CA PARIS (pôle 5 ch. 6), 17 mars 2023
CERCLAB - DOCUMENT N° 10258
CA PARIS (pôle 5 ch. 6), 22 mars 2023 : RG n° 21/11772
Publication : Judilibre
Extrait : « Par lettre recommandée avec accusé de réception du 10 septembre 2019 envoyée à la même adresse et dont M. X. a tout autant signé l'accusé de réception le 13 septembre suivant, la société ING BANK a indiqué prononcer la déchéance du terme en vertu de l'article 15 du contrat à raison de l'inexactitude des informations fournies.
L'article 15 de l'offre de prêt intitulé « Résiliation et exigibilité anticipée » dispose notamment que : « Le contrat de crédit immobilier sera résilié et la totalité des sommes restant dues deviendront exigibles à compter de la réception par l'emprunteur d'une notification faite par ING par lettre recommandée avec avis de réception informant l'emprunteur de la décision d'ING de résilier le contrat de crédit immobilier dans l'un des cas suivants : […] - Inexactitude des informations fournies au moment de l'octroi du crédit immobilier, qu'elles soient reconnues ou qu'elles soient devenues du fait d'évolutions ultérieures incomplètes, fausses ou inexactes, dès lors que ces informations étaient déterminantes de la décision d'octroyer le crédit immobilier ».
En effet, l'offre de prêt de la somme de 150.000 euros acceptée le 30 avril 2019 prévoyait le financement de l'acquisition d'un bien d'un montant de 165.000 euros sis [Adresse 6] à la suite d'un compromis de vente du 6 mars précédent reçu en l'étude de Maître Y., notaire à [Localité 8], stipulant ce prix du bien alors que la banque expose qu'il résulte d'une attestation notariée de Maître Z., notaire à [Localité 7], du 10 juin 2019 que M. X. a acquis, en réalité, un bien à cette adresse, identiquement cadastré, mais d'un montant de 300.000 euros.
M. X. fait valoir le caractère abusif de la dite clause au sens de l'article L. 212-1 du code de la consommation aux motifs qu'elle permet discrétionnairement à la banque de prononcer la déchéance du terme sans mise en demeure préalable exigeant qu'il saisisse une juridiction et sans avoir à justifier sa décision, de sorte que, réputée non écrite, la validité de l'exigibilité anticipée prononcée exigeait une mise en demeure préalable, une motivation et une tentative de règlement amiable qui ne sont pas intervenues, ce qui doit conduire au débouté des demandes.
C'est vainement que M. X. argue du caractère abusif de la clause litigieuse au sens de l'article L. 212-1 du code de la consommation dès lors que l'exigence de la fourniture, à l'appui de la demande de crédit, d'informations nécessaires à la décision d'octroyer le crédit qui soient exactes et authentiques ne fait que décliner l'obligation de contracter de bonne foi prévue à l'article 1112 du code civil, tout manquement pouvant justifier la résolution du contrat, en vertu de l'article 1224 du code civil et selon le droit commun, soit en application d'une clause contractuelle, soit, en cas d'inexécution suffisamment grave, d'une notification du créancier au débiteur ou d'une décision de justice. En effet, la clause litigieuse limite la faculté de la banque de prononcer l'exigibilité anticipée aux seuls cas de fourniture d'informations fausses ou inexactes portant sur des éléments déterminants du consentement du prêteur dans l'octroi du prêt ou encore d'une utilisation non conforme des fonds versés, ce qui constitue un manquement grave de l'emprunteur et, par ailleurs, elle ne prive en rien ce dernier de la faculté de recourir au juge, étant observé, au demeurant, que c'est la banque qui, en l'espèce, a saisi le tribunal d'une demande tendant à l'obtention d'un titre.
M. X. ne s'explique pas sur la sincérité du compromis de vente produit à l'appui de sa demande de prêt ni sur celle de l'acte de vente qui stipulent un prix du même bien allant du simple au double - qui est un élément fondamental de l'octroi du crédit par la banque - non plus que sur l'utilisation des fonds non conforme aux prévisions de l'offre qui l'engage, alors que la banque objective que les caractéristiques du bien financé ne pouvaient aboutir à la réalité d'un prix réellement payé de 300.000 euros mais d'une valeur d'environ moitié inférieure et qu'un autre établissement bancaire, la société Arkea Direct Banque Fortuneo a également fait inscrire une hypothèque judiciaire provisoire sur ledit bien, indice d'un second financement.
La circonstance que la banque soit seule à prêter l'entièreté de la somme nécessaire à l'acquisition d'un bien au prix correspondant à ce prêt est, pour elle et dans l'exercice d'éventuelles poursuites en recouvrement, très différente d'un concours avec une autre banque prêteuse de la même somme pour l'acquisition d'un bien dont le prix correspond seulement à la somme prêtée par chacune des banques.
M. X., qui ne s'explique pas sur la différence de prix du bien acquis ni sur les motifs de l'inscription d'une hypothèque judiciaire provisoire sur le bien par la société Arkea Fortuneo Banque Direct, ne fonde pas en droit les griefs qu'il fait à la société ING BANK de s'être abstenue de rechercher une issue amiable au litige qui n'est sanctionnée par aucun texte. »
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
PÔLE 5 CHAMBRE 6
ARRÊT DU 22 MARS 2023
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 21/11772 (8 pages). N° Portalis 35L7-V-B7F-CD5OS. Décision déférée à la Cour : Jugement du 11 mai 2021 - TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de PARIS - RG n° 20/00247.
APPELANT :
Monsieur X.
né le [Date naissance 2] à [Localité 10] de nationalité française, [Adresse 1], [Localité 4], Représenté par Maître Andrea KERMORGANT, avocat au barreau de PARIS, toque : R038
INTIMÉE :
Société ING BANK N.V
société de droit néerlandais, agissant au travers de sa succursale française, immatriculée au RCS de PARIS sous le numéro XXX, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège, [Adresse 3], [Localité 5], N° SIRET : YYY, Représentée par Maître Frédéric DE LA SELLE de la SELARL TAVIEAUX MORO-DE LA SELLE Société d'Avocats, avocat au barreau de PARIS, toque : J130
COMPOSITION DE LA COUR : En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 7 février 2023, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant M. Vincent BRAUD, Président, et MME Pascale SAPPEY-GUESDON, Conseillère.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de : M. Marc BAILLY, Président de chambre, M. Vincent BRAUD, Président, MME Pascale SAPPEY-GUESDON, Conseillère.
Greffier, lors des débats : Madame Yulia TREFILOVA
ARRÊT : - CONTRADICTOIRE - par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile. - signé par M. Vincent BRAUD, Président, et par Anaïs DECEBAL,Greffière présente lors de la mise à disposition.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Par acte du 6 mars 2019 valant compromis de vente, Monsieur X. s'est engagé à acquérir un bien immobilier situé sur la commune de [Localité 9], sous la condition suspensive d'obtention d'un prêt d'un montant de 150.000 €.
Par offre de prêt en date du 17 avril 2019, acceptée le 30 avril 2019, la société ING BANK N.V. a accordé à Monsieur X. un prêt immobilier d'un montant nominal de 150.000 €, remboursable selon 300 mensualités, au taux contractuel de 1,95 %.
Ce prêt avait pour objet de financer l'acquisition du bien immobilier objet du compromis de vente signé.
A la suite de la remise des fonds, en exécution du contrat de prêt, la société ING BANK N.V. a été rendue destinataire d'une attestation du notaire, confirmant l'acquisition du bien immobilier par Monsieur X. Toutefois, cette attestation notariée faisait état d'une acquisition du bien immobilier pour un montant de 300.000 € et non pour celui de 165.000 € initialement convenu par le compromis de vente. Faisant le constat d'une discordance manifeste entre les termes du compromis de vente et de l'attestation établie par le notaire, la société ING BANK N.V. par courrier recommandé avec AR en date du 10 septembre 2019, a prononcé la déchéance du terme immédiate du prêt immobilier, conformément aux dispositions de l'article 15 des conditions générales du prêt. Dans ce même courrier, Monsieur X. a été mis en demeure de payer la somme de 159.251,25 €. Cette mise en demeure, régulièrement réceptionnée est restée vaine.
Vu le jugement du tribunal judiciaire de Paris du 11 mai 2021 qui, sur l'assignation sous forme de procès-verbal de recherche infructueuse délivrée le 6 janvier 2020 par la société ING BANK N.V. à Monsieur X. a :
- condamné X. à payer à la société ING BANK N.V. les sommes suivantes :
- 159.251,25 euros assortie des intérêts courant à compter de la déchéance du terme au taux contractuel majoré de trois points, soit 4,95 %, sur 148.832,94 euros, et ceux calculés au taux légal à compter du 13 septembre 2019 sur 1.0418,31 euros, avec le bénéfice de l'anatocisme dans les conditions fixées à l'article 1343-2 du code civil,
- 1.000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile,
condamné X. à supporter les dépens, dont distraction au profit du conseil de la société ING BANK N.V.,
- ordonné l'exécution provisoire.
Vu l'appel interjeté par Monsieur X. par déclaration en date du 24 juin 2021 ;
[*]
Vu les dernières conclusions en date du 23 septembre 2021 de Monsieur X. qui exposent :
que le procès-verbal de signification de l'assignation du 6 janvier 2020 est nul car :
- Le nom de Monsieur X. était clairement visible sur sa boite aux lettres ainsi que sur la sonnette de son appartement.
- Monsieur X. n'a pas reçu copie de l'assignation du 6 janvier 2020.
- Monsieur X. a eu de nouveau un grief avec la réalité des diligences de l'huissier instrumentaire lors de la signification du jugement en date du 27 mai 2021 selon lesquelles il serait inconnu à cette adresse et que son nom ne figure nulle part à cette adresse ce qui est en contradiction avec les indications sur la boite aux lettres et sur la sonnette de l'appartement de Monsieur X.
La déchéance du terme est irrecevable car :
- La clause « d'exigibilité anticipée » stipulée dans le contrat de prêt doit être réputée non écrite car elle est abusive aux regard des articles L. 212-1, R. 212-1 et R. 212-2 du Code de la consommation puisqu'elle permet à la société ING BANK N.V. de prononcer la déchéance du terme immédiate des sommes restant dues si bon lui semble et sans délai raisonnable permettant à Monsieur X. d'y faire obstacle, sans obligations pour la société ING BANK N.V. ce qui crée un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties.
- La clause « d'exigibilité anticipée » stipulée dans le contrat de prêt étant réputée non écrite, la banque ING BANK N.V. aurait dû mettre en demeure Monsieur X. préalablement à la déchéance du terme et lui accorder un délai raisonnable pour faire obstacle à cette résiliation. Or, le courrier de la société ING BANK N.V. a prononcé sans délai la déchéance du terme et n'a accordé à Monsieur X. aucun délai pour régler la somme de159.251,25 euros, ce qui doit entrainer la nullité de la déchéance du terme.
- La déchéance du terme de la part de la banque ING BANK N.V. est non recevable puisqu'elle est purement discrétionnaire et non motivée.
- La déchéance du terme n'étant pas recevable, la société ING BANK N.V. était infondée à demander la condamnation de Monsieur X. au paiement de la somme de 159.251,25 euros dès lors qu'elle n'a envoyée aucune mise en demeure préalable permettant à Monsieur X. d'y répondre dans un délai raisonnable avant une éventuelle déchéance du terme.
- La société ING BANK NV a exigé le règlement immédiat de la somme de 159.251,25 euros, sans rechercher une quelconque issue amiable avec Monsieur X. ou lui proposer de saisir le médiateur de la banque.
De sorte qu'il demande à la cour de :
RECEVOIR Monsieur X. en son appel et le dire bien fondé,
INFIRMER le jugement entrepris en ce qu'il a retenu la déchéance du terme malgré l'absence de mise en demeure préalable et de motivation de la notification du 10 septembre 2019 ;
INFIRMER en conséquence le jugement en ce qu'il a condamné Monsieur X. à verser à la société ING BANK NV la somme de 159.251,25 euros assortie des intérêts courant à compter de la déchéance du terme au taux contractuel majoré de trois points, soit 4,95 %, sur 148.832,94 euros, et ceux calculés au taux légal à compter du 13 septembre 2019 sur 10.418,31 euros, avec le bénéfice de l'anatocisme dans les conditions fixées à l'article 1343-2 du Code civil ;
Statuant de nouveau,
JUGER que la signification de l'assignation du 6 janvier 2020, ensemble la signification du jugement du 11 mai 2021 intervenue le 27 mai 2021, selon les modalités de l'article 659 du Code de procédure civile, sont nulles ;
JUGER que la clause d'exigibilité anticipée visée dans l'offre de prêt de la société ING BANK NV est non-écrite car abusive ;
JUGER que la déchéance du terme telle que prononcée par la société ING BANK NV sur le fondement non démontré de pièces non-conformes est infondée et nulle ;
JUGER que la déchéance du terme telle que prononcée sans mise en demeure préalable par la société ING BANK NV est non recevable ;
JUGER que l'assignation du 6 janvier 2020 n'est précédée d'aucune mise en demeure préalable tendant à une régularisation du dossier ou explication de celui-ci par Monsieur X.,
En conséquence,
REJETER les demandes de la société ING BANK NV ;
JUGER que le contrat de prêt de Monsieur X. reprendra son cours à compter de la décision à intervenir selon le tableau d'amortissement en date du 30 avril 2019, majoré à son terme des échéances n'ayant pu être réglées par Monsieur X. du fait de la déchéance du terme indûment prononcée par la société ING BANK NV ;
En toute hypothèse,
CONDAMNER la société ING BANK NV au paiement de la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du le Code de procédure civile au profit de Monsieur X. ;
CONDAMNER la société ING BANK NV aux entiers dépens.
[*]
Vu les dernières conclusions en date du 27 décembre 2021 de la société ING BANK N.V qui exposent que :
La signification de l'assignation délivrée selon acte extra-judiciaire en date du 6 janvier 2020 est régulière car :
- L'instance initiée à l'encontre de Monsieur X. l'a été à la seule adresse connue de la banque ING BANK N.V.
- Les courriers adressés à Monsieur X. ont été régulièrement distribués à cette adresse.
- L'assignation a été signifiée selon les modalités de l'article 659 du Code de procédure civile, et à la suite de la délivrance de cet acte, l'huissier instrumentaire a adressé un courrier recommandé avec AR à Monsieur X. afin de lui transmettre copie de l'acte lui étant délivré et ce, à son adresse postale. Ce courrier a été régulièrement distribué.
- La signification du jugement prononcé a été régularisée selon les modalités de l'article 659 du Code de procédure civile, et le courrier recommandé avec AR adressé par l'huissier instrumentaire à l'appelant a, de nouveau, été régulièrement distribué,
- Les photographies telles que versées aux débats par Monsieur X. ne revêtent aucun caractère probant car, en définitive, il n'est pas permis de pouvoir certifier que les photographies communiquées correspondent effectivement à celles de son domicile parisien au [Adresse 1].
La déchéance du terme prononcée est recevable car :
- Selon les termes du contrat de prêt consenti et en particulier de son article 15, il était expressément précisé que la banque se réservait le droit de procéder à la déchéance du terme pour inexactitude des informations fournies au moment de l'octroi du crédit immobilier. Cette disposition ne revêt aucun caractère abusif au regard des dispositions du code de la consommation, conformément à la jurisprudence de la Cour de cassation.
- Selon l'article L. 212-1 alinéa 2 du code de la consommation, « le caractère abusif d'une clause s'apprécie en se référant, au moment de la conclusion du contrat, à toutes les circonstances qui entourent sa conclusion ». Or il y a une discordance entre les éléments fournis par Monsieur X. pour obtenir le financement et les modalités d'acquisition du bien ce qui permet d'affirmer que le contrat n'a pas été conclu de bonne foi,
- Monsieur X. ne s'est aucunement inquiété des motifs pour lesquels la déchéance du terme a été prononcée suite à la réception du courrier l'informant de cette déchéance,
- Le caractère suspect de l'acquisition effectuée semble manifeste au regard du prix payé par Monsieur X. et les prix du marché pratiqués lors de l'opération,
- Monsieur X. a manqué de loyauté en sollicitant la banque ARKEA DIRECT BANK qui a elle-même octroyé un prêt d'un montant de 150.000 €, probablement sur la base du même compromis. Cet établissement bancaire, d'ailleurs, a également initié une action judiciaire à l'encontre de Monsieur X. dès lors qu'il a inscrit une hypothèque judiciaire provisoire sur le bien immobilier financé.
De sorte qu'elle demande à la cour de :
DIRE la SA ING BANK N.V. recevable et bien fondée en ses prétentions ;
DEBOUTER Monsieur X. de ses prétentions ;
En conséquence,
CONFIRMER en toutes ses dispositions le jugement rendu par le Tribunal Judiciaire de Paris en date du 11 mai 2021 ;
CONDAMNER Monsieur X. au paiement d'une indemnité d'un montant de 3.500 € par application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ;
CONDAMNER Monsieur X. en tous les dépens, dont distraction au profit de Maître Frédéric DE LA SELLE, avocat au Barreau de Paris, conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.
[*]
Vu l'ordonnance de clôture rendue le 8 novembre 2022
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
MOTIFS :
Sur la nullité de l'assignation :
L'article 659 du code de procédure civile dispose notamment que 'lorsque la personne à qui l'acte doit être signifié n'a ni domicile, ni résidence, ni lieu de travail connus, l'huissier de justice dresse un procès-verbal où il relate avec précision les diligences qu'il a accomplies pour rechercher le destinataire de l'acte.
Le même jour ou, au plus tard, le premier jour ouvrable suivant, à peine de nullité, l'huissier de justice envoie au destinataire, à la dernière adresse connue, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, une copie du procès-verbal, à laquelle est jointe une copie de l'acte objet de la signification.
Le jour même, l'huissier de justice avise le destinataire, par lettre simple, de l'accomplissement de cette formalité.'
En l'espèce, le procès-verbal de délivrance de l'assignation du 6 janvier 2020 à l'adresse du [Adresse 1], dressé sous forme d'un procès-verbal de vaines recherches de l'article 659 du code de procédure civile, mentionne que 'l'intéressé est inconnu par le gardien (...) son nom ne figure nulle part à cette adresse', que, de retour à l'étude, des recherches infructueuses ont été faites sur l'annuaire électronique, sur les pages blanches conduisant à trois résultats mais sans identité avec le destinataire, que le site internet 'copain d'avant' mentionne ce dernier mais sans moyen de le contacter et être sûr qu'il ne s'agit pas d'un homonyme et que les personnes inscrites à ce nom sur les réseaux sociaux Facebook et Instagram ont des profils privés, sans entrée en contact possible.
Il en ressort que l'huissier instrumentaire a accompli les diligences nécessaires, spécialement en l'absence d'indication sur le lieu de travail de M. X. inconnu de son mandant, et a dressé à bon droit le procès-verbal litigieux à la dernière adresse connue qui figure sur l'acte de prêt et l'acte notarié le réitérant.
M. X. se plaint, paradoxalement, de ce qu'il s'agissait bien de son domicile et produit une photographie d'une boîte aux lettres où figure son nom aux côtés de celui de Y..
Mais, d'une part, les indications dans le procès-verbal qui relatent les constatations personnelles de l'huissier valent jusqu'à inscription de faux alors que la date à laquelle ont été pris les clichés produits n'est pas démontrée non plus que n'est objectivé le lieu de leur captation.
D'autre part et surtout, la banque n'est pas contredite lorsqu'elle expose que, conformément à l'exigence légale, une lettre recommandée avec accusé de réception comportant copie de l'assignation a été adressée à M. X. à cette adresse - qu'il explique être son domicile - et elle lui a été effectivement distribuée le 8 janvier 2020 puisque l'accusé de réception produit est revêtu de sa signature.
Il est ainsi démontré qu'il était dûment informé de la procédure engagée et, s'il n'a pas voulu comparaître en première instance, il ne peut en faire grief au procès-verbal critiqué qui n'encourt donc pas la nullité.
Le procès-verbal de signification du jugement du 27 mai 2021 comporte les mêmes mentions, la lettre recommandée avec accusé de réception a identiquement été reçue par lui, qui a signé l'accusé de réception le 28 mai 2021 et il n'allègue aucun grief de cette notification puisqu'il a pu régulièrement relever appel du jugement signifié.
Sur le caractère abusif de la clause litigieuse :
Par lettre recommandée avec accusé de réception du 10 septembre 2019 envoyée à la même adresse et dont M. X. a tout autant signé l'accusé de réception le 13 septembre suivant, la société ING BANK a indiqué prononcer la déchéance du terme en vertu de l'article 15 du contrat à raison de l'inexactitude des informations fournies.
L'article 15 de l'offre de prêt intitulé « Résiliation et exigibilité anticipée » dispose notamment que :
« Le contrat de crédit immobilier sera résilié et la totalité des sommes restant dues deviendront exigibles à compter de la réception par l'emprunteur d'une notification faite par ING par lettre recommandée avec avis de réception informant l'emprunteur de la décision d'ING de résilier le contrat de crédit immobilier dans l'un des cas suivants :
- Défaut de paiement de quatre (4) échéances restant, en tout ou partie, impayées après imputation des arriérés conformément à l'article 9.5 des conditions générales à bonne date et plus généralement de toutes sommes dues par l'emprunteur à ING en principal, intérêts, commissions, frais et accessoires au titre du crédit, l'ordre de paiement des échéances impayées étant précisé à l'article 9.5 des conditions générales ;
- affectation du Crédit Immobilier à une finalité autre que celle du financement du bien immobilier ou changement de destination de ce bien, tels qu'indiqués dans l'offre de Crédit Immobilier, sans l'obtention de l'accord préalable écrit d'ING,
- (…)
- Inexactitude des informations fournies au moment de l'octroi du crédit immobilier, qu'elles soient reconnues ou qu'elles soient devenues du fait d'évolutions ultérieures incomplètes, fausses ou inexactes, dès lors que ces informations étaient déterminantes de la décision d'octroyer le crédit immobilier ».
En effet, l'offre de prêt de la somme de 150.000 euros acceptée le 30 avril 2019 prévoyait le financement de l'acquisition d'un bien d'un montant de 165.000 euros sis [Adresse 6] à la suite d'un compromis de vente du 6 mars précédent reçu en l'étude de Maître Y., notaire à [Localité 8], stipulant ce prix du bien alors que la banque expose qu'il résulte d'une attestation notariée de Maître Z., notaire à [Localité 7], du 10 juin 2019 que M. X. a acquis, en réalité, un bien à cette adresse, identiquement cadastré, mais d'un montant de 300.000 euros.
M. X. fait valoir le caractère abusif de la dite clause au sens de l'article L. 212-1 du code de la consommation aux motifs qu'elle permet discrétionnairement à la banque de prononcer la déchéance du terme sans mise en demeure préalable exigeant qu'il saisisse une juridiction et sans avoir à justifier sa décision, de sorte que, réputée non écrite, la validité de l'exigibilité anticipée prononcée exigeait une mise en demeure préalable, une motivation et une tentative de règlement amiable qui ne sont pas intervenues, ce qui doit conduire au débouté des demandes.
C'est vainement que M. X. argue du caractère abusif de la clause litigieuse au sens de l'article L. 212-1 du code de la consommation dès lors que l'exigence de la fourniture, à l'appui de la demande de crédit, d'informations nécessaires à la décision d'octroyer le crédit qui soient exactes et authentiques ne fait que décliner l'obligation de contracter de bonne foi prévue à l'article 1112 du code civil, tout manquement pouvant justifier la résolution du contrat, en vertu de l'article 1224 du code civil et selon le droit commun, soit en application d'une clause contractuelle, soit, en cas d'inexécution suffisamment grave, d'une notification du créancier au débiteur ou d'une décision de justice.
En effet, la clause litigieuse limite la faculté de la banque de prononcer l'exigibilité anticipée aux seuls cas de fourniture d'informations fausses ou inexactes portant sur des éléments déterminants du consentement du prêteur dans l'octroi du prêt ou encore d'une utilisation non conforme des fonds versés, ce qui constitue un manquement grave de l'emprunteur et, par ailleurs, elle ne prive en rien ce dernier de la faculté de recourir au juge, étant observé, au demeurant, que c'est la banque qui, en l'espèce, a saisi le tribunal d'une demande tendant à l'obtention d'un titre.
M. X. ne s'explique pas sur la sincérité du compromis de vente produit à l'appui de sa demande de prêt ni sur celle de l'acte de vente qui stipulent un prix du même bien allant du simple au double - qui est un élément fondamental de l'octroi du crédit par la banque - non plus que sur l'utilisation des fonds non conforme aux prévisions de l'offre qui l'engage, alors que la banque objective que les caractéristiques du bien financé ne pouvaient aboutir à la réalité d'un prix réellement payé de 300.000 euros mais d'une valeur d'environ moitié inférieure et qu'un autre établissement bancaire, la société Arkea Direct Banque Fortuneo a également fait inscrire une hypothèque judiciaire provisoire sur ledit bien, indice d'un second financement.
La circonstance que la banque soit seule à prêter l'entièreté de la somme nécessaire à l'acquisition d'un bien au prix correspondant à ce prêt est, pour elle et dans l'exercice d'éventuelles poursuites en recouvrement, très différente d'un concours avec une autre banque prêteuse de la même somme pour l'acquisition d'un bien dont le prix correspond seulement à la somme prêtée par chacune des banques.
M. X., qui ne s'explique pas sur la différence de prix du bien acquis ni sur les motifs de l'inscription d'une hypothèque judiciaire provisoire sur le bien par la société Arkea Fortuneo Banque Direct, ne fonde pas en droit les griefs qu'il fait à la société ING BANK de s'être abstenue de rechercher une issue amiable au litige qui n'est sanctionnée par aucun texte.
En conséquence, il y a lieu de confirmer le jugement entrepris non autrement critiqué, de condamner M. X. à payer à la société ING Direct la somme de 3.500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
La cour,
Statuant publiquement et contradictoirement,
DÉBOUTE M. X. de sa demande tendant à voir déclarer nulle l'assignation du 6 septembre 2020 et le procès-verbal de signification du jugement du 27 mai 2021 ;
REJETTE les demandes de M. X. tendant à voir reconnaître non écrit comme abusif l'article 15 de l'offre de prêt acceptée le 30 avril 2019 et irrégulier le prononcé de l'exigibilité anticipée du 10 septembre 2019 ;
CONFIRME le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;
CONDAMNE M. X. à payer à la société ING BANK N.V. la somme de 3.500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;
CONDAMNE M. X. aux dépens de la présente instance qui seront recouvrés par Maître [E] [P], comme il est disposé à l'article 699 du code de procédure civile.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT
- 6052 - Code de la consommation - Notion de clauses abusives - Appréciation du déséquilibre - Déséquilibre injustifié - Exécution du contrat - Comportement des parties - Consommateur - Mauvaise foi
- 6623 - Code de la consommation - Présentation par contrat - Banque - Crédit à la consommation - Régime général - Obligations de l’emprunteur - Déchéance et résiliation - Nature des manquements