour le financement des ventes ou prestations de services qu'elle propose à sa clientèle.
Cette convention stipulait que seule la SA Banque Solféa étudiait et accordait les crédits sollicités, la SARL Universel Energie étant seulement habilitée à distribuer de la documentation commerciale et à recueillir les demandes de crédits affectés.
En deuxième lieu, le tribunal a retenu à l'encontre de la banque un manquement à l'obligation de formation du commercial.
Mais selon l'ancien article L. 311-8 du code de la consommation, applicable le 15 février 2013, c'est l'employeur qui tient à disposition l'attestation de formation au recueil des informations nécessaires à l'établissement de la fiche prévue à l'article L. 311-10.
Sa production ne peut donc être réclamée à la SA Banque Solféa.
3) Sur le versement des fonds empruntés à la SARL Universel Energie par la SA Banque Solféa :
En premier lieu, les intimés reprochent à la SA Banque Solféa d'avoir débloqué les fonds sur la base d'une attestation pré-imprimée et ambiguë, avant que les autorisations administratives n'aient été accordées.
Le tribunal a retenu le caractère incomplet de cette attestation.
Mais la SA Banque Solféa a versé les fonds empruntés à la SARL Universel Energie au vu du document intitulé « attestation de fin de travaux, à adresser à la Banque Solféa après exécution des travaux », daté du 22 mars 2013, signé par M. Y. après la formule suivante, peu important qu'elle soit pré-imprimée :
« Je soussigné M. Y.,
Atteste que les travaux objets du financement visé ci-dessus (qui ne couvrent pas le raccordement au réseau éventuel et autorisations administratives éventuelles) sont terminés et sont conformes au devis.
Je demande en conséquence à la Banque Solféa de payer la somme de 22.000 Euros représentant le montant du crédit à l'ordre de l'entreprise visée ci-dessus, conformément aux conditions particulières du contrat de crédit. »
Dès lors que dans l'attestation de livraison, qui contient toutes les informations nécessaires à l'identification de l'opération financée, M. Y. a certifié que les travaux étaient terminés et conformes au contrat, c'est à dire que le contrat principal était entièrement exécuté, et qu'il a donné un ordre de paiement sans réserve à la SA Banque Solféa, M. Y. et Mme X. sont d'autant moins recevables à reprocher à la banque d'avoir versé les fonds alors que la déclaration de travaux n'avait pas encore été déposée en mairie ou que l'installation n'était pas raccordée au réseau public de distribution de l'électricité, que cette attestation exclut ces éléments.
Enfin, les co-emprunteurs étant engagés solidairement, la validité de l'ordre de paiement donné par M. Y. n'était pas subordonnée à la signature de Mme X. sur l'attestation de fin de travaux.
Aucune faute ne peut, sur ce point, être imputée à la banque.
En deuxième lieu, les intimés invoquent le caractère abusif de la clause suivante stipulée au contrat de crédit :
« L'emprunteur autorise le prêteur à régler le professionnel dès la livraison du bien ou l'exécution de la prestation de service et après expiration du délai de rétractation. »
Mais n'est abusive au sens de l'ancien article L. 132-1 du code de la consommation, applicable au contrat souscrit le 15 février 2013, que les clauses qui ont pour objet ou pour effet dans les contrats conclus entre professionnels et non-professionnels ou consommateurs, de créer, au détriment du non-professionnel ou du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat.
Le décret visé par ce texte, qui détermine une liste de clauses présumées abusives, ne mentionne pas la clause en litige.
Ensuite, les fonds empruntés dans le cadre d'un crédit affecté ne sont pas à la libre disposition des emprunteurs et ne sont destinés qu'à financer le contrat principal.
Ils ont donc vocation à être versés exclusivement au co-contractant des emprunteurs dans le contrat principal.
En outre, la clause en litige ne permet pas à la banque de les verser librement, mais subordonne, au contraire, ce versement, à un ordre de l'emprunteur constatant que la prestation du contrat principal a été exécutée.
Ainsi, le contrat stipule également :
« Condition de mise à disposition des fonds : à la livraison du bien, par chèque ou virement au bénéficiaire mentionné dans l'attestation de fin de travaux. »
L'emprunteur a donc toute possibilité, tant que le bien commandé n'a pas été livré, ou que la prestation de service n'a pas été réalisée, ou même qu'elle n'a pas été réalisée correctement, de s'abstenir de signer l'attestation de fin de travaux.
Par suite, la clause en litige est étrangère à toute notion de déséquilibre au détriment du consommateur.
En troisième lieu, dès lors que M. Y. et Mme X. sont en possession de la centrale photovoltaïque installée par la SARL Universel Energie qui fonctionne et produit de l'électricité qu'ils vendent à EDF depuis plusieurs années, ils ne justifient d'aucun préjudice en relation avec les fautes qu'ils imputent à la SA Banque Solféa.
Le jugement doit être infirmé et leurs demandes de dommages et intérêts rejetées.
Enfin, l'équité nécessite d'allouer à l'appelante la somme de 2.500 Euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
- la Cour, après en avoir délibéré conformément à la loi, statuant par arrêt contradictoire prononcé par mise à disposition au greffe et en dernier ressort,
- INFIRME le jugement SAUF en ce qu'il a rejeté l'action formée par M. Y. et Mme X. à l'encontre de la SA Banque Solféa au titre d'un manquement au devoir de mise en garde ;
- STATUANT A NOUVEAU sur les points infirmés,
- REJETTE la fin de non-recevoir tirée de la prescription, la demande basée sur l'existence d'une clause abusive et les demandes de dommages et intérêts formées par M. Y. et Mme X. à l'encontre de la SA Solfinéa ;
- CONDAMNE solidairement M. Y. et Mme X. à payer à la SA Solfinéa la somme de 2.500 Euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;
- CONDAMNE solidairement M. Y. et Mme X. aux dépens de 1ère instance et d'appel.
- Le présent arrêt a été signé par Claude GATÉ, président, et par Charlotte ROSA, adjoint administratif faisant fonction de greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
La Greffière, Le Président,