CA NÎMES (2e ch. sect. A), 17 juin 1997
CERCLAB/CRDP - DOCUMENT N° 1076
CA NÎMES (2e ch. sect. A), 17 juin 1997 : RG n° 95 /3349 ; arrêt n° 369
Publication : Juris-Data n° 030451
Extrait : « Dans le bon de commande du 10 mars 1994 considéré par les parties comme constitutif de leurs seuls engagements, il est indiqué, dans les conditions particulières, que le délai est fixé « au plus vite », et dans les conditions générales que « nos délais sont donnés qu'à titre indicatif. Leur non-respect ne peut nous obliger à aucune indemnité ». De la combinaison des articles 1610 du Code Civil, L. 114-1 et L. 132-1 du Code de la Consommation, il ressort que de telles clauses doivent être considérées à la fois comme non écrites, les FOYERS LADES n'ayant pas indiqué dans le bon de commande valant contrat avec X., consommateur, la date limite à laquelle ils s'étaient engagés à livrer le foyer de cheminée, et comme abusives et non écrites, de telles clauses apparaissant imposées à X., non professionnel, par un abus de puissance économique des FOYERS LADES et conférant à ceux-ci un avantage excessif. »
COUR D’APPEL DE NÎMES
DEUXIÈME CHAMBRE SECTION A
ARRÊT DU 17 JUIN 1997
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 95/3349. Arrêt n° 369.
Ce jour, DIX SEPT JUIN MIL NEUF CENT QUATRE VINGT DIX SEPT,
A l'audience publique de la DEUXIÈME CHAMBRE SECTION A, DE LA COUR D'APPEL DE NÎMES, Monsieur ROCHE, Président, assisté de Madame DERNAT, Premier Greffier, a prononcé l'arrêt suivant, dans l'instance opposant :
D'une part :
La SARL LES FOYERS LADES
dont le siège social est [adresse], prise en la personne de son gérant en exercice y domicilié en cette qualité, ayant pour avoué constitué la SCP TARDIEU et Maître FLAUGERE pour avocat, APPELANTE
D'autre part :
Monsieur X.,
Demeurant et domicilié [adresse], AJT du […] – N° […], ayant pour avoué constitué la SCP GUIZARD et Maître TROMBERT pour avocat, INTIMÉ
Après que l'instruction ait été clôturée par le Conseiller de la Mise en Etat en date du 18 avril 1997, Après que les débats aient eu lieu à l'audience publique du 13 mai 1997 où siégeaient : Monsieur ROCHE, Président, Monsieur CAVALLINO, Conseiller, Monsieur DE MONREDON, Conseiller,
assistés de Madame DERNAT, Premier Greffier.
[minute page 2] La Cour ainsi composée et assistée a entendu les avoués en leurs explications et conclusions et Maître TROMBERT avocat en ses plaidoiries, et renvoyé le prononcé pour plus ample délibéré à la date du 17 juin 1997.
Les magistrats du siège en ont ensuite délibéré en secret conformément à la loi.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
FAITS, PROCÉDURE, PRÉTENTIONS DES PARTIES :
Par bon écrit n° 94XX du 10 mars 1994 X. a passé commande auprès de la SARL LES FOYERS LADES d'un foyer de cheminée moyennant un prix TTC de 20.399,20 francs.
L'appareil n'ayant pas été livré malgré le versement d'arrhes à concurrence de la somme de 10.000 francs, le 28 mars 1995 X. a fait assigner la SARL LES FOYERS LADES à titre principal en résiliation du contrat de vente et paiement de la somme de 20.000 francs sur le fondement de l'article 1590 du Code Civil.
Les FOYERS LADES ont régulièrement relevé appel d'un jugement du 13 juin 1995 du Tribunal d'Instance de TOURNON qui a :
- constaté la résolution du contrat signé par les parties le 10 mars 1994.
- condamné la SARL FOYERS LADES à payer à Monsieur X. la somme de 20.000 francs en principal et celle de 1.000 francs au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
- débouté les parties du surplus de leurs demandes, fins et conclusions.
- laissé les entiers dépens à la charge de la SARL FOYERS LADES.
Les FOYERS LADES estiment qu'il n'a contractuellement été posé aucun délai de livraison et qu'aucune mise en demeure n'a été délivrée à cette fin.
Le matériel commandé nécessite de longs délais de livraison. D'autre part, l'acompte n'a été réglé que 7 mois après le bon de commande. Enfin, dès réception de l'assignation, la livraison a été offerte à [minute page 3] X.
Les FOYERS LADES demandent en conséquence de :
- réformer en toutes ses dispositions le jugement rendu le 13 juin 1995 par le Tribunal d'Instance de TOURNON.
- débouter purement et simplement Monsieur X. de sa demande de résolution.
- constater que la société concluante tient la disposition de Monsieur X. le four commandé.
- condamner Monsieur X. à lui payer le solde de 10.399, 20 francs TTC.
- condamner Monsieur X. à payer à la société concluante la somme de 10.000 francs par application des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
- condamner Monsieur X. aux entiers dépens, les dépens d'appel étant distraits au profit de son avoué.
X. conclut à :
- confirmer en toutes ses dispositions le jugement du Tribunal d'Instance de TOURNON du 13 juin 1995.
- allouer pour le surplus la somme de 3.000 francs à titre de dommages-intérêts.
- condamner la SARL LES FOYERS LADES aux entiers dépens, ceux d'appel distraits au profit de son avoué sur son affirmation de droit.
La clause des conditions générales de vente laissant au vendeur la liberté de fixer les délais de livraison doit être considérée comme non écrite, voire abusive.
L'absence de mise en demeure est sans effet.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
MOTIFS :
Dans le bon de commande du 10 mars 1994 considéré par les parties comme constitutif de leurs seuls engagements, il est indiqué, dans les conditions particulières, que le délai est fixé « au plus vite », et dans les conditions générales que « nos délais sont donnés [minute page 4] qu'à titre indicatif. Leur non-respect ne peut nous obliger à aucune indemnité ».
De la combinaison des articles 1610 du Code Civil, L. 114-1 et L. 132-1 du Code de la Consommation, il ressort que de telles clauses doivent être considérées à la fois comme non écrites, les FOYERS LADES n'ayant pas indiqué dans le bon de commande valant contrat avec X., consommateur, la date limite à laquelle ils s'étaient engagés à livrer le foyer de cheminée, et comme abusives et non écrites, de telles clauses apparaissant imposées à X., non professionnel, par un abus de puissance économique des FOYERS LADES et conférant à ceux-ci un avantage excessif.
N'ayant pas obtenu la livraison du foyer de cheminée plus d'un an après la commande passée, la demande de résolution de X. a justement été déclarée fondée par le premier juge pour manquement des FOYERS LADES à leur obligation de livraison prévue par l'article 1603 du Code Civil, sauf à dire qu'elle doit être prononcée et non constatée, s'agissant d'une résolution judiciaire et non d'une résolution de plein droit, les conditions d'une telle résolution de plein droit n'étant pas démontrées et en particulier celles fixées par les dispositions de l'article L. 114-1 alinéa 1 et 2 du Code de la Consommation qui n'excluent pas pour autant la possibilité d'une résolution judiciaire d'un contrat inexécuté.
Il ne saurait être allégué une absence de mise en demeure préalable de l'acheteur à défaut de texte imposant cette exigence, et aucun texte n'étant invoqué par les FOYERS LADES à ce sujet.
Il ne saurait être soutenu que les délais de livraison de foyer tel que celui commandé seraient « nécessairement...longs » s'agissant d'une simple affirmation aussi imprécise qu'aléatoire.
Il ne peut être prétendu non plus que le règlement de « l'acompte de 10.000 francs » serait intervenu tardivement le 7 octobre 1994, un quelconque versement n'étant mentionné dans le bon de commande ni dans d'autres documents liant les parties, et les FOYERS LADES ne justifient même pas en avoir réclamé le paiement à X.
Il ne peut être revendiqué enfin que le foyer a finalement été mis à la disposition de l'acquéreur, celle-ci se situant après l'acte introductif d'instance, [minute page 5] soit postérieurement à l'ouverture du droit de X. de solliciter la résolution du contrat.
L'article 1590 du Code Civil est inapplicable en la cause, le contrat de vente conclu entre les parties étant résolu, ce qui empêche l'une ou l'autre des parties de se dédire.
N'établissant pas d'autre part l'existence d'un quelconque préjudice indemnisable en dehors de la restitution de la somme de 10.000 francs versée par lui, X. doit voir sa prétention limitée au montant de cette somme, ce qui conduit à réformer de ce chef le jugement déféré et à rejeter la demande de dommages-intérêts présentée en cause d'appel.
Le premier juge a justement alloué à X. la somme de 1.000 francs sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile au titre des frais irrépétibles qu'il serait inéquitable de laisser à sa charge.
Comme conséquence de la résolution du contrat de vente, le premier juge a justement rejeté comme non fondées les demandes des FOYERS LADES en paiement de sommes et offre de livraison. Il y a lieu en outre de rejeter pour ce même motif leur demande sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
Succombant à titre principal, les FOYERS LADES ont justement été condamnés aux dépens de première instance et doivent être condamnés à ceux d'appel.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS,
LA COUR :
Statuant publiquement, contradictoirement, en matière civile et en dernier ressort,
En la forme,
Déclare l'appel régulier et recevable.
Au fond,
[minute page 6] Confirme le jugement déféré sauf à :
- prononcer la résolution du contrat signé par les parties le 10 mars 1994 à la date de ce jugement, au lieu de constater la résolution du même contrat.
- fixer à 10.000 francs le montant de la somme que la SARL LES FOYERS LADES est condamnée à payer à X. en principal.
Y ajoutant,
Déboute la SARL LES FOYERS LADES de sa demande en paiement sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
Déboute X. de sa demande de dommages-intérêts à titre de mauvaise foi de l'appelante.
Condamne la SARL LES FOYERS LADES aux dépens d'appel avec droit pour la SCP d'avoués GUIZARD de recouvrer directement ceux dont elle a fait l'avance sans avoir reçu provision.
Arrêt signé par Monsieur ROCHE, Président et Madame DERNAT, Premier Greffier.