CA COLMAR (3e ch. civ. sect. A), 23 janvier 2023
CERCLAB - DOCUMENT N° 10041
CA COLMAR (3e ch. civ. sect. A), 23 janvier 2023 : RG n° 21/03225 ; arrêt n° 23/56
Publication : Judilibre
Extraits (rappel du jugement) : « Pour statuer ainsi, le tribunal a essentiellement retenu que la société Movidone ne rapportait pas la preuve de l'existence du contrat de maintenance allégué, qu'elle n'établissait pas la réalité du dysfonctionnement du matériel non plus que celle de sa non-conformité à ce qui avait été commandé ; qu' elle n'alléguait ni prouvait employer moins de six salariés de sorte qu'elle ne pouvait se prévaloir des dispositions protectrices du code de la consommation ; qu'il n'existe pas de déséquilibre significatif entre les droits et les obligations des parties créé par les articles 10 et 11 des conditions générales, l'interdiction de résiliation anticipée hors manquements aux obligations contractuelles ne créant pas de déséquilibre significatif entre les parties au contrat. »
Extraits (motifs de l’arrêt) : 1/ « Il est de jurisprudence que sont interdépendants les contrats concomitants ou successifs qui s'inscrivent dans une opération incluant une location financière. En application des articles 9 du code de procédure civile et 1353 du code civil, il appartient à la société Movidone, qui allègue avoir conclu avec la Sarl Way Water un contrat qui serait interdépendant avec le contrat de location conclu avec la société I. Location, de rapporter la preuve de ses allégations. »
2/ « Force est encore de constater que la société Movidone se borne à produire aux débats deux courriels qu'elle a adressés à la société I. Location le 22 novembre 2016 et l'autre le 8 décembre 2016, invoquant une panne. Ces éléments ne sont pas à eux seuls suffisants à rapporter la preuve du dysfonctionnement allégué et encore moins de sa cause.
Par ailleurs et à titre surabondant, il résulte des clauses du contrat de location (article 3-2) que le bailleur a cédé au locataire les droits et actions qu'il détiendrait contre le fournisseur à raison des vices ou défauts affectant le produit et que le locataire doit exercer tous les recours utiles contre le fournisseur et renonce à toute action contre le bailleur (article 5). »
3/ « L'indemnité contractuelle de résiliation, effectivement constitutive d'une clause pénale susceptible de modération en application de l'article 1231-5 du code civil, n'apparaît pas en l'espèce manifestement excessive : en effet, l'indemnité prévue n'excède pas en l'occurrence la légitime rémunération que la société I. Location pouvait espérer si le contrat s'était poursuivi jusqu'à son terme, sans incident de paiement du locataire. Elle vise à compenser le préjudice financier subi par la bailleresse résultant de la perte du bénéfice escompté alors qu'elle a financé et mis à disposition un matériel neuf en contrepartie de la perception des loyers et que l'économie du contrat a été calculée sur la base de la durée ferme de location. »
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE COLMAR
TROISIÈME CHAMBRE CIVILE SECTION A
ARRÊT DU 23 JANVIER 2023
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 3 A 21/03225. Arrêt n° 23/56. N° Portalis DBVW-V-B7F-HUEQ. Décision déférée à la cour : jugement rendu le 25 juin 2021 par le tribunal judiciaire de Strasbourg.
APPELANTE :
SAS MOVIDONE
Prise en la personne de son représentant légal, [Adresse 2], [Localité 4], Représentée par Maître Loïc RENAUD, avocat au barreau de COLMAR, avocat postulant, et Maître Gaëlle DOPPLER, avocat au barreau de STRASBOURG, avocat plaidant
INTIMÉS :
Maître U. Es qualité de liquidateur de la SARL WAY WATER,
[Adresse 3], [Localité 4]
SAS I. LOCATION
[Adresse 1], [Localité 4], Représentée par Maître Katja MAKOWSKI, avocat au barreau de COLMAR
COMPOSITION DE LA COUR : L'affaire a été débattue le 14 novembre 2022, en audience publique, devant la cour composée de : Mme MARTINO, Présidente de chambre, Mme FABREGUETTES, Conseiller, Madame DAYRE, Conseiller, qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Mme HOUSER
ARRÊT : - réputé contradictoire - prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile. - signé par Mme Annie MARTINO, président et Mme Anne HOUSER, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
FAITS CONSTANTS ET PROCÉDURE :
Suivant contrat du 10 mars 2016, la société I. Location a consenti à la société Movidone la location de longue durée d'une machine à café XF 50 de marque Jura, fournie par la Sarl Way Water, moyennant le versement de 21 loyers trimestriels de 252 euros toutes charges comprises l’un.
La société I. Location a fait l'acquisition auprès de la Sarl Way Water d'une machine à café XF 50 au prix de 4.307,69 euros toutes taxes comprises, selon facture du 14 mars 2016 adressée par la Sarl Way Water.
Le matériel a été livré le 15 mars 2016.
La Sarl Way Water a, le 17 mai 2016, fait l'objet d'un jugement d'ouverture d'une procédure de liquidation judiciaire.
Se prévalant d'impayés à compter du mois d'octobre 2016, la société I. Location a, après mise en demeure infructueuse du 13 janvier 2017, notifié à la société Movidone la résiliation anticipée du contrat de location en application des clauses contractuelles, mettant en demeure sa cocontractante à lui payer la somme principale de 4.121,48 euros.
Faute de règlement, elle l'a fait assigner devant le tribunal judiciaire de Strasbourg, par acte du 25 août 2017, en restitution du matériel objet du contrat de location, sous peine d'astreinte, et en paiement des sommes de 504 euros au titre des mensualités impayées, avec intérêts au taux légal augmentées de cinq points à compter du 17 février 2017, 3.570 euros au titre de l'indemnité de résiliation avec intérêts au taux légal à compter du 17 février 2017, 40 euros au titre de l'indemnité de recouvrement et 800 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Faisant essentiellement valoir tant le défaut de conformité de la machine à café livrée que son dysfonctionnement et invoquant la rupture du contrat de maintenance du fait de la liquidation judiciaire du fournisseur, la société Movidone a fait mettre en cause Maître U. ès- qualités de liquidateur de la
Sarl Way Water, en liquidation judiciaire, et a sollicité le constat de l'anéantissement du contrat conclu avec cette dernière, le constat de la caducité du contrat interdépendant de location de longue durée, entraînant le rejet des demandes principales de la société I. Location et la condamnation de cette dernière à lui payer les sommes de 2.242,80 euros en restitution des loyers payés outre 1.000 euros en réparation des préjudices matériel et de jouissance subi et 1 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
Subsidiairement, elle a conclu à la condamnation de Maître U., ès-qualités de liquidateur judiciaire, à la garantir de toutes condamnations pouvant être prononcées à son encontre en principal, intérêts et frais, sous forme d'admission de sa créance au passif de la liquidation judiciaire.
Par jugement réputé contradictoire du 25 juin 2021, le tribunal judiciaire de Strasbourg a débouté la société Movidone de ses demandes en nullité ou résiliation d'un contrat de maintenance et en constat de la caducité du contrat de location de longue durée et déclaré la société I. Location recevable et partiellement fondée en ses demandes.
Il a condamné la société Movidone à restituer le matériel loué à ses frais mais sans prononcer d'astreinte, et à payer à la société I. Location, au titre des loyers échus impayés, la somme de 504 euros toutes taxes comprises, avec les intérêts au taux légal à compter du 12 juillet 2017, au titre de l'indemnité de résiliation la somme de 3.570 euros, majorée des intérêts au taux légal à compter du jour du jugement, au titre de l'indemnité de recouvrement, la somme de 40 euros, et au titre de l'article 700 du code de procédure civile la somme de 400 euros.
Il a débouté la société Movidone de ses demandes de dommages intérêts dirigées contre la société I. Location, l'a déclarée irrecevable en ses demandes dirigées contre Maître U., ès qualités de liquidateur de la Sarl Way Water, a ordonné l'exécution provisoire, a condamné la société Movidone aux dépens de l'instance y compris ceux afférents à la mise en cause du liquidateur et déclaré le jugement commun et opposable à Maître U., ès qualités de liquidateur de la Sarl Way Water.
Pour statuer ainsi, le tribunal a essentiellement retenu que la société Movidone ne rapportait pas la preuve de l'existence du contrat de maintenance allégué, qu'elle n'établissait pas la réalité du dysfonctionnement du matériel non plus que celle de sa non-conformité à ce qui avait été commandé ; qu' elle n'alléguait ni prouvait employer moins de six salariés de sorte qu'elle ne pouvait se prévaloir des dispositions protectrices du code de la consommation ; qu'il n'existe pas de déséquilibre significatif entre les droits et les obligations des parties créé par les articles 10 et 11 des conditions générales, l'interdiction de résiliation anticipée hors manquements aux obligations contractuelles ne créant pas de déséquilibre significatif entre les parties au contrat.
L'appel en garantie a été déclaré irrecevable en raison du fait que la société Movidone n'a pas justifié de sa déclaration de créance au passif de liquidation judiciaire de la Sarl Way Water.
[*]
La société Movidone a interjeté appel à l'encontre de cette décision suivant déclaration en date du 13 juillet 2021 et par dernières écritures notifiées le 31 août 2022, elle conclut à l'infirmation en toutes ses dispositions du jugement déféré et demande à la cour statuant à nouveau de :
« Vu les articles 1116, 1184,1134 anciens du code civil applicables à l'espèce,
Vu l'article 331 du code de procédure civile,
Vu les articles L. 441-6, L. 441-3 et D. 441-5 du code de commerce,
Au visa de l'article 132-1 du code de la consommation, tel qu'il était en vigueur en mars 2016,
Vu la jurisprudence applicable,
Sur demande principale
- prononcer l'anéantissement du contrat ayant lié la Sarl Way Water et la société Movidone au 17 mai 2016 (liquidation judiciaire de la Sarl Way Water) ou au plus, au mois de septembre 2016,
En conséquence,
- prononcer la caducité du contrat de location longue durée conclu entre la société I. Location et la société Movidone, à compter du 17 mai 2016 et au plus tard septembre 2016,
En conséquence de la caducité,
- débouter la société I. Location de sa demande en paiement des sommes de 504 euros avec intérêts au taux légal à compter du 17 février 2017, de 3.570 euros augmentée des intérêts au taux légal à compter du 17 février 2017 et de 40 euros et de toutes ses demandes,
Subsidiairement,
- ordonner la diminution de la clause pénale, manifestement excessive, dont se prévaut la société I. Location, à hauteur de l'euro symbolique,
- condamner la société I. Location à payer à la société Movidone une somme de 2.242,80 euros toutes taxes comprises, au titre du remplacement nécessaire du plan de travail,
- condamner la société I. Location à payer à la société Movidone une indemnité de 1.500 euros à titre de dommages intérêts pour les préjudices subis,
Sur l'intervention forcée contre Maître U., ès- qualités de mandataire ad hoc de la Sarl Way Water
- dire et juger la société Movidone recevable et bien fondée en son intervention forcée,
- prononcer l'anéantissement légitime du contrat ayant lié la société Movidone et la Sarl Way Water et en tirer toutes conséquences de caducité dans la relation avec la société I. Location,
- condamner Maître U., ès qualités de liquidateur de la Sarl Way Water, en vertu du mandat ad hoc dont il est titulaire pour les besoins de la procédure, à supporter l'intégralité des condamnations prononcées le cas échéant en faveur de la société I. Location, sous la forme d'une admission d'une créance au passif de liquidation judiciaire de la Sarl Way Water,
Subsidiairement sur l'intervention forcée,
- condamner Maître U., ès-qualités de liquidateur de la Sarl Way Water, à relever et garantir la société Movidone de toutes les condamnations qui seraient par extraordinaire prononcées à son encontre au profit de la société I. Location à titre que ce soit, en principal, intérêts, frais article 700 du code de procédure civile et dépens,
Sur appel incident de la société I. Location
Au visa de l'article 564 du code de procédure civile,
- déclarer irrecevable la prétention nouvelle émise par la société I. Location,
Subsidiairement,
- rejeter la demande d'indemnisation à hauteur de 2.000 euros formulée par la société I. Location comme étant mal fondée,
En tout état de cause,
- condamner la société I. Location à payer à la société Movidone une somme de 3.500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner la même aux entiers frais et dépens de première instance et d'appel ».
Au soutien de son appel, la société Movidone fait valoir que le matériel livré ne correspond pas au matériel commandé et qu'elle ne pouvait se convaincre de ce défaut de conformité lorsqu'elle a signé le bon de livraison.
Elle soutient avoir conclu avec le fournisseur, la Sarl Way Water, depuis en liquidation judiciaire, un contrat incluant la maintenance, le service après-vente, la garantie du matériel objet de la location longue durée et la fourniture des consommables (café) et que le contrat qu'elle a conclu avec cette société I. Location est interdépendant avec le contrat de location conclu le même jour avec la société I. Location.
Elle assure que la société I. Location, dont elle allègue qu'elle produit de faux documents ou des documents incomplets, était parfaitement informée de l'existence du contrat de maintenance.
Elle prétend que du fait de sa mise en liquidation judiciaire en date du 17 mai 2016, la Sarl Way Water n'a plus été en mesure d'exécuter les obligations résultant du contrat de maintenance, de sorte que ce contrat s'est trouvé résolu de plein droit en vertu de l'article 1184 du code civil, au plus tôt au 17 mai 2016 et au plus tard en septembre 2016, date de la panne non réparée de la machine à café.
Elle affirme en outre que la résolution du contrat de maintenance est également fondée du fait de la non-conformité de la chose livrée à la chose commandée et postule que la Sarl Way Water se serait rendue coupable de manœuvres dolosives pour obtenir la signature par elle à tout prix du contrat alors qu'elle se savait probablement en état de cessation des paiements et lui a livré une vieille machine produite en 2013 en lieu et place du matériel commandé.
Elle ajoute qu'en raison de l'interdépendance des contrats, la résolution ou l'annulation du contrat de prestations de services entraîne la caducité du contrat de location longue durée, de sorte que la société I. Location doit être déboutée de toutes ses demandes.
À titre subsidiaire, elle estime la clause pénale manifestement excessive au regard du fait que la société I. Location ne lui a pas permis de faire réparer la machine en lui transmettant la facture d'achat.
[*]
Par dernières conclusions notifiées le 6 octobre 2022, la société I. Location demande à la cour de :
« Vu les articles anciens articles 1134, 1152 et 1153 du code civil et l'ancien article L. 441-6 du code de commerce,
- déclarer l'appel mal fondé,
- confirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions sauf en ce qu'il a condamné la société Movidone à restituer à ses frais le matériel objet du contrat de location,
En conséquence,
- débouter la société Movidone de l'intégralité de ses demandes dirigées à l'encontre de la société I. Location,
- condamner la société Movidone au paiement de la somme de 504 euros augmentée des intérêts légaux à compter du 12 juillet 2017,
- condamner la société Movidone au paiement de la somme de 3.570 euros augmentée des intérêts légaux à compter du 12 juillet 2017,
- condamner la société Movidone au paiement de la somme de 40 euros à titre d'indemnité de recouvrement,
- déclarer l'appel incident et la demande additionnelle de la société I. Location recevable et bien fondée,
- infirmer la décision en ce que la société Movidone a été condamnée à restituer à ses frais le matériel objet du contrat de location,
Statuant à nouveau :
- condamner la société Movidone au paiement de la somme de 2.000 euros à titre de dommages intérêts pour la non restitution du matériel, objet du contrat de location,
- condamner la société Movidone au paiement de la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner la société Movidone aux entiers frais et dépens de l'instance d'appel et de celle de première instance.
En substance, la société I. Location qui fait grief à l'appelante de procéder par voie d'affirmation, conteste l'existence d'un contrat de maintenance liant la société Movidone et la Sarl Way Water, dont elle n'aurait, au demeurant, pas été informée, la case sur le contrat de location, selon laquelle elle est informée de l'existence d'un contrat de prestations de services avec le fournisseur, n'étant pas cochée et conteste en conséquence l'interdépendance des contrats invoquée par l'appelante.
Elle ajoute que la conclusion du contrat de location n'est pas dépendante de celle d'un contrat de maintenance, qui est purement facultative.
Elle s'insurge contre les accusations de la partie adverse qui lui fait grief de ne pas produire l'intégralité du contrat et notamment la page 3, expliquant que la page 3 du contrat ne peut être produite par elle dès lors qu'il s'agit d'un exemplaire destiné au locataire.
Elle soutient que la société appelante, dont le dossier de preuves est défaillant, ne justifie pas d'une cause de résiliation ou d'annulation du prétendu contrat de maintenance.
Elle affirme qu'elle a parfaitement rempli l'ensemble de ses obligations correspondant à un service financier, à savoir se porter acquéreur du matériel en versant le prix au fournisseur et le donner en location au locataire et qu'elle doit être indemnisée du préjudice qu'elle subit du fait de la défaillance du locataire qui lui a fait perdre d'une part le capital investi, mais d'autre part la rentabilité escomptée de l'opération de location qui constitue l'un de ses objectifs prioritaires en tant qu'organisme de financement.
Elle s'oppose à la demande en paiement d'une facture de 2.242,80 euros correspondant au remplacement d'un plan de travail, dont le fondement juridique lui échappe ainsi qu'à la demande de dommages intérêts en réparation d'un prétendu préjudice de jouissance, alors qu'il appartenait au locataire de s'adresser au fournisseur en cas de dysfonctionnement du matériel.
Elle prétend que sa demande en paiement d'une indemnité pour non restitution du matériel n'est pas une demande nouvelle car elle tend aux mêmes fins que celles soumises au premier juge et en tout état de cause en serait une conséquence.
[*]
La déclaration d'appel et les conclusions d'appel ont été signifiées à Maître U.,ès-qualités de mandataire ad'hoc de la Sarl Way Water, en liquidation judiciaire par remise à personne le 19 octobre 2021.
Il n'a pas comparu.
[*]
L'ordonnance de clôture est en date du 2 novembre 2022.
Les parties ont, en cours de délibéré été invitées à présenter leurs observations quant à l'éventuel défaut d'intérêt pour la société I. Location à former appel incident quant à la restitution du matériel, faute de succombance.
Par observations du 4 janvier 2023, la société I. Location fait valoir qu'il est certain que l'adversaire ne restituera jamais le matériel, comme énoncé dans ses premières conclusions d'appel et que l'intérêt à faire appel doit s'apprécier au jour de l'appel dont la recevabilité ne peut dépendre de circonstances postérieures qui l'auraient rendues sans objet.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
MOTIFS :
Vu les dernières écritures des parties ci-dessus spécifiées et auxquelles il est référé pour plus ample exposé de leurs prétentions et moyens, en application de l'article 455 du code de procédure civile ;
Vu les pièces régulièrement communiquées ;
Sur la livraison du matériel objet du contrat de location :
La société I. Location produit la facture d'achat du matériel objet du contrat de location litigieux portant sur une « Impressa XF 50 » au prix de 4.307,69 euros.
La société Movidone ne peut utilement soutenir que la machine à café qui lui a été livrée était une « Impressa XJ5 ne correspondant pas au modèle décrit dans le contrat de location », alors qu'elle a signé le 15 mars 2016 une confirmation de livraison par laquelle elle a reconnu que le produit réceptionné, correspond aux descriptions figurant au contrat de location.
Il lui appartenait de vérifier la conformité du matériel livré avant de signer un document attestant de cette conformité.
Comme le premier juge l'a relevé par des motifs pertinents que la cour adopte, les éléments que produit la société Movidone, qui sont les mêmes que ceux de première instance, (copies de photographies d'étiquettes, mail adressé par la société Movidone à la société I. Location le 22 novembre 2016) ne permettent pas de prouver que, contrairement à la reconnaissance faite par elle de la conformité de la chose mise à disposition, la machine à café qu'elle a reçue ne correspondait pas au modèle commandé et n'était pas neuve.
A défaut d'éléments de preuve nouveaux, la décision déférée ne peut qu'être confirmée de ce chef.
Sur l'existence d'un contrat de maintenance et l'allégation de l'interdépendance de contrats :
Il est de jurisprudence que sont interdépendants les contrats concomitants ou successifs qui s'inscrivent dans une opération incluant une location financière.
En application des articles 9 du code de procédure civile et 1353 du code civil, il appartient à la société Movidone, qui allègue avoir conclu avec la Sarl Way Water un contrat qui serait interdépendant avec le contrat de location conclu avec la société I. Location, de rapporter la preuve de ses allégations.
Celle-ci produit pour tout élément de preuve une proposition émise en date du 1er mars 2016 par la Sarl Way Water concernant un « global services » comprenant l'installation d'une machine à café, une offre de location sur 63 mois comprenant la location de la machine à café et l'entretien semestriel préventif, l'entretien curatif, le service après-vente et la maintenance ainsi que la gestion des consommables (café en grains, filtres, pastilles de nettoyage...). Il y est prévu au titre du coût de la location de la machine à café un prix de 70 euros ht mensuel comprenant 5 kg de café. Il y est précisé que le matériel est garanti 63 mois selon le contrat de services.
Or, il n'est pas rapporté la preuve de l'acceptation de cette offre par la société Movidone et de la rencontre des volontés des deux parties.
Le contrat de services qui aurait dû être conclu suite à cette offre commerciale n'est pas versé aux débats et il n'est justifié d'aucun élément de nature à établir la réalité de sa conclusion.
Si la société Movidone verse aux débats un exemplaire du formulaire de confirmation de livraison signé par ses soins le 15 mars 2016, dont la case indiquant que le locataire informe I. de la conclusion d'un contrat de maintenance/entretien avec le fournisseur pour le matériel loué, est cochée, force est de constater qu'elle produit également le même formulaire, signé par elle à la même date sous une signature légèrement différente, dont ladite case n'est pas cochée et que l'exemplaire unique de confirmation de livraison versé aux débats par la société I. Location correspond à l'exemplaire de la confirmation de livraison dont la case relative à l'existence d'un contrat de maintenance n'est pas cochée.
En l'absence de preuve de l'existence d'une convention de maintenance, et alors qu'il n'est pas justifié que la Sarl Way Water aurait usé de manœuvres dolosives pour convaincre la société Movidone de contracter, c'est fort justement que le premier juge a rejeté les demandes de résiliation, de nullité ou d'anéantissement de ce prétendu contrat comme le moyen tiré de la caducité subséquente du contrat de location longue durée.
Sur le prétendu dysfonctionnement du matériel livré :
Force est encore de constater que la société Movidone se borne à produire aux débats deux courriels qu'elle a adressés à la société I. Location le 22 novembre 2016 et l'autre le 8 décembre 2016, invoquant une panne.
Ces éléments ne sont pas à eux seuls suffisants à rapporter la preuve du dysfonctionnement allégué et encore moins de sa cause.
Par ailleurs et à titre surabondant, il résulte des clauses du contrat de location (article 3-2) que le bailleur a cédé au locataire les droits et actions qu'il détiendrait contre le fournisseur à raison des vices ou défauts affectant le produit et que le locataire doit exercer tous les recours utiles contre le fournisseur et renonce à toute action contre le bailleur (article 5).
Sur la créance de la société I. Location :
En vertu de l'article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016, les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites.
En l'espèce, la société I. Location est en droit, en application des articles 4.1 à 4.3 et 10 et 11 des conditions générales du contrat de location, de réclamer le paiement des sommes de :
- 504 euros ttc au titre des loyers échus impayés avec les intérêts au taux légal à compter du 12 juillet 2017, date de réception de la lettre recommandée portant notification de la résiliation anticipée du contrat,
- 3.570 euros au titre de l'indemnité de résiliation correspondant aux loyers hors-taxes à échoir jusqu'à la fin du contrat avec les intérêts au taux légal à compter du jugement déféré.
Pour solliciter la réduction à l'euro symbolique du montant de l'indemnité de résiliation, la société Movidone, appelante, fait valoir que la société I. Location ne lui aurait pas permis de faire réparer la machine en lui transmettant la facture d'achat.
Cependant, elle procède encore une fois par allégation, ne produisant aux débats aucun mail ou courrier du fabricant qui lui aurait réclamé une facture d'achat.
L'indemnité contractuelle de résiliation, effectivement constitutive d'une clause pénale susceptible de modération en application de l'article 1231-5 du code civil, n'apparaît pas en l'espèce manifestement excessive : en effet, l'indemnité prévue n'excède pas en l'occurrence la légitime rémunération que la société I. Location pouvait espérer si le contrat s'était poursuivi jusqu'à son terme, sans incident de paiement du locataire. Elle vise à compenser le préjudice financier subi par la bailleresse résultant de la perte du bénéfice escompté alors qu'elle a financé et mis à disposition un matériel neuf en contrepartie de la perception des loyers et que l'économie du contrat a été calculée sur la base de la durée ferme de location.
En vertu des dispositions de l'article L. 441-6 du code de commerce, dans sa rédaction applicable au contrat, tout professionnel en situation de retard de paiement est de plein droit débiteur, à l'égard du créancier, d'une indemnité forfaitaire pour frais de recouvrement, dont le montant est fixé par décret.
La société I. Location, qui n'édite pas de factures, est donc en droit, conformément d'ailleurs aux conditions générales du contrat de location, de solliciter le paiement d'une somme de 40 euros correspondant au montant de l'indemnité forfaitaire pour frais de recouvrement, fixé par décret.
La décision déférée sera en conséquence confirmée quant aux montants financiers mis à la charge de la société Movidone.
Sur la demande au titre de l'indemnité de non-restitution :
Constatant que la partie appelante n'a pas exécuté la décision déférée qui ordonnait la restitution du matériel objet du contrat de location, la société I. Location conclut à l'infirmation de la décision déférée en ce que la société Movidone a été condamnée à lui restituer le matériel objet du contrat de location et demande à la cour, statuant à nouveau, de condamner la société Movidone au paiement d'une somme de 2.000 euros à titre de dommages intérêts pour non restitution du matériel.
Cependant, la société I. Location avait sollicité devant le premier juge la condamnation, sous astreinte, de la société Movidone à restituer le matériel objet du contrat de location.
Ayant obtenu gain de cause en première instance quant à la condamnation à restitution et alors qu'aucune circonstance particulière ne fait présumer de l'impossibilité pour la société civile de faire exécuter la décision déférée de ce chef (alors que tel était le cas dans une affaire ayant donné lieu à un arrêt du 23 mai 2022, produit par l'intimée), elle n'est pas recevable, faute de succombance, à interjeter un appel incident de ce chef.
Cet appel incident sera déclaré irrecevable.
Sur les demandes de dommages et intérêts formées par la société Movidone :
A défaut de caractérisation d'une faute commise par la société I. Location dans l'exécution des obligations qui s'imposaient à elle en vertu du contrat de location de longue durée, les demandes de dommages et intérêts formées par la société Movidone ne sauraient prospérer et ont été à bon droit rejetées par le premier juge.
Sur l'appel en garantie :
C'est par une juste application de la règle de droit que le premier juge a retenu que l'appel en garantie diligenté à l'encontre de la Sarl Way Water n'était pas recevable dès lors que la société Movidone n'a pas déclaré sa créance à la procédure de liquidation judiciaire de la Sarl Way Water.
La société Movidone, qui ne conteste pas que sa créance éventuelle à l'encontre du fournisseur a une origine antérieure au jour d'ouverture de la procédure collective le concernant, oppose qu'« en novembre 2016 ( panne) la forclusion lui aurait été opposée ».
Outre qu'une procédure de relevé de forclusion est prévue par le droit des procédures collectives et que cette faculté n'a pas été mise en oeuvre, il reste que le défaut de déclaration d'une créance antérieure rend cette créance inopposable à la masse des créanciers.
Le jugement déféré sera donc confirmé en ce qu'il a déclaré irrecevable l'appel en garantie.
Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile :
Les dispositions du jugement déféré quant aux dépens et à l'article 700 du code de procédure civile seront confirmées.
Partie perdante à hauteur d'appel, la société Movidone sera condamnée aux dépens conformément aux dispositions de l'article 696 du code de procédure civile et déboutée de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
En revanche, il sera fait droit à la demande formée par la société I. Location au titre de l'article 700 du code de procédure civile dans la limite de la somme de 1.200 euros.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
La Cour,
Statuant publiquement et réputé contradictoirement,
CONFIRME le jugement déféré en toutes ses dispositions,
Et y a joutant,
DÉCLARE irrecevable pour défaut d'intérêt à agir l'appel incident tendant à l'infirmation du jugement déféré du chef de la condamnation à restitution du matériel loué et partant irrecevable la demande en paiement d 'une indemnité de non restitution,
DÉBOUTE la société Movidone de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
CONDAMNE la société Movidone à payer à la société I. Location la somme de 1.200 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
CONDAMNE la société Movidone aux entiers dépens.
La Greffière La Présidente
- 6392 - Code civil et Droit commun - Sanction indirecte des déséquilibres significatifs – Indivisibilité dans les locations financières - Droit postérieur aux arrêts de Chambre mixte
- 8262 - Code civil - Sanction directe des déséquilibres significatifs - Art. 1171 C. civ. (Ord. 10 février 2016 – L. ratif. 20 avril 2018). – Présentation par contrat – Location financière sans option d’achat