CA LYON (6e ch.), 6 octobre 2022
CERCLAB - DOCUMENT N° 9867
CA LYON (6e ch.), 6 octobre 2022 : RG n° 21/01057
Publication : Judilibre
Extrait : « Toutefois, pour prétendre bénéficier des dispositions précitées, le professionnel doit justifier de ce que le contrat porte sur un objet n'entrant pas dans le champ de son activité principale et justifier de ce qu'il emploie au maximum 5 salariés.
La condition d'emploi d'un maximum de 5 salariés doit s'apprécier selon l'effectif de l'entreprise au jour de la signature du contrat, soit le 16 mai 2019. Pour prétendre justifier de ce qu'elle emploierait moins de six salariés, la société Natic Océan produit une déclaration de première embauche d'un salarié en date du 6 septembre 2019.
La société Locam répond que la Cour ne saurait se satisfaire des seules productions d'un extrait KBis, qui plus est très partiel, et de la déclaration d'embauche à l'URSSAF alors que ces pièces ne renseignent pas sur la composition de l'effectif employé par la SAS Natic Océan.
Elle rappelle que les documents sociaux et comptables attestant de la composition du personnel que doivent tenir toute entreprise abondent ; il serait donc aisé à la société Natic Océan ou son expert-comptable, de produire le registre du personnel, la déclaration sociale nominative (URSSAF), le livre-journal des salaires, etc...
Il ressort du document produit que la déclaration préalable à l'embauche du salarié X. a été enregistrée comme déclaration de première embauche dans un établissement au 6 septembre 2019. Il s'en déduit qu'à la date du contrat litigieux (16 mai 2019), la SAS Natic Océan n'employait pas de salarié dans cet établissement, en l'occurence à l'adresse du [Adresse 1] à [Localité 4].
Pour autant, le document Infogreffe versé aux débats ne permet pas de déterminer le nombre d'établissements de la société Natic Océan et, par conséquent, d'exclure que cette société ait employé des salariés dans un autre établissement, étant observé qu'elle se domiciliait à St Pol sur Mer dans un autre contrat, conclu avec une société Becom le 2 novembre 2017, qu'elle a produit par erreur.
Au demeurant, on ignore comment la société Natic Océan, exerçant depuis l'année 2016 une activité d'enseignement de la conduite nautique, pouvait dispenser des leçons de conduite sans faire appel à du personnel salarié avant septembre 2019.
Dans ces conditions, la société Natic Océan, qui n'a pas cru bon de verser de nouvelles pièces en dépit des observations pertinentes de la société Locam, ne démontre pas qu'elle n'employait pas plus de cinq salariés. Par conséquent, elle n'est pas fondée à prétendre bénéficier des dispositions précitées du code de la consommation et ne peut qu'être déboutée des demandes d'annulation du contrat et de restitution des loyers. »
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE LYON
SIXIÈME CHAMBRE
ARRÊT DU 6 OCTOBRE 2022
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 21/01057. N° Portalis DBVX-V-B7F-NMYJ. Décision du Tribunal de Commerce de SAINT-ÉTIENNE, du 26 janvier 2021 : RG : 2020J826.
APPELANTE :
LA SOCIETE NATIC OCEAN
[Adresse 1], [Localité 4], Représentée par Maître Julien MALLON de la SCP BONIFACE-HORDOT-FUMAT-MALLON, avocat au barreau de SAINT-ÉTIENNE
INTIMÉE :
LA SOCIÉTÉ LOCAM - LOCATION AUTOMOBILES MATÉRIELS
[Adresse 2], [Localité 3], Représentée par Maître Michel TROMBETTA de la SELARL LEXI, avocat au barreau de SAINT-ÉTIENNE
Date de clôture de l'instruction : 18 janvier 2022
Date des plaidoiries tenues en audience publique : 6 septembre 2022
Date de mise à disposition : 6 octobre 2022
Composition de la Cour lors des débats et du délibéré : - Dominique BOISSELET, président - Evelyne ALLAIS, conseiller - Stéphanie ROBIN, conseiller assistés pendant les débats de Sylvie GIREL, greffier.
A l'audience, un membre de la cour a fait le rapport, conformément à l'article 804 du code de procédure civile.
Arrêt contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile, Signé par Dominique BOISSELET, président, et par Sylvie GIREL, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
FAITS, PROCÉDURE ET DEMANDES DES PARTIES :
La SAS Natic Océan exerce depuis 2016 une activité d'école de conduite nautique.
Le 16 mai 2019, elle a conclu avec la SAS Locam un contrat de location de site Web fourni par la Sarl Cliqeo, moyennant 36 loyers de 485,46 euros ttc. Le site a été livré le 24 juin 2019.
Par acte d'huissier de justice du 1er décembre 2020, la SAS Locam a fait assigner la SAS Natic Océan à comparaître devant le tribunal de commerce de Saint-Étienne pour obtenir paiement des sommes de :
- 15.486,17 euros en principal, y compris indemnité et clause pénale de 10 %, outre intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure, au titre de 29 loyers impayés ou à échoir consécutifs au contrat de location de longue durée n°1503397,
- 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, avec demande de non rejet de l'exécution provisoire.
La société Locam a également demandé que soit ordonnée la restitution par la société Natic Océan du matériel objet du contrat, sous astreinte de 150 euros par jour de retard à compter du 8ème jour suivant la signification du jugement à intervenir.
La société Natic Océan ne s'est pas fait représenter à l'audience du tribunal du 5 janvier 2021.
Par jugement en date du 26 janvier 2021, le tribunal de commerce de Saint-Étienne a :
- condamné la SAS Natic Océan à payer à la SAS Locam la somme de 15.486,17 euros, y inclus la clause pénale de 10 %, outre intérêts au taux légal à dater de l'assignation,
- ordonné la restitution par la SAS Natic Océan à la SAS Locam du matériel objet du contrat, sous astreinte de 150 euros par jour de retard à compter du 8ème jour suivant la signification du jugement et ce, pour le cas où la restitution ne serait pas intervenue avant le prononcé du jugement,
- condamné la SAS Natic Océan à payer à la SAS Locam la somme de 100 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,
- dit que les dépens, dont frais de greffe taxés et liquidés à 64,46 euros, seront payés par la SAS Natic Océan à la SAS Locam,
- dit qu'en application de l'article 514 du code de procédure civile, la décision est de droit exécutoire par provision.
La SAS Natic Océan a relevé appel de cette décision par déclaration reçue au greffe de la Cour le 15 février 2021.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 18 janvier 2022.
[*]
En ses conclusions rectificatives du 1er juillet 2022, la SAS Natic Océan demande à la Cour, au visa des articles L. 221-3 et suivants du code de la consommation et 1103 du code civil, de :
- prononcer le rabat de l'ordonnance de clôture du 18 janvier 2022,
- réformer la décision entreprise et, statuant à nouveau,
à titre principal,
- constatant que le contrat Locam du 16 mai 2019 ne comporte pas les mentions et le bulletin de rétractation prévus à l'article L. 221-5 du code de la consommation,
en conséquence,
- prononcer la nullité du contrat conclu entre la société Locam et la société Natic Océan le 16 mai 2019 ;
- débouter la société Locam de l'ensemble de ses demandes ;
- condamner la société Locam à restituer l'intégralité des loyers indûment perçus ;
en tout état de cause,
- débouter la société Locam de l'ensemble de ses demandes ;
- la condamner à verser à la société Natic Océan la somme de 2.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
- la condamner enfin aux entiers dépens de l'instance, dont droit de recouvrement direct au profit de la SCP Boniface & Associés, avocats, sur son affirmation de droit, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
[*]
Par dernières conclusions du 5 août 2021, la SA Locam demande à la Cour, au visa des articles L. 221-2 4°, L. 221-3, L. 221-28 3° du code de la consommation, L. 311-2, 341-1 2° et 511-21, L. 511-3 du code monétaire et financier et le règlement CRB n° 86-21 du 24 novembre 1986 relatif aux activités non bancaires modifié par l'arrêté du 23 décembre 2013, de :
- juger non fondé l'appel de la société Natic Océan ;
- la débouter de toutes ses demandes ;
- confirmer le jugement entrepris ;
- condamner la société Natic Océan à régler à la société Locam une nouvelle indemnité de 2.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- la condamner en tous les dépens d'instance et d'appel.
[*]
Il est expressément renvoyé aux dernières conclusions des parties pour l'exposé exhaustif de leurs moyens et prétentions.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
MOTIFS DE LA DÉCISION :
Sur le rabat de la clôture :
Les conclusions de la société Natic Océan se sont trouvées affectées de graves erreurs matérielles qui ont été relevées après la clôture. Cette situation constitue une cause grave de révocation de l'ordonnance de clôture pour accueillir les conclusions rectificatives de l'appelante, l'intimée n'ayant pas formulé d'opposition à cette demande.
Sur les demandes d'annulation du contrat et de restitution des loyers perçus :
L'article L. 221-5 du code de la consommation prévoit notamment que, préalablement à la conclusion d'un contrat de vente ou de fourniture de services, le professionnel communique au consommateur, de manière lisible et compréhensible, les informations qu'il énumère dont celles relatives au droit de rétractation lorsqu'il existe ainsi qu'un formulaire type de rétractation.
Selon l'article L. 228-8 du même code, les mêmes informations doivent être remises dans le cas d'un contrat conclu hors établissement et en outre un tel contrat, pour lequel un droit de rétractation existe, doit être accompagné du formulaire type de rétractation prévu à l'article L. 221-5.
L'article L. 221-3 du même code étend l'application des dispositions précitées aux contrats conclus hors établissement entre deux professionnels, dès lors que l'objet de contrats n'entre pas dans le champ de l'activité principale du professionnel sollicité et que le nombre de salariés employés par celui-ci est inférieur ou égal à cinq.
Il est établi que le contrat a été conclu à [Localité 4], hors l'établissement de la société Locam situé à St Étienne).
Toutefois, pour prétendre bénéficier des dispositions précitées, le professionnel doit justifier de ce que le contrat porte sur un objet n'entrant pas dans le champ de son activité principale et justifier de ce qu'il emploie au maximum 5 salariés.
La condition d'emploi d'un maximum de 5 salariés doit s'apprécier selon l'effectif de l'entreprise au jour de la signature du contrat, soit le 16 mai 2019. Pour prétendre justifier de ce qu'elle emploierait moins de six salariés, la société Natic Océan produit une déclaration de première embauche d'un salarié en date du 6 septembre 2019.
La société Locam répond que la Cour ne saurait se satisfaire des seules productions d'un extrait KBis, qui plus est très partiel, et de la déclaration d'embauche à l'URSSAF alors que ces pièces ne renseignent pas sur la composition de l'effectif employé par la SAS Natic Océan.
Elle rappelle que les documents sociaux et comptables attestant de la composition du personnel que doivent tenir toute entreprise abondent ; il serait donc aisé à la société Natic Océan ou son expert-comptable, de produire le registre du personnel, la déclaration sociale nominative (URSSAF), le livre-journal des salaires, etc...
Il ressort du document produit que la déclaration préalable à l'embauche du salarié X. a été enregistrée comme déclaration de première embauche dans un établissement au 6 septembre 2019. Il s'en déduit qu'à la date du contrat litigieux (16 mai 2019), la SAS Natic Océan n'employait pas de salarié dans cet établissement, en l'occurence à l'adresse du [Adresse 1] à [Localité 4].
Pour autant, le document Infogreffe versé aux débats ne permet pas de déterminer le nombre d'établissements de la société Natic Océan et, par conséquent, d'exclure que cette société ait employé des salariés dans un autre établissement, étant observé qu'elle se domiciliait à St Pol sur Mer dans un autre contrat, conclu avec une société Becom le 2 novembre 2017, qu'elle a produit par erreur.
Au demeurant, on ignore comment la société Natic Océan, exerçant depuis l'année 2016 une activité d'enseignement de la conduite nautique, pouvait dispenser des leçons de conduite sans faire appel à du personnel salarié avant septembre 2019.
Dans ces conditions, la société Natic Océan, qui n'a pas cru bon de verser de nouvelles pièces en dépit des observations pertinentes de la société Locam, ne démontre pas qu'elle n'employait pas plus de cinq salariés. Par conséquent, elle n'est pas fondée à prétendre bénéficier des dispositions précitées du code de la consommation et ne peut qu'être déboutée des demandes d'annulation du contrat et de restitution des loyers.
Sur les autres demandes :
Sur le quantum de la créance, la société Natic Océan n'a pas actualisé ses écritures qui sont basées à tort sur le contrat de 2017 conclu avec la société Becom. Le décompte de créance de la société Locam s'avère conforme aux stipulations du contrat du 16 mai 2019 affecté au financement du contrat conclu avec la société Cliqeo. Le jugement est confirmé quant à la condamnation à paiement.
Concernant la demande de restitution du matériel sous astreinte, la société Locam n'explicite pas quel matériel aurait été confié à la société Natic Océan au titre de la location d'un site internet. Cette disposition du jugement, comme la demande initiale, paraît relever d'un 'copié-collé', elle s'avère sans objet et ne sera pas confirmée.
Le jugement est confirmé quant à l'indemnité de 100 euros allouée par le premier juge sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi que sur la charge des dépens.
Les dépens d'appel seront supportés par la société Natic Océan, partie perdante.
L'appelante conserve la charge des frais irrépétibles qu'elle a exposés et doit indemniser la société Locam de ses propres frais à hauteur de 1.500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
La Cour,
Rabat l'ordonnance de clôture du 18 janvier 2022 et fixe la clôture de la procédure à l'audience de débats du 6 septembre 2022 ;
Confirme le jugement prononcé le 26 janvier 2021 par le tribunal de commerce de Saint-Étienne, sauf en ce qu'il ordonne la restitution du matériel sous astreinte ;
Statuant à nouveau,
Déboute la SAS Locam de sa demande de restitution de matériel sous astreinte ;
Y ajoutant,
Condamne la SAS Natic Océan aux dépens d'appel ;
Condamne la SAS Natic Océan à payer à la SAS Locam la somme de 1.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT