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CA CHAMBÉRY (2e ch.), 15 décembre 2022

Nature : Décision
Titre : CA CHAMBÉRY (2e ch.), 15 décembre 2022
Pays : France
Juridiction : Chambery (CA), 2e ch.
Demande : 21/00703
Date : 15/12/2022
Nature de la décision : Réformation
Mode de publication : Judilibre
Date de la demande : 30/03/2021
Référence bibliographique : 5984 (preuves exigées du consommateur), 9744 (année lombarde)
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CERCLAB - DOCUMENT N° 9994

CA CHAMBÉRY (2e ch.), 15 décembre 2022 : RG n° 21/00703 

Publication : Judilibre

 

Extraits : 1/ « La cour relève qu'il est constant en jurisprudence que l'offre de prêt immobilier doit mentionner le taux effectif global, qui est un taux annuel, proportionnel au taux de période, lequel, ainsi que la durée de la période, doivent être expressément communiqués à l'emprunteur. Le défaut de communication du taux et de la durée de la période est sanctionné par la déchéance, totale ou partielle, du droit aux intérêts conventionnels. Toutefois, une telle sanction ne saurait être appliquée lorsque l'écart entre le taux effectif global mentionné et le taux réel est inférieur à la décimale prescrite par l'article R. 313 -1 du code de la consommation (Cass. civ. 1ère, 5 février 2020, n°10-11.939). »

2/ « Il convient de relever que l'appréciation du caractère abusif des clauses, au sens du premier alinéa de l'article L. 132-1, devenu L. 212-1, du code de la consommation, ne porte pas sur la définition de l'objet principal du contrat pour autant que ces clauses sont rédigées de façon claire et compréhensible. A cet égard, la Cour de justice de l'Union européenne a dit pour droit que l'article 4, paragraphe 2, de la directive 93/13/CEE du Conseil, du 5 avril 1993, concernant les clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs, doit être interprété en ce que la notion d'« objet principal du contrat », au sens de cette disposition, couvre une clause contractuelle insérée dans un contrat de prêt libellé en devise étrangère, n'ayant pas fait l'objet d'une négociation individuelle et selon laquelle le prêt doit être remboursé dans la même devise étrangère que celle dans laquelle il a été contracté, dès lors que cette clause fixe une prestation essentielle caractérisant ce contrat et que, par conséquent, cette clause ne peut pas être considérée comme étant abusive, pour autant qu'elle soit rédigée de façon claire et compréhensible (arrêt du 20 septembre 2017, Andriciuc e.a. : C-186/16).

En l'espèce, M. X. et Mme X. invoquent une clause de « l'offre de prêt page 6/13 » (conclusions p. 20/51) sans préciser de quel(s) contrat(s) il s'agit sachant qu'ils fondent leurs demandes sur trois contrats de prêts et quatre avenants. Il en résulte que la cour n'est pas en mesure de connaître le contrat concerné par la clause critiquée. Au demeurant, même à supposer que le contrat concerné soit identifié, la clause telle que recopiée dans les conclusions (« les intérêts sont calculés sur la base d'une année de 360 jours et d'un mois de 30 jours ») est parfaitement claire. Constituant l'objet principal du contrat elle ne saurait, en toutes hypothèses, être qualifiée d'abusive.

En conséquence, M. X. et Mme X. seront déboutés de leurs demandes au titre de la clause abusive. »

 

COUR D’APPEL DE CHAMBÉRY

DEUXIÈME CHAMBRE

ARRÊT DU 15 DÉCEMBRE 2022

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 21/00703. N° Portalis DBVY-V-B7F-GVHY. Décision déférée à la Cour : Jugement du TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de BONNEVILLE en date du 5 mars 2021 : R.G. n° 19/00962.

 

Appelante :

SA CRÉDIT AGRICOLE DES SAVOIE

dont le siège social est sis [Adresse 9] prise en la personne de son représentant légal, Représentée par Maître Christian FORQUIN, avocat postulant au barreau de CHAMBÉRY et la SCP BRIFFOD/PUTHOD/CHAPPAZ, avocat plaidant au barreau de BONNEVILLE

 

Intimés :

M. X.

né le [Date naissance 1] à [Localité 11], demeurant [Adresse 10]

Mme X.

née le [Date naissance 6] à [Localité 11], demeurant [Adresse 4]

Représentés par la SCP LE RAY BELLINA DOYEN, avocat postulant au barreau de CHAMBÉRY et la SELARL DEJEAN-PRESTAIL, avocat plaidant au barreau de GRENOBLE

 

COMPOSITION DE LA COUR : Lors de l'audience publique des débats, tenue le 25 octobre 2022 avec l'assistance de Madame Sylvie LAVAL, Greffière

Et lors du délibéré, par : - Madame Alyette FOUCHARD, Conseillère faisant fonction de Présidente, à ces fins désignée par ordonnance de Madame la Première Présidente, - Monsieur Edouard THEROLLE, Conseiller, - Monsieur Fabrice GAUVIN, Conseiller

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

EXPOSÉ DU LITIGE :

Par acte sous seing privé du 21 mai 2011, la société crédit agricole des Savoie a consenti à M. X. et Mme X., un prêt immobilier n° 41YYYY8, d'un montant de 233.891 euros au taux contractuel de 4,15 % remboursable sur une durée de 300 mois.

Par avenant du 26 novembre 2014, le taux contractuel a été ramené à 3,45 %.

Par acte sous seing privé du 12 octobre 2011, la société crédit agricole des Savoie a consenti aux mêmes emprunteurs un second prêt immobilier n° 46ZZZ6 d'un montant de 168.000 euros au taux contractuel de 4,30 % également remboursable sur une durée de 300 mois.

Par avenant du 30 novembre 2014, le taux contractuel a été ramené à 3,45 %.

À compter du mois d'août 2013, les emprunteurs ont cessé d'honorer leurs échéances.

Par acte du 26 mai 2017, M. X. et Mme X. ont assigné la société crédit agricole des Savoie aux fins de suspension des échéances des prêts.

Par jugement du 25 avril 2018, ils ont été déboutés de leurs demandes.

Après avoir vainement mis en demeure les débiteurs de s'acquitter des échéances échues impayées, la société crédit agricole des Savoie a prononcé la déchéance du terme.

Par actes des 29 et 30 juillet 2019, la société crédit agricole des Savoie a assigné M. X. et Mme X. en paiement.

Par jugement contradictoire du 5 mars 2021, le tribunal judiciaire de Bonneville a :

- déclaré irrecevable la demande M. X. et Mme X. en exonération des intérêts majorés,

- dit que les clauses figurant aux contrats de prêt n° 41YYY8 et n° 46ZZZ6 fixant en cas de défaillance de l'emprunteur avec déchéance du terme, une indemnité égale à 7 % des sommes dues à payer par celui-ci, sont des clauses pénales revêtant un caractère manifestement excessif, en conséquence, a fixé l'indemnité au taux de 3 % des sommes dues,

- dit que M. X. et Mme X. sont redevables envers la société crédit agricole des Savoie de la somme de 222.224,77 euros avec intérêts contractuels à compter du 6 février 2019 au titre du prêt n° 41YYYY8,

- dit que M. X. et Mme X. sont redevables envers la société crédit agricole des Savoie de la somme de 162.676.54 euros avec intérêts contractuels à compter du 6 février 2019 au titre du prêt n° 46ZZZ6,

- dit que la société crédit agricole des Savoie est redevable envers M. X. et Mme X. de la somme de 100.000 euros à titre de dommages et intérêts pour manquement à l'obligation de mise en garde,

- ordonné la compensation judiciaire entre lesdistes sommes et par conséquent,

- condamné M. X. et Mme X. à verser la somme de 284.901,31 euros, outre intérêts contractuels à compter du 6 février 2019,

- débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,

- dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné M. X. et Mme X. aux dépens dont distraction au profit de la SCP Briffod, Puthod, Chappaz, avocat.

Par déclaration du 30 mars 2021, la société crédit agricole des Savoie a interjeté appel du jugement.

[*]

Dans ses conclusions notifiées par voie électronique le 21 décembre 2021, auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé des moyens, la société crédit agricole des Savoie demande à la cour de :

- confirmer le jugement du 5 mars 2021 en ce qu'il a :

- débouté M. X. et Mme X. de leurs demandes de nullité des contrats et avenants et de toutes leurs autres demandes fondées sur le non-respect du délai de réflexion de 10 jours,

- rejeté leurs demandes fondées sur l'existence d'une erreur affectant le TEG à raison du défaut de prise en compte du coût de l'assurance, de la prétendue absence de prise en compte d'une période d'anticipation, et sur le défaut de mention de la durée période,

- rejeté leurs demandes en raison d'un défaut d'information sur l'assurance,

- rejeté leurs demandes fondées sur le manquement de la banque à son obligation d'information et de conseil,

- le réformer pour le surplus,

- dire et juger qu'il n'y a pas lieu à réduction des indemnités forfaitaires réclamées au titre de deux prêts objets de la présente procédure,

- dire et juger que le crédit agricole de Savoie n'a pas manqué à son obligation de mise en garde,

- débouter M. X. et Mme X. de l'ensemble de leurs prétentions,

- condamner solidairement M. X. et Mme X. à lui payer les sommes suivantes :

* 230.183,37 euros outre intérêts à 3,45 % à compter du 6 février 2019 au titre du prêt n° 41YYY8,

* 168.513.28 euros, outre intérêts à 3,45 % à compter du 6 février 2019 au titre du prêt n° 46ZZZ6,

- les condamner solidairement à lui payer la somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- s'entendre condamner solidairement aux entiers dépens dont distraction sera ordonnée au profit de maître Forquin en application de l'article 699 du code de procédure civile.

[*]

Dans leurs conclusions notifiées par voie électronique le 7 septembre 2022, auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé des moyens, Monsieur X. et Madame X. demandent à la cour de :

- rejeter l'intégralité des demandes, fins et prétentions du crédit agricole des Savoie,

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a :

- qualifié de clauses pénales les indemnités de résiliation de 7 %, et les a jugées manifestement excessives,

- retenu un manquement du crédit agricole des Savoie à son devoir de conseil, et l'a condamné à les indemniser du préjudice en découlant.

- le réformer et l'infirmer pour le surplus, et notamment en ce qu'il a limité cette condamnation indemnitaire, et la réduction des clauses pénales, et en ce qu'il a rejeté le surplus de leurs demandes,

statuant de nouveau pour ce faire,

- juger irrecevables comme constituant des prétentions nouvelles en cause d'appel, les demandes du crédit agricole des Savoie tendant à contester sa responsabilité et sa condamnation à dommages et intérêts, et sa demande tendant à voir juger qu'ils seraient des emprunteurs avertis,

- juger que le crédit agricole des Savoie ne justifie pas du respect des délais de réflexion dont ils bénéficiaient,

- prononcer l'annulation des trois crédits et de leurs avenants respectifs,

en conséquence,

- condamner le crédit agricole des Savoie à leur rembourser l'ensemble des sommes versées au titre de leurs trois emprunts, et ce depuis l'origine,

- condamner le crédit agricole des Savoie à rembourser :

- à M. X. la somme de 4.143.15 euros au titre des cotisations d'assurances indûment prélevées postérieurement à la déchéance du terme des deux prêts sous seing privé,

- à Mme X. la somme de 4.143.15 euros au titre des cotisations d'assurances indûment prélevées postérieurement à la déchéance du terme des deux prêts sous seing privé,

- ou subsidiairement 8.286,30 euros à M. X. et Mme X., sommes arrêtées provisoirement à novembre 2022 à parfaire

- ordonner la compensation de ces sommes avec toute condamnation prononcée à l'encontre des intimés,

- enjoindre au crédit agricole des Savoie de cesser tout prélèvement au titre de ces deux crédits, sous astreinte de 500 euros par prélèvement injustifié, outre condamnation à son remboursement,

- qualifier les intérêts de retard et les indemnités de résiliation réclamées par le crédit agricole des Savoie de clauses pénales manifestement excessives,

en conséquence,

- les réduire à néant, et réduire tout intérêt de retard à venir à zéro à ce titre également,

- juger que le TEG mentionné dans chacune des offres de prêt et avenants à eux accordés par le crédit agricole des Savoie sont erronés,

- juger que le TEG étant calculé sur 360 jours la clause afférente constitue une clause abusive,

- réputer en conséquence non écrite les clauses de fixation du TEG dans chacun des contrats,

en conséquence, pour l'une quelconque de ces raisons,

- prononcer la nullité de tout intérêt au taux contractuel, pour chacun des contrats et de leurs avenants,

à titre subsidiaire,

- prononcer la déchéance de tout droit à intérêts depuis l'origine de chacun des trois contrats liant les parties,

à titre infiniment subsidiaire,

- juger les taux mentionnés et appliqués au titre de l'emprunt initial de 2010 et de son dernier réaménagement en 2014 usuraires et en conséquence les ramener au seul taux valable,

en conséquence, en suite de l'une quelconque de ces condamnations,

- imputer tout trop perçu au titre des contrats de crédit initiaux sur les sommes restant dues au titre des derniers avenants signés et encore en vigueur,

- enjoindre le crédit agricole des Savoie de verser aux débats un tableau d'amortissement rectificatif pour chacun des ces emprunts et avenants,

à titre infiniment subsidiaire,

- ordonner une expertise judiciaire aux frais du crédit agricole des Savoie, et désigner tel expert qu'il plaira à la cour ayant pour mission l'analyse financière des contrats :

- ordonner la réouverture des débats pour statuer sur les demandes relatives au TEG,

- prononcer la nullité de toute déchéance du terme prononcée par le crédit agricole des Savoie, ou à tout le moins les juger inopposables à Monsieur X. et Madame X.,

sur la responsabilité de la banque,

- juger que le crédit agricole des Savoie a commis de nombreuses fautes dans l'octroi de ses concours et sa proposition d'assurance,

- juger que ces manquements ont causé différents préjudices à M. X. et Mme X.,

réformant cependant le jugement sur l'indemnisation allouée, et statuant de nouveau,

- condamner le crédit agricole des Savoie à leur payer les sommes suivantes :

* 200.000 euros en réparation du préjudice subi dans le défaut de conseil quant à l'assurance groupe pour le prêt n° 41YYYY8,

* 180.000 euros en réparation du préjudice subi dans le défaut de conseil quant à l'assurance groupe pour le prêt n° 46ZZZ6,

* 383.750 euros en réparation du préjudice subi dans l'octroi de ses différents concours.

en tout état de cause,

- ordonner la mainlevée de toute inscription d'hypothèque, conventionnelle, ou judiciaire, prise au profit du crédit agricole des Savoie sur le bien immobilier situé sur la commune de [Localité 13] (74) :

- sis [Adresse 10], cadastrés section H n° [Cadastre 5], pour 15 ca, n° [Cadastre 7] pour 19 ca et n° [Cadastre 8] pour 11 a et 81 ca,

- sis [Adresse 3], cadastrés section A n° [Cadastre 2] pour 68 ca, lot-volume 2000, soit le lot n° 8002 (un appartement) et les 623/1000e.

- condamner le crédit agricole des Savoie à donner mainlevée de ces inscriptions, à ses frais, dans les 15 jours de la décision à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jours de retard,

- juger que toute condamnation au profit d'un seul des emprunteurs profitera à l'autre du fait de leur solidarité,

- ordonner la compensation de toutes condamnations réciproques qui seraient ordonnées,

- écarter l'application de la majoration des intérêts prévue par l'article L. 313-3 du code monétaire et financier,

- leur allouer les plus larges délais de paiement,

en conséquence,

- ordonner la suspension de toutes leurs obligations au titre des deux prêts sous seing privés durant 24 mois,

- ordonner la réduction de tout intérêt qui resterait dû (après déchéance ou réduction) au seul taux de 0,87 % l'an, sans variation,

- ordonner l'imputation de tout versement sur le capital en priorité,

- condamner le crédit agricole des Savoie à leur payer la somme de 3.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner le crédit agricole des Savoie aux entiers dépens de première instance et d'appel,

- leur donner acte de ce qu'ils joignent aux présentes conclusions le bordereau de communication des pièces qu'ils verseront aux débats.

[*]

Par ordonnance du 7 juillet 2022, le conseiller chargé de la mise en état a débouté M. X. et Mme X. de leur demande d'expertise et les a condamnés aux dépens de l'incident.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 26 septembre 2022.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIFS DE LA DÉCISION :

1. Sur le caractère nouveau des demandes de la société crédit agricole des Savoie relatives à sa responsabilité :

M. X. et Mme X. exposent que la société crédit agricole des Savoie fonde la quasi totalité de son appel sur la contestation de sa responsabilité alors qu'il ne l'aurait pas contestée en première instance. Ils prétendent qu'il s'agit de prétentions nouvelles irrecevables en cause d'appel.

L'article 564 du code de procédure civile dispose que, à peine d'irrecevabilité, les parties ne peuvent, par principe, soumettre à la cour de nouvelles prétentions.

En l'espèce la simple lecture du jugement déféré permet de constater que la société crédit agricole des Savoie sollicitait auprès du premier juge le débouté des consorts X. de toutes leurs demandes (jugement p. 3) parmi lesquelles figuraient les demandes relatives à la responsabilité de la banque. Ils n'apportent donc rien de nouveau devant la cour en continuant à solliciter le rejet de ces demandes. Au demeurant, la société crédit agricole des Savoie expose en réalité, dans ses conclusions, des moyens au soutien d'une prétention tendant au rejet de la mise en cause de sa responsabilité. Enfin, à supposer qu'il s'agisse de prétentions nouvelles, l'article 564 du code de procédure civile permet, en toutes hypothèses, la possibilité de soumettre à la cour des prétentions nouvelles pour « faire écarter les prétentions adverses ».

Il en résulte que les moyens et demandes de la société crédit agricole des Savoie se rapportant à sa responsabilité civile sont recevables.

 

2. Sur la nullité des contrats de prêts tirés du non-respect du délai de 10 jours et les demandes subséquentes :

A titre préalable la cour observe que l'action d'origine de la société crédit agricole des Savoie portait sur le paiement des sommes dues après déchéance du terme au titre de deux contrats de prêt en date des mois de mai et d'octobre 2011. Or M. X. et Mme X. sollicitent également l'annulation d'un troisième contrat de prêt accordé par la société crédit agricole des Savoie le 5 février 2009 pour un montant de 187.352 euros remboursable en 335 mensualités de 1.111,44 euros et une mensualité de 1.108,49 euros moyennant un taux d'intérêt annuel de 6,4103 % et modifié par avenant en 2010, puis 2014. Ils sollicitent également l'annulation des deux avenants aux contrats de 2011 souscrits en 2014. Il est constant que la question de ce troisième contrat et de ses avenants a été dans le débat lors de la première instance.

L'article L. 312-10 du code de la consommation dans sa version applicable aux trois contrats litigieux (aujourd'hui article L. 313-34) dispose que : « l'envoi de l'offre oblige le prêteur à maintenir les conditions qu'elle indique pendant une durée minimale de trente jours à compter de sa réception par l'emprunteur.

L'offre est soumise à l'acceptation de l'emprunteur et des cautions, personnes physiques, déclarées. L'emprunteur et les cautions ne peuvent accepter l'offre que dix jours après qu'ils l'ont reçue. L'acceptation doit être donnée par lettre, le cachet de la poste faisant foi ».

Il est constant en jurisprudence (Cass. civ. 1ère,1er juillet 2015, n°14-12.432) que la charge de la preuve du non-respect du délai de réflexion de 10 jours prévu par le texte visé ci-dessus incombe à celui qui l'invoque et que l'appréciation des moyens de preuve relève du pouvoir souverain des juges du fond. En l'espèce M. X. et Mme X. n'apportent aucun élément de nature à montrer que le délai de réflexion de 10 jours pour chacun des contrats ou pour leurs avenants n'a pas été respecté Au contraire, la société crédit agricole des Savoie démontre pour sa part, pour les deux prêts et les deux avenants de 2011 et 2014 que ce délai a bien été respecté (pièce 27 à 34).

En conséquence le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a débouté M. X. et Mme X. de leur demande en nullité des contrats et des demandes subséquentes fondées sur le non-respect du délai de réflexion de 10 jours.

 

3. Sur les erreurs affectant les TEG des différents prêts :

M. X. et Mme X. se prévalent de quatre erreurs affectant le TEG les différents prêts et avenants : l'absence de prise en compte des frais d'assurance obligatoire, l'absence précision de la durée de période du taux de période, le fait que le calcul du TEG a été opéré sur le fondement de l'année dite lombarde et l'absence de prise en compte des périodes d'anticipation.

Il convient de rappeler que, de jurisprudence établie, si une erreur affectant le TEG est constatée, la sanction applicable consiste en une déchéance totale ou partielle du droit aux intérêts et non en la nullité de la clause de stipulation des intérêts. Par conséquent, le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a débouté M. X. et Mme X. de leurs demandes en nullité des intérêts contractuels. Il convient, en revanche, d'examiner les arguments au soutien de la demande en déchéance du droit aux intérêts.

 

a. Sur l'intégration des frais d'assurance :

Les emprunteurs estiment que l'assurance groupe fait partie des conditions résolutoires visées dans les offres de prêts et que le caractère obligatoire de la souscription s'adresse bien aux deux emprunteurs. Ils exposent encore que la banque ne justifie pas d'une ventilation entre une partie de l'assurance qui serait obligatoire et une autre qui serait facultative et prétendent que l'assurance décès était couplée à l'assurance PTIA.

La banque leur oppose le fait que l'assurance n'était obligatoire que pour un emprunteur et non pour son co-emprunteur, de sorte que le calcul de son TEG, lequel intègre le coût de l'assurance pour un emprunteur ne comporte pas d'erreur. M. X. et Mme X. répliquent qu'ils sont tous deux 'emprunteurs' et non 'co-emprunteurs' comme le montrent les contrats litigieux.

La cour observe que la notice d'information jointe au contrat de prêt, qui a été émargée par les emprunteurs lesquels ont par ailleurs déclaré, dans l'acceptation de l'offre, que le contrat d'assurance leur a été remis et qu'ils ont pris connaissance du contenu du feuillet d'information de la convention d'assurance (pièce n° 1 pour le contrat accepté le 21 mai 2011 / pièce n° 6 pour le contrat accepté le 12 octobre 2011 / pièce n°38 pour l'offre acceptée le 17 février 2009). Les notices indiquent très clairement que l'assurance n'est obligatoire que si le souscripteur est « l'unique emprunteur » et qu'elle est facultative si le co-emprunteur est assuré pour le même financement. Il convient de noter que, même si les contrats désignent, par convention et afin de simplifier la forme du contrat, plusieurs emprunteurs sous le vocable « emprunteur » et non « co-emprunteur » il ne s'agit bien là que d'une facilité de langage. En effet la notion de co-emprunteur ne peut s'entendre que d'au moins deux emprunteurs qui s'engagent ensemble, ce qui est le cas en l'espèce. En outre, les formulaires d'acceptation précisent expressément que M. X. s'engage comme « co-emprunteur » et Mme X. comme « emprunteur ». Il n'existe donc aucune ambiguïté en la matière et c'est à raison que le tribunal a considéré que l'assurance n'était obligatoire que pour l'un des deux et que la banque n'a pas commis d'erreur dans le calcul de son TEG en ce qui concerne ce point.

 

b. Sur l'absence de précision de la durée de la période ayant permis le calcul du taux de période :

La cour relève qu'il est constant en jurisprudence que l'offre de prêt immobilier doit mentionner le taux effectif global, qui est un taux annuel, proportionnel au taux de période, lequel, ainsi que la durée de la période, doivent être expressément communiqués à l'emprunteur. Le défaut de communication du taux et de la durée de la période est sanctionné par la déchéance, totale ou partielle, du droit aux intérêts conventionnels. Toutefois, une telle sanction ne saurait être appliquée lorsque l'écart entre le taux effectif global mentionné et le taux réel est inférieur à la décimale prescrite par l'article R. 313 -1 du code de la consommation (Cass. civ. 1ère, 5 février 2020, n°10-11.939).

En l'espèce, les emprunteurs n'exposent pas, dans leurs écritures sous l'intitulé « absence de précision de la durée de la période sur laquelle le taux de période est calculé » (conclusions p.15 à 17) en quoi, à la supposer avérée, l'absence de mention de la période aurait entraîné une erreur supérieure à la décimale. Ils se contentent en effet de développer des arguments tendant à montrer que la période utilisée n'est pas mentionnée. Au demeurant, comme cela sera relevé ci-dessous, les rapports privés qu'ils versent ne démontrent pas que les erreurs invoquées ont entraîné une erreur supérieure à la décimale.

 

c. Sur le calcul du TEG sur 360 jours et le taux de période erroné :

La cour relève qu'il est constant en jurisprudence (Cass. civ. 1re, 6 janvier 2021, n° 18-25.865) que, à la supposer établie, l'inexactitude du taux de période n'est pas de nature à entraîner la déchéance du droit aux intérêts. En effet, si une erreur affectant le taux de période peut être sanctionnée par la déchéance du droit aux intérêts, ce n'est que lorsqu'elle emporte une incidence sur le TEG mentionné dans l'offre. C'est donc au regard de l'éventuelle incidence sur le TEG que l'erreur dans le taux et la durée de la période se trouve sanctionnée. Il en est de même en ce qui concerne une erreur de TEG qui serait due à l'utilisation, pour le calcul, de l'année dite lombarde (par ex. Cass. civ. 1ère, 11 mars 2020, n° 19-10.875).

La cour observe qu'il est tout aussi constant en jurisprudence que le défaut de communication du taux et de la durée de la période est sanctionné par la déchéance, totale ou partielle, du droit aux intérêts conventionnels à la condition cependant qu'il soit établi que la différence entre le taux effectif global mentionné et le taux réel est supérieur à la décimale prescrite par l'article R. 313-1 du code de la consommation dans sa rédaction applicable au jour des contrats (Cass. civ. 1ère, 5 février 2020, n° 19-11.939).

Il incombe aux emprunteurs qui l'invoquent de démontrer que les erreurs invoquées sur le TEG entraînent une différence de plus d'une décimale entre le taux appliqué et le taux revendiqué. En l'espèce M. X. et Mme X. se fondent sur trois rapports établis non contradictoirement à l'égard de la banque (pièces 6, 7 et 8). Or aucun d'entre eux n'indique que les erreurs invoquées sont supérieures à la décimale comme cela a été très justement relevé par le tribunal. Ainsi, et sans prendre en compte les hypothèses liées au défaut d'intégration du coût de l'assurance emprunteur, argument écarté comme précisé ci-dessus, il résulte des rapports que :

- pour le contrat de prêt de février 2009 le taux affiché est de 0,5342 et le taux revendiqué de 0,4965 (p. 32/47), pour son avenant du 22 octobre 2010 le taux affiché est de 0,4059 et le taux revendiqué de 0,4003 (p. 34/47) et pour son avenant du 28 novembre 2014 aucune comparaison n'est précisée (pièce n°6) ;

- pour le contrat de prêt du 29 avril 2011 le taux affiché est de 0,4025 et le taux revendiqué de 0,3895 (p. 32/44) et pour son avenant du 29 octobre 2014 aucune comparaison n'est précisée ;

- pour le contrat de prêt du 16 septembre 2011 le taux affiché est de 0,4028 et le taux revendiqué de 0,3973 (p. 32/44) et pour son avenant du 29 octobre 2014 aucune comparaison n'est précisée.

 

d. Sur l'absence de prise en compte des périodes d'anticipation :

La cour observe que, si les contrats litigieux prévoient une durée maximale d'anticipation de 24 mois, ainsi que le coût maximal de l'anticipation, ils visent également et surtout la période prévue de 300 mois « hors anticipation » (pièces banque n°1 et 6) pour les deux prêts les plus récents et de 336 mois « hors anticipation » (pièce débiteur n°1) pour le prêt le plus ancien. Pour les trois prêts, les tableaux d'amortissement joints ne montrent aucune période d'anticipation et M. X. et Mme X. n'apportent aucune démonstration de ce qu'ils auraient eu recours à la possibilité d'anticipation prévue aux contrats, laquelle doit dès lors être considérée comme purement théorique.

Ainsi, c'est par une exacte analyse des pièces versées que le tribunal a rejeté les arguments fondés sur l'absence de prise en compte dans le calcul du TEG de chaque prêt des intérêts et frais liés à une période d'anticipation dont la réalité n'est pas démontrée. En outre, contrairement à ce qu'indiquent les écritures de M. X. et Mme X. (conclusions p. 20) le tribunal n'a pas motivé sa décision en exposant que les tableaux d'amortissement définitifs ne sont pas produits. Il résulte en effet du jugement que les tableaux d'amortissement sont annexés aux prêts et que les consorts X. y renvoient alors qu'ils ne prévoient pas de période d'anticipation.

Le jugement entrepris sera donc confirmé en ce qu'il a débouté M. X. et Mme X. de leurs demandes en déchéance du droit aux intérêts tirés des erreurs dans le calcul du TEG.

 

4. Sur la demande d'expertise :

Il résulte des développements précédents que le calcul du TEG des prêts ne comporte pas d'erreur en ce qui concerne l'intégration des frais d'assurance ou des intérêts et frais intercalaires et que, selon les propres pièces produites par les emprunteurs, il n'existe pas, pour les autres points invoqués, d'erreur supérieure à la décimale. En conséquence, aucun élément ne permet de venir appuyer la demande d'expertise formulée par M. X. et Mme X. Ils seront donc déboutés de cette demande.

 

5. Sur la déchéance du droit aux intérêts tirée du défaut de remise de la notice d'assurance :

La cour observe que les notices d'assurance versées au dossier ont été émargées par les emprunteurs dans le contrat accepté le 17 février 2009 (pièce banque n° 38), dans le contrat accepté le 21 mai 2011 (pièce n°1) et dans le contrat accepté le 12 octobre 2011 (pièce n°6). Les emprunteurs ont en outre reconnu, pour chaque contrat, avoir reçu et être resté en possession d'un exemplaire de la notice d'assurance. Aucune irrégularité ne peut donc ici être relevée.

En ce qui concerne les avenants il est précisé dans ces documents qu'ils n'emportent pas novation et ne modifient que les clauses concernées. Or, l'assurance n'est pas visée en tant qu'objet des avenants. Il n'existe donc pas davantage d'irrégularité en ce qui concerne les avenants.

Par conséquent, le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a débouté M. X. et Mme X. de leur demande en déchéance du droit aux intérêts tirée du défaut de remise de la notice d'assurance.

 

6. Sur le caractère abusif de la clause lombarde :

Il convient de relever que l'appréciation du caractère abusif des clauses, au sens du premier alinéa de l'article L. 132-1, devenu L. 212-1, du code de la consommation, ne porte pas sur la définition de l'objet principal du contrat pour autant que ces clauses sont rédigées de façon claire et compréhensible. A cet égard, la Cour de justice de l'Union européenne a dit pour droit que l'article 4, paragraphe 2, de la directive 93/13/CEE du Conseil, du 5 avril 1993, concernant les clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs, doit être interprété en ce que la notion d'« objet principal du contrat », au sens de cette disposition, couvre une clause contractuelle insérée dans un contrat de prêt libellé en devise étrangère, n'ayant pas fait l'objet d'une négociation individuelle et selon laquelle le prêt doit être remboursé dans la même devise étrangère que celle dans laquelle il a été contracté, dès lors que cette clause fixe une prestation essentielle caractérisant ce contrat et que, par conséquent, cette clause ne peut pas être considérée comme étant abusive, pour autant qu'elle soit rédigée de façon claire et compréhensible (arrêt du 20 septembre 2017, Andriciuc e.a. : C-186/16).

En l'espèce, M. X. et Mme X. invoquent une clause de « l'offre de prêt page 6/13 » (conclusions p. 20/51) sans préciser de quel(s) contrat(s) il s'agit sachant qu'ils fondent leurs demandes sur trois contrats de prêts et quatre avenants. Il en résulte que la cour n'est pas en mesure de connaître le contrat concerné par la clause critiquée. Au demeurant, même à supposer que le contrat concerné soit identifié, la clause telle que recopiée dans les conclusions (« les intérêts sont calculés sur la base d'une année de 360 jours et d'un mois de 30 jours ») est parfaitement claire. Constituant l'objet principal du contrat elle ne saurait, en toutes hypothèses, être qualifiée d'abusive.

En conséquence, M. X. et Mme X. seront déboutés de leurs demandes au titre de la clause abusive.

 

7. Sur le taux d'usure du prêt de 2009 et de son dernier avenant de 2014 :

M. X. et Mme X. estiment que les TEG de ces deux contrats sont supérieurs au taux d'usure alors applicables. Sur la base des documents fournis par les emprunteurs, la cour observe qu'au 4ème semestre 2009 le taux d'usure est fixé à 6,57 % s'agissant d'un prêt immobilier à taux fixe (pièce n°9). Il résulte en outre de l'avis du 22 décembre 2008 concernant l'usure que le seuil d'usure applicable aux prêts immobiliers à taux fixe est de 7,80 % au 1er janvier 2009. Or, le contrat issu de l'offre du 5 février 2009 prévoit un TEG égal à 6,4103 % (pièce emprunteur n°1).

De même, les intimés précisent que le taux d'usure est de 4,85 % pour le même type de prêt pour le 4ème semestre 2014 (pièce n°10). Or le TEG prévu par l'avenant proposé le 29 octobre 2014 est fixé à 4,20 %.

Les taux critiqués sont donc inférieurs au taux d'usure, la cour ne pouvant, comme le font les emprunteurs, se fonder sur un TEG estimé réel par eux dans la mesure où il a été vu ci-dessus qu'il n'existe pas d'erreur de calcul.

En conséquence M. X. et Mme X. seront déboutés de leurs demandes au titre du taux d'usure.

 

8. Sur la non-conformité des contrats de prêts et de leurs avenants à l'article L. 312-1 et suivant du code de la consommation dans leurs versions applicables :

M. X. et Mme X. précisent dans leurs écritures (conclusions p 23) que « les offres de prêts et avenants produits ne sont pas conformes aux dispositions des articles L. 312-1 et suivants du code de la consommation, dans leurs versions applicables ». Ils en déduisent que « Ces différentes irrégularités seront justement sanctionnées par la déchéance de tout droit à intérêts ».

Aux termes de l'article 954 du code de procédure civile, la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n'examine les moyens au soutien des prétentions que s'ils sont invoqués dans la discussion.

En l'espèce force est de constater que les intimés ne développent aucun moyen pour expliquer sur quels point précis les offres de prêts ou les avenants ne seraient pas conformes à la loi applicable au temps de leur émission.

 

9. Sur la nullité des déchéances du terme :

La cour observe que l'argumentation des emprunteurs se fonde sur le fait qu'ils ont invoqué la nullité des stipulations d'intérêts et, subsidiairement la déchéance du droit aux intérêts. Cela aurait, selon eux, pour conséquence que les sommes dues ne correspondraient plus à celles que réclamait la banque, rendant les mises en demeure préalables et obligatoires, irrégulières.

Dans la mesure où la cour a rejeté, par les motifs développés ci-dessus, les demandes en nullité de stipulation des intérêts et en déchéance du droit aux intérêts, aucune irrégularité des déchéances du terme prononcées ne peut être relevée.

En conséquence, le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a débouté M. X. et Mme X. de leur demande au titre de la nullité des déchéances du terme.

 

10. Sur les cotisations d'assurance indûment prélevées :

La cour observe que si des développements figurent à ce titre dans les motifs des conclusions de M. X. et Mme X. (p.24 et 25), aucune demande n'est formulée à ce titre dans le dispositif. Dès lors, par application de l'article 954 du code de procédure civile, la cour ne répondra pas à cette argumentation qui ne conduit à aucune prétention.

 

11. Sur les clauses pénales :

L'article 1152 ancien du code civil, applicable aux présents contrats, dispose que : « Lorsque la convention porte que celui qui manquera de l'exécuter payera une certaine somme à titre de dommages-intérêts, il ne peut être alloué à l'autre partie une somme plus forte, ni moindre. Néanmoins, le juge peut, même d'office, modérer ou augmenter la peine qui avait été convenue, si elle est manifestement excessive ou dérisoire. Toute stipulation contraire sera réputée non écrite ».

M. X. et Mme X. exposent que les intérêts de retard doivent être analysés en clauses pénales manifestement excessives. Il en serait de même des indemnités de résiliation prévues au contrat. Il est constant que leur demande est limitée aux seuls prêts visés dans l'assignation (conclusions p. 26/51) c'est-à-dire, ceux qui ont été souscrits en 2011 et portant les numéros 41YYYY8 et 46ZZZ6.

 

a. Sur les intérêts de retard :

Il est constant en jurisprudence qu'une clause selon laquelle, dans un prêt d'argent, le taux sera majoré en cas de défaillance de l'emprunteur constitue une clause pénale (Cass. com. 18 mai 2005, n° 03-10.508). Elle ne saurait toutefois être réduite que si elle apparaît comme étant manifestement excessive conformément à la règle ci-dessus rappelée.

Or il résulte des pièces produites par la banque que, à la date du 15 novembre 2018 (pièce banque n°21) :

- pour le prêt n° 41YYY8, les intérêts de retard s'élèvent à la somme de 376,95 euros pour un capital emprunté de 233 891 euros,

- pour le prêt n° 46ZZZ6, les intérêts de retard s'élèvent à la somme de 269,25 euros pour un capital emprunté de 167.736 euros.

De même, à la date du 14 janvier 2019 (pièce banque n°22 à 24) :

- pour le prêt n° 41YYY8 les intérêts de retard s'élèvent à la somme de 630,42 euros,

- pour le prêt n° 46ZZZ6, les intérêts de retard s'élèvent à la somme de 450,30 euros.

Par conséquent, les sommes réclamées ne sauraient être qualifiées d'excessives au regard de l'importance du capital emprunté et du montant des sommes à échoir en janvier 2019 (213 187,79 euros pour le prêt n° 41YYY8 et 156 341,06 euros pour le prêt n° 46ZZZ6).

 

b. Sur l'indemnité de résiliation :

La société crédit agricole des Savoie réclame à M. X. et Mme X. une indemnité forfaitaire de 13.927,55 euros au titre du prêt n° 41YYY8 (pièce banque n°24) et de 10.2131,76 euros au titre du prêt n° 46ZZZ6 (pièce banque n°25). Ces sommes représentent, conformément aux dispositions contractuelles 7 % du montant du capital restant dû.

Il est constant que la disproportion d'une clause pénale s'apprécie nécessairement in concreto en comparant le montant de la pénalité et le préjudice effectivement subi par celui qui l'invoque. En l'espèce, une pénalité d'un tel montant pour un capital restant dû de plus de 198.000 euros dans le premier cas et de plus de 145.900 euros dans le second, avec des intérêts moratoires portés à 6,45 %, dans des contrats où la rémunération due par les emprunteurs est calculée sur un taux fixe de 3,45 % l'an après conclusion des avenants, apparaît manifestement excessive en présence d'une situation nécessairement obérée des débiteurs au moment où ils cessent les paiements. En conséquence, la clause pénale sera ramenée à la somme de 3.000 euros au titre du prêt n° 41YYY8 et de 1 800 euros au titre du prêt n° 46ZZZ6.

 

12. Sur les sommes dues par M. X. et Mme X. :

Il résulte de ce qui précède et des décomptes produits par la société crédit agricole des Savoie que M. X. et Mme X. sont solidairement redevables des sommes suivantes :

- pour le prêt n° 41YYY8 :

- 8.179,35 euros au titre des échéances échues impayées,

- 8.185,81 euros au titre des intérêts échus impayés,

- 630,42 euros au titre des intérêts moratoires,

- 198.965 euros au titre du capital restant dû,

- 295,24 euros au titre des intérêts arrêtés au 5 février 2019

- 3.000 euros au titre de la clause pénale,

soit la somme totale de 219.255,82 euros, outre intérêts au taux contractuel de 3,45 % l'an sur la somme de 198 965 euros à compter du 6 février 2019 ;

- pour le prêt n° 46ZZZ6 :

- 5.724,79 euros au titre des échéances échues impayées,

- 5.997,13 euros au titre des intérêts échus impayés,

- 450,30 euros au titre des intérêts moratoires,

- 145.910,79 euros au titre du capital restant dû,

- 216,51 euros au titre des intérêts arrêtés au 5 février 2019

- 1.800 euros au titre de la clause pénale,

soit la somme totale de 160.099,52 euros, outre intérêts au taux contractuel de 3,45 % l'an sur la somme de 145.910,79 euros à compter du 6 février 2019.

 

13. Sur la responsabilité de la société crédit agricole des Savoie :

a. Sur le devoir de conseil relatif à l'assurance :

M. X. et Mme X. précisent qu'ils n'ont pas la qualité d'emprunteurs avertis et qu'en conséquence la banque leur devait un devoir de conseil qu'elle ne leur a pas dispensé. Ils disent en effet ne pas posséder la moindre compétence dans le domaine juridique ou financier et font état du fait que les biens immobiliers qu'ils possèdent proviennent, par héritage, de leur mère, étant entendu par ailleurs que M. X. souffre de lourds handicaps (surdité, cécité et handicap moteur important). Ils précisent qu'ils n'ont pas été correctement conseillés dans le choix de l'assurance souscrite qui couvrait les risques de décès et de « PTIA » ainsi que « ITT » dans le premier prêt mais ne comprenant pas le risque « ITT » dans les deux suivants. Ils ajoutent que le conseil ne saurait résulter d'une simple formule pré-imprimée et que M. X. étant le seul à tirer une partie de ses revenus de son activité professionnelle il aurait dû lui être conseillé de prendre une assurance « ITT ». Ils disent encore que c'est ainsi qu'à la suite de ses problèmes de santé, l'assurance a pu prendre en charge le premier prêt mais pas les deux suivants. Il en résulte pour lui un fort préjudice qu'il évalue en perte de chance à 200.000 euros pour le premier prêt de 2011 et à 180.000 euros pour le second.

La cour observe tout d'abord qu'aucun élément du dossier ne permet de dire que M. X. et Mme X. sont des emprunteurs avertis. Le fait qu'ils possèdent un patrimoine immobilier et qu'ils ont contracté plusieurs prêts sur une période relativement brève ne suffit en effet pas à leur conférer cette qualité.

La cour relève ensuite que la banque n'est pas, en raison du devoir de non-immixtion, tenue d'un devoir de conseil, sauf si elle a contracté une obligation spécifique à cet égard. Par ailleurs, il est constant qu'elle n'est pas débitrice d'un devoir de conseil général à l'égard de son client, et n'est susceptible d'engager sa responsabilité que dans le cas où elle lui a fourni un conseil inadapté à une situation dont elle a connaissance. Dans ce cas, la preuve du caractère inadapté du conseil incombe à l'emprunteur.

En l'espèce les emprunteurs se contentent d'affirmer qu'alors qu'en 2009 l'assurance proposée comprenait une couverture « ITT » en plus de l'invalidité ou du décès, cette garantie ne leur aurait pas été conseillée lors de la souscription des deux prêts de 2011. La cour ne saurait déduire de ces affirmations le fait que la banque n'a pas proposé aux débiteurs de souscrire, à nouveau cette garantie, dès lors que le seul fait constant est ici l'absence de souscription de cette garantie. En outre, les notices d'assurances remises à M. X. et Mme X. prévoient expressément la possibilité de la couverture 'ITT' laquelle, comme l'a pertinemment relevé le tribunal, a déjà été souscrite en 2009 par des emprunteurs qui n'en ignoraient donc ni l'existence ni l'étendue. Il résulte en outre clairement des offres relatives aux trois prêts que l'assurance obligatoire sollicitée ne couvre que le décès et l'invalidité, les autres risques potentiellement couverts étant facultatifs.

En conséquence, la preuve de la non délivrance par la société crédit agricole des Savoie d'un conseil adapté en matière d'assurance n'est pas rapportée. Le jugement déféré sera donc confirmé en ce qu'il a débouté M. X. et Mme X. de leurs demandes relatives à la violation du devoir de conseil.

 

b. Sur la violation du devoir de mise en garde :

M. X. et Mme X. exposent que la banque est tenue à une obligation de mise en garde à l'égard des emprunteurs contre le caractère dangereux de l'engagement (prêt non adapté aux ressources, risque d'endettement excessif, opération financée vouée à l'échec). Ils estiment que leur taux d'endettement était trop important et que la banque aurait dû les alerter et ce particulièrement au regard du handicap souffert. Au contraire la société crédit agricole des Savoie leur a octroyé 5 prêts immobiliers en 2 ans alors que M. X. ne percevait en 2009, en dehors des revenus locatifs que 3.771 euros de revenus annuels alors que Mme X. n'en avait quasiment pas.

La société crédit agricole des Savoie estime pour sa part que les différents crédits accordés étaient parfaitement adaptés aux moyens des emprunteurs, notamment en ce que pendant plusieurs années les remboursements sont intervenus sans difficulté et en ce qu'ils disposaient d'un important patrimoine immobilier pouvant générer des revenus locatifs confortables.

La cour rappelle que le devoir de mise en garde consiste, pour l'établissement de crédit, à alerter l'emprunteur ou la caution au regard de ses capacités financières et du risque d'endettement né de l'octroi du prêt. Celui qui l'invoque doit justifier d'un risque de surendettement. Le banquier prêteur n'a d'obligation de mise en garde qu'en cas de crédit excessif, même si le prêt est consenti à un emprunteur non averti. Il appartient à l'emprunteur qui invoque un manquement au devoir de mise en garde de la banque d'apporter la preuve de cette inadaptation ou du risque d'endettement.

La cour observe que, par jugement en date du 25 avril 2019 (pièce banque n°19), le tribunal d'instance de Bonneville a rejeté la demande de suspension des échéances des prêts immobiliers n°158481, n° 41YYY8 et n° 46ZZZ6 aux motifs que le seul élément nouveau apparu depuis la souscription des prêts est l'existence d'une procédure judiciaire concernant des désordres relatifs à des travaux effectués dans un chalet situé à Saint Gervais. Le tribunal, à cette occasion a, en particulier, relevé que le patrimoine immobilier des intéressés se composait notamment d'un chalet à Saint Gervais, d'un studio dans la même commune, de deux appartements, de deux places de parking et d'un garage à Annecy, d'un appartement à [Localité 12] ainsi que d'un local commercial à Nogent. Ces éléments sont corroborés par la déclaration des revenus fonciers de 2016 (pièce banque n°35) faisant état de 7 biens immobiliers en possession des emprunteurs depuis 2009.

Il est constant en jurisprudence qu'il appartient aux juges de prendre en compte l'ensemble des biens et revenus des emprunteurs pour apprécier le risque d'endettement (Cass. com. 9 juillet 2019, n° 17-31.255). En l'espèce, M. X. et Mme X. disposent d'un patrimoine immobilier important et ne rapportent pas la preuve qui leur incombe de l'existence d'un risque d'endettement excessif, notamment en ce qu'ils ne fournissent pas la valeur des biens en question. Pour le surplus, il résulte des écritures de M. X. et Mme X. que le prêt de février 2009 (n°154881) a été souscrit pour financer les « premiers travaux » dans un duplex à [Localité 13] (conclusions p. 36) et que ce prêt était garanti par une hypothèque conventionnelle à hauteur du capital emprunté (187.352 euros ; conclusion p.4). Il en résulte, qu'en cas de défaut de paiement, aucun risque excessif d'endettement ne pouvait naître de ce prêt, garanti par la valeur du bien.

Il résulte de ce qui précède qu'aucune faute tirée de la violation du devoir de mise en garde ne serait être imputée à la société crédit agricole des Savoie. La décision entreprise sera donc infirmée en ce qu'elle a accordé à M. X. et Mme X. une somme de 100.000 euros à titre de dommages et intérêt et les intimés seront déboutés de leurs demandes de dommages et intérêts.

 

14. Sur la demande de mainlevée des hypothèques :

Dans la mesure où M. X. et Mme X. fondent leur demande sur le fait qu'ils ne sont plus redevables de la moindre somme envers la banque et où la cour juge du contraire, il n'y a pas lieu de faire droit à ces demandes. Le jugement déféré sera confirmé sur ce point.

 

15. Sur la demande de délais de paiement et les demandes subséquentes :

L'article 1343-5 ancien du code civil applicable en l'espèce, dispose que, compte tenu de la situation du débiteur et en considération des besoins du créancier, le juge peut, dans la limite de deux années, reporter ou échelonner le paiement des sommes dues. Par décision spéciale et motivée, le juge peut prescrire que les sommes correspondant aux échéances reportées porteront intérêt à un taux réduit qui ne peut être inférieur au taux légal ou que les paiements s'imputeront d'abord sur le capital.

En l'espèce M. X. justifie de faibles revenus en 2021 (5.649 euros annuels, pièce n° 67). Il en est de même pour Mme X. (10.701 euros annuels, outre 2.623 de revenus fonciers, pièce n° 66). Ils précisent être dans les plus grandes difficultés pour faire face à leurs dettes et font état de différents prêts à la consommation souscrits, outre les crédits immobiliers litigieux, pour un capital emprunté total d'au moins 115.000 euros (pièce n° 32 à 36). Au regard des sommes dues au crédit agricole pour un montant de plus de 395.000 euros dans la présente procédure, aucun échéancier sur deux ans ne saurait être en mesure de leur permettre d'éteindre la dette. De même, M. X. et Mme X. ne font pas état d'un projet de vente d'un ou plusieurs de leurs biens pouvant justifier l'octroi de délai de paiement jusqu'à sa réalisation.

En conséquence, ils seront déboutés de leur demande de délais de paiement et des demandes s'y rattachant.

Enfin, la cour ne statuera pas sur la demande de « juger que toute condamnation au profit d'un seul des emprunteurs profitera à l'autre du fait de leur solidarité » qui ne constitue pas une prétention au sens du code de procédure civile mais qui tend à demander à la cour de constater un effet ordinaire et légal de la solidarité.

 

16. Sur les dépens et les demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile :

M. X. et Mme X. qui succombent seront tenus in solidum aux dépens de première instance et d'appel, avec distraction au profit de maître Forquin, avocat, par application de l'article 699 du code de procédure civile. Ne remplissant pas les conditions d'octroi de ce mécanisme, ils seront également déboutés de leur demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Enfin, aucune considération d'équité ne permet de leur faire supporter tout ou partie des frais irrépétibles non compris dans les dépens exposés par la société crédit agricole des Savoie. Elle sera donc également déboutée de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

La cour, après en avoir délibéré conformément à la loi, statuant publiquement, par décision contradictoire,

Dit recevables les demandes de la société crédit agricole des Savoie relatives à sa responsabilité civile,

Confirme le jugement déféré en ce qu'il :

- a débouté M. X. et Mme X. de leur demande en nullité des contrats et des demandes subséquentes fondées sur le non-respect du délai de réflexion de 10 jours,

- a débouté M. X. et Mme X. de leurs demandes en nullité de la stipulation des intérêts et en déchéance du droit aux intérêts des contrats de prêts et de leurs avenants,

- a débouté M. X. et Mme X. de leur demande en nullité des déchéances du terme,

- a débouté M. X. et Mme X. de leur demande relative à la violation du devoir de conseil,

- a débouté M. X. et Mme X. de leur demande de mainlevée des hypothèques,

Réformant le jugement déféré pour le surplus et statuant à nouveau :

Déboute M. X. et Mme X. de leur demande d'expertise,

Déboute M. X. et Mme X. de leurs demandes au titre du caractère abusif de la clause dite lombarde,

Déboute M. X. et Mme X. de leurs demandes au titre du taux d'usure,

Déboute M. X. et Mme X. de leurs demandes au titre du caractère excessif de la clause concernant les intérêts de retard,

Déboute M. X. et Mme X. de leur demande de dommages et intérêts,

Condamne solidairement M. X. et Mme X. à payer à la société crédit agricole des Savoie la somme de 379.355,34 euros, outre intérêts au taux contractuel de 3,45 % l'an sur la somme de 344.875,79 euros à compter du 6 février 2019,

Déboute M. X. et Mme X. de leur demande de délais de paiement et des demandes subséquentes,

Condamne in solidum M. X. et Mme X. aux dépens de première instance et d'appel, maître Forquin, avocat, étant autorisé à recouvrer auprès d'eux ceux dont il a fait l'avance sans avoir reçu provision,

Déboute M. X., Mme X. et la société crédit agricole des Savoie de leurs demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Ainsi prononcé publiquement le 15 décembre 2022 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile, et signé par Madame Alyette FOUCHARD, Conseillère faisant fonction de Présidente et Madame Sylvie DURAND, Greffière pour le prononcé.

La Greffière                                      La Présidente