TI TOURNON, 13 juin 1995
CERCLAB/CRDP - DOCUMENT N° 160
TI TOURNON, 13 juin 1995 : RG n° 95/00102 ; jugement n° 164
(sur appel CA Nîmes (2e ch. A), 17 juin 1997 : RG n° 95/3349 ; arrêt n° 369)
Extrait : « ATTENDU que le paragraphe intitulé « Délais de livraison » figurant aux conditions générales de vente imprimées au verso mentionne notamment « nos délais ne sont donnés qu'à titre indicatif. Leur non respect ne peut nous obliger à aucune indemnité » ; que cette clause imposée par le vendeur à pour effet de supprimer le droit à réparation de l'acquéreur prévu par l'article 1610 du Code Civil, en cas de manquement à l'obligation de délivrance ; qu'elle est manifestement abusive comme conférant au professionnel un avantage excessif sur le non professionnel au regard notamment des dispositions de l'article 35 de la Loi du 10 janvier 1978 reprises dans la Loi du 26 juillet 1993 relative au Code de la Consommation ; en conséquence cette clause doit être réputée non écrite. »
TRIBUNAL D’INSTANCE DE TOURNON (Ardèche)
JUGEMENT DU 13 JUIN 1995
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 02.95.00102. À l'audience publique le Tribunal d'Instance de TOURNON sous la Présidence de Madame Véronique FORGE, Juge assistée de Mademoiselle Berengère LEON, faisant fonction de greffier, a rendu jugement suivant :
ENTRE :
Monsieur X.
[adresse], Représenté par Maître FESVRE avocat [adresse] à TOURNON. PARTIE DEMANDERESSE
ET :
SARL LES FOYERS DE LADES
[adresse], Représentée par Maître FLAUGERE avocat [adresse] à TOURNON. PARTIE DÉFENDERESSE
AUDIENCE DES DÉBATS : 9 mai 1995
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
[minute page 2] EXPOSÉ DES FAITS DE LA CAUSE ET DE LA PROCÉDURE :
Par acte en date du 28 mars 1995 Monsieur X. assignait la SARL FOYER LADES prise en la personne de son gérant en exercice aux fins d'obtenir sa condamnation à lui payer la somme de 20.000 Francs en principal, outre celle de 3.000 Francs au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, au bénéfice de l'exécution provisoire.
Le requérant expose que le 10 mars 1994 il a commandé à la SA FOYER LADES un foyer fermé à combustion inversée avec récupérateur de chaleur pour un prix de 20.399,20 Francs, la livraison devant intervenir au plus vite. A la demande du vendeur Monsieur X. a versé 10.000 Francs à titre d'arrhes le 7 octobre 1994. Or l'appareil n'a jamais été livré.
Il est donc demandé la résiliation du contrat de vente pour carence du vendeur et le paiement d'une somme de 20.000 Francs représentant le double du montant des arrhes versées en application de l'article 1590 du Code Civil.
En réponse la défenderesse indique qu'au verso du bon de commande, il est précisé que les délais ne sont donnés qu'à titre indicatif, et que leur non respect ne peut donner à aucune indemnité. La SARL FOYER LADES précise qu'hormis le chèque de 10.000 Francs versé par Monsieur X. et l'assignation ouvrant la présente procédure, elle n'a reçu aucune nouvelle de son client.
Elle rappelle que la vente était parfaite dès l'accord des parties sur la chose et le prix ; qu'aucun délai contractuel de livraison n'était convenu et qu'en tout état de cause, la résolution judiciaire ne peut être demandée qu'après mise en demeure au vendeur de livrer dans un délai donné. Le vendeur a offert la livraison en fin de semaine suivant l'assignation et précise que le foyer est à la disposition du requérant livrable à sa première réclamation.
A titre reconventionnel elle sollicite le paiement du solde soit 10.399,20 Francs.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
SUR QUOI :
ATTENDU que dans le cadre des informations dues aux consommateurs, il appartient au vendeur professionnel de fournir à l'acheteur non professionnel une indication précise et explicite sur le délai de livraison de l'objet stipulé au bon de commande.
ATTENDU qu'en portant au recto du bon de commande en date du 10 mars 1994 la mention « le plus vite possible » la SARL FOYER LADES ne fixe aucun délai réel pour accomplir son obligation de délivrance privant ainsi l'acheteur de toute date certaine à partir de laquelle il pourrait demander la résolution du contrat ou sa mise en possession.
ATTENDU qu'au mieux la mention « le plus vite possible » pourrait s'analyser comme définissant implicitement un délai raisonnable ; qu'en tout état de cause le délai écoulé entre le bon de commande du 10 mars 1994 et l'assignation du 28 mars 1995, soit plus d'un an, ne peut être considéré comme acceptable s'agissant d'un produit commercialisé dans des conditions normales par le vendeur.
ATTENDU que le paragraphe intitulé « Délais de livraison » figurant aux conditions générales de vente imprimées au verso mentionne notamment « nos délais ne sont donnés qu'à titre indicatif. Leur non respect ne peut nous obliger à aucune indemnité » ; que cette clause imposée par le vendeur à pour effet de supprimer le droit à réparation de l'acquéreur prévu par l'article 1610 du Code Civil, en cas de manquement à l'obligation de délivrance ; qu'elle est manifestement abusive comme conférant au professionnel un avantage [minute page 3] excessif sur le non professionnel au regard notamment des dispositions de l'article 35 de la Loi du 10 janvier 1978 reprises dans la Loi du 26 juillet 1993 relative au Code de la Consommation ; en conséquence cette clause doit être réputée non écrite.
ATTENDU que ni l'article 1610 du Code Civil ni le contrat conclu entre les parties ne prévoient l'obligation d'une mise en demeure préalable du vendeur pour l'acquéreur qui demande la résolution du contrat.
ATTENDU qu'il convient de faire droit à la demande de Monsieur X. et de condamner la SARL FOYER LADES à lui payer la somme de 20.000 Francs en application des dispositions de l'article 1590 du Code Civil.
ATTENDU que le défendeur sera en conséquence débouté de sa demande reconventionnelle en paiement du solde de 10.399,20 Francs.
ATTENDU qu'il serait inéquitable de laisser à la charge du requérant l'intégralité de ses frais de procédure, une indemnité de 1.000 Francs lui sera allouée sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
LE TRIBUNAL statuant publiquement, contradictoirement et en premier ressort.
CONSTATE la résolution du contrat signé par les parties le 10 mars 1994.
CONDAMNE la SARL FOYER LADES à payer à Monsieur X. la somme de 20.000 Francs en principal, et celle de 1.000 Francs au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
DÉBOUTE les parties du surplus de leurs demandes, fins et conclusions.
LAISSE les entiers dépens à la charge de la SARL FOYER LADES.
AINSI fait jugé et prononcé en audience publique les jour mois et an que dessus.
ET a le Président signé avec le Greffier en Chef.
LE PRÉSIDENT. LE GREFFIER EN CHEF.