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CA PARIS (pôle 5 ch. 6), 14 juin 2023

Nature : Décision
Titre : CA PARIS (pôle 5 ch. 6), 14 juin 2023
Pays : France
Juridiction : Paris (CA), Pôle 5 ch. 6
Demande : 21/16292
Date : 14/06/2023
Nature de la décision : Réformation
Mode de publication : Judilibre
Date de la demande : 8/09/2021
Référence bibliographique : 5835 (domaine, absence de clause), 5730 (procédure, appel), 9744 (prêt immobilier, année lombarde)
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CERCLAB - DOCUMENT N° 10357

CA PARIS (pôle 5 ch. 6), 14 juin 2023 : RG n° 21/16292

Publication : Judilibre

 

Extraits : 1/ « 1 - M. et Mme Y. en cause d'appel demandent à la cour de « Dire non écrite la clause d'intérêt du prêt », précisant : « une clause telle que celle figurant au contrat de prêt constitue une clause abusive », comme il est dit dans la recommandation n° 05-02 du 20 septembre 2005 de la Commission des clauses abusives.

La société BNP Paribas considère cette dernière prétention comme étant nouvelle au sens des dispositions de l'article 564 du code de procédure civile et demande à la cour de la déclarer irrecevable.

Or, le juge se devant d'examiner même d'office le caractère abusif d'une clause de calcul d'intérêts, aucune irrecevabilité de saurait être tirée du fait que les emprunteurs n'ont pas formulé cette demande dès la première instance.

En vertu des dispositions de l'article L. 132-1 devenu l'article L. 212-1 du code de la consommation, dans les contrats conclus entre professionnels et non professionnels ou consommateurs, sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du non-professionnel ou du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat.

Il est à noter qu'en l'espèce aucune clause du contrat ne stipule des intérêts calculés sur une année de 360 jours. La cour n'aura pas à déclarer non écrite une clause qui n'existe pas. M. et Mme Y. ne peuvent qu'être déboutés de leurs prétentions relatives au caractère abusif de la « clause » litigieuse.

2/ « 2 - Ensuite, M. et Mme Y. reprochent à la banque d'avoir calculé les intérêts du prêt, illicitement, sur la base d'une année bancaire de 360 jours, ce qui selon eux est sanctionné par la nullité de la clause d'intérêt qui « devra être systématiquement prononcée lorsque l'étude de l'offre de prêt fera apparaître que le taux a été calculé sur 360 jours ».

Tout d'abord, la question de la sanction applicable relève d'une appréciation de fond et ne saurait conduire à une fin de non-recevoir. Le jugement déféré sera donc infirmé de ce chef.

Ensuite, contrairement à ce que soutiennent les appelants écrivant que la Cour de cassation dont la jurisprudence est reprise de manière constante par les juridictions du fond sanctionne l'irrégularité de la clause de stipulation conventionnelle par la nullité et la substitution du taux légal, en l'état actuel de la jurisprudence de la Haute-Cour la seule sanction civile encourue en cas de calcul des intérêts d'un prêt sur la base de l'année dite lombarde, est celle de la déchéance du droit du prêteur aux intérêts conventionnels du prêt, dans la proportion est appréciée par le juge. La solution est identique en matière de taux effectif global erroné. »

3/ « Ceci étant, contrairement à ce que soutiennent les appelants, et comme jugé par le tribunal, il doit être retenu que calculer les intérêts courus entre deux échéances sur la base d'un mois de 30 jours et d'une année de 360 jours est équipollent à calculer ces intérêts sur la base d'un mois normalisé et d'une année de 365 jours, seule méthode correcte eu égard aux dispositions du code de la consommation, en particulier l'article R. 313-1 et son annexe, d'application générale, et cela, contrairement à ce qu'affirment les appelants, quand bien même il s'agit d'un crédit immobilier, et étant indifférent le fait que le prêt aurait été signé une année bissextile (ce qui n'est d'ailleurs nullement le cas en l'espèce).

Au cas présent ce constat d'équivalence est exactement rappelé par la société BNP Paribas dans ses écritures, et n'est d'ailleurs pas utilement combattu par M. et Mme Y., lesquels ne rapportent nullement la preuve, qui leur incombe, d'un calcul lombard des échéances mensuelles complètes qui serait différent de celui effectué par la banque.

Certes, si calculer les intérêts courus entre deux échéances sur la base d'un mois de 30 jours et d'une année de 360 jours est équipollent à calculer ces intérêts sur la base d'un mois normalisé et d'une année de 365 jours, en revanche, le calcul des intérêts courus pendant un nombre de jours autre que trente, différerait selon qu'il est rapporté à une année lombarde ou une année civile.

Cependant en l'espèce, nulle part dans les écritures de M. et Mme Y. il n'est allégué d'une erreur qui aurait été commise dans le calcul des intérêts d'une échéance incomplète, sauf à retenir ce qui est écrit dans le rapport de M. [F] évoquant la première échéance courue entre le 25 novembre 2015 et le 5 décembre 2015, rapport que M. et Mme Y. versent aux débats sans même prendre la peine d'en reprendre l'exposé ni les conclusions dans leurs écritures.

Si la banque fait juridiquement erreur en appliquant à cette échéance, pour en calculer le montant des intérêts, la notion de jour normalisé, force est de constater qu'en toute hypothèse, l'erreur ne peut qu'être minime, et en tout état de cause il n'est pas démontré en l'espèce, que cette erreur minime sur le montant de cette échéance emporterait pour l'emprunteur un surcoût d'intérêts affectant le taux effectif global au-delà de la décimale, comme l'exige dorénavant la Cour de cassation. »

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE PARIS

PÔLE 5 CHAMBRE 6

ARRÊT DU14 JUIN 2023

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 21/16292 (8 pages). N° Portalis 35L7-V-B7F-CEKUC. Décision déférée à la Cour : Jugement du 14 avril 2021 -TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de PARIS - RG n° 17/12542.

 

APPELANTS :

Madame X. épouse Y.

[Adresse 1], [Localité 4], Représentée par Maître Yann GRE, avocat au barreau de VAL-DE-MARNE, toque : PC 381

Monsieur Y.

[Adresse 1], [Localité 4], Représenté par Maître Yann GRE, avocat au barreau de VAL-DE-MARNE, toque : PC 381

 

INTIMÉE :

SA BNP PARIBAS

[Adresse 2], [Localité 3], Représentée par Maître Clément DEAN de la SELARL PUGET LEOPOLD COUTURIER, avocat au barreau de PARIS, Ayant pour avocat plaidant Maître Béatrice LEOPOLD COUTURIER de la SELARL PUGET LEOPOLD COUTURIER, avocat au barreau de PARIS, toque : R029

 

COMPOSITION DE LA COUR : En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 20 avril 2023, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Pascale SAPPEY-GUESDON, Conseiller.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de : M. Marc BAILLY, Président de chambre, M. Vincent BRAUD, Président, MME Pascale SAPPEY-GUESDON, Conseiller.

Greffier, lors des débats : Madame Yulia TREFILOVA

ARRÊT : - CONTRADICTOIRE - par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile. - signé par M. Marc BAILLY, Président et par MME Anaïs DECEBAL, Greffier, présent lors de la mise à disposition.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

FAITS PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :

Suivant offre de prêt émise le 20 octobre 2015 dont il n'est pas contesté qu'elle a été régulièrement acceptée par les emprunteurs, la société BNP Paribas a consenti à M. Y. et Mme X., son épouse, un prêt immobilier destiné à financer l'acquisition d'un terrain et la construction d'une maison à usage de résidence principale. Ce prêt, d'un montant de 230.000 euros et d'une durée de 15 ans, a été stipulé remboursable au taux fixe de 1,80 % l'an. L'offre de prêt mentionne un taux effectif global de 2,20 % l'an, et un taux de période mensuel de 0,18 %.

Se plaignant d'irrégularités dans la tenue de leur compte de dépôt et soutenant que le contrat de prêt ne respecterait pas diverses dispositions du code de la consommation, M. et Mme Y. poursuivaient :

- d'une part, la restitution des sommes selon eux indûment perçues par la banque à l'occasion du fonctionnement de ce compte,

- d'autre part, la nullité de la clause de stipulation d'intérêts du prêt, subsidiairement la déchéance totale du droit de la banque aux intérêts conventionnels, et subséquemment, la condamnation de la banque, le taux légal venant se substituer au taux conventionnel, au remboursement des intérêts indûment versés ainsi qu'à émettre un nouveau tableau d'amortissement prenant en compte le taux légal.

Par jugement en date du 14 avril 2021 le tribunal a statué selon le dispositif suivant :

« Déclare les époux Y. irrecevables dans leurs actions en nullité sur les irrégularités affectant le taux effectif global ;

Déboute les époux Y. de l'intégralité de leurs demandes ;

Les condamne in solidum au paiement d'une somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile à la SA BNP Paribas ;

Les condamne in solidum aux entiers dépens ;

Autorise Maître J. à recouvrer directement les frais dont il a fait l'avance sans en avoir reçu provision ;

Dit n'y avoir lieu à exécution provisoire. »

Par déclaration reçue au greffe de la cour le 8 septembre 2021 M. et Mme Y. ont interjeté appel de ce jugement. À l'issue de la procédure d'appel clôturée le 4 avril 2023 les moyens et prétentions des parties s'exposent de la manière suivante.

[*]

Par dernières conclusions communiquées par voie électronique le 6 mars 2023 les appelants

demandent à la cour,

« Vu l'article 1907 du code civil,

Vu l'article 1134 du code civil,

Vu l'article 1135 du code civil,

Vu l'article 1147 du code civil,

Vu les articles L. 312-1 et suivants du code de la consommation,

Vu les articles L. 313-1 et suivants du code de la consommation,

Vu la Recommandation de la commission des clauses abusives du 20 septembre 2005 ;

Vu la jurisprudence de la Cour de cassation, »

en ces termes :

« À titre principal :

- Réformer et infirmer le jugement entrepris ;

Statuant à nouveau,

- Dire recevables les demandes des concluants ;

- Dire et juger que les frais imposés par la BNP n'ont aucun fondement contractuel et ne sont pas dus ;

En conséquence,

- Condamner la BNP PARIBAS à payer à Madame et Monsieur Y. une somme de 149,50 euros au titre du remboursement des frais indûment perçus ;

- Faire interdiction à la BNP PARIBAS de prélever des frais de tenue de compte sur le compte bancaire n°0000XX76, sous astreinte de 100 euros par infraction constatée à compter du prononcé de la décision à intervenir ;

- Dire que les intérêts du prêt ont été calculés sur une 360 jours et non sur l'année civile ;

- Dire que le TEG annoncé est erroné ;

- Prononcer en conséquence la nullité de la clause d'intérêt figurant au contrat de prêt ;

- Dire non écrite la clause d'intérêt du prêt ;

Subsidiairement,

- Prononcer la déchéance du droit aux intérêts de la Banque ;

En toute hypothèse,

- Dire que le taux d'intérêt légal devra être substitué au taux contractuel avec effet à la date de souscription du contrat ;

- Dire, conformément à la jurisprudence de la Cour de cassation que le taux légal de la date de souscription du contrat devra être appliqué (2015) ;

- Dire que les sommes ayant été réglées par la partie requérante au titre des intérêts devront être ré-imputées sur le capital et que le trop-perçu devra être restitué à la partie demanderesse ;

- Condamner la BNP à restituer à Monsieur et Madame Y. le trop-perçu d'intérêts versés par le demandeur à la banque après recalcul et correspondant à la différence entre les intérêts perçus à la date de la décision à intervenir et ceux qui résultent de l'application au contrat de prêt du taux légal de 0,99 % l'an, avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation et capitalisation en application de l'article 1154 du code civil ;

- Condamner la Banque à établir, pour chaque prêt un nouveau tableau d'amortissement avec effet à la date de conclusion du contrat, sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter du prononcé de la décision à intervenir ;

- Dire que les condamnations à intervenir seront assorties des intérêts au taux légal à compter de la date de signification de la présente assignation ;

- Ordonner la capitalisation des intérêts ;

- Ordonner la compensation entre les créances réciproques des parties ;

- Débouter la BNP PARIBAS de l'ensemble de ses demandes ;

- Condamner la société intimée au paiement de la somme de 3.000 euros, en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- La condamner aux entiers dépens, incluant les frais d'Expertise, dont attribution à Maître GRE, Avocat, conformément à l'article 699 du CPC. »

[*]

Par dernières conclusions communiquées par voie électronique le 31 mars 2023 l'intimé demande à la cour,

« Rejetant toutes fins, moyens et conclusions contraires,

- Confirmer le jugement du 14/04/2021 rendu par le Tribunal Judiciaire de Paris,

- Déclarer irrecevables les consorts Y. par application de l'article 564 du CPC en leur demande relative à l'existence d'une prétendue clause abusive en cause d'appel,

- Déclarer irrecevables ou, à défaut, mal fondés les consorts Y. en l'ensemble de leurs autres demandes, fins et prétentions et les en débouter intégralement,

- Les condamner à payer la somme de 5.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- Les condamner aux entiers dépens. »

[*]

Par application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé, pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, à leurs conclusions précitées.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Sur les frais de tenue de compte :

M. et Mme Y. affirment que lors de l'octroi du prêt la banque leur a imposé une clause de domiciliation de revenus tout en leur assurant alors, que la tenue du compte serait gratuite, et de leur avoir par la suite néanmoins facturé des frais de tenue de compte, modifiant de ce fait, unilatéralement, le contrat initial. M. et Mme Y. indiquent avoir refusé l'application de ces frais, et considèrent que ce refus aurait dû avoir pour conséquence de les autoriser à clôturer leur compte, sans frais, conformément aux dispositions du code monétaire et financier. Or, l'offre de prêt mentionne un taux d'intérêt supérieur de 0,2 % au cas de clôture du compte, si bien que celle-ci ne pouvait donc, en fait, se faire sans frais.

Les appelants ne précisent pas quelles dispositions du code monétaire et financier conféreraient au titulaire d'un compte, un droit à clôture sans frais, ni en quoi ces dispositions seraient applicables à leur situation ou aux faits de la cause. C'est exactement, que le tribunal, à l'instar de la banque s'est référé aux dispositions de l'article L. 312-1-1 du code monétaire et financier, et notamment en son IV., pour juger, à bon droit, que si la clôture du compte doit être sans frais lorsqu'elle est sollicitée par le client, celui-ci est tenu d'assumer les nouveaux frais s'il n'en a pas fait la demande dans les conditions prévues par ce texte.

Les emprunteurs signant l'offre de prêt proposée par la banque en ont accepté toutes les stipulations, y compris celle relative à la domiciliation des revenus, qui présentait pour eux un avantage financier certain - un taux d'intérêt inférieur de 0,2 points à celui qui serait appliqué au cas contraire. Alors qu'il n'est pas contesté que M. et Mme Y. ont eu connaissance des nouveaux tarifs, ils n'ont donc pas souhaité clôturer leur compte, et dès lors ne peuvent soutenir pouvoir bénéficier d'une dispense de frais qui ne s'applique qu'en ce cas de figure.

Le jugement déféré est confirmé en ce qu'il a débouté M. et Mme Y. de cette demande.

 

Sur le calcul des intérêts du prêt et le taux effectif global :

1 - M. et Mme Y. en cause d'appel demandent à la cour de « Dire non écrite la clause d'intérêt du prêt », précisant : « une clause telle que celle figurant au contrat de prêt constitue une clause abusive », comme il est dit dans la recommandation n° 05-02 du 20 septembre 2005 de la Commission des clauses abusives.

La société BNP Paribas considère cette dernière prétention comme étant nouvelle au sens des dispositions de l'article 564 du code de procédure civile et demande à la cour de la déclarer irrecevable.

Or, le juge se devant d'examiner même d'office le caractère abusif d'une clause de calcul d'intérêts, aucune irrecevabilité de saurait être tirée du fait que les emprunteurs n'ont pas formulé cette demande dès la première instance.

En vertu des dispositions de l'article L. 132-1 devenu l'article L. 212-1 du code de la consommation, dans les contrats conclus entre professionnels et non professionnels ou consommateurs, sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du non-professionnel ou du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat.

Il est à noter qu'en l'espèce aucune clause du contrat ne stipule des intérêts calculés sur une année de 360 jours. La cour n'aura pas à déclarer non écrite une clause qui n'existe pas.

M. et Mme Y. ne peuvent qu'être déboutés de leurs prétentions relatives au caractère abusif de la « clause » litigieuse.

2 - Ensuite, M. et Mme Y. reprochent à la banque d'avoir calculé les intérêts du prêt, illicitement, sur la base d'une année bancaire de 360 jours, ce qui selon eux est sanctionné par la nullité de la clause d'intérêt qui « devra être systématiquement prononcée lorsque l'étude de l'offre de prêt fera apparaître que le taux a été calculé sur 360 jours ».

Tout d'abord, la question de la sanction applicable relève d'une appréciation de fond et ne saurait conduire à une fin de non-recevoir. Le jugement déféré sera donc infirmé de ce chef.

Ensuite, contrairement à ce que soutiennent les appelants écrivant que la Cour de cassation dont la jurisprudence est reprise de manière constante par les juridictions du fond sanctionne l'irrégularité de la clause de stipulation conventionnelle par la nullité et la substitution du taux légal, en l'état actuel de la jurisprudence de la Haute-Cour la seule sanction civile encourue en cas de calcul des intérêts d'un prêt sur la base de l'année dite lombarde, est celle de la déchéance du droit du prêteur aux intérêts conventionnels du prêt, dans la proportion est appréciée par le juge.

La solution est identique en matière de taux effectif global erroné.

Toutefois, M. et Mme Y. entendent exercer, à titre subsidiaire, l'action en déchéance du droit du prêteur aux intérêts conventionnels. Les griefs qu'ils développent seront donc examinés sous cet angle et à ce titre.

 

a) Sur le mode de calcul des intérêts du prêt :

Il est de principe que par application des dispositions combinées des articles 1907 alinéa 2 du code civil et L. 313-1, L. 313-2, R. 313-1 du code de la consommation, les intérêts conventionnels d'un prêt consenti à un consommateur ou un non-professionnel doivent, comme le taux effectif global, être calculés sur la base de l'année civile sous peine de se voir substituer l'intérêt légal.

C'est à l'emprunteur qu'il incombe de démontrer que la banque a effectivement calculé les intérêts conventionnels sur la base de l'année lombarde.

Ceci étant, contrairement à ce que soutiennent les appelants, et comme jugé par le tribunal, il doit être retenu que calculer les intérêts courus entre deux échéances sur la base d'un mois de 30 jours et d'une année de 360 jours est équipollent à calculer ces intérêts sur la base d'un mois normalisé et d'une année de 365 jours, seule méthode correcte eu égard aux dispositions du code de la consommation, en particulier l'article R. 313-1 et son annexe, d'application générale, et cela, contrairement à ce qu'affirment les appelants, quand bien même il s'agit d'un crédit immobilier, et étant indifférent le fait que le prêt aurait été signé une année bissextile (ce qui n'est d'ailleurs nullement le cas en l'espèce).

Au cas présent ce constat d'équivalence est exactement rappelé par la société BNP Paribas dans ses écritures, et n'est d'ailleurs pas utilement combattu par M. et Mme Y., lesquels ne rapportent nullement la preuve, qui leur incombe, d'un calcul lombard des échéances mensuelles complètes qui serait différent de celui effectué par la banque.

Certes, si calculer les intérêts courus entre deux échéances sur la base d'un mois de 30 jours et d'une année de 360 jours est équipollent à calculer ces intérêts sur la base d'un mois normalisé et d'une année de 365 jours, en revanche, le calcul des intérêts courus pendant un nombre de jours autre que trente, différerait selon qu'il est rapporté à une année lombarde ou une année civile.

Cependant en l'espèce, nulle part dans les écritures de M. et Mme Y. il n'est allégué d'une erreur qui aurait été commise dans le calcul des intérêts d'une échéance incomplète, sauf à retenir ce qui est écrit dans le rapport de M. [F] évoquant la première échéance courue entre le 25 novembre 2015 et le 5 décembre 2015, rapport que M. et Mme Y. versent aux débats sans même prendre la peine d'en reprendre l'exposé ni les conclusions dans leurs écritures.

Si la banque fait juridiquement erreur en appliquant à cette échéance, pour en calculer le montant des intérêts, la notion de jour normalisé, force est de constater qu'en toute hypothèse, l'erreur ne peut qu'être minime, et en tout état de cause il n'est pas démontré en l'espèce, que cette erreur minime sur le montant de cette échéance emporterait pour l'emprunteur un surcoût d'intérêts affectant le taux effectif global au-delà de la décimale, comme l'exige dorénavant la Cour de cassation.

 

b) Sur l'erreur affectant le taux effectif global :

Le premier juge a exactement rappelé les principes de droit régissant le calcul du taux effectif global et la preuve de son caractère erroné.

Sur la foi de l'analyse mathématique établie par M. F. - pièce 6 - M. et Mme Y. reprochent à la banque de ne pas avoir pris en compte dans le calcul du taux effectif global, les frais de courtage, d'un montant de 750 euros, ce qui emporterait un écart supérieur à la décimale entre le taux effectif global réel et le taux effectif global affiché par la banque.

La banque intimée répond que M. et Mme Y. ne justifient pas s'en être acquittés et relève, à juste titre, qu'en tout état de cause le recours aux services d'un courtier relevait du seul choix des emprunteurs, il ne s'agissait pas d'une condition d'octroi du prêt, de sorte que leur coût n'avait pas à être intégré dans l'assiette de calcul du taux effectif global. Par ailleurs, M. et Mme Y. ne démontrent pas que cette omission aurait, en elle-même, entraîné une erreur du taux effectif global excédant la décimale comme prévu par l'article R. 313-1 du code de la consommation.

Les écritures de M. et Mme Y. ne disent rien des autres irrégularités qu'aurait relevées M. [F] et en tout état de cause, comme commenté avec pertinence par la banque intimée, les écarts, minimes (au titre des primes d'assurance, des frais de dossier de l'assurance, de la commission d'ouverture de crédit) sont insusceptibles de générer un écart de taux effectif global supérieur à la décimale, et quant aux frais de caution Crédit Logement, plus conséquents, ils ont été pris en compte, et le rapport [F] ne démontre pas le contraire.

Enfin, et surtout, la société BNP Paribas critique, à raison, la méthode de M. [F], qui a commis des erreurs sur le moment d'imputation des frais (à la date à laquelle ils sont payables) de sorte que le recalcul proposé ne peut qu'être erroné en ce que les flux n'ont pas été placés correctement.

Il résulte de l'ensemble de ces éléments que M. et Mme Y. échouent à rapporter la preuve, qui leur incombe, d'irrégularités tant dans le calcul des intérêts du prêt que s'agissant de l'assiette de calcul du taux effectif global, d'une erreur affectant l'exactitude de celui-ci au-delà de la décimale.

Par conséquent, le jugement déféré est confirmé en ce que M. et Mme Y. ont été déboutés de l'intégralité de leurs demandes, et condamnés subséquemment au paiement des dépens et au titre des frais irrépétibles.

 

Sur les dépens et les frais irrépétibles :

M. et Mme Y. qui échouent dans leurs demandes, supporteront la charge des dépens et ne peuvent prétendre à aucune somme sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile. En revanche pour des raisons tenant à l'équité il y a lieu de faire droit à la demande de l'intimé formulée sur ce même fondement, mais uniquement dans la limite de la somme de 2.500 euros.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant dans les limites de l'appel,

CONFIRME le jugement déféré en toutes ses dispositions, sauf en ce qu'il a déclaré M. et Mme Y. irrecevables en leur action en nullité, et dit y avoir lieu à statuer au fond ;

Et y ajoutant :

REJETTE la fin de non-recevoir opposée par la banque de la demande de M. et Mme Y. tendant à voir déclarer non écrite la clause de calcul des intérêts ;

DÉBOUTE M. et Mme Y. de cette demande ;

CONDAMNE M. et Mme Y. à payer à la société BNP Paribas la somme de 2.500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile à raison des frais irrépétibles exposés en cause d'appel ;

DÉBOUTE M. et Mme Y. de leur propre demande formulée sur ce même fondement ;

CONDAMNE M. et Mme Y. aux entiers dépens d'appel.

LE GREFFIER                                            LE PRÉSIDENT