CEntre de Recherche sur les CLauses ABusives
Résultats de la recherche

TJ PARIS (5e ch. 2e sect.), 18 janvier 2024

Nature : Décision
Titre : TJ PARIS (5e ch. 2e sect.), 18 janvier 2024
Pays : France
Juridiction : T.jud. Paris
Demande : 21/08330
Date : 18/01/2024
Nature de la décision : Rejet
Mode de publication : Judilibre
Date de la demande : 17/05/2021
Imprimer ce document

 

CERCLAB - DOCUMENT N° 10661

TJ PARIS (5e ch. 2e sect.), 18 janvier 2024 : RG n° 21/08330

Publication : Judilibre

 

Extraits : 1/ « En l’espèce, Mademoiselle X. omet de produire à l’appui de sa demande le contrat de formation alors qu’elle se prévaut de la recommandation de la commission des clauses abusives du 7 juillet 1989 relative aux contrats proposés, par les établissements d’enseignement qui dénonce les clauses empêchant la résiliation du contrat à la demande du consommateur qui justifie d’un motif sérieux et légitime, de sorte que le tribunal n’est pas en mesure d’apprécier les clauses relatives à la résiliation du contrat prévue au contrat ni même d’apprécier comme le prétend la demanderesse si le versement de la totalité des frais d’inscriptions s’imposait et si des modalités de leur remboursement étaient prévues.

La demanderesse qui produit une facture du 7 novembre 2019 et une attestation d’inscription qui attestent de la conclusion du contrat, ne justifie nullement de son contenu, alors que la preuve lui en incombe.

Elle ne place pas ce faisant, le tribunal en mesure d’apprécier si les conditions de la résiliation sont réunies, alors que la demande ne précise pas le fondement juridique de la résiliation invoquée, et alors qu’il lui est demandé d’apprécier la validité des clauses de ce contrat, et en particulier, des clauses relatives à la résiliation de celui-ci, au regard de la recommandation invoquée. Sa demande sera donc de ce fait rejetée. »

2/ « S’agissant de la crise sanitaire liée au Covid, qui est par ailleurs invoquée, elle ne constitue pas davantage un événement traduisant la force majeure. Certes, il s’agit d’un évènement imprévisible lors de la conclusion du contrat, mais cet empêchement à la délivrance d’une prestation d’enseignement, qui devait s’étendre sur deux ans, est temporaire. Et la requérante ne justifie ni n’allègue qu’elle n’était pas en mesure de reporter sa formation d’un an, ni que l’organisme de formation le lui ait refusé, alors qu’elle l’aurait sollicité, et que l’enseignement à distance s’avérait impossible pour ce type de formation, de sorte que la demanderesse ne justifie pas être libérée de ses obligations, en vertu de l’article 1218 du code civil.

Ainsi, la force majeure invoquée, qui se borne à suspendre l'exécution de l'obligation, n’est pas caractérisée par la demanderesse, qui ne rapporte pas, en l’état, les preuves nécessaires au soutien de ses prétentions, et sera, de ce fait, déboutée de l’ensemble de ses demandes, au regard des articles 9 du code de procédure civile, et 1353 du code civil, Mademoiselle X. n’établissant pas que la SAS défenderesse était dans l’impossibilité d’exécuter la prestation d’enseignement. »

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE PARIS

CINQUIÈME CHAMBRE DEUXIÈME SECTION

JUGEMENT DU 18 JANVIER 2024

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 21/08330. N° Portalis 352J-W-B7F-CUU75. Assignation du : 17 mai 2021

 

DEMANDERESSE :

Mademoiselle X.

née le [date] à [payse], de nationalité […] et demeurant au [Adresse 3], [ville], [pays], représentée par Maître Hanane TADINI, avocat au barreau de PARIS, avocat postulant, vestiaire #A0767

 

DÉFENDERESSE :

SAS CENTRE DE MANAGEMENT HÔTELIER / INSTITUT EUROPÉEN DE TOURISME ET D’HÔTELLERIE

[Adresse 1], [Localité 2], non représentée

 

COMPOSITION DU TRIBUNAL : Par application des articles R. 212-9 du Code de l’Organisation Judiciaire et 812 du Code de Procédure Civile, l’affaire a été attribuée au Juge unique. Avis en a été donné aux avocats constitués qui ne s’y sont pas opposés.

Christine BOILLOT, Vice-Présidente, statuant en juge unique, assistée de Catherine BOURGEOIS, Greffière

 

DÉBATS : A l’audience du 30 novembre 2023 tenue en audience publique, avis a été donné aux conseils des parties que la décision serait rendue par mise à disposition au greffe le 18 janvier 2024

JUGEMENT : Prononcé par mise à disposition au greffe, Réputé contradictoire, En premier ressort

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Mademoiselle X. a assigné la SAS CENTRE de MANAGEMENT HOTELIER/ INSTITUT, EUROPEEN DE TOURISME et d’HOTELLERIE (CMH/ IETH) devant le tribunal judiciaire de Paris, par exploit du 17 mai 2021, aux fins d’obtenir de résiliation du contrat de formation qu’elle a conclu avec cet organisme de formation en 2018, et pour lequel elle a commencé de régler des frais d’inscriptions pour l’année scolaire 2018/2019, en vue de préparer un « MBA in international Hospitalitiy and Luxury Brand Management », et en vue d’obtenir le remboursement des frais d’inscription qu’elle a versés à cet organisme, alors que l’étudiante n’a pas obtenu son visa et n’a pu effectuer la formation, à raison de la crise sanitaire. Ci-après plusieurs demandes de remboursement, adressées au centre en 2020, par courrier et par courriel.

Dans ses dernières conclusions, notifiées le 6 avril 2022, elle renouvelle les mêmes demandes, sollicitant du tribunal, au visa des articles L. 444-8, alinéa 2 du code de l’éducation et 1104 et 1217 et suivants du code civil, de :

- la déclarer recevables et bien fondées en ses demandes

- prononcer la résiliation du contrat de formation conclu avec le Centre de Management Hôtelier/Institut Européen de Tourisme et d’Hôtellerie (CMH/IETH) ;

- le condamner à lui payer

* 9.000 € en restitution des frais de scolarité versés ;

* 5.000 € en application de l’article 700 du code de procédure civile outre les dépens.

L’étudiante malgache prétend qu’au lieu de passer par une pré-inscription qui est selon elle une procédure normale pour un étudiant étranger aspirant à étudier en France, sans être titulaire du titre de séjour, il lui a été demandé de verser l’intégralité des droits d’inscription, par deux virements successifs du 18 septembre 2018 pour un montant de 4.000 €, et du 15 octobre 2018 pour 5.000 €, et qu’elle n’a pas en définitive obtenu son visa d’entrée du consulat de France de Tananarive, ce dont elle a informé l’organisme de formation. Elle fait valoir n’avoir pas pu suivre la formation, compte tenu de l’état d’urgence déclaré, lequel constituait un obstacle insurmontable à sa venue en France.

Par courrier du 18 mai 2020, elle a donc sollicité, auprès du centre, le remboursement de ses frais d’inscription, demande qu’elle a renouvelée dans un courrier recommandé du 23 juillet 2020, puis dans un courriel.

Elle se prévaut de la recommandation de la commission des clauses abusives du 7 juillet 1989 relative aux contrats proposés par les établissements d’enseignement, qui dénonce les clauses empêchant la résiliation du contrat à la demande du consommateur, alors qu’il se prévaut d’un motif sérieux et légitime.

[*]

Pour un plus ample exposé des prétentions et des moyens des parties, il convient de se référer aux termes de l’assignation, en application de l’article 455 du code de procédure civile.

Assigné dans les formes de l’article 658 du code de procédure civile et informée par lettre simple des conséquences de son abstention, conformément à l’article 471, dernier alinéa du code de procédure civile, l’organisme de formation défendeur n’a pas constitué avocat.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 1er juillet 2022.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIFS :

Le défendeur n’ayant pas constitué avocat, la présente décision sera rendue par jugement réputé contradictoire, conformément aux dispositions de l’article 473 du Code de procédure civile.

En application de l’article 472 du Code de procédure civile, si le défendeur ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond. Le juge ne fait droit à la demande que dans la mesure où il l'estime régulière, recevable et bien fondée.

Aux termes des articles 1217, 1218 et 1224 du code civil, la partie envers laquelle l'engagement n'a pas été exécuté, ou l'a été imparfaitement, peut :

- refuser d'exécuter ou suspendre l'exécution de sa propre obligation ;

- poursuivre l'exécution forcée en nature de l'obligation ;

- obtenir une réduction du prix ;

- provoquer la résolution du contrat ;

- demander réparation des conséquences de l'inexécution.

Les sanctions qui ne sont pas incompatibles peuvent être cumulées ; des dommages et intérêts peuvent toujours s'y ajouter.

Il y a force majeure, en matière contractuelle, lorsqu'un événement échappant au contrôle du débiteur, qui ne pouvait être raisonnablement prévu lors de la conclusion du contrat et dont les effets ne peuvent être évités par des mesures appropriées, empêche l'exécution de son obligation par le débiteur.

Si l'empêchement est temporaire, l'exécution de l'obligation est suspendue, à moins que le retard qui en résulterait ne justifie la résolution du contrat. Si l'empêchement est définitif, le contrat est résolu de plein droit et les parties sont libérées de leurs obligations dans les conditions prévues aux articles 1351 et 1351-1.

La résolution résulte soit de l'application d'une clause résolutoire soit, en cas d'inexécution suffisamment grave, d'une notification du créancier au débiteur ou d'une décision de justice.

En l’espèce, Mademoiselle X. omet de produire à l’appui de sa demande le contrat de formation alors qu’elle se prévaut de la recommandation de la commission des clauses abusives du 7 juillet 1989 relative aux contrats proposés, par les établissements d’enseignement qui dénonce les clauses empêchant la résiliation du contrat à la demande du consommateur qui justifie d’un motif sérieux et légitime, de sorte que le tribunal n’est pas en mesure d’apprécier les clauses relatives à la résiliation du contrat prévue au contrat ni même d’apprécier comme le prétend la demanderesse si le versement de la totalité des frais d’inscriptions s’imposait et si des modalités de leur remboursement étaient prévues.

La demanderesse qui produit une facture du 7 novembre 2019 et une attestation d’inscription qui attestent de la conclusion du contrat, ne justifie nullement de son contenu, alors que la preuve lui en incombe.

Elle ne place pas ce faisant, le tribunal en mesure d’apprécier si les conditions de la résiliation sont réunies, alors que la demande ne précise pas le fondement juridique de la résiliation invoquée, et alors qu’il lui est demandé d’apprécier la validité des clauses de ce contrat, et en particulier, des clauses relatives à la résiliation de celui-ci, au regard de la recommandation invoquée. Sa demande sera donc de ce fait rejetée.

Si la demanderesse justifie d’un refus du consulat général de France à Madagascar de délivrance d’un visa, au motif opposé que le dossier est incomplet et qu’il y manque certains justificatifs, elle ne justifie nullement avoir renouvelé sa demande avec un dossier complété, après le 19 octobre 2018, alors que les enseignements étaient dispensés pour l’année scolaire 2019-2020, ce premier refus, ne constituant, en tout état de cause, qu’un empêchement temporaire à l’exécution du contrat, alors que la prestation était à venir, et qu’il n’a pu suspendre l’exécution du contrat. Il n’est donc pas établi que ledit empêchement à l’exécution du contrat était définitif et ne pouvait être évité par des moyens appropriés, qui relevaient, en l’occurrence, de la demanderesse, au sens de l’article 1218 du code civil précité. Le refus de visa invoqué n’est donc pas propre à caractériser la force majeure. La demanderesse échoue ainsi à rapporter la preuve qui lui incombe.

S’agissant de la crise sanitaire liée au Covid, qui est par ailleurs invoquée, elle ne constitue pas davantage un événement traduisant la force majeure. Certes, il s’agit d’un évènement imprévisible lors de la conclusion du contrat, mais cet empêchement à la délivrance d’une prestation d’enseignement, qui devait s’étendre sur deux ans, est temporaire. Et la requérante ne justifie ni n’allègue qu’elle n’était pas en mesure de reporter sa formation d’un an, ni que l’organisme de formation le lui ait refusé, alors qu’elle l’aurait sollicité, et que l’enseignement à distance s’avérait impossible pour ce type de formation, de sorte que la demanderesse ne justifie pas être libérée de ses obligations, en vertu de l’article 1218 du code civil.

Ainsi, la force majeure invoquée, qui se borne à suspendre l'exécution de l'obligation, n’est pas caractérisée par la demanderesse, qui ne rapporte pas, en l’état, les preuves nécessaires au soutien de ses prétentions, et sera, de ce fait, déboutée de l’ensemble de ses demandes, au regard des articles 9 du code de procédure civile, et 1353 du code civil, Mademoiselle X. n’établissant pas que la SAS défenderesse était dans l’impossibilité d’exécuter la prestation d’enseignement.

 

Sur les demandes accessoires :

Mademoiselle X. qui succombe en ses prétentions supportera les dépens. Les demandes au titre des frais irrépétibles seront rejetées.

Au vu de l’issue du litige, il n’y a pas lieu d’assortir le prononcé de la présente décision du bénéfice de l'exécution provisoire.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

Le tribunal, statuant publiquement par jugement réputé contradictoire, en premier ressort et par mise à disposition au greffe,

DÉBOUTE Mademoiselle X. de l’intégralité de ses demandes ;

CONDAMNE Mademoiselle X. aux dépens ;

DIT n’y avoir lieu à exécution provisoire de la présente décision.

Fait et jugé à Paris le 18 Janvier 2024

La Greffière                                      La Présidente

Catherine BOURGEOIS                 Christine BOILLOT