CA REIMS (ch. civ. 1re sect.), 9 octobre 2006
CERCLAB/CRDP - DOCUMENT N° 1001
CA REIMS (ch. civ. 1re sect.), 9 octobre 2006 : RG n° 05/01343 ; arrêt n° 484
Publication : Juris-Data n° 334070
Extrait : « Attendu que Madame Y. allègue subsidiairement l'existence de clauses abusives, en prétextant un déséquilibre significatif et à son détriment entre droits et obligations des cocontractants, au visa de l'article L. 132-1 du Code de la Consommation, étant toutefois de principe que le caractère abusif d'une clause s'apprécie par référence à l'ensemble des circonstances ayant présidé à la conclusion, et au regard aussi de l'ensemble ses autres clauses, et que les clauses abusives sont réputées non écrites, sans emporter nullité de l'entier contrat, restant applicable quant au surplus de ses stipulations, sauf s'il ne peut subsister hors les clauses abusives ;
Que, pour soutenir que les droits et obligations du contrat lui seraient ici défavorables, Madame Y. se livre à une mauvaise appréciation de celui-ci, en invoquant notamment sa faible liberté de contracter, en tant que consommatrice confrontée à un vendeur professionnel, s'étant notamment agi d'adhérer à l'assurance « duo » et au contrat de crédit ;
Que CREATIS objecte à bon escient que l'on conçoit mal en quoi l'adhésion à cette assurance lui serait préjudiciable, alors même la garantie offerte, du type « satisfait ou remboursé », lui étant totalement favorable, n'emporte aucun déséquilibre en sa défaveur, et que sa thèse selon laquelle elle n'aurait pas sciemment souscrit le contrat de crédit n'est pas sérieusement soutenable, puisque, aussi bien, l'offre préalable lui ayant été soumise stipulait expressément son caractère accessoire à une prestation de services PANORIMMO, en faisant de surcroît référence à un crédit in fine, tandis qu'elle devait elle-même y porter de sa propre main la mention « crédit in fine prélevé en fin de contrat », n'ayant pu raisonnablement laisser subsister en son esprit aucun doute quant à la réalité, la nature et la portée de l'engagement par elle ainsi souscrit ;
Qu'il est vrai qu'elle jouissait en outre de la faculté, si véritablement elle en avait eu convenance, de se rétracter dans un délai de sept jours en utilisant les bordereaux prévus à cet effet, alors même qu'elle n'en a rien fait, cependant qu'en l'état des stipulations contractuelles, ménageant une garantie de remboursement du montant du contrat en cas de non-réalisation de la vente dans le délai convenu de vingt-quatre mois, le client dispose encore d'autres solutions alternatives que de renoncer à la vente de son bien pour être déchargé du paiement ;
Que CREATIS fait encore et tout aussi pertinemment observer que le contrat s'analyse à l'évidence, à la lumière de l'article 1102 du Code Civil, en une convention synallagmatique, emportant, comme telle, obligations réciproques à la charge de chacune des parties, consistant notamment, pour le client annonceur, à acquitter le prix, comptant, forfaitaire et d'avance, et, pour PANORIMMO, à assurer, en contrepartie, la diffusion élargie de l'annonce de vente du bien immobilier considéré, objet du contrat principal, pendant un délai maximum de vingt-quatre mois, en recourant aux divers services et supports techniques énoncés au contrat, à charge de communiquer l'annonce du bien immobilier auprès d'acheteurs potentiels jusqu'à la vente, et dans la limite de ce délai de vingt-quatre mois, en assurant la promotion de ce bien jusqu'à sa réalisation, érigée en terme contractuel rendant exigible le prix de la commande ;
Qu'il était toutefois clairement stipulé aussi qu'à défaut de vente dans les vingt-quatre mois suivant la signature du contrat, le client serait remboursé de l'entier prix par lui versé, au comptant ou à crédit, par la mise en oeuvre d'une garantie de type « satisfait ou remboursé »; ou ici, « vendu ou remboursé », et que Madame Y. s'engageait par ailleurs à acquitter ce prix forfaitaire au comptant, en recourant, le cas échéant, à un crédit consenti par CREATIS, de même qu'à renouveler l'ordre de mission aux échéances fixées afin de permettre à PANORIMMO de poursuivre la diffusion de son offre de vente, tout en évitant de maintenir la publicité du bien après sa cession, sachant que le défaut non-renouvellement, assimilable à la conclusion de la vente, se soldait par l'exigibilité du prix forfaitaire de la commande ;
Attendu que, faute de déceler en de telles stipulations contractuelles aucun déséquilibre tel qu'allégué par Madame Y., celle-ci doit être déboutée de toutes demandes, fins ou prétentions émises de ce chef, comme étant inopérantes ».
COUR D’APPEL DE REIMS
CHAMBRE CIVILE PREMIÈRE SECTION
ARRÊT DU OCTOBRE 2006
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 05/01343. Arrêt n° 484.
APPELANTE :
d'un jugement rendu le 06 avril 2005 par le Tribunal de Grande Instance de CHALONS-EN-CHAMPAGNE,
BANQUE CREATIS
[adresse], COMPARANT, concluant par la SCP GENET-BRAISANT avoués à la Cour, et ayant pour conseil Maître ALIAS Pascal, avocat au barreau D'AIX EN PROVENCE
INTIMÉS :
- Madame X. épouse Y.
COMPARANT, concluant par Maître Claude ESTIVAL, avoués à la Cour, et ayant pour conseil la SELARL DEROWSKI, avocats au barreau de CHALONS-EN-CHAMPAGNE.
- Maître RAFONI, mandataire judiciaire, pris en qualité de liquidateur à la liquidation judiciaire de la Société PANORIMMO
[adresse],
- Maître DUBOIS, mandataire judiciaire, pris en qualité de liquidateur à la liquidation judiciaire de la Société ASSURIMMO
[adresse], N'AYANT PAS CONSTITUÉ AVOUÉ, bien que régulièrement assignés
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ : Madame CHAUBON, Président de Chambre, Monsieur PERROT, Conseiller, Madame SIMON ROSSENTHAL, Conseiller
GREFFIER : Madame Maryline THOMAS, Greffier lors des débats et prononcé
DÉBATS : À l'audience publique du 19 juin 2006, où l'affaire a été mise en délibéré au 09 octobre 2006,
ARRÊT : Prononcé par Madame CHAUBON, Président de Chambre, à l'audience publique du 09 octobre 2006, conformément aux dispositions de l'article 452 du nouveau code de procédure civile, qui a signé la minute avec le Greffier, présent lors du prononcé.
[fin de la première page non paginée]
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
[minute page 1] Vu le jugement rendu, le 6 avril 2005 par le Tribunal de Grande Instance de CHALONS EN CHAMPAGNE, ayant :
- déclaré nuls les contrats conclus par Madame Y. avec les sociétés PANORIMMO, ASSURIMO et CREATIS pour vice du consentement entachant le contrat principal (PANORIMMO) ;
- dit que la somme de 10.764 €réclamée par la société CREATIS à Madame Y. n'est pas exigible, et rejeté en conséquence la demande reconventionnelle présentée de ce chef ;
- débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires ;
- condamné la société CREATIS, Maître RAFONI, ès qualités, et Maître DUBOIS, ès qualités, solidairement, à verser à Madame Y. la somme de 800 €, par application des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;
- condamné les mêmes, sous la même solidarité, aux dépens de l'instance, avec recouvrement direct au profit de la SELARL Cabinet DEROWSKI, conformément aux dispositions de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile ;
Vu, ensemble, rappel régulièrement interjeté contre cette décision le 13 mai 2005 par la SA BANQUE CREATIS, ses conclusions du 12 septembre 2005, celles de Madame Y., du 9 novembre 2005, celles, récapitulatives, de l'appelante, du 6 juin 2006, ainsi que l'ordonnance de clôture rendue le 12 juin 2006, fixant l'affaire pour plaidoirie à l'audience du 19 du même mois ;
Attendu que, copropriétaire indivise avec son frère d'une villa à [ville], Madame Y. concluait le 1er février 2003 avec la SA PANORIMMO un contrat aux fins de fournitures, pendant vingt-quatre mois, de prestations de communication en vue de la vente de cet immeuble, par voie de diffusion sur ses magazines, ainsi que sur minitel et Internet, moyennant un coût de 10.764 € TTC, signait dans le même temps avec la société de courtage ASSURIMMO un contrat intitulé « duo », incluant une assurance « vendu ou remboursé » outre une assurance individuelle accident, destinée à garantir, dans les limites fixées à ce contrat, le remboursement du montant TTC de la prestation due par PANORIMMO pour la vente du bien immobilier, si elle n'intervenait pas dans les deux ans de la signature du contrat avec cette dernière, et souscrivait également auprès de la SA BANQUE CREATIS, pour régler PANORIMMO, un prêt accessoire d'un montant de 10.764 €, correspondant au coût de sa prestation, et stipulé remboursable in fine, en une unique mensualité de 10.764 €, à la vente du bien, dans un délai ne pouvant excéder vingt-quatre mois ;
Attendu, bien qu’ASSURIMMO ait été placée en liquidation judiciaire le 21 octobre 2003, puis PANORIMMO, le 27 février 2004, que Madame Y. parvenait néanmoins à vendre sa maison le 24 mars 2004, ce dont elle informait CREATIS, qui lui réclamait alors le remboursement de la somme de 10.764 € TTC ;
Attendu qu'ayant fait attraire CREATIS devant le Tribunal de Grande Instance de CHALONS EN CHAMPAGNE par exploit du 28 juin 2004, [minute page 2] Madame Y. poursuivait principalement la nullité des contrats par elle conclus avec PANORIMMO, ASSURIMMO et CREATIS, et prétendait par suite n'être point redevable envers cette dernière de la somme de 10.764 € réclamée, sauf à voir subsidiairement saisir la Commission des Clauses Abusives par le Tribunal, et surseoir à statuer dans l'attente de son avis ;
Attendu que, s'opposant à de telles prétentions, CREATIS réfutait l'existence d'un vice du consentement de Madame Y., contestait par ailleurs toute ambiguïté du contrat principal conclu par celle-ci avec PANORIMMO quant à son activité et à la nature de la prestation fournie, faisant en effet valoir qu'un ordre de mission, contrat d'entreprise par nature, ne saurait être assimilé à un mandat, et déniait pour le surplus l'existence de clauses abusives, en relevant que l'adhésion de Madame Y. au contrat d'assurance d'ASSURIMMO n'emportait aucun déséquilibre à son détriment, mais lui était favorable, et qu'elle ne pouvait soutenir n'avoir pas eu conscience d'avoir conclu un contrat de crédit, en l'absence d'ambiguïté de l'offre préalable, non sans ajouter qu'il lui était encore loisible de se rétracter, et que le contrat contenait de surcroît une garantie de remboursement en cas de non-réalisation dans le délai de vingt-quatre mois, le contrat principal s'analysant ainsi en une convention synallagmatique parfaitement équilibrée ;
Qu'elle prétendait reconventionnellement que la vente du bien litigieux avait mis un terme au contrat principal et par-là même rendu exigible le remboursement des sommes versées au titre de l'emprunt souscrit, et poursuivait dès lors la condamnation de Madame Y. en la somme de 10.764 €, outre en l'indemnité contractuelle de 861,12 €, avec intérêts au taux légal depuis sa demande, rappelant notamment son engagement d'acquitter le prix forfaitaire de la prestation de PANORIMMO et de renouveler l'ordre de mission aux échéances fixées, pour éviter le maintien de la publicité au-delà de la vente de l'immeuble, sous peine de caducité du contrat, le non-renouvellement, assimilé à la vente, rendant exigible le prix forfaitaire de la commande, et exposant que le contrat accessoire de financement suit le sort du contrat principal, dont il est juridiquement interdépendant, au sens et en vertu des articles L. 311-20 et suivants du Code de la Consommation, insistant encore sur l'absence, selon elle, d'inexécution par PANORIMMO de ses obligations, même en l'état de sa liquidation judiciaire dès avant la réalisation de la vente de la maison, tant il est impossible de déterminer si ses prestations ne sont pas néanmoins à l'origine de cette transaction ;
Qu'elle rappelait encore, subsidiairement, que l'éventuelle résolution ou annulation du contrat principal, opérant rétroactivement, remettrait les parties dans le même état que si elles n'avaient pas contracté, et les obligerait donc, ensemble, prêteur et emprunteur, à de mutuelles restitutions ;
Attendu que, statuant dans les termes susvisés de la décision déférée, les premiers juges faisaient essentiellement droit aux prétentions de Madame Y., en prononçant l'annulation de l'ensemble des contrats par elle souscrits pour vice du consentement, et en disant inexigible la somme de 10.764 € réclamée par CREATIS ;
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
[minute page 3] Attendu, Maîtres RAFONI et DUBOIS, ès respectives qualités de liquidateurs de PANORIMMO et ASSURIMMO, n'ayant pas comparu, faute d'avoir constitué avoué, bien que régulièrement assignés, le premier à personne et le second, tant sur première que seconde assignation, à domicile, qu'il sera statué par arrêt réputé contradictoire, en application des dispositions de l'article 474 in fine du Nouveau Code de Procédure Civile ;
* * *
Attendu que Madame Y. sollicite globalement l'annulation des contrats par elle ensemble conclus avec PANORIMMO, ASSURIMMO et CREATIS, en arguant de son erreur déterminante sur la qualité de la première, s'étant prétendument méprise, pour avoir cru avoir affaire à une agence immobilière, comme l'ont retenu les premiers juges ;
Attendu qu'il appartient toutefois à quiconque invoque un vice du consentement d'en apporter la preuve, à charge d'en établir la concomitance à la conclusion de la convention ainsi querellée ;
Or attendu que CREATIS souligne à juste titre que, les termes du contrat principal conclu entre Madame Y. et PANORIMMO, énonçant précisément les activités de cette dernière, excluent toute éventuelle méprise de l'intéressée sur ce point, lui étant dès lors seule imputable, sans pouvoir être assimilée à une erreur sur la personne ;
Que l'appelante rappelle non moins justement que la loi n° 70-9 du 2 janvier 1970, régissant l'activité des agents immobiliers, d'ordre public, et d'interprétation stricte, n'est applicable qu'aux personnes physiques et morales se livrant ou prêtant habituellement leur concours, même à titre accessoire, aux opérations portant sur les biens d'autrui et relatives à l'achat, la vente, l'échange, la location de biens immobiliers, toutes activités supposant, pour être régies par cette loi, la représentation du client ;
Qu'il est en l'espèce constant que Madame Y. a chargé PANORIMMO de mettre à sa disposition un ensemble de supports de communication multimédias afin de lui permettre de favoriser les contacts avec d'éventuels acheteurs, en vue de parvenir à vendre son bien immobilier, sans que celle-ci ait pour autant jamais eu une quelconque vocation, aux termes du contrat, à intervenir en tant qu'agence immobilière, mais seulement en qualité de prestataire de services, au titre d'un contrat de commande passé avec sa cliente aux seules fins de réalisation de prestations publicitaires, l'objet d'un tel contrat étant au surplus clairement défini comme consistant en la parution d'une annonce immobilière, avec prestation de communication, la diffusion participant de l'essence même de l'ordre de mission, procédant lui-même de la nature d'un contrat d'entreprise, obligeant PANORIMMO à effectuer des actes matériels de promotion définis au contrat, sans donc pouvoir être confondus avec un quelconque mandat, obligeant à des actes juridiques et non point matériels, et sous cette précision que le mandat de vente doit encore être exprès, en vertu de l'article 1988 du Code Civil ;
Que PANORIMMO ne s'est ici jamais obligée qu'à diffuser l'annonce auprès du public, en effectuant divers actes matériels de promotion, dont [minute page 4] témoignent éloquemment ses conditions générales de vente, en leur article 1.2, limitant en effet son intervention à la communication immobilière en matière de prestation de service entre particuliers, sans lui faire jouer, en aucun cas, le rôle d'une agence immobilière, le client donneur d'ordre n'étant lié par aucune exclusivité, ni redevable d'aucune commission à la vente ;
Que l'ordre de mission soumis à la signature de Madame Y. est d'ailleurs lui-même particulièrement clair quant à la nature de la prestation de service offerte par PANORIMMO, pour énoncer expressément qu'il s'agit d'une mission de communication pour la transmission de son bien immobilier ou commercial, et notamment par voie de diverses diffusions, dont, internationale, sur internet ;
Que, PANORIMMO s'étant ainsi obligée à assurer la promotion du bien jusqu'à sa vente, constituant le terme contractuel rendant exigible le prix de la commande, il en résulte que l'obligation pour le client de rembourser à CREATIS le montant correspondant persiste, même si la vente n'est pas permise ou rendue possible par l'entremise de PANORIMMO, n'ayant, pour autant, aucune obligation de vendre le bien immobilier ;
Que CREATIS fait par ailleurs valoir qu'afin d'éviter toute confusion dans l'esprit de ses clients, elle qualifie et intitule son offre de crédit d'accessoire à une prestation de service PANORIMMO, et y joint de surcroît une reconnaissance de consentement éclairé comprenant notamment un schéma descriptif des engagements souscrits et précisant les cas d'exigibilité de la créance ;
Attendu que Madame Y. prétend en l'occurrence avoir vu en PANORIMMO un agent immobilier, alors que toutes les explications nécessaires lui avaient été fournies et tous documents utiles remis, conformément aux prescriptions légales, et assortis de toutes précisions complémentaires, tant sur l'ordre de mission que les conditions générales de vente ou l'offre préalable ;
Attendu que CREATIS est dès lors fondée à voir juger que l'intéressée, ayant été en mesure d'apprécier la portée et l'étendue de son engagement, ne peut utilement prétendre s'être méprise sur la personne de PANORIMMO, au point de l'avoir tenue pour une agence immobilière ;
Attendu qu'il y a donc lieu d'infirmer le jugement entrepris pour, statuant à nouveau, écarter tout vice du consentement et consacrer par en conséquence la validité du contrat principal ;
* * *
Attendu que Madame Y. allègue subsidiairement l'existence de clauses abusives, en prétextant un déséquilibre significatif et à son détriment entre droits et obligations des cocontractants, au visa de l'article L. 132-1 du Code de la Consommation, étant toutefois de principe que le caractère abusif d'une clause s'apprécie par référence à l'ensemble des circonstances ayant présidé à la conclusion, et au regard aussi de l'ensemble ses autres clauses, et que les clauses abusives sont réputées non écrites, sans emporter nullité de l'entier contrat, restant applicable quant au surplus de ses stipulations, sauf s'il ne peut subsister hors les clauses abusives ;
[minute page 5] Que, pour soutenir que les droits et obligations du contrat lui seraient ici défavorables, Madame Y. se livre à une mauvaise appréciation de celui-ci, en invoquant notamment sa faible liberté de contracter, en tant que consommatrice confrontée à un vendeur professionnel, s'étant notamment agi d'adhérer à l'assurance « duo » et au contrat de crédit ;
Que CREATIS objecte à bon escient que l'on conçoit mal en quoi l'adhésion à cette assurance lui serait préjudiciable, alors même la garantie offerte, du type « satisfait ou remboursé », lui étant totalement favorable, n'emporte aucun déséquilibre en sa défaveur, et que sa thèse selon laquelle elle n'aurait pas sciemment souscrit le contrat de crédit n'est pas sérieusement soutenable, puisque, aussi bien, l'offre préalable lui ayant été soumise stipulait expressément son caractère accessoire à une prestation de services PANORIMMO, en faisant de surcroît référence à un crédit in fine, tandis qu'elle devait elle-même y porter de sa propre main la mention « crédit in fine prélevé en fin de contrat », n'ayant pu raisonnablement laisser subsister en son esprit aucun doute quant à la réalité, la nature et la portée de l'engagement par elle ainsi souscrit ;
Qu'il est vrai qu'elle jouissait en outre de la faculté, si véritablement elle en avait eu convenance, de se rétracter dans un délai de sept jours en utilisant les bordereaux prévus à cet effet, alors même qu'elle n'en a rien fait, cependant qu'en l'état des stipulations contractuelles, ménageant une garantie de remboursement du montant du contrat en cas de non-réalisation de la vente dans le délai convenu de vingt-quatre mois, le client dispose encore d'autres solutions alternatives que de renoncer à la vente de son bien pour être déchargé du paiement ;
Que CREATIS fait encore et tout aussi pertinemment observer que le contrat s'analyse à l'évidence, à la lumière de l'article 1102 du Code Civil, en une convention synallagmatique, emportant, comme telle, obligations réciproques à la charge de chacune des parties, consistant notamment, pour le client annonceur, à acquitter le prix, comptant, forfaitaire et d'avance, et, pour PANORIMMO, à assurer, en contrepartie, la diffusion élargie de l'annonce de vente du bien immobilier considéré, objet du contrat principal, pendant un délai maximum de vingt-quatre mois, en recourant aux divers services et supports techniques énoncés au contrat, à charge de communiquer l'annonce du bien immobilier auprès d'acheteurs potentiels jusqu'à la vente, et dans la limite de ce délai de vingt-quatre mois, en assurant la promotion de ce bien jusqu'à sa réalisation, érigée en terme contractuel rendant exigible le prix de la commande ;
Qu'il était toutefois clairement stipulé aussi qu'à défaut de vente dans les vingt-quatre mois suivant la signature du contrat, le client serait remboursé de l'entier prix par lui versé, au comptant ou à crédit, par la mise en oeuvre d'une garantie de type « satisfait ou remboursé »; ou ici, « vendu ou remboursé », et que Madame Y. s'engageait par ailleurs à acquitter ce prix forfaitaire au comptant, en recourant, le cas échéant, à un crédit consenti par CREATIS, de même qu'à renouveler l'ordre de mission aux échéances fixées afin de permettre à PANORIMMO de poursuivre la diffusion de son offre de vente, tout en évitant de maintenir la publicité du bien après sa cession, sachant que le défaut non-renouvellement, assimilable à la conclusion de la vente, se soldait par l'exigibilité du prix forfaitaire de la commande ;
[minute page 6] Attendu que, faute de déceler en de telles stipulations contractuelles aucun déséquilibre tel qu'allégué par Madame Y., celle-ci doit être déboutée de toutes demandes, fins ou prétentions émises de ce chef, comme étant inopérantes ;
* * *
Attendu que l'intimée poursuit encore la nullité du contrat de crédit en arguant de ce que le taux d'intérêt ne serait pas égal à zéro, et que CREATIS facturerait la TVA ;
Attendu, le crédit gratuit étant réglementé dans sa publicité et relativement à l'avantage équivalent devant être consenti par le vendeur à l'acquéreur payant comptant, que l'article L. 311-7 du Code de la Consommation impose au vendeur d'offrir un prix inférieur à la somme proposée pour rachat à crédit, dans une proportion au moins égale à ce qui est fixé réglementairement, selon les modalités fixées, l'article R. 311-4 du même Code définissant, quant à lui, le montant de cette ristourne ;
Qu'il s'en déduit l'obligation, en cas de crédit gratuit, de faire mention de deux prix distincts, soit celui correspondant au crédit gratuit et l'autre au paiement comptant, tout en veillant à ce que l'avantage financier induit par le crédit gratuit n'excède pas la limite fixée par voie réglementaire ;
Qu'en outre, et au titre des opérations de démarchage à domicile, en cas de vente à crédit, l'article L. 121-23-6e dudit Code exige de faire mention du prix global, des modalités de paiement, des formes exigées par la réglementation sur la vente à crédit, outre du taux nominal et du taux effectif global de l'intérêt, déterminé selon les prévisions de l'article L. 313-1 du même Code, et sous cette précision, lorsque la vente donne lieu à un crédit gratuit, et en vertu de l'article L. 311-10 du Code de la Consommation, de mentions obligatoires quant au coût total ventilé du crédit, et, s'il y a lieu, à son taux effectif global ;
Que, toute opération de crédit étant par nature onéreuse, un crédit n'est jamais réputé gratuit que lorsque son coût est pris en charge par le fournisseur, de sorte que, même s'il apparaît gratuit pour l'emprunteur, il reste néanmoins coûteux pour le fournisseur, dans ses éventuels rapports avec l'établissement de crédit ;
Que, pour autant, le fournisseur n'est nullement tenu par l'article L. 311-10 du Code précité de faire apparaître le coût réel du crédit gratuit sur le bon de commande ou l'offre de prêt ;
Attendu qu'il s'avère dès lors que les obligations du fournisseur ont été dûment observées, les deux prix étant en effet expressément portés sur le contrat de prestation de service, et l'écart existant entre eux correspondant au moins aux prescriptions légales, sous cette précision de la prise en charge des intérêts du prêt par PANORIMMO ;
Et attendu, dans ta mesure où il n'est pas autrement contestable que l'opération de crédit ainsi proposée par CREATIS consistait bien en un prêt à taux zéro, s'analysant, dans l'offre commerciale de PANORIMMO, en un [minute page 7] crédit gratuit, lui-même parfaitement valable, que Madame Y. doit être encore déboutée de ses demandes, fins et prétentions émises à ce titre ;
* * *
Attendu que l'intimée invoque également la prétendue violation des dispositions de l'article L. 121-26 du Code de la Consommation, du fait de la concomitance entre sa signature du contrat de prestation de service, de l'offre préalable de crédit et du contrat d'assurance ;
Mais attendu que CREATIS rétorque à bon droit que la signature d'une offre préalable de crédit accessoire à une prestation de service n'est en rien illicite, s'agissant d'un crédit affecté, au sens de l'article L. 311-20 du Code de la Consommation, et non de l'obtention d'une contrepartie prohibée, mais de la simple signature d'un contrat principal et d'un contrat accessoire, sachant que Madame Y. avait ici encore toute latitude, dont elle n'a toutefois pas usé, pour se rétracter de ses engagements au titre de ces deux contrats, et utilisant les bordereaux prévus à cet effet dont ils étaient dûment pourvus ;
Attendu que l'intéressée verra donc pareillement rejeter une telle argumentation ;
* * *
Attendu que l'appelante se prévaut reconventionnellement contre sa cocontractante d'une créance indéniablement fondée, dès l'instant que l'opération contractuelle globale impliquait la souscription par le client de deux contrats formellement distincts mais juridiquement interdépendants, le premier, et principal, avec PANORIMMO, et le second, accessoire, de crédit, auprès de CREATIS, à l'instar de celui autrement conclu avec ASSURIMMO ;
Que la première et principale convention conclue avec PANORIMMO, prestataire des services commandés, revêtant, au sens de l'article 1102 du Code Civil, une nature synallagmatique, imposait ainsi aux parties autant de réciproques obligations, dont chacune puisait sa cause dans l'objet de l'obligation de son cocontractant, celle de l'intimée, client annonceur, résidant ainsi dans l'acquittement du prix, stipulé payable comptant, forfaitaire et d'avance, en contrepartie de l'engagement pris par PANORIMMO d'assurer la diffusion élargie de l'annonce de vente du bien immobilier, sur une durée maximale de vingt-quatre mois, en recourant à l'utilisation de divers services et supports techniques énoncés au contrat, et en publiant l'annonce jusqu'à la vente et dans ce délai maximum ;
Qu'il incombait aussi à Madame Y. de payer le prix forfaitaire au comptant, en recourant au besoin à un prêt consenti par CREATIS, et de renouveler également l'ordre de mission, aux échéances fixées, afin de permettre à PANORIMMO de poursuivre la diffusion de son offre de vente ;
Que l'emprunt accessoirement consenti par CREATIS, en la forme d'une offre préalable, constitue donc un prêt, affecté au financement du prix forfaitaire du contrat principal, et ayant eu pour objet le paiement de la prestation principale due par PANORIMMO ;
[minute page 8] Que ce contrat principal pouvait toucher son terme dans trois cas de figure distincts, que le bien ait été vendu dans le délai maximum de vingt-quatre mois suivant sa signature, que le client ait omis de renouveler l'ordre de mission, dans les conditions et suivant les modalités énoncées au contrat, ou bien encore à l'échéance du terme des vingt-quatre mois, en l'absence de vente de l'immeuble, sauf pour le client à être alors admis à prétendre au remboursement du prix payé en mettant en oeuvre la garantie « satisfait ou remboursé », sous réserve que les conditions en soient réunies ;
Or attendu qu'il est en l'espèce constant que Madame Y. est bien parvenue à céder son bien immobilier, aux termes de l'attestation de vente notariée en date du 24 mars 2004 par elle produite aux débats, ce qui a indéniablement rendu la créance de CREATIS exigible, tandis qu'il importe en réalité bien peu que cette transaction ne soit intervenue que peu après l'ouverture de la liquidation judiciaire de PANORIMMO, tant il reste rigoureusement impossible d'affirmer que ses prestations ne seraient en rien à l'origine de la cession, et alors que Madame Y. s'est en revanche assurément obligée à rembourser le montant du prêt en pareille hypothèse, soit sitôt réalisée la vente de son bien immobilier ;
Attendu qu'il suit nécessairement de là que CREATIS est en droit de requérir l'infirmation de la décision déférée pour voir, statuant à nouveau, condamner Madame Y. à lui payer la somme de 10.764 € par elle sollicitée, outre celle de 861,12 € à titre d'indemnité contractuelle, avec intérêts au taux légal à compter du 6 octobre 2004, date de sa première demande formulée en ce sens, et jusqu'à parfait règlement ;
Que l'appelante est au demeurant d'autant plus fondée à ainsi prétendre qu'en tenant même, pour les seuls besoins du raisonnement, la nullité du contrat pour définitivement acquise, celle-ci ayant nécessairement un effet rétroactif, obligerait néanmoins les parties à de mutuelles et réciproques restitutions, afin de se rétablir respectivement dans l'état de droit antérieur à la conclusion de leur convention annulée, étant encore admis qu'il incombe tout pareillement au consommateur, en cas de résolution ou annulation du contrat principal, de rembourser au prêteur de deniers les sommes par lui versées, fût-ce, comme en l'espèce, entre les mains d'un tiers et pour le compte du client, en l'absence du moins ici de toute opposition formulée auprès de CREATIS par Madame Y. à la délivrance des fonds, intervenue directement au profit de PANORIMMO, mais pour le compte de celle-ci, - ne pouvant donc être admise à faire grief au prêteur de deniers d'une quelconque faute dans leur versement -, contrairement sur ce point aux motifs erronément énoncés en la décision querellée, méritant dès lors et de plus fort, en toute hypothèse infirmation en ses entières dispositions ;
* * *
Attendu que, succombant en l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions contraires, infondées, dont elle sera par suite déboutée, Madame Y. se verra en outre condamner envers CREATIS, au visa de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, en l'équitable indemnité de 2.000 € par elle légitimement requise en déduction de ses frais irrépétibles de première instance et d'appel non compris dans les dépens y afférents, dont la même sera enfin intégralement tenue, moyennant distraction, pour ceux d'appel, au profit de la SCP GENET BRAISANT, Avoués à la Cour ;
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
[minute page 9] PAR CES MOTIFS,
LA COUR,
Statuant publiquement et par arrêt réputé contradictoire,
INFIRMANT le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
ET, STATUANT À NOUVEAU,
CONDAMNE Madame Y. à payer à la SA CREATIS, pour les causes sus-énoncées, la somme principale de 10.764 €, outre celle de 861,12 €, ensemble, avec intérêts au taux légal à compter du 6 octobre 2004 et jusqu'à parfait règlement ;
DÉBOUTE en conséquence Madame Y. de l'ensemble des ses demandes, fins et prétentions contraires, infondées ;
LA CONDAMNE en outre à payer à la SA CREATIS une indemnité de 2.000 €, en déduction de ses frais irrépétibles de première instance et d'appel ;
CONDAMNE enfin la même aux entiers dépens y afférents, moyennant distraction, pour ceux d'appel, au profit de la SCP GENET BRAISANT, Avoués à la Cour.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,