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CA GRENOBLE (ch. com.), 2 février 2023

Nature : Décision
Titre : CA GRENOBLE (ch. com.), 2 février 2023
Pays : France
Juridiction : Grenoble (CA), ch. com.
Demande : 21/02587
Date : 2/02/2023
Nature de la décision : Réformation
Mode de publication : Judilibre
Date de la demande : 10/06/2021
Référence bibliographique : 5933 (domaine, véhicule), 5713 (rectification du visa de textes erronés)
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CERCLAB - DOCUMENT N° 10086

CA GRENOBLE (ch. com.), 2 février 2023 : RG n° 21/02587 

Publication : Judilibre

 

Extrait : « 35. Si l'intimée oppose les dispositions du code de la consommation, et invoque une notion de consommateur dans ses conclusions, elle a cependant la qualité de personne morale et est de droit commerçante, en raison de sa forme puisqu'il s'agit d'une société par actions simplifiée. Au sens de l'article préliminaire du code de la consommation, dans sa rédaction applicable au 11 décembre 2015, date de l'adhésion de l'appelante au contrat Plan Autoexpert, au sens de ce code, est considérée comme un consommateur toute personne physique qui agit à des fins qui n'entrent pas dans le cadre de son activité commerciale, industrielle, artisanale ou libérale. L'article L. 212-1 dans la rédaction existant à cette époque, est relatif à la conformité des produits mis en vente sur le marché, et ne vise pas les clauses abusives. Le régime des clauses abusives est régi par les articles L. 132-1 et suivants (anciens) du code de la consommation, et l'article L. 132-1 prévoit que ce régime concerne les relations existant entre professionnel d'une part, et les non-professionnels ou les consommateurs d'autre part. Or, l'intimée a la qualité de professionnel, de sorte qu'elle ne peut invoquer ces dispositions. Ce moyen est ainsi mal fondé. »

 

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE GRENOBLE

CHAMBRE COMMERCIALE

ARRÊT DU 2 FÉVRIER 2023

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 21/02587. N° Portalis DBVM-V-B7F-K5GM. Appel d'une décision (N° RG 2019J00388) rendue par le Tribunal de Commerce de GRENOBLE, en date du 21 mai 2021, suivant déclaration d'appel du 10 juin 2021.

 

APPELANTES :

SA ICARE ASSURANCE

au capital de XXX €, inscrite au RCS de Nanterre sous le n° YYY, représentée par son Président en exercice, domicilié en cette qualité audit siège, [Adresse 4], [Localité 3]

SA ICARE

au capital de ZZZ €, inscrite au RCS de Nanterre sous le n° WWW, représentée par son Président en exercice, domicilié en cette qualité au siège social [Adresse 4], [Localité 3]

représentées par Maître Roselyne CHANTELOVE de la SCP CHAPUIS CHANTELOVE GUILLET-LHOMAT, avocat au barreau de GRENOBLE, postulant et par Maître Philippe RAVAYROL, avocat au barreau de PARIS

 

INTIMÉE :

SAS ACGP CACI

inscrite au RCS de GRENOBLE sous le N° VVV, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés au dit siège [Adresse 1], [Localité 2], représentée par Maître André MAUBLEU, avocat au barreau de GRENOBLE

 

COMPOSITION DE LA COUR : LORS DU DÉLIBÉRÉ : Mme Marie-Pierre FIGUET, Présidente de Chambre, Mme Marie Pascale BLANCHARD, Conseillère, M. Lionel BRUNO, Conseiller,

DÉBATS : A l'audience publique du 17 novembre 2022, M. Lionel BRUNO, Conseiller, qui a fait rapport assisté de Alice RICHET, Greffière, a entendu les avocats en leurs conclusions, les parties ne s'y étant pas opposées conformément aux dispositions des articles 805 et 907 du Code de Procédure Civile. Il en a été rendu compte à la Cour dans son délibéré et l'arrêt a été rendu ce jour.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Faits et procédure :

1. Le 19 novembre 2015, la société Acgp Caci a commandé auprès de la société Faf Bymycar Grenoble un véhicule utilitaire de marque Fiat, au prix de 29.372,46 euros. Cette acquisition a été effectuée au moyen d'un contrat de crédit-bail, souscrit auprès de la société Fca Leasing. Une facture a été émise par la société Faf Bymycar sur la société Fca Leasing le 25 novembre 2015, la déclaration de cession a été effectuée par le vendeur le 11 décembre 2015. Le certificat d'immatriculation établi le 16 décembre 2015 a mentionné la société Fca Leasing comme propriétaire, et la société Acgp Caci comme utilisateur. Le 11 décembre 2015, la société Acgp Caci a adhéré au contrat de prolongation de garantie dit « Plan autoexpert », souscrit par la société Fca Leasing auprès de la société Icare, pour une durée de quatre ans.

2. Le 10 juillet 2017, le véhicule a présenté un bruit anormal et a été conduit au garage de la société Faf Bymycar. Il a été restitué à la société Acgp Caci le 26 juillet 2017. Le lendemain, ce véhicule, totalisant 31.076 km, a présenté une panne moteur et a été immobilisé chez la société Faf Bymycar. Celle-ci a établi un devis de réparation le 11 août 2017, pour 10.097,47 euros.

3. La société Icare a mandaté le cabinet Adexauto afin d'examiner le véhicule. La société Acgp Caci a obtenu la désignation d'un expert par ordonnance de référé du 27 février 2018, et l'expert, monsieur [C], a remis son rapport le 29 septembre 2018. La société Acgp Caci a alors saisi le juge des référés afin d'obtenir le paiement d'une provision de 32.609,92 euros, et par ordonnance du 30 avril 2019, le juge des référés a renvoyé les parties devant le juge du fond. Le 9 septembre 2019, la société Acgp Caci a ainsi assigné les sociétés Bymycar, Fiat France, Fca France, Fca Leasing, Fca Capital et Icare devant le tribunal de commerce de Grenoble.

4. Par jugement du 21 mai 2021, le tribunal de commerce a :

- reçu la société Icare Assurance en son intervention volontaire ;

- constaté l'existence de vices cachés ;

- dit que les sociétés Fca France et Faf Bymycar sont tenues solidairement à la garantie des vices cachés ;

- condamné conjointement et solidairement les sociétés Fca France et Faf Bymycar à restituer à la société Acgp Caci la somme de 8.666,99 euros HT, arbitrée par l'expert judiciaire, et correspondant à la valeur du remplacement du moteur devenu hors d'usage ;

- mis la société Icare hors de cause quant à la mise en œuvre de la garantie des vices cachés ;

- mis la société Fca Capital hors de cause quant à la mise en œuvre de la garantie des vices cachés ;

- constaté que la société Acgp Caci a acquis un véhicule neuf, et qu'il n'y a pas eu tromperie ;

- dit que la panne du véhicule litigieux entre dans le cadre de la garantie Icare ;

- constaté que la société Icare n'a pas répondu à son obligation contractuelle ;

- condamné la société Icare à payer à la société Acgp Caci la somme de 10.097,47 euros TTC au titre de sa responsabilité contractuelle ;

- dit que les sociétés Fca Leasing et Fca Capital n'ont commis aucune faute susceptible d'engager leur responsabilité ;

- débouté la société Acgp Caci de sa demande de voir condamner les sociétés Fca Leasing et Fca Capital au titre des préjudices subis du fait de la panne du véhicule Ducato ;

- dit que la société Faf Bymycar a commis une faute pour défaut de conseil et de réparations ;

- condamné la société Faf Bymycar à payer à la société Acgp Caci la somme de 20.777,25 euros HT, au titre des préjudices subis du fait de la panne du véhicule Ducato ;

- débouté la société Acgp Caci de sa demande au titre du préjudice moral ;

- débouté la société Acgp Caci de sa demande au titre de la résistance abusive ;

- condamné solidairement les sociétés Fca France, Faf Bymycar, Icare et Icare Assurance, à payer à la société Acgp Caci une somme arbitrée à 3.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné les sociétés Fca France, Faf Bymycar, et Icare qui succombent, aux dépens ;

- débouté les parties du surplus de leurs demandes.

5. La société Icare a interjeté appel de cette décision le 10 juin 2021, en ce que le tribunal a :

- dit que la panne du véhicule litigieux entre dans le cadre de la garantie Icare ;

- constaté que la société Icare n'a pas répondu à son obligation contractuelle ;

- condamné la société Icare à payer à la société Acgp Caci la somme de 10.097,47 euros TTC au titre de sa responsabilité contractuelle ;

- condamné solidairement la société Icare à payer à la société Acgp Caci une somme arbitrée à 3.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.

6. La société Icare Assurance a également interjeté appel de cette décision le 9 septembre 2021, en ce que le tribunal l'a condamnée à payer à la société Acgp Caci la somme de 3.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

7. Par ordonnance du 23 septembre 2021, ces deux appels ont été joints. En outre, par ordonnance juridictionnelle du 27 janvier 2022, le conseiller de la mise en état a débouté la société Acgp Caci de sa demande tendant à l'irrecevabilité de l'appel formé par la société Icare. L'instruction de cette procédure a été clôturée le 3 novembre 2022.

 

Prétentions et moyens de la société Icare et de la société Icare Assurance :

8. Selon leurs conclusions remises le 20 septembre 2022, elles demandent à la cour, au visa des articles 6 et 9 du code de procédure civile, 1103, 1231-1, 1353 et 1641 du code civil, L. 121-7 du code des assurances :

- d'infirmer le jugement déféré en ce qu'il a jugé que la panne du véhicule litigieux entre dans le cadre de la garantie Icare ; en ce qu'il a jugé que la société Icare n'a pas répondu à son obligation contractuelle ; en ce qu'il a condamné la société Icare à payer à la société Acgp Caci la somme de 10.097,47 euros TTC au titre de sa responsabilité contractuelle ; en ce qu'il a condamné solidairement la société Icare à payer à la société Acgp Caci une somme arbitrée à 3.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance ;

- d'infirmer le jugement déféré en ce qu'il a condamné la société Icare Assurance à payer à la société Acgp Caci la somme de 3.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- statuant à nouveau, de juger que la société Acgp Caci n'a pas respecté les préconisations du constructeur concernant l'entretien du véhicule, et notamment la périodicité à laquelle il devait être réalisé ;

- de juger que le respect des préconisations du constructeur est une condition de la garantie du « Plan Autoexpert » ;

- en conséquence, de débouter la société Acgp Caci de l'ensemble de ses demandes en principal, intérêts et frais, formées contre la société Icare ;

- subsidiairement, de juger que les manquements commis par la société Acgp Caci en qualité d'utilisateur du véhicule font l'objet de l'exclusion de garantie de l'article 5 du contrat Plan Autoexpert ;

- de juger que le plan Autoexpert ne saurait garantir le vice propre de la chose assurée ;

- en conséquence, de débouter la société Acgp Caci de l'ensemble de ses demandes formées à l'encontre de la société Icare ;

- de condamner la société Acgp Caci à payer aux sociétés Icare et Icare Assurance la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- de condamner la société Acgp Caci aux entiers dépens de l'instance.

Les appelantes exposent :

9. - que le cabinet Adexauto, mandaté par la société Icare, a notamment constaté un niveau d'huile moteur inférieur au minimum, un turbocompresseur hors de service avec la présence d'huile dans l'échangeur, la présence d'huile dans les durites d'entrée et de sortie de l'échangeur, du côté de l'admission du turbocompresseur, un dommage sur la volute du compresseur et un jeu au niveau de l'axe du turbocompresseur ; qu'il a précisé que cette avarie résulte d'un manque d'huile, ayant pour origine soit une utilisation du véhicule avec un niveau d'huile trop bas, non contrôlé par l'utilisateur, soit un non-respect des préconisations du constructeur en matière d'entretien, imposant un vidange tous les deux ans ou 48.000 km à la première de ces échéances ;

10. - que ce véhicule n'a jamais été entretenu par l'intimée depuis son acquisition, de sorte que le 12 octobre 2017, la société Icare lui a indiqué qu'elle n'interviendra pas dans la prise en charge du sinistre ; que le tribunal, s'il a dit que la société Icare ne peut être tenue au titre de la garantie des vices cachés, et a mis hors de cause la société Icare Assurance, a cependant retenu la responsabilité contractuelle de la société Icare au motif qu'elle ne peut se prévaloir de l'article 5 du contrat relatif aux dommages exclus, traitant de l'exclusion de garantie en cas de mauvaise utilisation du véhicule ;

11. - que si le contrat Plan Autoexpert a été conclu entre le groupe FC France et la société Icare, l'intimée en est le bénéficiaire selon le bulletin d'adhésion signé le 11 décembre 2015 ; qu'elle a déclaré avoir pris connaissance des conditions générales du contrat et y avoir adhéré, alors qu'elle en a reçu un exemplaire, qu'elle produit ;

12. - que ce contrat couvre les frais de réparation des avaries fortuites, alors que selon son article 7, le bénéficiaire s'engage à utiliser le véhicule en bon père de famille, dans le respect des normes techniques du constructeur, et dans le respect de la préconisation des révisions aux kilométrages indiqués dans le carnet Autoexpert ; qu'il est rappelé que tout défaut d'entretien fait perdre le bénéfice de la garantie ; qu'il ne s'agit que de l'énoncé de la garantie et non d'une clause d'exclusion comme soutenu par l'intimée ; que la charge de la preuve de l'application de la garantie incombe à l'intimée, qui est l'assurée, et ainsi qui doit prouver le bon entretien du véhicule ;

13. - que si l'intimée soutient que cet article 7 constituerait une clause abusive, il ne crée cependant aucun déséquilibre significatif entre les droits et les obligations des parties ; que la Cour de Cassation a ainsi jugé le 8 janvier 2009 (pourvoi n° 07-20.731) que cette clause est une condition de la garantie ; ainsi, que différentes décisions indiquent que peu importe que le non-respect des préconisations d'entretien n'ait aucun lien de causalité avec la panne ;

14. - qu'en l'espèce, le rapport d'expertise amiable du cabinet Adexauto a constaté la présence d'une avarie au niveau du turbocompresseur du moteur, suite à un manque d'huile, ayant pour origine l'absence de contrôle du niveau d'huile et le non-respect des préconisations du constructeur en matière d'entretien, puisque ce véhicule acquis le 28 novembre 2014 n'a jamais été entretenu, ce que ne conteste pas l'appelante ; que le terme de deux ans suivant la première mise en circulation était largement dépassé au moment de la panne ;

15. - que si l'intimée soutient qu'elle ignorait la date de première mise en circulation, puisque le bon de commande établi par la société Faf Bymycar mentionnait que ce véhicule était neuf, le contrat de crédit-bail mentionnant une date de première mise en circulation au mois de novembre 2015, la facture émise par le vendeur indique cependant une immatriculation le 28 novembre 2014 ; que le contrat Plan Autoexpert ne concerne que les véhicules d'occasion, ainsi qu'indiqué dans le bulletin d'adhésion signé par l'intimée et dans les conditions générales ;

16. - que si l'intimée reproche aux sociétés Faf Bymycar, Fiat France et Fca France de l'avoir trompée sur la date de mise en circulation, l'empêchant ainsi de pouvoir respecter les conditions de la garantie Autoexpert, elle ne démontre pas que le carnet d'entretien ne lui a pas été remis lors de l'acquisition ; que la concluante n'étant ni le vendeur du véhicule, ni un professionnel de l'automobile, ne peut être tenue pour responsable de l'absence de communication de ce carnet ;

17. - subsidiairement, que l'article 5 du contrat a prévu une exclusion de la garantie en cas de mauvaise utilisation du véhicule ; que le seul fait que l'intimée n'ait pas respecté les préconisations concernant l'entretien du véhicule lui fait perdre ainsi le bénéfice de la garantie ; que l'intimée a commis une faute en ne contrôlant pas le niveau d'huile, ce qui aurait permis d'éviter la panne, ainsi que relevé par l'expert judiciaire ;

18. - que l'article 5 exclut également toute garantie si l'avarie résulte de réparations qui n'ont pas été décidées par un professionnel de la réparation automobile, de même que les conséquences d'un incident mécanique relevant des assurances de responsabilité civile professionnelle des réparateurs ; qu'en la cause, la société Faf Bymycar est intervenue à plusieurs reprises sur le véhicule, et notamment le 26 juillet 2018 pour le remplacement d'une vitre de porte ; qu'elle aurait alors dû préconiser la réalisation d'un entretien périodique, étant en outre le vendeur du véhicule, la période de deux ans suivant la mise en circulation étant atteinte; qu'elle est de même intervenue le 10 juillet 2017, suite à un dépôt du véhicule en raison d'un voyant d'alerte « révision » allumé ; que le véhicule a été restitué à l'intimée le 24 juillet 2017, et a parcouru 120 km avant d'être à nouveau confié à la société Faf Bymycar le 26 juillet 2017, en raison d'un bruit moteur important ; que la panne a ainsi pour origine des réparations non décidées par un professionnel de la réparation automobile, et relève de la responsabilité civile professionnelle du réparateur, ce qui est expressément exclu de la garantie Autoexpert ;

19. - que l'intimée fonde principalement sa demande sur l'existence d'un vice caché, alors que la société Icare a été mise hors de cause à ce titre par le tribunal ; que le contrat Plan Autoexpert exclut formellement toute garantie en cas d'un tel vice, indiquant que les conditions générales demeurent étrangères aux garanties conventionnelles ou légales dues par le constructeur ou le précédent propriétaire ; qu'ainsi, la concluante ne doit aucune garantie à ce titre ; qu'il s'agit de l'application de l'article L. 121-7 du code des assurances, disposant que les pertes subies par la chose assurée et qui proviennent de son vice propre ne sont pas à la charge de l'assureur, sauf convention contraire ;

20. - concernant la société Icare Assurance, que le tribunal n'a prononcé aucune condamnation à son encontre, à l'exception de celle intervenue sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ; que cette dernière ne peut qu'être infirmée, cette appelante n'ayant commis aucune faute.

 

Prétentions et moyens de la société Acgp Caci :

21. Selon ses conclusions remises le 9 mai 2022, elle demande à la cour :

- de déclarer l'appel de la société Icare irrecevable ;

- de déclarer abusive, nulle et inopposable la clause d'exclusion de garantie découlant de l'article 7 des conditions générales du contrat Plan Autoexpert, ou de l'interpréter dans le sens que la garantie est exclue uniquement si la panne résulte d'un défaut d'entretien du véhicule ;

- de confirmer le jugement déféré ;

- de condamner la société Icare à payer à la concluante la somme de 5.000 euros pour résistance et procédure abusive ;

- de la condamner à payer à la concluante la même somme par application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- de condamner la société Icare aux dépens d'appel, avec distraction au profit de maître Maubleu, avocat.

Elle répond :

22. - qu'à l'exception des appelantes, le jugement déféré a été accepté par les autres parties ;

23. - concernant l'appel de la société Icare, qu'il a été dirigé uniquement contre la concluante, de sorte qu'il est irrecevable par application de l'article 553 du code de procédure civile, puisqu'il existe une indivisibilité en raison de la condamnation solidaire de la société Icare avec les sociétés Fca France, Faf Bymycar et Icare Assurance ; que si l'appel aboutit, il modifiera les condamnations des autres parties solidaires ;

24. - sur le fond, que la concluante a adhéré au contrat Plan Autoexpert le 1er décembre 2015, pour une durée de quatre ans ; que les conditions générales ont prévu que ce contrat a pour objet de faire bénéficier le véhicule d'une prolongation de la garantie commençant à courir à la fin de la garantie du vendeur, et jusqu'à la fin du financement ; que les prestations concernent notamment l'immobilisation en cas de panne mécanique, la mise à disposition d'un véhicule de remplacement, la prise en charge des frais de transport, la prise en charge des organes à concurrence de la valeur du véhicule;

25. - qu'aucun carnet d'entretien n'a été remis à la concluante alors que l'avarie n'a pas pour origine un défaut d'entretien ;

26. - que la concluante a été trompé sur la date de mise en circulation du véhicule, puisque le bon de commande concernait un véhicule neuf, alors que le contrat de crédit-bail a mentionné une date de première mise en circulation en novembre 2015 ;

27. - que le 10 juillet 2017, le véhicule, présentant un bruit anormal, a été conduit au garage de la société Faf Bymycar, laquelle a constaté un bruit de sifflement, un jeu dans l'axe du turbocompresseur mais un niveau d'huile correct ; qu'il a été restitué à la concluante le 26 juillet 2017, sans préconisation particulière ; que la panne est survenue deux jours plus tard, avec nécessité de remplacer le turbo et le moteur ;

28. - que l'expert judiciaire a constaté que le moteur est hors d'usage, et que le grippage ne résulte ni d'un défaut de maintenance, ni d'un problème d'utilisation ; qu'il a précisé que la date de première mise en circulation est erronée, et que le véhicule est affecté d'un vice caché, résultant d'une montée en température qui a provoqué le grippage d'un piston ; qu'il a considéré que la garantie de la société Icare est due, puisque l'avarie ne résulte pas d'un défaut de maintenance ;

29. - ainsi, qu'aucune exclusion de garantie ne peut s'appliquer, ce qu'a retenu le tribunal ; que pour la concluante, le véhicule n'avait pas deux ans lors de la survenue de la panne, alors que le terme de 48.000 km n'avait pas été atteint ;

30. - que l'exclusion découlant de l'article 7 des conditions générales est abusive, par application des articles L. 212-1 et L. 212-2 du code de la consommation, et ainsi inopposable à la concluante, sinon supposant une interprétation contraire aux prétentions de l'appelante, puisqu'elle crée au préjudice du consommateur un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties ; qu'elle n'est ni claire, ni compréhensible et difficilement lisible, alors qu'une clause d'exclusion doit être mentionnée en caractères très apparents et être parfaitement compréhensible ; qu'elle est également nulle de ce chef ;

31. - que le défaut d'entretien n'est pas clairement défini, et ne peut exclure la garantie si la panne n'en est pas la conséquence, sauf au contrat à ne rien garantir ; qu'en outre, aucun carnet d'entretien n'a été remis à la concluante, alors que les préconisations du constructeur ont été respectées, puisque la concluante a été trompée sur la date de première mise en circulation ;

32. - que l'appel est ainsi manifestement abusif, alors que la société Icare résiste abusivement.

* * * * *

33. Il convient en application de l'article 455 du code de procédure civile de se référer aux conclusions susvisées pour plus ample exposé des prétentions et moyens des parties.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIFS DE LA DÉCISION :

1) Sur la recevabilité de l'appel :

34. L'incident tranché par le conseiller de la mise en état a concerné la même demande que celle formulée devant la cour, et sur le même moyen, à savoir l'absence d'un appel dirigé contre les autres parties condamnées solidairement. Le conseiller a rejeté cette contestation et a déclaré l'appel recevable, par une ordonnance devenue définitive. Cette demande de l'intimée est ainsi irrecevable.

 

2) Concernant la validité des conditions générales du contrat Plan Autoexpert :

35. Si l'intimée oppose les dispositions du code de la consommation, et invoque une notion de consommateur dans ses conclusions, elle a cependant la qualité de personne morale et est de droit commerçante, en raison de sa forme puisqu'il s'agit d'une société par actions simplifiée. Au sens de l'article préliminaire du code de la consommation, dans sa rédaction applicable au 11 décembre 2015, date de l'adhésion de l'appelante au contrat Plan Autoexpert, au sens de ce code, est considérée comme un consommateur toute personne physique qui agit à des fins qui n'entrent pas dans le cadre de son activité commerciale, industrielle, artisanale ou libérale. L'article L. 212-1 dans la rédaction existant à cette époque, est relatif à la conformité des produits mis en vente sur le marché, et ne vise pas les clauses abusives. Le régime des clauses abusives est régi par les articles L. 132-1 et suivants (anciens) du code de la consommation, et l'article L. 132-1 prévoit que ce régime concerne les relations existant entre professionnel d'une part, et les non-professionnels ou les consommateurs d'autre part. Or, l'intimée a la qualité de professionnel, de sorte qu'elle ne peut invoquer ces dispositions. Ce moyen est ainsi mal fondé.

36. Concernant la qualification de l'article 7 des conditions générales de vente du contrat Plan Autoexpert, ces conditions prévoient plusieurs chapitres : un chapitre 1 correspondant à des dispositions communes à plusieurs plans de garantie, un chapitre 2 concernant les conditions générales du contrat plan de protection, non souscrit, concernant l'achat d'un véhicule neuf, un chapitre 3 concernant le contrat Autoexpert, objet du présent litige, ayant pour objet de faire bénéficier le véhicule acheté d'occasion d'une prolongation de la garantie du vendeur jusqu'à l'expiration du financement.

37. Il n'est pas contesté que l'intimée a pris connaissance de ce contrat, en a accepté les stipulations et en a reçu un exemplaire. L'article 7 du chapitre 3 figure non dans le paragraphe concernant les exclusions, mais dans celui relatif aux obligations du bénéficiaire de la garantie. A ce titre, ce «'bénéficiaire s'engage à utiliser le véhicule désigné en bon père de famille, dans le respect des normes et impératifs techniques du constructeur, et dans le respect de la préconisation des révisions aux kilométrages indiqués dans le carnet Autoexpert qu'il déclare bien connaître. Le véhicule devra notamment être entretenu selon le programme d'entretien par tout distributeur Autoexpert ou par tout réparateur agréé par le constructeur de son véhicule». Il est ensuite indiqué, en caractères gras, qu'il «'est notamment rappelé que tout défaut d'entretien fait perdre le bénéfice de la garantie'».

38. Ainsi que soutenu par la société Icare, il ne s'agit pas d'une clause d'exclusion de la garantie, mais seulement une condition concernant la mise en œuvre du contrat, ainsi que retenu, dans une cause identique, par la 2ième chambre civile de la Cour de Cassation le 8 'janvier 2009, pourvoi n°07-20.731. Les clauses d'exclusion sont ainsi prévues par l'article 5, et il s'agit notamment de l'usure normale, et des pièces ou organes dont la prise en charge n'est pas prévue par l'article 4 des conditions générales.

39. Les conditions générales sont parfaitement lisibles et compréhensibles, notamment concernant celles figurant à l'article 7, définissant la mise en œuvre du contrat et les obligations du bénéficiaire. Il en résulte que pour bénéficier de la garantie, l'intimée doit justifier de l'entretien du véhicule selon le programme prévu par le constructeur, en l'espèce une révision tous les deux ans, à compter de la mise en circulation du véhicule, sinon tous les 48.000 km, selon le premier terme atteint. Ainsi qu'indiqué en caractères gras très apparents, il est rappelé que tout défaut d'entretien fait perdre le bénéfice de la garantie.

40. Concernant l'application de l'article 7, si l'intimée soutient qu'elle ignorait que le véhicule n'était pas neuf, en raison des mentions figurant sur le bon de commande, le contrat de crédit-bail et le certificat de cession, le tribunal de commerce, par des motifs contradictoires, a indiqué en page 15 de son jugement qu'il «'conviendra de retenir la date de première immatriculation au 28 novembre 2014'», mais qu'il s'agit cependant d'un véhicule neuf (page 16). Il a cependant ensuite conclu que «'les arguments de la société Acgp Caci quant au fait qu'elle avait été trompée sur la nature neuve du véhicule objet du litige, seront rejetés» (page 16). Dans le dispositif de cette décision, le tribunal a néanmoins dit que cette société a acquis un véhicule neuf et qu'il n'y a pas eu tromperie.

41. La cour constate qu'effectivement, tant le bon de commande que le contrat de crédit-bail ont visé un véhicule neuf, ainsi à mettre en circulation pour la première fois en novembre 2015. Le certificat de cession établi par la société Faf Bymycar indique de même une date d'immatriculation le 28 novembre 2015. Cependant, la facture émise par ce vendeur sur le crédit-bailleur, fait mention, au titre de la provenance de ce véhicule, d'une entreprise et non du fabricant. Il est également précisé qu'il y a une garantie constructeur de deux ans, ayant pris effet le 27 novembre 2014. La mention concernant la date d'immatriculation indique le 28 novembre 2014. La déclaration de cession du véhicule mentionne de même, au titre du numéro du certificat d'immatriculation, l'année 2014. Enfin, le bulletin d'adhésion signé par l'intimé a indiqué que le véhicule a été mis en circulation le 28 novembre 2014, et que seule la garantie Plan Autoexpert a été souscrite, le bulletin précisant expressément qu'elle est réservée aux véhicules d'occasion. La même date de mise en circulation figure en tête du certification d'immatriculation mentionnant l'intimée en qualité d'utilisateur de ce véhicule.

42. Il en résulte que contrairement aux motifs exposés par le tribunal, ce véhicule n'a pas été acquis neuf, mais d'occasion, avec une mise en circulation remontant au 28 novembre 2014, ce que l'intimée ne pouvait ignorer en raison des mentions précises figurant sur le bulletin d'adhésion à la garantie Plan Autoexpert et sur le certificat d'immatriculation, dont elle a eu nécessairement une copie, sinon l'original, ce document devant être produit à première réquisition aux forces de police.

43. Ce véhicule aurait ainsi dû faire l'objet d'un entretien au plus tard le 28 novembre 2016. Se prévalant de l'exécution du contrat de garantie Plan Autoexpert, il appartient à l'intimée de rapporter la preuve de cet entretien, ce dont elle ne justifie pas. Si elle soutient n'avoir reçu aucun carnet d'entretien, elle ne produit aucun élément permettant de retenir qu'elle a demandé ce document et n'a pu l'obtenir. Si elle soutient que la notion de défaut d'entretien n'est pas clairement définie, et ne peut exclure la garantie si la panne n'en est pas la conséquence, sauf au contrat à ne rien garantir, la cour indique cependant qu'aucune définition particulière n'est nécessaire concernant cette notion, alors que l'objet du contrat n'est pas de garantir un défaut d'entretien.

44. Il en résulte, ainsi que soutenu par les appelantes, que les conditions de mise en œuvre de la garantie résultant du Plan Autoexpert n'étaient pas réunies, peu important que le dommage soit ou non le résultat du défaut d'entretien. Le jugement déféré sera ainsi infirmé en ce qu'il a :

- jugé que la panne du véhicule litigieux entre dans le cadre de la garantie Icare ;

- jugé que la société Icare n'a pas répondu à son obligation contractuelle ;

- condamné la société Icare à payer à la société Acgp Caci la somme de 10.097,47 euros TTC au titre de sa responsabilité contractuelle ;

- condamné solidairement la société Icare à payer à la société Acgp Caci une somme arbitrée à 3.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance ;

- condamné la société Icare Assurance à payer à la société Acgp Caci la somme de 3.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

45. Statuant à nouveau, sans qu'il soit nécessaire de statuer sur le moyen subsidiaire résultant de la clause d'exclusion prévue par l'article 5 de la garantie, la cour déboutera ainsi l'intimée de l'ensemble de ses demandes dirigées contre les appelantes, y compris concernant leur résistance et leur appel abusif, ce caractère n'étant pas établi en raison des motifs développés plus haut. Succombant en son appel, la société Acgp Caci sera condamnée à payer aux sociétés Icare et Icare Assurance la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens de l'instance.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

La Cour statuant publiquement, contradictoirement, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile, après en avoir délibéré conformément à la loi,

Vu les articles 553 du code de procédure civile, L. 132-1 et suivants (anciens) du code de la consommation, 1103, 1231-1, 1353 et 1641 du code civil ;

Déclare irrecevable la contestation formée par la société Acgp Caci concernant la recevabilité de l'appel de la société Icare ;

Infirme le jugement déféré en ce qu'il a :

- jugé que la panne du véhicule litigieux entre dans le cadre de la garantie Icare ;

- jugé que la société Icare n'a pas répondu à son obligation contractuelle ;

- condamné la société Icare à payer à la société Acgp Caci la somme de 10.097,47 euros TTC au titre de sa responsabilité contractuelle ;

- condamné solidairement la société Icare à payer à la société Acgp Caci une somme arbitrée à 3.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance ;

- condamné solidairement la société Icare Assurance à payer à la société Acgp Caci la somme de 3.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Confirme le jugement déféré en ses autres dispositions soumises à la cour ;

statuant à nouveau ;

Déboute la société Acgp Caci de l'ensemble de ses demandes dirigées contre les sociétés Icare et Icare Assurance ;

Condamne la société Acgp Caci à payer aux sociétés Icare et Icare Assurance la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;'

Condamne la société Acgp Caci aux dépens exposés tant en première instance qu'en cause d'appel ;

Signé par Mme Marie-Pierre FIGUET, Présidente et par Mme Alice RICHET, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

La Greffière                                      La Présidente