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CJUE (9e ch.), 30 juin 2022

Nature : Décision
Titre : CJUE (9e ch.), 30 juin 2022
Pays : UE
Juridiction : Cour de Justice de l'UE (9e ch.)
Demande : C-170/21
Date : 30/06/2022
Numéro ECLI : ECLI:EU:C:2022:518
Nature de la décision : Question préjudicielle (CJUE)
Mode de publication : Site Curia (CJUE)
Date de la demande : 15/03/2021
Référence bibliographique : 5982 (pouvoirs du juge, injonction de payer)
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CERCLAB - DOCUMENT N° 9846

CJUE (9e ch.), 30 juin 2022 : affaire n° C-170/21 

Publication : Site Curia

 

Extrait : « 1) L’article 6, paragraphe 1, de la directive 93/13/CEE du Conseil, du 5 avril 1993, concernant les clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs, doit être interprété en ce sens que le juge national, saisi d’une demande de délivrance d’une injonction de payer et alors que le débiteur-consommateur concerné ne participe pas à la procédure jusqu’à la délivrance de cette injonction de payer, est tenu d’écarter d’office l’application d’une clause abusive du contrat de crédit à la consommation conclu entre ce consommateur et le professionnel concerné, sur laquelle une partie de la créance invoquée est fondée. Dans cette hypothèse, ce juge dispose de la faculté de rejeter partiellement cette demande, à la condition que ce contrat puisse subsister sans aucune autre modification ni révision ou complément, ce qu’il incombe audit juge de vérifier.

2) L’article 6, paragraphe 1, de la directive 93/13 doit être interprété en ce sens que, si cette disposition oblige le juge national, saisi d’une demande d’injonction de payer, à tirer toutes les conséquences qui, selon le droit national, découlent de la constatation du caractère abusif d’une clause figurant dans un contrat entre un consommateur et un professionnel afin de s’assurer que ce consommateur n’est pas lié par celle‑ci, elle n’oblige pas, en principe, ce juge à procéder à une compensation d’office entre le paiement effectué sur le fondement de ladite clause et le solde dû en vertu de ce contrat, sous réserve toutefois du respect des principes d’équivalence et d’effectivité.

3) L’article 6, paragraphe 1, de la directive 93/13 doit être interprété en ce sens que, dans l’hypothèse où, en vertu de cette disposition, lue à la lumière des principes d’équivalence et d’effectivité, le juge national, saisi d’une demande d’injonction de payer, serait obligé d’effectuer une compensation d’office entre le paiement effectué sur le fondement d’une clause abusive figurant dans un contrat de crédit à la consommation et le solde dû en vertu de ce contrat, ce juge est tenu d’écarter l’application de la jurisprudence en sens contraire d’une juridiction de degré supérieur. ».

 

COUR DE JUSTICE DE L’UNION EUROPÉENNE

NEUVIÈME CHAMBRE

ARRÊT DU 30 JUIN 2022

 

Dans l’affaire C‑170/21, ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par le Sofiyski rayonen sad (tribunal d’arrondissement de Sofia, Bulgarie), par décision du 15 mars 2021, parvenue à la Cour le 15 mars 2021, dans la procédure

Profi Credit Bulgaria EOOD

contre

T.I.T.,

LA COUR (neuvième chambre),

composée de M. S. Rodin, président de chambre, Mmes L. S. Rossi et O. Spineanu‑Matei (rapporteure), juges,

Avocat général : M. M. Szpunar,

Greffier : M. A. Calot Escobar,

vu la procédure écrite,

considérant les observations présentées :

- pour Profi Credit Bulgaria EOOD, par Mme I. Peneva,

- pour la Commission européenne, par Mme E. Georgieva et M. N. Ruiz García, en qualité d’agents,

vu la décision prise, l’avocat général entendu, de juger l’affaire sans conclusions,

rend le présent

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Arrêt

1. La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 6, paragraphe 1, de la directive 93/13/CEE du Conseil, du 5 avril 1993, concernant les clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs (JO 1993, L 95, p. 29).

2. Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant Profi Credit Bulgaria EOOD (ci-après « PCB »), une institution financière de droit bulgare, à T.I.T., un consommateur, au sujet de la demande de délivrance d’une injonction de payer une dette pécuniaire, en application d’un contrat de crédit à la consommation conclu entre les parties au principal.

 

Le cadre juridique :

Le droit de l’Union :

3. L’article 6, paragraphe 1, de la directive 93/13 énonce :

« Les États membres prévoient que les clauses abusives figurant dans un contrat conclu avec un consommateur par un professionnel ne lient pas les consommateurs, dans les conditions fixées par leurs droits nationaux, et que le contrat restera contraignant pour les parties selon les mêmes termes, s’il peut subsister sans les clauses abusives. »

 

Le droit bulgare :

Le GPK

4. L’article 410 du Grazhdanski protsesualen kodeks (code de procédure civile (ci-après le « GPK »), dispose :

« (1) Le demandeur peut demander la délivrance d’une injonction :

1. portant sur une dette pécuniaire ou sur des biens fongibles, lorsque la demande relève de la compétence du Rayonen sad (tribunal d’arrondissement) ;

[...]

(3) Lorsque la créance naît d’un contrat conclu avec un consommateur, est joint à la demande le contrat, si ce dernier se présente sous la forme écrite, accompagné de tous les avenants et annexes, ainsi que, le cas échéant, des conditions générales applicables à celui-ci. »

[…] ladite demande est contraire à la loi ou aux bonnes mœurs ;

[...]

(3) S’il fait droit à la demande, le tribunal rend une ordonnance d’injonction dont une copie est signifiée au débiteur. »

la même demande est fondée sur une clause abusive figurant dans un contrat conclu avec un consommateur ou dont l’existence peut être raisonnablement supposée ;

6. Aux termes de l’article 413, paragraphe 2, du GPK, l’ordonnance rejetant dans sa totalité ou en partie la demande de délivrance d’une injonction peut être contestée par le demandeur au moyen d’un recours individuel dont il n’est pas exigé de copie pour signification.

7. L’article 414, paragraphes 1 et 2, du GPK est ainsi libellé :

« (1) Le débiteur peut former opposition par écrit contre l’injonction d’exécution ou contre une partie de celle-ci. Cette opposition n’a pas à être motivée, sauf dans les cas de figure visés à l’article 414a du présent code.

(2) L’opposition est formée dans un délai d’un mois à compter de la réception de l’injonction ; ce délai ne peut être prorogé. »

8. L’article 422 du GPK énonce :

« (1) Le recours en constatation de la créance est réputé introduit à compter du dépôt de la demande de délivrance d’une injonction, dès lors que le délai visé à l’article 415, paragraphe 4, du présent code a été respecté.

(2) Sauf dans les cas de figure visés à l’article 420 du présent code, l’introduction du recours visé au paragraphe 1 ne suspend pas l’exécution immédiate qui a été autorisée.

(3) Lorsque ce recours a été rejeté par un jugement qui est revêtu de la force de chose jugée, il est mis fin à l’exécution […]

(4) Aucun titre exécutoire contraire n’est émis, lorsque ledit recours est rejeté au motif que la créance n’était pas due. »

 

Le ZZD

9. L’article 76 du zakon za zadalzheniyata i dogovorite (loi relative aux obligations et aux contrats) (DV no 275, du 22 novembre 1950), dans sa version applicable au litige au principal (ci-après le « ZZD »), prévoit :

« (1) Quiconque est débiteur de plusieurs obligations similaires envers une seule et même personne peut, si l’exécution ne suffit pas à les rembourser toutes, désigner celle des obligations qu’il choisit de rembourser. Si l’intéressé ne désigne pas cette dernière, c’est l’obligation la plus lourde pour lui qui est remboursée. Si plusieurs obligations sont également lourdes, c’est la plus ancienne qui est remboursée et, si elles ont la même ancienneté, elles sont remboursées au prorata.

(2) Lorsque l’exécution ne suffit pas à rembourser les intérêts, les frais et le capital, ce sont d’abord les frais, puis les intérêts, puis en dernier lieu le capital qui sont remboursés. »

 

Le ZPK

10. L’article 9, paragraphe 1, du zakon za potrebitelskiya kredit (loi relative aux contrats de crédit à la consommation), du 18 février 2010 (DV no 18, du 5 mars 2010, p. 2), dans sa version applicable au litige au principal (ci-après le « ZPK »), dispose :

« Le contrat de crédit à la consommation est un contrat en vertu duquel un prêteur octroie ou s’engage à octroyer à un consommateur un crédit sous la forme d’un prêt, d’un délai de paiement ou de toute autre facilité de paiement similaire, à l’exception des contrats conclus en vue de la prestation de services ou de la livraison de biens de même nature pendant une période continue, aux termes desquels le consommateur règle le coût de ces services ou de ces biens, aussi longtemps que ceux‑ci sont fournis ou livrés, par des paiements échelonnés sur toute cette période. »

11. L’article 10a du ZPK énonce :

« (1) Le prêteur peut percevoir auprès du consommateur des frais et des commissions pour des services accessoires liés au contrat de crédit à la consommation.

(2) Le prêteur ne peut exiger le paiement de frais et de commissions pour des activités relatives à la mise à disposition ou à la gestion du crédit.

(3) Le prêteur ne peut percevoir qu’une seule fois des frais ou une commission pour une seule et même opération.

(4) Un contrat de crédit à la consommation doit déterminer de manière claire et précise le type et le montant des frais ou des commissions, ainsi que l’opération pour laquelle ceux-ci sont facturés. »

12. L’article 19 du ZPK prévoit :

« [...]

(4) Le taux annuel du coût du crédit ne peut excéder le quintuple des intérêts de retard au taux légal en leva bulgares (BGN) et en devises, déterminés par arrêté du Conseil des ministres de la République de Bulgarie.

(5) Les clauses du contrat méconnaissant les dispositions du paragraphe 4 sont réputées nulles.

(6) Lorsque des paiements ont été effectués en vertu de contrats contenant des clauses qui ont été déclarées nulles au titre du paragraphe 5, le surplus facturé au-delà du seuil visé au paragraphe 4 est déduit des paiements suivants effectués au titre du crédit. »

 

Le litige au principal et les questions préjudicielles

13. PCB a déposé auprès de la juridiction de renvoi une demande de délivrance d’une injonction de payer en application de l’article 410 du GPK à l’encontre de T.I.T., un ressortissant bulgare (ci-après le « consommateur concerné »), en vue du paiement par ce dernier d’une dette pécuniaire, composée de la somme en principal, des intérêts contractuels, de la rémunération pour un forfait de services supplémentaires et des intérêts de retard, en application d’un contrat de crédit à la consommation conclu entre les parties au principal le 29 décembre 2017. Selon les indications fournies par la juridiction de renvoi, une telle procédure de délivrance d’une injonction de payer se déroule unilatéralement jusqu’à la délivrance de celle-ci.

14. En application de ce contrat de crédit à la consommation, le consommateur concerné avait payé, selon PCB, onze mensualités avant d’être en défaut de paiement et de se voir notifier que le crédit à la consommation concerné était devenu exigible par anticipation.

15. Après avoir constaté qu’une clause dudit contrat de crédit à la consommation, relative à la rémunération pour la fourniture d’un forfait de services supplémentaires, présentait un caractère abusif, la juridiction de renvoi a considéré que la demande de délivrance d’une injonction de payer, dans sa partie relative au paiement de cette rémunération, devait être rejetée sur le fondement de l’article 411, paragraphe 2, point 3, du GPK. En outre, cette juridiction a considéré que le montant déjà payé par le consommateur concerné devait être affecté, conformément à l’article 76, paragraphe 2, du ZZD, au remboursement des intérêts contractuels et du capital, de sorte que 17 tranches de ces intérêts ainsi que 16 tranches entières et une partie de la dix-septième tranche de ce capital auraient été acquittées.

16. Par conséquent, par ordonnance du 9 novembre 2020, la juridiction de renvoi a ordonné la délivrance d’une injonction de payer à l’encontre du consommateur concerné, en application du même contrat de crédit à la consommation, en vertu de laquelle celui-ci devait rembourser à PCB une somme recalculée par cette juridiction, imputant d’office les versements déjà effectués sur le montant de la créance invoquée par PCB.

17. PCB a introduit un recours contre cette ordonnance auprès du Sofyiski gradski sad (tribunal de la ville de Sofia, Bulgarie). Par ordonnance du 16 février 2021, d’une part, ce tribunal a considéré que, conformément à l’article 411, paragraphe 2, point 3, du GPK, la juridiction de première instance devait refuser de délivrer une injonction de payer lorsque la demande de délivrance de cette injonction était fondée sur une clause abusive figurant dans un contrat conclu avec un consommateur, ce qu’elle pouvait relever d’office et sans qu’il soit besoin que le débiteur fasse opposition. Sur le fond, ledit tribunal a confirmé l’existence d’une clause abusive figurant dans le contrat de crédit à la consommation concerné.

18. D’autre part, le Sofyiski gradski sad (tribunal de la ville de Sofia) a considéré que l’appel interjeté était fondé pour le reste. Il a, notamment, estimé que, par l’affectation des paiements du consommateur au remboursement des intérêts et du capital, conformément à l’article 76, paragraphe 2, du ZZD, la juridiction de première instance avait outrepassé ses compétences concernant l’émission d’une injonction de payer. La procédure d’injonction de payer fondée sur l’article 410 du GPK ne viserait, en effet, conformément à la jurisprudence du Varhoven kasatsionen sad (Cour suprême de cassation, Bulgarie), non pas à faire constater l’existence de la créance concernée, mais uniquement à vérifier si cette créance était contestée. Le contrôle de l’existence de la créance alléguée devrait, en revanche, être effectué par la voie d’une procédure en constatation, engagée à la demande du créancier concerné, conformément à l’article 422 du GPK dans l’hypothèse où le débiteur concerné exercerait son droit de faire opposition à l’injonction conformément à l’article 414 du GPK.

19. Le juge d’appel a, par conséquent, partiellement annulé l’ordonnance du 9 novembre 2020 de la juridiction de renvoi, en ne confirmant que le rejet de la demande en tant que cette dernière portait sur le paiement de la rémunération pour le forfait de services supplémentaires concerné, en ce qu’elle était fondée sur une clause considérée comme étant abusive. Il a ensuite ordonné que soit délivrée en faveur de PCB, en vertu de l’article 410 du GPK, une injonction de payer la totalité des autres sommes réclamées et a renvoyé l’affaire à la juridiction de renvoi, en tant que juge de première instance, pour la délivrance d’une injonction de payer.

20. Éprouvant des doutes sur la manière de procéder, la juridiction de renvoi observe que, s’il était admis, dans un cas de figure tel que celui en l’occurrence, où il a été établi que le consommateur concerné avait effectué des remboursements en vertu d’une clause abusive figurant dans un contrat de crédit à la consommation, que, afin d’écarter l’application de cette clause, le juge procédât d’office à une compensation, en appliquant par analogie une disposition du ZPK, à savoir l’article 19, paragraphe 6, du ZPK, lu en combinaison avec l’article 76, paragraphe 2, du ZZD, ce consommateur ne devrait pas former opposition en vertu de l’article 414 du GPK ou introduire un recours contentieux pour faire valoir son droit à compensation.

1) Il conviendrait dès lors de déterminer, dans l’hypothèse où l’article 6, paragraphe 1, de la directive 93/13 permettait au juge national de refuser partiellement la délivrance d’une injonction de payer, si, en vertu de cette disposition, ce juge doit d’office tirer toutes les conséquences du caractère abusif de la clause concernée et procéder à une compensation d’office ou s’il doit, au contraire, se conformer à la jurisprudence d’une juridiction de degré supérieur qui, nonobstant la constatation de la présence dans le contrat de crédit à la consommation concerné d’une clause abusive, ordonne la délivrance d’une injonction de payer et ne rejette la demande de délivrance de cette injonction qu’en tant que celle-ci porte sur les sommes réclamées sur le fondement de cette clause abusive, sans possibilité de compensation. La juridiction de renvoi précise, à cet égard, qu’elle pose cette question dans le contexte de la fourniture de moyens efficaces de protection des consommateurs, dans la mesure où, en vertu du droit bulgare, la compensation des créances par le juge n’est admissible que lorsqu’elle est exercée en tant que droit subjectif. Celle-ci ne pourrait, en revanche, être opérée d’office qu’à titre d’exception, en vertu de l’article 19, paragraphe 6, du ZPK.

2) En cas de réponse affirmative à la première question : le juge national est-il tenu de refuser intégralement de prononcer une décision juridictionnelle ordonnant un paiement, lorsqu’une partie des prétentions affichées est fondée sur une clause contractuelle abusive formant le montant de ces prétentions ?

3) En cas de réponse affirmative à la première question, mais de réponse négative à la deuxième [question] : le juge national est-il tenu de refuser partiellement de prononcer une décision juridictionnelle ordonnant un paiement, pour la partie des prétentions fondée sur une clause contractuelle abusive ?

4) En cas de réponse affirmative à la troisième question : le juge national est-il tenu – et, dans l’affirmative, à quelles conditions – de tirer d’office les conséquences du caractère abusif d’une clause lorsque des informations indiquent qu’elle a donné lieu à un paiement et, notamment, de compenser ce paiement contre d’autres créances impayées découlant du contrat concerné ?

5) En cas de réponse affirmative à la quatrième question : le juge national est-il lié par les instructions d’une instance de degré supérieur, lesquelles sont contraignantes pour lui d’après le droit national, mais ne tirent pas les conséquences du caractère abusif de la clause ? »

 

MOTIFS (justification de la décision)                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Sur les questions préjudicielles :

Sur la recevabilité :

23. En premier lieu, PCB met en doute la recevabilité de la première question au motif que la Cour a jugé, dans l’arrêt du 13 septembre 2018, Profi Credit Polska (C‑176/17, EU:C:2018:711), qu’une protection effective des droits conférés au consommateur par la directive 93/13 ne saurait être garantie qu’à la condition que le système procédural national concerné permette, notamment, dans le cadre de la procédure d’injonction de payer, un contrôle d’office de la nature potentiellement abusive des clauses figurant dans le contrat concerné conclu avec un consommateur.

24. À cet égard, il convient de rappeler, d’une part, que, même en présence d’une jurisprudence de la Cour permettant de résoudre le point de droit concerné, les juridictions nationales conservent l’entière liberté de saisir la Cour si elles l’estiment opportun, sans que la circonstance que les dispositions dont l’interprétation est demandée ont déjà été interprétées par la Cour ait pour conséquence de faire obstacle à ce que cette dernière statue de nouveau (arrêt du 6 novembre 2018, Bauer et Willmeroth, C‑569/16 et C‑570/16, EU:C:2018:871, point 21 ainsi que jurisprudence citée).

25. D’autre part, il est de jurisprudence constante que, dans le cadre de la coopération entre la Cour et les juridictions nationales instituée à l’article 267 TFUE, il appartient au seul juge national qui est saisi du litige et qui doit assumer la responsabilité de la décision juridictionnelle à intervenir d’apprécier, au regard des particularités de l’affaire, tant la nécessité d’une décision préjudicielle pour être en mesure de rendre son jugement que la pertinence des questions qu’il pose à la Cour. En conséquence, dès lors que la question posée porte sur l’interprétation du droit de l’Union, la Cour est, en principe, tenue de statuer (arrêt du 6 novembre 2018, Bauer et Willmeroth, C‑569/16 et C‑570/16, EU:C:2018:871, point 23 ainsi que jurisprudence citée).

26. En second lieu, s’agissant de l’allégation de PCB selon laquelle la juridiction de renvoi n’a pas constaté une incompatibilité du droit bulgare avec l’article 6, paragraphe 1, de la directive 93/13 dont l’interprétation est demandée, mais vise à faire interpréter des dispositions de ce droit, il y a lieu de relever qu’il ressort de la demande de décision préjudicielle que cette juridiction s’interroge sur l’interprétation de cette disposition afin de savoir si elle doit écarter, en vertu du principe de primauté du droit de l’Union, l’application d’une réglementation nationale telle qu’interprétée par une juridiction de degré supérieur et dont la jurisprudence s’impose à elle.

27. Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, il y a lieu de conclure que la demande de décision préjudicielle, y compris la première question, est recevable.

 

Sur le fond :

Sur les première à troisième questions :

28. Par ses première à troisième questions, qu’il convient d’examiner ensemble, la juridiction de renvoi demande, en substance, si l’article 6, paragraphe 1, de la directive 93/13 doit être interprété en ce sens que le juge national, saisi d’une demande de délivrance d’une injonction de payer et alors que le débiteur-consommateur ne participe pas à la procédure jusqu’à la délivrance de cette injonction de payer, est tenu d’écarter d’office l’application d’une clause abusive du contrat de crédit à la consommation conclu entre ce consommateur et le professionnel concerné, sur laquelle une partie de la créance invoquée est fondée, et si, dans cette hypothèse, ce juge dispose de la faculté de ne rejeter cette demande que partiellement.

29. Aux termes de l’article 6, paragraphe 1, de la directive 93/13, les États membres prévoient que les clauses abusives figurant dans un contrat conclu avec un consommateur par un professionnel ne lient pas les consommateurs, dans les conditions fixées par leurs droits nationaux, et que le contrat restera contraignant pour les parties selon les mêmes termes, s’il peut subsister sans les clauses abusives.

30. Cette disposition impérative tend à substituer à l’équilibre formel que le contrat établit entre les droits et les obligations des cocontractants un équilibre réel de nature à restaurer l’égalité entre ces derniers (arrêt du 21 décembre 2016, Gutiérrez Naranjo e.a., C‑154/15, C‑307/15 et C‑308/15, EU:C:2016:980, point 55 ainsi que jurisprudence citée).

31. Dans ce but, en premier lieu, il incombe au juge national, dans les conditions fixées par son droit, d’apprécier d’office le caractère abusif d’une clause contractuelle relevant du champ d’application de la directive 93/13 et d’en écarter l’application afin qu’elle ne produise pas d’effets contraignants à l’égard du consommateur concerné, sauf si ce consommateur s’y oppose (voir, en ce sens, arrêt du 26 mars 2019, Abanca Corporación Bancaria et Bankia, C‑70/17 et C‑179/17, EU:C:2019:250, point 52 ainsi que jurisprudence citée).

32. À cet égard, il importe de rappeler que, si le juge national, ce faisant, supplée au déséquilibre qui existe entre le consommateur et le professionnel, c’est à la condition que celui-ci dispose des éléments de droit et de fait nécessaires à cet effet (voir, en ce sens, arrêt du 13 septembre 2018, Profi Credit Polska, C‑176/17, EU:C:2018:711, point 42 et jurisprudence citée). Il s’ensuit que, le cas échéant, le juge national devra prendre, en l’absence d’opposition de la part du consommateur concerné et au besoin d’office, des mesures d’instruction afin de compléter le dossier, en demandant aux parties, dans le respect du principe du contradictoire, de lui fournir des informations complémentaires à cet effet (voir, en ce sens, ordonnance du 26 novembre 2020, DSK Bank et FrontEx International, C‑807/19, EU:C:2020:967, points 52 et 54 ainsi que jurisprudence citée).

33. Ces motifs valent également à l’égard d’une procédure d’injonction de payer (voir, en ce sens, arrêt du 13 septembre 2018, Profi Credit Polska, C‑176/17, EU:C:2018:711, point 43 et jurisprudence citée).

34. En second lieu, selon une jurisprudence constante, l’article 6, paragraphe 1, de la directive 93/13 n’exige pas que le juge national écarte, outre l’application de la clause du contrat déclarée abusive, celle des clauses qui n’ont pas été qualifiées comme telles (arrêt du 29 avril 2021, Bank BPH, C‑19/20, EU:C:2021:341, point 54 et jurisprudence citée).

35. En effet, l’objectif poursuivi par cette disposition, et notamment le second membre de phrase de celle-ci, consiste non pas à annuler tous les contrats contenant des clauses abusives, mais à rétablir l’équilibre entre les parties en écartant l’application des clauses considérées comme abusives, tout en maintenant, en principe, la validité des autres clauses du contrat concerné. Ce contrat doit, en principe, subsister sans aucune autre modification que celle résultant de la suppression des clauses abusives. Ainsi, ledit contrat peut être maintenu pour autant que, conformément aux règles du droit interne, une telle persistance du même contrat sans les clauses abusives est juridiquement possible (voir, en ce sens, arrêts du 7 août 2018, Banco Santander et Escobedo Cortés, C‑96/16 et C‑94/17, EU:C:2018:643, point 75, ainsi que du 29 avril 2021, Bank BPH, C‑19/20, EU:C:2021:341, point 83 et jurisprudence citée).

36. Dans ce contexte, la Cour a, en outre, jugé que ladite disposition s’oppose à une règle du droit national qui permet au juge national de compléter le contrat concerné en révisant le contenu d’une clause dont il a constaté le caractère abusif (voir, en ce sens, arrêt du 26 mars 2019, Abanca Corporación Bancaria et Bankia, C‑70/17 et C‑179/17, EU:C:2019:250, point 53 et jurisprudence citée).

37. Il résulte des éléments qui précèdent que la juridiction nationale saisie d’une demande d’injonction de payer fondée sur un contrat de crédit à la consommation qui contient une clause abusive pourra faire droit à cette demande, tout en écartant l’application de cette clause, à condition que ce contrat puisse subsister sans aucune autre modification ni révision ou complément, ce qu’il incombe à cette juridiction de vérifier. Dans cette hypothèse, il doit être loisible à ladite juridiction de rejeter ladite demande uniquement pour la partie des prétentions découlant de ladite clause, si celles-ci peuvent être distinguées du reste de la demande.

38. Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, il y a lieu de répondre aux première à troisième questions que l’article 6, paragraphe 1, de la directive 93/13 doit être interprété en ce sens que le juge national, saisi d’une demande de délivrance d’une injonction de payer et alors que le débiteur-consommateur ne participe pas à la procédure jusqu’à la délivrance de cette injonction de payer, est tenu d’écarter d’office l’application d’une clause abusive du contrat de crédit à la consommation conclu entre ce consommateur et le professionnel concerné, sur laquelle une partie de la créance invoquée est fondée. Dans cette hypothèse, ce juge dispose de la faculté de rejeter partiellement cette demande, à la condition que ce contrat puisse subsister sans aucune autre modification ni révision ou complément, ce qu’il incombe audit juge de vérifier.

 

Sur la quatrième question :

39. Par sa quatrième question, la juridiction de renvoi demande, en substance, si l’article 6, paragraphe 1, de la directive 93/13 doit être interprété en ce sens qu’il oblige le juge national, saisi d’une demande d’injonction de payer, à tirer d’office les conséquences du caractère abusif d’une clause d’un contrat de crédit à la consommation lorsque celle-ci a donné lieu à un paiement, de sorte qu’il serait tenu de procéder à une compensation d’office entre ce paiement et le solde dû en vertu de ce contrat.

40. À cet égard, la juridiction de renvoi expose que, si cette obligation s’impose au juge national, en vertu de l’article 6 de cette directive, le consommateur concerné ne devrait plus engager une procédure distincte pour faire valoir son droit à compensation.

41. Selon une jurisprudence constante, le juge national doit, en vertu de l’article 6, paragraphe 1, de la directive 93/13, tirer toutes les conséquences qui, selon le droit national, découlent de la constatation du caractère abusif d’une clause afin de s’assurer que le consommateur concerné n’est pas lié par celle-ci (arrêt du 30 mai 2013, Asbeek Brusse et de Man Garabito, C‑488/11, EU:C:2013:341, point 49 ainsi que jurisprudence citée). Une telle obligation implique, ainsi qu’il a été rappelé au point 31 du présent arrêt, qu’il incombe à ce juge d’écarter l’application de la clause considérée comme étant abusive afin que cette clause ne produise pas d’effets contraignants à l’égard de ce consommateur.

42. Dès lors qu’une telle clause doit être considérée, en principe, comme n’ayant jamais existé, de sorte qu’elle ne saurait avoir d’effet à l’égard de ce consommateur, l’obligation pour le juge national d’écarter l’application d’une clause contractuelle abusive qui impose le paiement d’une somme emporte, en principe, un effet restitutoire correspondant à l’égard de cette somme (voir, en ce sens, arrêt du 21 décembre 2016, Gutiérrez Naranjo e.a., C‑154/15, C‑307/15 et C‑308/15, EU:C:2016:980, points 61 et 62).

43. Dans ce contexte, la Cour a considéré qu’il appartient aux États membres, au moyen de leur droit national, de définir les modalités dans le cadre desquelles le constat du caractère abusif d’une clause figurant dans un contrat est établi et les effets juridiques concrets de ce constat sont matérialisés. Toutefois, ce constat doit permettre de rétablir la situation en droit et en fait qui aurait été celle du consommateur concerné en l’absence de cette clause abusive, notamment en fondant un droit à restitution des avantages indûment acquis, à son détriment, par le professionnel concerné sur le fondement de ladite clause abusive. En effet, un tel encadrement par le droit national de la protection garantie aux consommateurs par la directive 93/13 ne saurait porter atteinte à la substance de cette protection (voir, en ce sens, arrêt du 21 décembre 2016, Gutiérrez Naranjo e.a., C‑154/15, C‑307/15 et C‑308/15, EU:C:2016:980, points 65 et 66).

44. Si les États membres sont ainsi tenus, en vertu de l’article 6, paragraphe 1, de la directive 93/13, de prévoir dans leur droit national des modalités procédurales permettant d’assurer le respect dudit droit à restitution, il n’en découle pas, en revanche, une obligation de mettre en œuvre le même droit au moyen d’une compensation d’office à opérer par le juge national, bien que celui-ci soit tenu d’écarter l’application de la clause abusive.

45. Il s’ensuit qu’une réglementation nationale, telle que celle en cause au principal, en vertu de laquelle la juridiction saisie d’une demande de délivrance d’une injonction de payer est tenue de rejeter cette demande dans la mesure où cette dernière est fondée sur une clause abusive, mais n’est pas autorisée à procéder à une compensation d’office entre les paiements effectués sur le fondement de cette clause et le solde dû, et qui a comme conséquence que le débiteur, qui ne participe pas à la procédure d’injonction de payer, est contraint d’engager une procédure distincte pour l’exercice de son droit à la restitution intégrale, n’est pas, en principe, contraire à l’article 6 de la directive 93/13.

46. Néanmoins, il est de jurisprudence constante que les modalités de sauvegarde des droits découlant du droit de l’Union, que les États membres établissent en vertu du principe de l’autonomie procédurale, doivent répondre à la double condition de ne pas être moins favorables que celles régissant des situations similaires soumises au droit interne (principe d’équivalence) et de ne pas rendre impossible en pratique ou excessivement difficile l’exercice des droits conférés aux consommateurs par le droit de l’Union (principe d’effectivité) (voir, en ce sens, arrêt du 18 février 2016, Finanmadrid EFC, C‑49/14, EU:C:2016:98, point 40 et jurisprudence citée).

47. En premier lieu, s’agissant du principe d’équivalence, il y a lieu d’observer que, selon l’état du droit interne tel qu’il est décrit dans la demande de décision préjudicielle, l’article 19, paragraphe 6, du ZPK prévoit une compensation d’office lorsqu’une clause est nulle en vertu de l’article 19, paragraphe 5, du ZPK, s’agissant de paiements effectués en vertu d’une clause qui excède le plafond du taux annuel du coût du crédit, défini à l’article 19, paragraphe 4, de celui-ci. De l’avis de la juridiction de renvoi, l’application par analogie de cet article 19, paragraphe 6, lu en combinaison avec l’article 76 du ZZD, permettrait, dans le cadre d’une procédure d’émission d’une injonction de payer fondée partiellement sur une clause abusive, de procéder également à une compensation d’office, notamment s’agissant des paiements effectués sur le fondement de cette clause, de sorte que le consommateur concerné ne devrait plus engager une procédure distincte pour obtenir la restitution des montants indûment payés. Toutefois, dans la mesure où, en répondant à une demande de renseignements posée par la Cour à cet égard, la juridiction de renvoi a exposé, d’une part, qu’il existait une jurisprudence contradictoire en ce qui concerne les conditions dans lesquelles le juge national est tenu, dans le cadre d’une procédure d’injonction, d’opérer la compensation d’office en cas de constatation d’une clause abusive telle que celle prévue à l’article 19, paragraphe 6, du ZPK et, d’autre part, qu’il existait une jurisprudence divergente en ce qui concerne la légalité de l’application par analogie de cette disposition afin d’opérer une compensation d’office dans des cas de figure qui ne donnent pas lieu uniquement à l’application de l’article 19, paragraphe 4, du ZPK, la Cour ne dispose pas d’éléments suffisants pour apprécier le respect du principe d’équivalence. Il appartiendra par conséquent au juge national, qui est seul à pouvoir avoir une connaissance directe des modalités procédurales du droit à la restitution dans son ordre juridique interne, de vérifier le respect de ce principe, en prenant en considération l’objet, la cause et les éléments essentiels de ces modalités procédurales.

48. En second lieu, s’agissant du principe d’effectivité, il ne ressort pas des renseignements communiqués par la juridiction de renvoi, et notamment de ceux portant sur l’interprétation jurisprudentielle de l’article 410 du GPK, en vertu de laquelle le contrôle de l’existence de la créance concernée échappe à la compétence du juge dans le cadre de la procédure d’injonction de payer et oblige par conséquent le consommateur concerné, pour l’exercice de son droit à la restitution intégrale qui découle de l’article 6 de la directive 93/13, à mener une procédure distincte, que cet article rend impossible ou excessivement difficile l’exercice de ce droit, quand bien même cette obligation requiert un comportement actif du débiteur concerné et la poursuite d’une procédure contradictoire. Il n’apparaît dès lors pas que lesdites modalités procédurales rendent, à elles seules, l’exercice du droit à la restitution conféré par le droit de l’Union impossible ou excessivement difficile, ce qu’il appartiendra toutefois à la juridiction de renvoi de vérifier. À cet égard, il convient, par ailleurs, de rappeler que le respect du principe d’effectivité ne saurait aller jusqu’à suppléer intégralement à la passivité totale du consommateur concerné (voir, en ce sens, arrêt du 10 septembre 2014, Kušionová, C‑34/13, EU:C:2014:2189, point 56).

49. Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, il y a lieu de répondre à la quatrième question que l’article 6, paragraphe 1, de la directive 93/13 doit être interprété en ce sens que, si cette disposition oblige le juge national, saisi d’une demande d’injonction de payer, à tirer toutes les conséquences qui, selon le droit national, découlent de la constatation du caractère abusif d’une clause figurant dans un contrat de crédit à la consommation conclu entre un consommateur et un professionnel afin de s’assurer que ce consommateur n’est pas lié par celle-ci, elle n’oblige pas, en principe, ce juge à procéder à une compensation d’office entre le paiement effectué sur le fondement de ladite clause et le solde dû en vertu de ce contrat, sous réserve toutefois du respect des principes d’équivalence et d’effectivité.

 

Sur la cinquième question :

50. À titre liminaire, il convient de relever que la juridiction de renvoi a posé la cinquième question dans l’hypothèse d’une réponse affirmative à la quatrième question.

51. Ainsi, par la cinquième question, la juridiction de renvoi demande, en substance, si, dans l’hypothèse où, en vertu de l’article 6, paragraphe 1, de la directive 93/13, lue à la lumière des principes d’équivalence et d’effectivité, le juge national, saisi d’une demande d’injonction de payer, serait obligé d’effectuer une compensation d’office entre le paiement effectué sur le fondement d’une clause abusive figurant dans un contrat de crédit à la consommation et le solde dû en vertu de ce contrat, cette disposition doit être interprétée en ce sens que ce juge serait tenu d’écarter l’application de la jurisprudence, interdisant une telle compensation d’office, d’une juridiction de degré supérieur.

52. À cet égard, force est de constater qu’il ressort de la jurisprudence de la Cour qu’il incombe à cette juridiction, eu égard au principe de primauté du droit de l’Union, d’écarter l’application de la jurisprudence d’une juridiction de degré supérieur, telle que celle en cause au principal, qui lui interdit de procéder à une compensation d’office, dans le cadre d’une injonction de payer, entre les montants payés par le débiteur concerné sur la base de clauses considérées comme étant abusives et le solde dû en vertu du contrat de crédit à la consommation concerné, dès lors que, dans la même hypothèse, cette jurisprudence ne serait pas compatible avec le droit de l’Union (voir, en ce sens, arrêt du 21 décembre 2016, Gutiérrez Naranjo e.a., C‑154/15, C‑307/15 et C-308/15, EU:C:2016:980, point 74).

53. Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, l’article 6, paragraphe 1, de la directive 93/13 doit être interprété en ce sens que, dans l’hypothèse où, en vertu de cette disposition, lue à la lumière des principes d’équivalence et d’effectivité, le juge national, saisi d’une demande d’injonction de payer, serait obligé d’effectuer une compensation d’office entre le paiement effectué sur le fondement d’une clause abusive figurant dans un contrat de crédit à la consommation et le solde dû en vertu de ce contrat, ce juge est tenu d’écarter l’application de la jurisprudence en sens contraire d’une juridiction de degré supérieur.

 

Sur les dépens :

54. La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Par ces motifs, la Cour (neuvième chambre) dit pour droit :

1) L’article 6, paragraphe 1, de la directive 93/13/CEE du Conseil, du 5 avril 1993, concernant les clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs, doit être interprété en ce sens que le juge national, saisi d’une demande de délivrance d’une injonction de payer et alors que le débiteur-consommateur concerné ne participe pas à la procédure jusqu’à la délivrance de cette injonction de payer, est tenu d’écarter d’office l’application d’une clause abusive du contrat de crédit à la consommation conclu entre ce consommateur et le professionnel concerné, sur laquelle une partie de la créance invoquée est fondée. Dans cette hypothèse, ce juge dispose de la faculté de rejeter partiellement cette demande, à la condition que ce contrat puisse subsister sans aucune autre modification ni révision ou complément, ce qu’il incombe audit juge de vérifier.

2) L’article 6, paragraphe 1, de la directive 93/13 doit être interprété en ce sens que, si cette disposition oblige le juge national, saisi d’une demande d’injonction de payer, à tirer toutes les conséquences qui, selon le droit national, découlent de la constatation du caractère abusif d’une clause figurant dans un contrat entre un consommateur et un professionnel afin de s’assurer que ce consommateur n’est pas lié par celle‑ci, elle n’oblige pas, en principe, ce juge à procéder à une compensation d’office entre le paiement effectué sur le fondement de ladite clause et le solde dû en vertu de ce contrat, sous réserve toutefois du respect des principes d’équivalence et d’effectivité.

3) L’article 6, paragraphe 1, de la directive 93/13 doit être interprété en ce sens que, dans l’hypothèse où, en vertu de cette disposition, lue à la lumière des principes d’équivalence et d’effectivité, le juge national, saisi d’une demande d’injonction de payer, serait obligé d’effectuer une compensation d’office entre le paiement effectué sur le fondement d’une clause abusive figurant dans un contrat de crédit à la consommation et le solde dû en vertu de ce contrat, ce juge est tenu d’écarter l’application de la jurisprudence en sens contraire d’une juridiction de degré supérieur.

Signatures

(*1) Langue de procédure : le bulgare.

Langue faisant foi : bulgare