CEntre de Recherche sur les CLauses ABusives
Résultats de la recherche

CA RENNES (2e ch.), 10 février 2023

Nature : Décision
Titre : CA RENNES (2e ch.), 10 février 2023
Pays : France
Juridiction : Rennes (CA), 2e ch.
Demande : 20/01112
Décision : 23/77
Date : 10/02/2023
Nature de la décision : Réformation
Mode de publication : Judilibre
Date de la demande : 14/02/2020
Numéro de la décision : 77
Référence bibliographique : 9744 (prêt, année lombarde), 5705 (action imprescriptible)
Imprimer ce document

 

CERCLAB - DOCUMENT N° 10099

CA RENNES (2e ch.), 10 février 2023 : RG n° 20/01112 ; arrêt n° 77 

Publication : Judilibre

 

Extraits : 1/ « Dès lors, les époux X. pouvaient se convaincre, à la seule lecture de l'offre, que les intérêts pouvaient être calculés sur une base autre que l'année bancaire, et que le TEG annuel était, ou non, proportionnel au taux de période mensuel.

En revanche, l'inexactitude alléguée du calcul actuariel du TEG ne pouvait être décelé par des emprunteurs profanes, lesquels n'ont pu s'en convaincre, à tort ou à raison, qu'au vu du rapport du cabinet d'analyse financière Humania Consultants en date du 29 février 2016.

En outre, par arrêt du 10 juin 2021, la Cour de justice de l'Union européenne a dit pour droit que l'article 6, § 1, et l'article 7, § 1, de la directive 93/13/CEE du Conseil, du 5 avril 1993, concernant les clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs, lus à la lumière du principe d'effectivité, doivent être interprétés en ce sens qu'ils s'opposent à une réglementation nationale soumettant l'introduction d'une demande par un consommateur aux fins de la constatation du caractère abusif d'une clause figurant dans un contrat conclu entre un professionnel et ce consommateur à un délai de prescription. Il s'en déduit que la demande principale des époux X. tendant à voir déclarer non écrite la clause de calcul des intérêts sur la base d'une année de 360 jours stipulée dans l'offre initiale, ainsi que leurs demandes subsidiaires en annulation de la stipulation d'intérêts et en déchéance du droit du prêteur aux intérêts fondées sur l'inexactitude du calcul actuariel du TEG mentionné dans l'offre initiale ne sont pas atteinte par la prescription quinquennale et sont recevables. »

2/ « Cependant, LCL fait à juste titre observer que, pour le calcul du TEG d'un prêt à périodicité mensuelle, la détermination du taux de période en lui appliquant le rapport d'un mois de 30 jours sur une année de 360 jours produit un résultat mathématique strictement équivalent à l'application du rapport d'un mois normalisé de 30,41666 jours sur une année civile de 365 jours prescrit par l'annexe à l'article R. 313-1 du code de la consommation dans sa rédaction applicable à la cause, dont aucune disposition n'exclut l'application aux prêts autres que ceux dont le TEG est calculé selon la méthode d'équivalence.

D'autre part, si, même en présence d'un prêt à périodicité mensuelle, la réalisation d'un tel calcul sur la base d'une année de 360 jours peut, lorsqu'il existe des intérêts produits par les portions du crédit débloquées par tranches successives ou par le capital libéré à une date autre que la date d'échéance prévue par le tableau d'amortissement, être de nature à affecter le coût du crédit et, partant, le TEG, les époux X. n'apportent pas la preuve, qui leur incombe, qu'il existe en l'espèce de telles échéances brisées ayant généré la facturation d'un trop-perçu d'intérêts intercalaires en leur défaveur, de nature à affecter l'exactitude du TEG au delà de la marge d'erreur d'une décimale prévue par l'annexe à l'article R. 313-1 du code de la consommation.

Il en résulte que les emprunteurs ne démontrent pas que cette clause créerait un déséquilibre significatif à leur détriment, de sorte qu'elle ne saurait être qualifiée d'abusive.

Surabondamment, il sera observé que cette clause, qui porte sur la rémunération prévue en contrepartie du service financier offert au consommateur et, partant, sur l'objet même du contrat, est rédigée de façon claire et compréhensible, et que l'opacité qui lui est prêtée relativement à ses prétendues conséquences économiques ne résulte que d'allégations des emprunteurs dont la pertinence n'a pas été retenue.

Il n'y a donc pas lieu d'écarter cette clause de l'offre initiale, et moins encore la stipulation d'intérêts conventionnels qui lui est en toute hypothèse distincte et demeurerait applicable quand bien même la clause de calcul des intérêts sur 360 jours serait réputée non écrite. »

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE RENNES

DEUXIÈME CHAMBRE

ARRÊT DU 10 FÉVRIER 2023

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 20/01112. Arrêt n° 77. N° Portalis DBVL-V-B7E-QPP2.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Président : Monsieur Joël CHRISTIEN, Président de Chambre,

Assesseur : Monsieur David JOBARD, Président de Chambre,

Assesseur : Monsieur Jean-François POTHIER, Conseiller,

GREFFIER : Madame Ludivine MARTIN, lors des débats et lors du prononcé

DÉBATS : A l'audience publique du 5 janvier 2023, devant Monsieur Joël CHRISTIEN, magistrat rapporteur, tenant seul l'audience, sans opposition des représentants des parties, et qui a rendu compte au délibéré collégial

ARRÊT : Contradictoire, prononcé publiquement le 10 février 2023 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l'issue des débats

 

APPELANTS :

Monsieur X.

né le [Date naissance 1] à [Localité 6], [Adresse 2], [Adresse 2]

Madame Y. épouse X.

née le [Date naissance 4] à [Localité 5], [Adresse 2], [Adresse 2]

Tous représentés par Maître Clarisse LE GRAND, postulant, avocat au barreau de NANTES, Tous représentés par Maître Alexandre BARBELANE de la SELARL BFB AVOCATS, plaidant, avocat au barreau de PARIS

 

INTIMÉE :

SA CRÉDIT LYONNAIS

[Adresse 3], [Adresse 3], Représentée par Maître Alexis CROIX de la SELARL A-LEX AVOCAT, Postulant, avocat au barreau de RENNES

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

EXPOSÉ DU LITIGE :

Selon offre préalable de crédit immobilier acceptée le 20 octobre 2007, la société Le Crédit lyonnais (LCL) a consenti aux époux X. un prêt de 426.000 euros au taux de 4,70 % l'an, remboursable en 300 mensualités.

Puis, selon offre d'avenant acceptée le 1er mars 2014, le taux d'intérêt a été réduit à 2,85 % l'an.

Prétendant que les intérêts seraient abusivement et illicitement calculés sur la base d'une année de 360 jours, que le TEG de 5,345 % mentionné dans l'offre ne serait pas proportionnel au taux de période, que le TEG de l'offre et de l'avenant seraient erronés pour ne pas respecter le principe d'égalité des flux, et que l'avenant ne mentionnerait pas le taux de période, les époux X. ont, par acte du 11 avril 2017, fait assigner LCL devant le tribunal de grande instance de Saint-Nazaire pour faire déclarer la clause de stipulation d'intérêts de l'offre initiale et de l'avenant non écrite ou nulle, et obtenir la déchéance du droit du prêteur aux intérêts, la restitution du trop-perçu d'intérêts et le paiement de dommages-intérêts.

LCL a invoqué la prescription de l'action des emprunteurs ou, en tous cas, le mal fondé de celle-ci.

Par jugement du 9 janvier 2020, le tribunal judiciaire de Saint-Nazaire a :

- déclaré prescrite l'action des époux X. fondée sur le calcul du TEG sur 360 jours,

- déclaré recevable l'action des époux X. pour le surplus,

- débouté les époux X. de leurs demandes,

- condamné ceux-ci solidairement à verser à LCL la somme de 3.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné ceux-ci solidairement aux dépens.

[*]

Les époux X. ont relevé appel de cette décision le 14 février 2020, pour demander à la cour de l'infirmer et de :

* s'agissant de l'offre de prêt :

- à titre principal, déclarer abusive et par conséquent réputée non écrite la clause prévoyant le calcul des intérêts sur la base d'une année bancaire de 360 jours et d'un mois de 30 jours,

- à titre subsidiaire, prononcer la nullité de la clause de stipulation d'intérêts du prêt litigieux et la substitution, au taux d'intérêt conventionnel, du taux d'intérêt légal applicable année par année,

- à titre infiniment subsidiaire, prononcer la déchéance des intérêts conventionnels du prêt litigieux à hauteur du taux d'intérêt légal applicable année par année,

- dire qu'en cas de taux légal supérieur à la moitié du taux conventionnel, le taux d'intérêt applicable sera plafonné à 50 % du taux d'intérêt conventionnel,

- condamner LCL au paiement de la somme de 97.000 euros correspondant aux intérêts indûment versés au titre du prêt depuis sa conclusion jusqu'au 28 février 2014, date de prise d'effet de l'avenant du 13 février 2014,

* s'agissant de l'avenant du 13 février 2014 :

- à titre principal, déclarer abusive et par conséquent réputée non écrite la clause, figurant dans l'offre de prêt et produisant toujours ses effets, prévoyant le calcul des intérêts sur la base d'une année bancaire de 360 jours et d'un mois de 30 jours,

- à titre subsidiaire, prononcer la substitution du taux légal applicable année par année, au taux d'intérêt conventionnel, et dire qu'en cas de taux légal supérieur à la moitié du taux conventionnel, le taux d'intérêt applicable sera plafonné à 50 % du taux d'intérêt conventionnel,

- à titre infiniment subsidiaire, prononcer la déchéance des intérêts conventionnels du prêt litigieux à hauteur du taux d'intérêt légal applicable année par année,

- condamner LCL au paiement de la somme de 21.000 euros correspondant aux intérêts indûment versés au titre du prêt depuis le 28 février 2014, date de prise d'effet de l'avenant jusqu'au jour des conclusions, sauf à parfaire,

- enjoindre à LCL, sous astreinte de 200 euros par jour de retard à compter du 8ème jour suivant la signification de la décision à intervenir, de produire un nouveau tableau d'amortissement prenant en considération cette substitution du taux d'intérêt légal applicable année par année, au taux conventionnel,

- enjoindre à LCL, à chaque publication du taux d'intérêt légal, de produire un nouveau tableau d'amortissement prenant en compte la substitution au taux d'intérêt conventionnel du taux d'intérêt légal applicable,

* en tout état de cause :

- condamner LCL au paiement de la somme de 15.000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi du fait de son manquement à son obligation d'information, de loyauté et d'honnêteté,

- condamner LCL au paiement d'une indemnité de 5.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

[*]

LCL conclut quant à elle à la confirmation de la décision attaquée et sollicite en outre la condamnation des époux X. au paiement d'une somme de 5.000 euros à titre de dommages-intérêts et d'une indemnité de 6.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.

[*]

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure ainsi que des prétentions et moyens des parties, la cour se réfère aux énonciations de la décision attaquée ainsi qu'aux dernières conclusions déposées pour les époux X. le 11 mai 2020 et pour LCL le 29 juillet 2020, l'ordonnance de clôture ayant été rendue le 27 octobre 2022.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

EXPOSÉ DES MOTIFS :

Sur la prescription :

En application des articles 1304 du code civil dans sa rédaction applicable à la cause, l'action de l'emprunteur en nullité de la stipulation d'intérêts se prescrit par cinq ans commençant à courir à compter de la découverte du vice.

En outre, en application de l'article L. 110-4 du code de commerce, l'action en déchéance du droit du prêteur aux intérêts se prescrit quant à elle par dix ans, ramenés à cinq ans par la loi du 17 juin 2008, à compter du jour où l'emprunteur a connu ou aurait dû connaître l'inexactitude du TEG.

Il en résulte que, sur ces deux fondements invoqués à titre subsidiaire par les époux X., leurs demandes sont soumises à une prescription quinquennale, dont le point de départ est la date de conclusion du contrat lorsque cette inexactitude était décelable à la simple lecture de l'acte.

Les actions exercées au titre des vices affectant prétendument l'offre d'avenant ne peuvent donc être prescrites, puisqu'il s'est écoulé moins de cinq ans entre son acceptation du 1er mars 2014 et l'assignation introductive d'instance du 11 avril 2017.

S'agissant des vices affectant l'offre initiale acceptée le 20 octobre 2007, les époux X. invoquent, au soutien de leurs demandes d'annulation et de déchéance, la stipulation d'une clause illicite de calcul des intérêts sur la base d'une année de 360 jours, le défaut de proportionnalité du TEG au taux de période, ainsi que l'inexactitude d'un TEG qui n'aurait pas été obtenu à partir d'un taux de période calculé actuariellement pour assurer, selon la méthode des intérêts composés, l'égalité entre les sommes prêtées et les sommes remboursées par l'emprunteur en capital, intérêts et frais.

Pourtant, il était mentionné dans les conditions générales du prêt que « les intérêts courus entre deux échéances seront calculés sur la base de 360 jours, chaque mois étant compté pour 30 jours rapportés à 360 jours l'an ».

Il était en outre explicitement énoncé aux conditions particulières du prêt que le TEG était de 5,345 %, que le taux de période était de 0,445 % et que la périodicité des échéances était mensuelle.

Dès lors, les époux X. pouvaient se convaincre, à la seule lecture de l'offre, que les intérêts pouvaient être calculés sur une base autre que l'année bancaire, et que le TEG annuel était, ou non, proportionnel au taux de période mensuel.

En revanche, l'inexactitude alléguée du calcul actuariel du TEG ne pouvait être décelé par des emprunteurs profanes, lesquels n'ont pu s'en convaincre, à tort ou à raison, qu'au vu du rapport du cabinet d'analyse financière Humania Consultants en date du 29 février 2016.

En outre, par arrêt du 10 juin 2021, la Cour de justice de l'Union européenne a dit pour droit que l'article 6, § 1, et l'article 7, § 1, de la directive 93/13/CEE du Conseil, du 5 avril 1993, concernant les clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs, lus à la lumière du principe d'effectivité, doivent être interprétés en ce sens qu'ils s'opposent à une réglementation nationale soumettant l'introduction d'une demande par un consommateur aux fins de la constatation du caractère abusif d'une clause figurant dans un contrat conclu entre un professionnel et ce consommateur à un délai de prescription.

Il s'en déduit que la demande principale des époux X. tendant à voir déclarer non écrite la clause de calcul des intérêts sur la base d'une année de 360 jours stipulée dans l'offre initiale, ainsi que leurs demandes subsidiaires en annulation de la stipulation d'intérêts et en déchéance du droit du prêteur aux intérêts fondées sur l'inexactitude du calcul actuariel du TEG mentionné dans l'offre initiale ne sont pas atteinte par la prescription quinquennale et sont recevables.

Le jugement attaqué sera réformé en ce sens.

 

Sur la clause abusive :

Il est mentionné dans les conditions générales du prêt que « les intérêts courus entre deux échéances seront calculés sur la base de 360 jours, chaque mois étant compté pour 30 jours rapportés à 360 jours l'an ».

Les époux X. soutiennent que cette clause, qui aurait pour effet de majorer le coût du crédit sans permettre à l'emprunteur d'évaluer ce surcoût, créerait un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au détriment du consommateur et, partant, devrait être déclarée abusive en application de l'article L. 132-1 devenu L. 212-1 du code de la consommation.

Cependant, LCL fait à juste titre observer que, pour le calcul du TEG d'un prêt à périodicité mensuelle, la détermination du taux de période en lui appliquant le rapport d'un mois de 30 jours sur une année de 360 jours produit un résultat mathématique strictement équivalent à l'application du rapport d'un mois normalisé de 30,41666 jours sur une année civile de 365 jours prescrit par l'annexe à l'article R. 313-1 du code de la consommation dans sa rédaction applicable à la cause, dont aucune disposition n'exclut l'application aux prêts autres que ceux dont le TEG est calculé selon la méthode d'équivalence.

D'autre part, si, même en présence d'un prêt à périodicité mensuelle, la réalisation d'un tel calcul sur la base d'une année de 360 jours peut, lorsqu'il existe des intérêts produits par les portions du crédit débloquées par tranches successives ou par le capital libéré à une date autre que la date d'échéance prévue par le tableau d'amortissement, être de nature à affecter le coût du crédit et, partant, le TEG, les époux X. n'apportent pas la preuve, qui leur incombe, qu'il existe en l'espèce de telles échéances brisées ayant généré la facturation d'un trop-perçu d'intérêts intercalaires en leur défaveur, de nature à affecter l'exactitude du TEG au delà de la marge d'erreur d'une décimale prévue par l'annexe à l'article R. 313-1 du code de la consommation.

Il en résulte que les emprunteurs ne démontrent pas que cette clause créerait un déséquilibre significatif à leur détriment, de sorte qu'elle ne saurait être qualifiée d'abusive.

Surabondamment, il sera observé que cette clause, qui porte sur la rémunération prévue en contrepartie du service financier offert au consommateur et, partant, sur l'objet même du contrat, est rédigée de façon claire et compréhensible, et que l'opacité qui lui est prêtée relativement à ses prétendues conséquences économiques ne résulte que d'allégations des emprunteurs dont la pertinence n'a pas été retenue.

Il n'y a donc pas lieu d'écarter cette clause de l'offre initiale, et moins encore la stipulation d'intérêts conventionnels qui lui est en toute hypothèse distincte et demeurerait applicable quand bien même la clause de calcul des intérêts sur 360 jours serait réputée non écrite.

 

Sur les vices de l'offre initiale :

Il est par ailleurs exact qu'aux termes de l'article R. 313-1, II du code de la consommation, dans sa rédaction applicable à la cause, le TEG d'un prêt immobilier est un taux annuel proportionnel au taux de période qui est calculé actuariellement et doit assurer, selon la méthode des intérêts composés, l'égalité entre les sommes prêtées et tous les versements de l'emprunteur en capital, intérêts et frais, le cas échéant estimés.

Les époux X. s'appuient sur l'analyse financière du cabinet Humania Consultants pour prétendre que le taux de période de 0,445 % mentionné dans l'offre initial n'aurait pas été calculé conformément à ces dispositions réglementaires, ce taux étant en réalité, selon cette étude, de 0,44527 %.

Cependant, il est de principe que, seule l'inexactitude du TEG peut donner lieu à sanction.

Or, un taux de période mensuel de 0,44527 % donne un TEG annuel proportionnel de 5,34324 %, soit, après application des règles d'arrondi prescrites par l'annexe à l'article R. 313-1 du code de la consommation dans sa rédaction applicable à la cause, un TEG de 5,343 %, inférieur au TEG de 5,345 % mentionné dans l'offre.

Il n'en résulte donc aucune erreur en défaveur des emprunteurs.

Les demandes non prescrites relatives à de prétendus vices de l'offre initiale ne sont donc pas fondées et seront rejetées.

 

Sur les vices de l'avenant :

Les emprunteurs soutiennent que la clause de calcul des intérêts sur la base d'année de 360 jours stipulée dans les conditions générales de l'offre initiale vicierait aussi l'avenant qui lui demeure soumis, en ce qu'elle majorerait, à compter de sa prise d'effet, le taux d'intérêts, affecterait la duré de la période et fausserait le calcul du TEG.

Cependant, si les intérêts conventionnels et le TEG doivent en effet être calculés sur la base de l'année civile, il demeure qu'il appartient aux emprunteurs d'établir que l'application de la clause litigieuse a pu concrètement affecter l'exactitude du TEG mentionné dans l'offre et jouer en leur défaveur.

Or, pour les motifs précédemment exposés par la cour afin d'écarter le caractère abusif d'une telle clause, il a été relevé que les appelants alléguaient sans en rapporter la moindre preuve que son application aurait, en l'espèce, eu pour effet concret de majorer le coût du crédit ou, en tous cas, qu'elle aurait généré une inexactitude du TEG en leur défaveur supérieure à la marge d'erreur d'une décimale prévue par l'annexe à l'article R. 313-1 du code de la consommation dans sa rédaction applicable à la cause, dont aucune disposition n'exclut l'application aux prêts autres que ceux dont le TEG est calculé selon la méthode d'équivalence.

Par ailleurs, pour prétendre que le TEG de 7,213 % mentionné dans l'offre d'avenant n'aurait pas été correctement calculé conformément à l'article R. 313-1 du code de la consommation, afin d'assurer, selon la méthode des intérêts composés, l'égalité entre les sommes prêtées et les sommes remboursées par l'emprunteur en capital, intérêts et frais, les époux X. se fondent sur l'analyse financière de la société Humania Consultants.

Or, celle-ci détermine que le taux de période de l'avenant serait de 0,29991 %, ce qui donne un TEG annuel proportionnel de 3,59892 %, notablement inférieur au TEG mentionné dans l'acte.

Dès lors, il n'est établi aucune erreur en défaveur des emprunteurs.

Enfin, il est de principe qu'en application de l'article L. 312-14-1 devenu L. 313-39 du code de la consommation, les modifications du contrat initial en cas de renégociation d'un crédit immobilier sont apportées sous la seule forme d'un avenant comprenant diverses informations, sans que soit exigée la communication du taux et de la durée de la période.

Il ne saurait donc y avoir lieu à annulation de la stipulation d'intérêts ou à déchéance du droit du prêteur aux intérêts au seul motif que l'avenant du 1er mars 2014 ne comporte pas ces précisions.

 

Sur les dommages-intérêts :

LCL ne démontre pas que le droit des époux X. d'agir en justice et d'exercer une voie de recours ouverte pas la loi ait en l'espèce dégénéré en abus.

La banque ne démontre pas davantage avoir subi un préjudice au seul motif que la partie adverse réclamait sa condamnation au paiement de dommages-intérêts pour manquement à son devoir « de loyauté et d'honnêteté ».

Sa demande reconventionnelle en paiement de dommages-intérêts sera donc rejetée.

 

Sur les frais irrépétibles :

Il serait en revanche inéquitable de laisser à la charge de LCL l'intégralité des frais exposés par lui à l'occasion de l'instance d'appel et non compris dans les dépens, en sorte qu'il lui sera alloué une somme de 2 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS,

LA COUR :

Infirme le jugement rendu le 9 janvier 2020 par le tribunal judiciaire de Saint-Nazaire en ce qu'il a :

- déclaré prescrite l'action des époux X. aux fins de déclarer abusive et non écrite la clause de calcul des intérêts sur la base d'une année de 360 jours stipulée dans l'offre initiale,

- déclaré prescrite les actions des époux X. en annulation de la stipulation d'intérêts et en déchéance du droit du prêteur aux intérêts fondées sur un vice de calcul des intérêts sur la base d'une année de 360 jours au titre de l'avenant du 1er mars 2014,

- déclaré recevable les actions des époux X. en annulation de la stipulation d'intérêts et en déchéance du droit du prêteur aux intérêts fondées sur le vice de défaut de proportionnalité entre le taux de période et le TEG mentionnés dans l'offre initiale du 20 octobre 2007 ;

Rejette la demande des époux X. aux fins de déclarer abusive et non écrite la clause de calcul des intérêts sur la base d'une année de 360 jours ;

Déclare irrecevable les actions des époux X. en annulation de la stipulation d'intérêts et en déchéance du droit du prêteur aux intérêts fondées sur le vice de défaut de proportionnalité entre le taux de période et le TEG mentionnés dans l'offre initiale du 20 octobre 2007 ;

Déboute les époux X. de leurs demandes en annulation de la stipulation d'intérêts et en déchéance du droit du prêteur aux intérêts fondées sur le vice de calcul des intérêts sur la base d'une année de 360 jours au titre de l'avenant du 1er mars 2014 ;

Confirme le jugement attaqué en ses autres dispositions ;

Y additant, déboute la société Le Crédit lyonnais de sa demande reconventionnelle en paiement de dommages-intérêts ;

Condamne in solidum les époux X. à payer à la société Le Crédit lyonnais une somme de 2 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne in solidum les époux X. aux dépens d'appel ;

Rejette toutes autres demandes contraires ou plus amples.

LE GREFFIER                                            LE PRÉSIDENT