CA LYON (3e ch. A), 14 septembre 2023
CERCLAB - DOCUMENT N° 10402
CA LYON (3e ch. A), 14 septembre 2023 : RG n° 20/01120
Publication : Judilibre
Extrait : « En l'espèce, il convient de rappeler que les contrats liant les parties portent, entre la société Locam et la société CG Solutions Informatiques, sur la fourniture d'un bien, et entre la société La Famille et la société Locam, sur une location, le contrat entre ces dernières reprenant les termes de « locataire » et bailleur, sans autre mention particulière, et la société Locam intervenant en sa qualité de bailleur de matériels.La société Locam indique intervenir dans le cadre d'un contrat de location financière qui, à son sens, est exclu des dispositions du code de la consommation régissant les contrats conclus hors établissement, puisque n'étant pas un service financier au sens défini par l'article 3.3 de la Directive 2011/83 UE et exclu par l'article L 221-2 du code de la consommation. Or, le contrat conclu entre la société Locam et la société La Famille n'est pas assimilable à une opération de crédit car la location n'est pas assortie d'une option d'achat et la directive invoquée rappelle qu'un service financier est défini comme « tout service ayant trait à la banque, au crédit, à l'assurance aux pensions individuelles, aux investissements ou aux paiements ». Dès lors, le contrat liant les parties n'est pas exclu du champ de l'application de l'article L. 221-3 du code de la consommation comme n'étant pas une opération connexe aux opérations de banque.
La société La Famille rapporte la preuve de ce qu'elle entre dans les autres critères du texte à savoir, l'existence d'un contrat signé hors établissement, sur un objet n'entrant pas dans le champ de son activité de restauration, puisque portant sur l'acquisition d'un pack dynamique soit un écran qui permet la diffusion de différentes images, et s'agissant d'une société n'employant pas plus de cinq salariés, soit un seul salarié sur la période de signature du contrat.
Il est constant par ailleurs que la société Locam ne rapporte pas la preuve de ce que les contrats contestés comportent des bordereaux de rétractation, ne respectant pas en cela les dispositions du code de la consommation, cette absence étant sanctionnée par la nullité des conventions.
Dès lors, la société La Famille remplit les critères lui permettant de demander l'application du droit de la consommation et de ses dispositions d'ordre public.
2/ « Eu égard à ce qui précède, et faute pour la société Locam de fournir un bordereau de rétractation dans le contrat de location financière ou bien d'apporter une information claire à ce titre, le contrat liant la société La Famille à la société Locam ne peut qu'être déclaré nul.
S'agissant du contrat de fourniture, étant rappelé que les contrats de fourniture et de location financière sont interdépendants, il convient d'en prononcer de facto la caducité du contrat de fourniture liant la société La Famille à la société CG Solutions Informatiques. En conséquence, la société Locam sera condamnée à restituer à la société La Famille la somme de 2.856,18 euros au titre des loyers indûment perçus. »
3/ « En l'espèce, la société La Famille entend se prévaloir dans ses écritures de l'obligation d'information pré-contractuelle ou contractuelle nécessaire en cas de conclusion d'un contrat à distance en invoquant les dispositions de l'article 1112-1 du code civil. Toutefois, ce texte n'a pas vocation à s'appliquer puisque n'étant pas entrée en vigueur à la date de la conclusion du contrat litigieux.
En outre, même si la société La Famille agit sur le fondement de l'article 1147 du code civil, il lui revient de rapporter la preuve de la faute contractuelle de la société Locam dans l'exécution de ses obligations, mais aussi de son préjudice, preuve qui n'est rapporté dans aucun des cas. Dès lors, la demande de dommages et intérêts présentée ne pourra qu'être rejetée. »
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE LYON
TROISIÈME CHAMBRE A
ARRÊT DU 14 SEPTEMBRE 2023
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 20/01120. N° Portalis DBVX-V-B7E-M3OR. Décision du Tribunal de Commerce de SAINT-ÉTIENNE CEDEX 1 du 10 janvier 2020 : RG n° 2017j515.
APPELANTE :
SARL LA FAMILLE exerçant sous l'enseigne LE GAVROCHE
au capital de XXX euros, inscrite au RCS de Grenoble sous le numéro YYY prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège, [Adresse 1], [Localité 4], Représentée par Maître Romain LAFFLY de la SELARL LAFFLY & ASSOCIES - LEXAVOUE LYON, avocat au barreau de LYON, toque : 938, postulant et ayant pour avocat plaidant Maître Myriam TIDJANI de la société BEYLE AVOCATS, avocat au barreau de GRENOBLE
INTIMÉS :
M. V. N. ès qualités de liquidateur judiciaire de la société CG SOLUTIONS INFORMATIQUES
[Adresse 2], [Localité 6], non représenté
SAS LOCAM
au capital de ZZZ €, immatriculée au RCS de SAINT ETIENNE sous le numéro WWW, agissant poursuites et diligences par son dirigeant domicilié ès qualité audit siège, [Adresse 3], [Localité 5], Représentée par Maître Michel TROMBETTA de la SELARL LEXI, avocat au barreau de SAINT-ÉTIENNE
Date de clôture de l'instruction : 27 mai 2021
Date des plaidoiries tenues en audience publique : 7 juin 2023
Date de mise à disposition : 14 septembre 2023
Audience présidée par Aurore JULLIEN, magistrate rapporteur, sans opposition des parties dûment avisées, qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, assistée pendant les débats de Clémence RUILLAT, greffière.
Composition de la Cour lors du délibéré : - Patricia GONZALEZ, présidente - Marianne LA-MESTA, conseillère - Aurore JULLIEN, conseillère
Arrêt par défaut rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties présentes ou représentées en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile, Signé par Patricia GONZALEZ, présidente, et par Clémence RUILLAT, greffière, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
EXPOSÉ DU LITIGE :
Le 20 juillet 2016, la SARL La Famille, exploitant un fonds de commerce de restauration sous l'enseigne « La Gavroche » a conclu avec la SAS Location Automobiles Matériels (ci-après « la société Locam ») un contrat de location portant sur un pack dynamique fourni par la SARL CG Solutions Informatiques, moyennant le règlement de 48 loyers mensuels de 588 euros TTC. Le 16 août 2016, un procès-verbal de livraison et de conformité a été signé.
Par courrier recommandé du 8 mai 2017, la société Locam a mis en demeure la société La Famille de régler les échéances impayées sous peine de déchéance et de l'exigibilité de toutes sommes dues au titre du contrat.
Cette mise en demeure étant demeurée sans effet, par acte d'huissier du 30 mai 2017, la société Locam a assigné la société La Famille devant le tribunal de commerce de Saint-Étienne afin d'obtenir la somme principale de 27.812,40 euros.
Par acte d'huissier du 28 décembre 2017, la société La Famille a appelé dans la cause la société CG Solutions Informatiques. L'affaire a été jointe à la précédente par jugement du 27 février 2018.
Par jugement du 13 septembre 2018, le tribunal de commerce de Clermont Ferrand a prononcé la liquidation judiciaire de la société CG Solutions Informatiques et a désigné Maître N. en qualité de liquidateur judiciaire.
Par acte d'huissier du 7 novembre 2018, la société La Famille a appelé dans la cause Maître N., ès-qualités de liquidateur judiciaire de la société CG Solutions Informatiques. L'affaire a été jointe aux précédentes par jugement du 21 décembre 2018.
Par jugement réputé contradictoire du 10 janvier 2020, le tribunal de commerce de Saint-É tienne a :
- débouté la société La Famille de sa demande tendant à voir prononcer la nullité du contrat pour absence d'information relative au droit de rétractation,
- débouté la société La Famille de sa demande tendant à voir prononcer la nullité du contrat de fourniture et prestations de services,
- constaté l'interdépendance et l'indivisibilité des contrats liant d'une part la société La Famille et la société CG Solutions Informatiques et d'autre part la société La Famille et la société Locam,
- débouté la société La Famille de sa demande tendant à voir prononcer la caducité du contrat de location,
- débouter la société La Famille de sa demande de restitution des loyers versés,
- dit l'ensemble des conditions générales du contrat de location opposable à la société La Famille,
- débouté la société La Famille de sa demande de constatation d'un manquement par la société Locam de ses obligations de conseils et d'informations,
- débouté la société La Famille de sa demande d'indemnisation,
- débouté la société La Famille de sa demande de sursis à statuer,
- condamné la société La Famille à verser à la société Locam la somme de 27.812,40 euros, y incluse la clause pénale de 10 %, outre intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 8 mai 2017,
- ordonné la restitution par la société La Famille à la société Locam du matériel objet du contrat,
- rejeté la demande d'astreinte,
- condamné la société La Famille à payer la somme de 250 euros à la société Locam au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- dit que les dépens sont à la charge de la société La Famille,
- rejeté la demande d'exécution provisoire du jugement,
- débouté les parties du surplus de leurs demandes.
La société La Famille a interjeté appel par acte du 11 février 2020.
Par conclusions notifiées par voie dématérialisée le 17 mars 2021 à la société Locam, fondées sur l'article 16 du code de procédure civile, les articles 1137, 1112-1, 1108, 1134 et 1147 ancien du code civil et les articles L. 221-5, L. 228-8 et L. 221-3 du code de la consommation, la société La Famille a demandé à la cour de :
- infirmer le jugement déféré,
- juger nul et nul effet le contrat de location financière qu'elle a souscrit le 20 juillet 2016 avec la société Locam,
- juger nul et nul effet le contrat qu'elle a souscrit avec la société CG Solutions Informatiques,
- condamner la société Locam à lui restituer les sommes indûment perçues au titre de ce contrat,
- constater l'inopposabilité des conditions générales de vente du contrat de location financière souscrit avec la société Locam le 20 juillet 2016,
en conséquence,
- débouter la société Locam de toutes demandes dirigées à son encontre,
- constater que la société Locam a manqué à ses obligations de conseils, d'informations et notamment celles visées à l'article 1112-1 du code civil,
que dès lors,
- condamner la société Locam à lui régler la somme de 28.000 euros à titre de dommages-intérêts,
- condamner la société Locam à lui régler la somme de 2.856,18 euros correspondant aux sommes indûment versées,
- à titre subsidiaire, surseoir à statuer dans l'attente de la décision pénale,
- condamner la société Locam à lui régler la somme de 4.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner la même aux entiers dépens, avec droit de recouvrement pour ceux d'appel.
Suivant conclusions signifiées à Maître N., ès-qualités de liquidateur judiciaire de la société CG Solutions Informatiques le 27 avril 2020, la société La Famille a demandé à la cour de :
- infirmer le jugement du Tribunal de commerce de Saint-Étienne du 10 janvier 2020
- dire et juger nul et de nul effet le contrat de location financière souscrit le 20 juillet 2016 entre la société La Famille et la société Locam,
- dire et juger de nul effet le contrat souscrit entre la société La Famille et la société CG Solutions Informatiques
- condamner la société Locam à restituer à la société La Famille les sommes indûment perçues au titre de ce contrat
- constater l'inopposabilité des conditions générales de vente du contrat de location financière souscrit avec la société Locam le 20 juillet 2016
en conséquence,
- débouter la société Locam de toute demande dirigée à l'encontre de la société La Famille
- constater que la société Locam a manqué à ses obligations de conseil, d'information et notamment celles visées à l'article 1112-1 du code civil
- condamner la société Locam à lui payer la somme de 28.000 euros à titre de dommages et intérêts
à titre subsidiaire
- surseoir à statuer dans l'attente de la décision pénale
- condamner la société Locam à lui payer la somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile
- condamner la même aux entiers dépens de première instance et d'appel, distraits au profit de Maître Laffly, avocat, sur affirmation de son droit.
[*]
Par conclusions notifiées par voie dématérialisée le 18 février 2021 fondées sur les articles 1103 et suivants, 1231-2, 1137 et 1172 du code civil, les articles 311-1, 313-1 et 511-21 du code monétaire et financier, les articles L. 121-16-1 4° devenu L. 222-1 4° et L. 311-1 du code de la consommation, l'article L. 511-3 du CMF, le règlement du CRB n°86-21 du 24 octobre 1986 relatif aux activités non bancaires modifié par l'arrêté du 23 décembre 2013 et l'article L. 110-3 du code de commerce, la société Locam a demandé à la cour de :
- dire non fondé l'appel de la société La Famille,
- la débouter de toutes ses demandes,
- confirmer le jugement entrepris,
y ajoutant,
- condamner la société La Famille à lui régler une nouvelle indemnité de 2.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- la condamner en tous les dépens d'instance et d'appel.
[*]
Maître N., ès-qualités de liquidateur judiciaire de la société CG Solutions Informatiques, à qui la déclaration d'appel a été signifiée par acte du 27 avril 2020, n'a pas constitué avocat.
[*]
La procédure a été clôturée par ordonnance du 27 mai 2021, les débats étant fixés au 7 juin 2023.
Pour un plus ample exposé des moyens et motifs des parties, renvoi sera effectué à leurs dernières écritures conformément aux dispositions de l'article 455 du Code de Procédure Civile.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
MOTIFS DE LA DÉCISION :
Sur la demande de nullité et de caducité des contrats souscrits :
Sur ce point, la société La Famille fait valoir :
- les dispositions des articles L. 221-5 et L. 221-8 du code de la consommation qui prévoit la nécessaire information relative au droit de rétractation au profit d'un consommateur lors de la conclusion d'un contrat hors établissement et à défaut, la nullité du contrat conclu
- la conclusion du contrat litigieux dans ses locaux, à [Localité 4] par la société CG Solutions Informatiques, s'agissant du contrat de fourniture mais aussi du contrat de location financière
- l'objet du contrat qui ne portait pas dans son champ de compétence puisque la société La Famille exerce une activité de restauration, et que le contrat portait sur la fourniture d'un pack dynamique c'est-à-dire d'un dispositif vidéo
- l'emploi d'un seul salarié sur la période de signature du contrat comme le démontrent les pièces comptables mais aussi l'attestation de son expert-comptable
- le bénéfice des dispositions protectrices du consommateur au regard de l'intégralité de ces éléments, dispositions d'ordre public
- la nature du contrat, à savoir un contrat de location d'un objet mobilier, acquis dans les faits par la société Locam, après choix du meuble par le locataire auprès d'un fournisseur qui est réglé intégralement par le bailleur financier, ce qui exclut tout contrat de service financier ou relatif à l'activité bancaire
- la nullité du contrat de fourniture et de prestations de service avec la société CG Solutions Informatiques puisqu'il a été reconnu par le fournisseur que l'objet fourni n'a jamais fonctionné, ce qui qualifie tromperie sur l'objet
- la caducité du contrat de location financière, étant relevé que la société Locam a perçu la somme de 2.856,18 euros eu égard à la nullité du contrat de fourniture
- l'inopposabilité des conditions générales de vente de la société Locam qui ne comportent aucune signature du dirigeant de la société La Famille, et en l'absence de régularisation
- le caractère non-écrit des clauses venant contredire le principe d'interdépendance des contrats
- l'obligation renforcée en terme d'information contractuelle en cas de conclusion d'un contrat entre absents notamment lorsque les contrats sont conclus par voie informatique, ou par correspondance.
À l'appui de sa position, la société Locam fait valoir :
- l'application à sa situation du Code Monétaire et Financier étant une filiale à 100 % de la caisse régionale Loire et Haute Loire du Crédit Agricole, et sa qualité de société de financement enregistrée auprès de l'ACPR
- sa qualité de société de financement et l'exclusion dès lors des dispositions relatives au droit de la consommation
- les dispositions des article L. 511-21 et L. 511-3 du Code Monétaire et Financier
- l'exclusion par l'article L. 222-1 du code de la consommation des opérations connexes aux opérations de banque
- le fait que les opérations connexes de location simple participent des services financiers qu'elle dispense en tant que société de financement et la non application en conséquence des dispositions de l'article L. 221-2 4°
- le récapitulatif des sommes dues par la société La Famille
- l'absence de preuve de ce que la société La Famille n'emploie pas plus de cinq salariés, l'attestation de l'expert-comptable étant insuffisante à rapporter la preuve nécessaire à l'application du droit de la consommation au surplus des autres moyens
- concernant le dol allégué ou le manquement à une obligation de conseil, l'absence de preuve du dol et d'un supposé stratagème permettant à la société Locam de tirer profit du manquement à ses engagements de la société CG Solutions Informatiques
- la clarté du contrat de location financière dont l'en-tête indique bien « CONTRAT DE LOCATION », l'indication du nombre et du montant des loyers ainsi que leur périodicité
- la prise de connaissance par le gérant de la société appelante des conditions de souscription du contrat, y compris des conditions générales par l'apposition de sa signature et du tampon humide de la société, la signature de chaque page des conditions générales n'étant pas obligatoire étant rappelé que les deux sociétés sont des commerçants, et que juste avant la signature, il est indiqué que le fait de signer implique que le contractant a pris connaissance des conditions générales.
Sur ce,
Selon l'article L. 221-3, les dispositions du code de la consommation applicables aux relations entre consommateurs et professionnels sont étendues aux contrats conclus hors établissement entre deux professionnels dès lors que l'objet de ces contrats n'entre pas dans le champ de l'activité principal du professionnel sollicité et que le nombre de salariés employés par celui-ci est inférieure ou égal à cinq.
Il ressort des dispositions des articles L. 221-5 et L. 221-20 du code de la consommation que lorsque les éléments concernant le droit de rétractation ne sont pas indiqués au contrat, à savoir le délai initial de 14 jours, ce délai est prolongé d'une année.
L'article L. 221-27 du code de la consommation dispose que l'exercice du droit de rétractation met fin à l'obligation des parties soit d'exécuter le contrat à distance ou le contrat hors établissement, soit de le conclure lorsque le consommateur a fait une offre et que l'exercice du droit de rétractation d'un contrat principal à distance ou hors établissement met automatiquement fin à tout contrat accessoire, sans frais pour le consommateur autres que ceux prévus aux articles L. 221-23 à L. 221-25.
Enfin, l'article L. 221-29 du code de la consommation dispose que toute dérogation aux textes susvisés serait nulle et de nul effet, les dispositions ayant vocation à s'appliquer de plein droit.
Il convient dans un premier temps de vérifier si la société La Famille peut prétendre au bénéfice des dispositions de l'article L. 221-3 du code de consommation.
En l'espèce, il convient de rappeler que les contrats liant les parties portent, entre la société Locam et la société CG Solutions Informatiques, sur la fourniture d'un bien, et entre la société La Famille et la société Locam, sur une location, le contrat entre ces dernières reprenant les termes de « locataire » et bailleur, sans autre mention particulière, et la société Locam intervenant en sa qualité de bailleur de matériels.
La société Locam indique intervenir dans le cadre d'un contrat de location financière qui, à son sens, est exclu des dispositions du code de la consommation régissant les contrats conclus hors établissement, puisque n'étant pas un service financier au sens défini par l'article 3.3 de la Directive 2011/83 UE et exclu par l'article L 221-2 du code de la consommation.
Or, le contrat conclu entre la société Locam et la société La Famille n'est pas assimilable à une opération de crédit car la location n'est pas assortie d'une option d'achat et la directive invoquée rappelle qu'un service financier est défini comme « tout service ayant trait à la banque, au crédit, à l'assurance aux pensions individuelles, aux investissements ou aux paiements ». Dès lors, le contrat liant les parties n'est pas exclu du champ de l'application de l'article L. 221-3 du code de la consommation comme n'étant pas une opération connexe aux opérations de banque.
La société La Famille rapporte la preuve de ce qu'elle entre dans les autres critères du texte à savoir, l'existence d'un contrat signé hors établissement, sur un objet n'entrant pas dans le champ de son activité de restauration, puisque portant sur l'acquisition d'un pack dynamique soit un écran qui permet la diffusion de différentes images, et s'agissant d'une société n'employant pas plus de cinq salariés, soit un seul salarié sur la période de signature du contrat.
Il est constant par ailleurs que la société Locam ne rapporte pas la preuve de ce que les contrats contestés comportent des bordereaux de rétractation, ne respectant pas en cela les dispositions du code de la consommation, cette absence étant sanctionnée par la nullité des conventions.
Dès lors, la société La Famille remplit les critères lui permettant de demander l'application du droit de la consommation et de ses dispositions d'ordre public.
Il convient en conséquence d'infirmer dans sa totalité la décision déférée et de statuer à nouveau.
Eu égard à ce qui précède, et faute pour la société Locam de fournir un bordereau de rétractation dans le contrat de location financière ou bien d'apporter une information claire à ce titre, le contrat liant la société La Famille à la société Locam ne peut qu'être déclaré nul.
S'agissant du contrat de fourniture, étant rappelé que les contrats de fourniture et de location financière sont interdépendants, il convient d'en prononcer de facto la caducité du contrat de fourniture liant la société La Famille à la société CG Solutions Informatiques.
En conséquence, la société Locam sera condamnée à restituer à la société La Famille la somme de 2.856,18 euros au titre des loyers indûment perçus.
Sur la demande de dommages et intérêts formée par la société La Famille :
L'article 1147 du code civil, dans sa version applicable au litige dispose que le débiteur est condamné, s'il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts, soit à raison de l'inexécution de l'obligation, soit à raison du retard dans l'exécution, toutes les fois qu'il ne justifie pas que l'inexécution provient d'une cause étrangère qui ne peut lui être imputée, encore qu'il n'y ait aucune mauvaise foi de sa part.
En l'espèce, la société La Famille entend se prévaloir dans ses écritures de l'obligation d'information pré-contractuelle ou contractuelle nécessaire en cas de conclusion d'un contrat à distance en invoquant les dispositions de l'article 1112-1 du code civil. Toutefois, ce texte n'a pas vocation à s'appliquer puisque n'étant pas entrée en vigueur à la date de la conclusion du contrat litigieux.
En outre, même si la société La Famille agit sur le fondement de l'article 1147 du code civil, il lui revient de rapporter la preuve de la faute contractuelle de la société Locam dans l'exécution de ses obligations, mais aussi de son préjudice, preuve qui n'est rapporté dans aucun des cas.
Dès lors, la demande de dommages et intérêts présentée ne pourra qu'être rejetée.
Sur les demandes accessoires :
La société Locam échouant en ses prétentions, elle sera condamnée à supporter les entiers dépens de la procédure de première instance et d'appel.
L'équité commande d'accorder à la société La Famille une indemnisation sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
La société Locam sera condamnée à lui verser la somme de 3.500 euros à ce titre.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
La Cour, statuant publiquement, dans les limites de l'appel
Infirme en toutes ses dispositions la décision déférée,
Statuant à nouveau
Prononce la nullité du contrat conclu entre la SARL La Famille et la SAS Locam le 20 juillet 2016,
Prononce la caducité du contrat conclu entre la SARL La Famille et la société CG Solutions Informatiques représentée par Maître N. ès qualité de liquidateur judiciaire le 20 juillet 2016,
Condamne la SAS Locam à payer à la SARL La Famille la somme de 2.856,18 euros,
Déboute la SARL La Famille de sa demande dommages et intérêts,
Condamne la SAS Locam à supporter les entiers dépens de la procédure de première instance et d'appel,
Condamne la SAS Locam à payer à la SARL La Famille la somme de 3.500 euros à titre d'indemnisation sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE
- 5889 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de professionnel - Critères - Contrats conclus hors établissement ou à distance (après la loi du 17 mars 2014 - art. L. 221-3 C. consom.)
- 5946 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de professionnel - Illustrations - Contrats conclus pendant l’activité - Activité administrative - Informatique