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CA VERSAILLES (ch. civ. 1-3), 7 mars 2024

Nature : Décision
Titre : CA VERSAILLES (ch. civ. 1-3), 7 mars 2024
Pays : France
Juridiction : Versailles (CA), 1re ch.
Demande : 21/01096
Date : 7/03/2024
Nature de la décision : Réformation
Mode de publication : Judilibre
Date de la demande : 18/02/2021
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CERCLAB - DOCUMENT N° 10841

CA VERSAILLES (ch. civ. 1-3), 7 mars 2024 : RG n° 21/01096

Publication : Judilibre

 

Extraits : 1/ « En vertu des dispositions de l'article 122 du code de procédure civile, « constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l'adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d'agir, tel le défaut de qualité, le défaut d'intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée ». Il résulte des articles 122 et 124 du code de procédure civile que les fins de non-recevoir ne sont pas limitativement énumérées ; que, licite, la clause d'un contrat instituant une procédure de conciliation obligatoire et préalable à la saisine du juge, dont la mise en œuvre suspend jusqu'à son issue le cours de la prescription, constitue une fin de non-recevoir qui s'impose au juge si les parties l'invoquent (Cass. ch. mixte, 14 février 2003, n° 00-19.423). L'irrecevabilité n'est encourue en cas d'inobservation de la clause que si celle-ci détaille les conditions particulières de sa mise en œuvre.

En l'espèce, le 13 juillet 2013, M. X. a signé une lettre de mission de suivi patrimonial stipulant notamment : « en cas de litige, les parties contractantes s'engagent à rechercher en premier lieu un arrangement amiable puis en second lieu d'informer la commission Arbitrage et discipline de la Chambre des Indépendants du Patrimoine ([Adresse 1]). Ce n'est qu'en cas d'échec de cet arrangement amiable que le litige pourrait être porté devant les tribunaux compétents. »

Il convient de constater que les modalités de l'« arrangement amiable », que les parties se sont engagées à rechercher en cas de différend ne sont pas définies, de même que n'est prévue qu'une simple « information » à une commission d'arbitrage et de discipline. En outre, cette clause ne manifeste pas plus de manière non équivoque la volonté par les parties de subordonner une action judiciaire à une tentative de conciliation alors qu'aucune sanction n'est prévue.

Dès lors, cette clause ne peut être assimilée à une procédure de conciliation préalable et le non-respect allégué de cette disposition ne peut caractériser une fin de non-recevoir. Ce moyen sera donc rejeté. »

2/ « La prescription quinquennale des sanctions qui s'attachent au dol court du jour où la victime l'a connu ou découvert.

Le manquement d'un conseiller en gestion de patrimoine à son obligation d'informer le souscripteur d'un contrat d'assurance-vie libellé en unités de compte sur le risque de pertes présenté par un support d'investissement, ou à son obligation de le conseiller au regard d'un tel risque, prive ce souscripteur d'une chance d'éviter la réalisation de ces pertes. Celles-ci ne se réalisent qu'au rachat du contrat d'assurance-vie, quand bien même le support en cause aurait fait antérieurement l'objet d'un désinvestissement. (Cass. com. 21 juin 2023, n°21-19.853). »

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE VERSAILLES

CHAMBRE CIVILE 1-3

ARRÊT DU 7 MARS 2024

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

N° Portalis DBV3-V-B7F-UKLA. Code nac : 58Z. CONTRADICTOIRE. Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 27 novembre 2020 par le TJ de Nanterre (6e ch.) : RG n° 17/01146.

LE SEPT MARS DEUX MILLE VINGT QUATRE, La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

 

APPELANT :

Monsieur X.

né le [Date naissance 4] à [Localité 11], de nationalité Française, [Adresse 2], [Localité 7], Représentant : Maître Morgane FRANCESCHI, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 570, Représentant : Maître Sébastien BERNARD, Plaidant, avocat au barreau de PARIS

 

INTIMÉES :

SA SWISSLIFE ASSURANCE ET PATRIMOINE

N° SIRET : XXX, [Adresse 8], [Localité 10], Représentant : Maître Xavier PERINNE de la SELEURL Xavier PERINNE SELARL, Postulant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : R174 Représentant : Maître Vincent BOURGOIN, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : R 174

SAS AXYALIS PATRIMOINE

N° SIRET : YYY, [Adresse 6], [Localité 5]

SA MMA IARD venant aux droits de la société COVEA RISKS

N° SIRET : ZZZ, [Adresse 3], [Localité 9]

Société MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES venant aux droits de la société COVEA RISKS

N° SIRET : WWW, [Adresse 3], [Localité 9],

Représentant : Maître Philippe CHATEAUNEUF, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 643, Représentant : Maître Dounia HARBOUCHE, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : C2038

 

COMPOSITION DE LA COUR : L'affaire a été débattue le 21 septembre 2023, en audience publique, devant la Cour composée de : Madame Florence PERRET, Président, Madame Gwenael COUGARD, Conseiller chargé du rapport, Monsieur Bertrand MAUMONT, Conseiller, qui en ont délibéré.

GREFFIER : Madame FOULON, lors des débats

ARRÊT : - contradictoire - rendu par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévuesau deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile. - signé par Madame Florence PERRET, Président et par Madame FOULON, Greffier.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                        (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

FAITS ET PROCÉDURE :

Le 19 janvier 2010, M. X. a souscrit, par l'intermédiaire de la société en gestion de patrimoine Axyalis patrimoine, un contrat d'assurance vie libellé en euros dénommé « Sélection R Oxygène » proposé par la société SwissLife assurance patrimoine, sur lequel il a investi la somme de 150.000 euros vers le support en unités dénommé Optimiz 8/14, puis vers le support en unités de compte Axyalis Coupons.

Le 7 juillet 2010, il a procédé à un versement supplémentaire de 63 550 euros.

Le 12 janvier 2011, il a signé un avenant procédant à la vente de 161 911,86 euros investi sur le produit Optimiz 8/14 et 20 955,50 euros en fond euro pour acquérir 182 867,36 euros du produit Axyalis Coupons.

Enfin, le 7 mars 2011, il a investi la somme de 100.000 euros.

Par avenant du 18 juin 2014, M. X. a investi les fonds placés en unités de compte Axyalis Coupons vers l'unité de compte Kairos. Ce produit est arrivé à échéance le 30 décembre 2016.

M. X. a effectué deux rachats partiels les 13 juillet 2013 et 21 janvier 2017, de montants respectifs de 232 464,83 euros et 31.000 euros.

Par actes d'huissier délivrés le 9 janvier 2017, M. X. a assigné les sociétés Swisslife et Axyalis patrimoine devant le tribunal judiciaire de Nanterre aux fins d'annulation, ou à défaut de résolution, des avenants de souscription aux produits Axyalis Coupons et Kairos, et de condamnation au paiement de dommages et intérêts.

Par acte du 28 décembre 2017, il a également fait assigner devant le tribunal judiciaire de Nanterre les sociétés MMA Iard et MMA Iard Assurances mutuelles (les sociétés MMA) en leur qualité d'assureur de la société Axyalis patrimoine, aux fins de condamnation à payer la somme de 487 411 euros.

Les deux instances ont été jointes le 8 février 2018.

Par ordonnance du 4 mai 2018, le juge de la mise en état a rejeté l'exception d'incompétence soulevée par la société SwissLife assurance et patrimoine.

Le 1er août 2019, M. X. a sollicité le rachat total de son contrat.

Par jugement du 27 novembre 2020, le tribunal judiciaire de Nanterre a :

- rejeté les demandes en nullité et en résolution formées par M. X.,

- déclaré irrecevables, car prescrites, les demandes indemnitaires formées au titre de l'acte conclu en 2011, à l'exception de celles fondées sur un défaut de suivi,

- déclaré recevable, mais mal fondé, le surplus des demandes indemnitaires présentées par M. X.,

- l'a rejeté,

- dit n'y avoir lieu d'ordonner l'exécution provisoire,

- condamné M. X. aux dépens, distraits au profit de Maître Dounia Harbouche,

- condamné M. X. à payer à la société SwissLife une indemnité de procédure de 1 200 euros,

- condamné M. X. à payer aux sociétés Axyalis patrimoine, MMA Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles une indemnité de procédure de 1 200 euros,

- rejeté toutes autres demandes.

[*]

Par acte du 18 février 2021, M. X. a interjeté appel et prie la cour, par dernières écritures du 20 juin 2023 de :

- infirmer le jugement déféré en ce qu'il :

* rejette les demandes en nullité et en résolution formées par M. X.,

* déclare irrecevables, car prescrites, les demandes indemnitaires formées au titre de l'acte conclu en

2011, à l'exception de celles fondées sur un défaut de suivi,

* déclare recevable, mais mal fondé, le surplus des demandes indemnitaires présentées par M. X.,

* le rejette,

* condamne M. X. aux dépens, distraits au profit de Maître Dounia Harbouche,

* le condamne à payer à la société SwissLife une indemnité de procédure de 1 200 euros,

* le condamne à payer aux sociétés Axyalis patrimoine, MMA Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles une indemnité de procédure de1 200 euros,

* rejette toutes autres demandes.

Statuant à nouveau

- dire non écrite, ou subsidiairement, annuler toute clause de conciliation obligatoire opposée par les sociétés Axyalis Patrimoine, MMA Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles.

- rejeter les fins de non-recevoir opposées en défense. Déclarer recevables les demandes.

- annuler, ou à défaut prononcer la résolution des trois avenants de souscription au produit Axyalis Coupons de juillet 2010, janvier 2011 et mars 2011 ainsi que de l'avenant de souscription au produit Kairos de juin 2014.

- ordonner, en conséquence, à l'assureur de restituer à M. X. les sommes versées lors des versements de juillet 2010 (63 550,26 euros) et mars 2011 (100.000 euros). Enjoindre également à l'assureur de recalculer la valeur finale de rachat total du contrat d'assurance en tenant compte du fait que les produits cédés par l'avenant annulé du 11 janvier 2011 doivent être considérés comme étant restés en vigueur et ne pas avoir été remplacés. Enjoindre à l'assureur Swisslife Assurance et Patrimoine d'adresser un versement complémentaire de 346.000 euros à M. X. à ce titre.

- dire que les sociétés Swisslife Assurance Patrimoine et Axyalis Patrimoine ont commis des manquements détaillés dans la discussion aux règles et obligations de protection de l'épargne, d'information, de mise en garde et de conseil lors de la souscription et dans le suivi des unités de compte Axyalis Coupons et Kairos et qu'elles doivent, avec les assureurs d'Axyalis Patrimoine, réparation de l'entier préjudice subi, ou à tout le moins des pertes de chance subies, du fait de ces manquements.

- condamner, en conséquence, in solidum ou, à défaut les unes ou les autres, les sociétés Axyalis patrimoine, SwissLife Assurance et Patrimoine, MMA Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles à verser à M. X. la somme de 492 411,34 euros en réparation de son préjudice financier résultant des manquements commis par Axyalis Patrimoine et Swisslife Assurance et Patrimoine lors de la souscription ainsi que dans l'exécution et le suivi des unités de compte Axyalis Coupons et Kairos

- condamner les sociétés défenderesses à payer à M. X. in solidum, ou à défaut l'une ou l'autre, la somme de 5.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens distraits au profit de l'avocat au titre de la procédure de première instance et d'appel.

[*]

Par dernières écritures du 21 juin 2023, les sociétés Axyalis patrimoine, MMA Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles prient la cour de :

- confirmer le jugement déféré en ce qu'il a :

* rejeté les demandes en nullité et en résolution formées par M. X.,

* déclaré irrecevables, car prescrites, les demandes indemnitaires formées au titre de l'acte conclu en

2011,

* déclaré mal fondé, le surplus des demandes indemnitaires présentées par M. X. et l'a rejeté,

* condamné M. X. aux dépens, distraits au profit de Maître Dounia Harbouche,

* condamné M. X. à payer aux sociétés Axyalis Patrimoine, MMA Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles une indemnité de procédure de 1 200 euros.

- infirmer le jugement déféré en ce qu'il a :

* rejeté la fin de non-recevoir fondée sur le non-respect de la mise en œuvre de la procédure de conciliation préalable.

Et statuant à nouveau

A titre principal,

- déclarer la présente action de M. X. à l'encontre d'Axyalis et des sociétés MMA irrecevable pour cause de non-respect de la procédure de conciliation amiable obligatoire et donc rejeter son action.

A titre subsidiaire,

- déclarer l'action de M. X. à l'encontre d'Axyalis et des sociétés MMA tant au titre de ses demandes portant sur l'UC Axyalis Coupons que celles portant sur l'UC Kairos irrecevables comme étant prescrites par conséquent la rejeter,

- déclarer irrecevable comme étant prescrite la demande de M. X. tendant à voir condamner in solidum ou, à défaut les unes ou les autres, les sociétés Axyalis et MMA à lui verser la somme de 492 411,34 euros en raison de son prétendu préjudice financier et donc la rejeter.

- débouter M. X. de toutes ses demandes dirigées à l'encontre des sociétés Axyalis et MMA.

A titre très subsidiaire, si par extraordinaire la cour d'appel devait considérer les demandes de M. X. diligentées à l'encontre d'Axyalis et des sociétés MMA recevables,

- débouter M. X. de voir condamner in solidum ou, à défaut l'une ou l'autre, les sociétés Axyalis et MMA à lui verser à la somme de 492 411,34 euros en réparation de son prétendu préjudice financier; préjudice qui, en tout état de cause, ne pourrait s'analyser qu'en une perte de chance, en l'espèce, égale à zéro,

- débouter M. X. de toutes ses demandes dirigées à l'encontre des sociétés Axyalis et MMA.

A titre encore plus subsidiaire,

- condamner les sociétés MMA à garantir Axyalis de toutes condamnations mises à la charge de cette dernière, en exécution de la police responsabilité civile professionnelle n°225732 précitée.

En tout état de cause,

- condamner M. X. à payer aux sociétés Axyalis, MMA Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles la somme de 6.000 euros chacune, en application de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens dont distraction au profit de Maître Philippe Châteauneuf, avocat au Barreau de Versailles, en application de l'article 699 du code de procédure civile.

[*]

Par dernières écritures du 6 juin 2023, la société SwissLife prie la cour de :

- déclarer M. X. mal fondé en son appel et l'en débouter intégralement,

- confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

Sur la demande de nullité ou de résolution des avenants :

- déclarer irrecevable car prescrite toute action de M. X. en nullité ou en résolution des avenants et en conséquence débouter M. X. de ses demandes,

- déclarer mal fondée la demande en nullité ou en résolution des avenants d'arbitrage dès lors que le contrat n'existe plus suivant le rachat total et en conséquence confirmer le jugement déféré en ce qu'il a débouté M. X. de ses demandes,

- en tout état de cause, confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté M. X. de l'ensemble de ses demandes,

- en tout état de cause, débouter M. X. de l'ensemble de ses demandes.

Sur la demande de dommages-intérêts :

- déclarer irrecevable car prescrite toute action de M. X. en responsabilité et en conséquence confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a déclaré irrecevable les demandes de M. X.,

- déclarer mal fondée l'action de M. X. en responsabilité et en conséquence confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté M. X. de ses demandes,

- en tout état de cause, débouter M. X. de l'ensemble de ses demandes.

En tout état de cause :

- débouter M. X. de l'ensemble de ses demandes,

- condamner M. X. au paiement de la somme de 5.000 euros à SwissLife Assurance et Patrimoine au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens dont distraction au profit de Maître Xavier Périnne en application de l'article 699 du code de procédure civile.

[*]

La cour renvoie aux écritures des parties en application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile pour un exposé complet de leur argumentation.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 22 juin 2023.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIFS :

Sur la recevabilité de l'action engagée à l'encontre des sociétés Axyalis et MMA :

Invoquant les dispositions de l'article 122 du code de procédure civile, les sociétés Axya :lis et MMA affirment que l'action engagée par M. X. est irrecevable faute d'avoir respecté la procédure de conciliation préalable obligatoire prévu par la lettre de mission de suivi patrimonial signée le 13 juillet 2013 par l'appelant.

Elles font valoir que le changement de dénomination de l'instance de conciliation (devenue CNCGP, Chambre nationale des conseils de gestion de patrimoine, au lieu de CIP, Chambre des indépendants du patrimoine) est sans incidence sur la validité et l'opposabilité de la clause à M. X.

Elles soutiennent que la clause litigieuse n'avait pas vocation à instituer une médiation des litiges de consommation et n'est pas donc pas abusive au sens de l'article R. 212-2 du code de la consommation.

M. X. rétorque que la clause de conciliation qui lie la victime et l'assuré n'est pas invocable par l'assureur mis en cause dans le cadre d'une action directe.

Il souligne avoir tenté de rechercher un arrangement amiable et en déduit qu'aucune irrecevabilité ne peut plus donc être invoquée par les sociétés MMA et Axyalis à ce titre.

L'appelant soutient ensuite que la clause litigieuse vise une information de la commission arbitrage de la Chambre des indépendants du patrimoine, qui n'est pas assimilable à une obligation de saisine à titre de conciliation et précise qu'il ne saurait lui être reproché, sur le fondement de l'article 1193 du code civil, de n'avoir pas saisi la Chambre nationale des conseils de gestion de patrimoine.

Il fait valoir que la société Axyalis n'a pas satisfait à son obligation de proposer une médiation de la consommation et que la Chambre nationale des conseils de gestion de patrimoine n'était pas inscrite sur la liste des médiateurs de la consommation et ne pouvait donc intervenir dans ce type de litige, outre que les clauses de règlement amiable obligatoires dans les litiges de consommation constituent des clauses abusives.

Sur ce,

En vertu des dispositions de l'article 122 du code de procédure civile, « constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l'adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d'agir, tel le défaut de qualité, le défaut d'intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée ».

Il résulte des articles 122 et 124 du code de procédure civile que les fins de non-recevoir ne sont pas limitativement énumérées ; que, licite, la clause d'un contrat instituant une procédure de conciliation obligatoire et préalable à la saisine du juge, dont la mise en œuvre suspend jusqu'à son issue le cours de la prescription, constitue une fin de non-recevoir qui s'impose au juge si les parties l'invoquent (Cass. ch. mixte, 14 février 2003, n° 00-19.423).

L'irrecevabilité n'est encourue en cas d'inobservation de la clause que si celle-ci détaille les conditions particulières de sa mise en œuvre.

En l'espèce, le 13 juillet 2013, M. X. a signé une lettre de mission de suivi patrimonial stipulant notamment : « en cas de litige, les parties contractantes s'engagent à rechercher en premier lieu un arrangement amiable puis en second lieu d'informer la commission Arbitrage et discipline de la Chambre des Indépendants du Patrimoine ([Adresse 1]). Ce n'est qu'en cas d'échec de cet arrangement amiable que le litige pourrait être porté devant les tribunaux compétents. »

Il convient de constater que les modalités de l'« arrangement amiable », que les parties se sont engagées à rechercher en cas de différend ne sont pas définies, de même que n'est prévue qu'une simple « information » à une commission d'arbitrage et de discipline.

En outre, cette clause ne manifeste pas plus de manière non équivoque la volonté par les parties de subordonner une action judiciaire à une tentative de conciliation alors qu'aucune sanction n'est prévue.

Dès lors, cette clause ne peut être assimilée à une procédure de conciliation préalable et le non-respect allégué de cette disposition ne peut caractériser une fin de non-recevoir. Ce moyen sera donc rejeté.

 

Sur la prescription :

M. X. conteste toute prescription de son action au motif que le délai de prescription ne court qu'à compter du jour où la victime a connu ou aurait dû connaître le dommage, soit en l'espèce le 30 décembre 2016, date d'expiration de l'unité de compte Kairos, à laquelle il a connu les pertes subies.

Il réfute l'application de la prescription biennale, faisant valoir que l'action engagée contre l'assureur ou l'intermédiaire d'assurance sur le fondement d'un manquement à obligation précontractuelle d'information et de conseil ne dérive pas du contrat d'assurance, outre que les conditions générales ne contenaient pas d'informations précises sur cette prescription.

Les sociétés Axyalis et MMA soutiennent en réponse que la prescription est acquise puisque le point de départ du délai est la date de souscription du contrat.

La société Swisslife affirme que l'action en nullité des arbitrages et versements effectués en 2010/2011 était prescrite, s'il est fait application de l'article 2224 du code civil, en 2016 et même avant si la prescription biennale prévue par l'article L. 114-1 du code des assurances était retenue.

Elle expose que le point de départ de la prescription court à compter de la conclusion du contrat dès lors que le souscripteur a été informé de ses caractéristiques.

Sur ce,

L'action en nullité du contrat d'assurance ou de ses avenants, fondée sur le dol de l'assureur ou de son mandataire, qui repose sur l'existence de manoeuvres pratiquées avant la conclusion du contrat, ne dérive pas du contrat d'assurance, au sens de l'article L. 114-1 du code des assurances.

De même, l'action en responsabilité formée contre l'assureur en raison de son manquement à son obligation d'information ne dérive pas du contrat d'assurance et n'est donc pas soumise à la prescription biennale.

Il résulte de la combinaison des articles 2224 et L. 110-4 du code de commerce que les obligations entre commerçants et non-commerçants se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.

La prescription quinquennale des sanctions qui s'attachent au dol court du jour où la victime l'a connu ou découvert.

Le manquement d'un conseiller en gestion de patrimoine à son obligation d'informer le souscripteur d'un contrat d'assurance-vie libellé en unités de compte sur le risque de pertes présenté par un support d'investissement, ou à son obligation de le conseiller au regard d'un tel risque, prive ce souscripteur d'une chance d'éviter la réalisation de ces pertes. Celles-ci ne se réalisent qu'au rachat du contrat d'assurance-vie, quand bien même le support en cause aurait fait antérieurement l'objet d'un désinvestissement. (Cass. com. 21 juin 2023, n°21-19.853).

En l'espèce, l'action de M. X. n'est pas prescrite à l'égard des investissements sur le produit Kairos effectués le 18 juin 2014, pour avoir été initiée par assignation du 9 janvier 2017.

Au surplus, c'est seulement à la date de l'échéance du produit d'investissement Axyalis Coupons soit le 1er juillet 2014, que M. X. était en mesure d'apprécier la réalisation de son dommage constitué de la perte de son capital ou de déterminer l'existence d'un dol.

L'action de M. X. est donc recevable comme initiée dans le délai prescrit et le jugement querellé sera infirmé de ce chef.

 

Sur la nullité des contrats et le manquement des sociétés Axyalis et Swisslife à leurs obligations contractuelles :

M. X. affirme, sur le fondement des articles L. 131-1 et L. 132-27 du code des assurances ainsi que L. 111-1 et L. 120-1 du code de la consommation, que les intimées ont manqué à leur devoir d'information et de conseil qui implique de fournir à l'assuré, tant au moment de la conclusion du contrat qu'à l'occasion des avenants, des informations claires, exactes, loyales et adaptées à sa situation personnelle.

Il précise qu'alors qu'il avait indiqué souhaiter orienter ses économies entre prudence et équilibre, la société Axyalis lui a fait souscrire son propre produit à très haut risque, à savoir Axyalis Coupon.

Il affirme que la société Axyalis a également manqué à son obligation de suivi mentionnée dans la lettre de mission de suivi patrimonial, les risques du produit Axyalis Coupons s'étant renforcés pendant l'exécution du contrat.

Concernant les fautes commises lors de la souscription de l'unité de compte Kairos, M. X. souligne qu'un seul produit lui a été proposé, qui lui a été présenté comme plus sécuritaire alors qu'il était en réalité plus risqué.

Il fait valoir que la société Swisslife ne peut s'exonérer de sa responsabilité alors que la société Axyalis est sa filiale ou sous-filiale et que les deux sociétés ont nécessairement élaboré ensemble le produit Kairos.

M. X. soutient que les manquements ainsi démontrés sont de nature à entraîner la nullité des avenants de souscription au produit Axyalis Coupons et de l'avenant de souscription du produit Kairos pour dol, réfutant que le rachat ultérieur du contrat puisse faire obstacle à cette résolution.

Il expose qu'en tout état de cause, la responsabilité des intimées est engagée sur le fondement de la responsabilité contractuelle et subsidiairement, délictuelle en raison de sa perte de chance puisqu'il n'avait aucun motif de s'intéresser à un produit très risqué et que, si une information et un conseil adéquats lui avaient été fournis, la probabilité qu'il souscrive à un tel produit étaient très faibles, voire nulles.

L'appelant précise avoir subi une perte de 313 835, 24 euros et affirme que, s'il avait conservé ses coupons Optimiz 8/14, il aurait touché une plus-value finale de 182 301, 69 euros.

Sur la garantie des sociétés MMA, M. X. soutient qu'en vertu de l'article L. 124-3 du code des assurances, l'action directe de la victime contre l'assureur de l'auteur du dommage constitue un droit propre à l'indemnité due en vertu du contrat d'assurance et que l'assureur doit être tenu in solidum avec son assuré.

Les sociétés Axyalis et MMA soutiennent que toute unité de compte figurant sur la liste de l'article R. 131-1 du code des assurances satisfait au critère de protection suffisante de l'épargne au sens de l'article L. 131-1.

Elles rappellent que la société Axyalis est un courtier en assurance et non un gestionnaire de portefeuille, en déduisant que son rôle n'était donc pas de contrôler le choix des actions composant le panier de référence et l'analyse des fonds. Elles soulignent qu'aucun mandat d'arbitrage n'a été confié à la société Axyalis et qu'aucune violation de suivi ne peut donc lui être reprochée.

Les intimées affirment que la remise des documents précontractuels suffisait à remplir l'obligation d'information et de conseil à la charge de la société Axyalis qui constitue une obligation de moyens, celle-ci s'étant renseignée sur le patrimoine et les objectifs de M. X. et celui-ci ayant accepté les risques inhérents aux produits d'investissement.

Sur la demande d'annulation du contrat ou des avenants, les sociétés Axyalis et MMA font valoir que la société Axyalis n'est pas partie au contrat conclu entre M. X. et la société Swisslife et qu'aucun dol ne peut donc lui être reproché.

Elles indiquent sur le fond que les conditions du dol ne sont pas remplies : l'intention dolosive et le caractère déterminant du consentement ne sont pas démontrés, la société Axyalis n'a dissimulé aucune information à M. X. et ne pouvait pas prévoir la contre-performance des coupons Axyalis et Kairos.

Les sociétés Axyalis et MMA affirment que M. X. a été parfaitement informé du fonctionnement de son contrat d'assurance-vie et des caractéristiques d'unités de compte Axyalis Coupons et Kairos.

Soutenant qu'il n'existe aucun lien entre les fautes alléguées et le préjudice de M. X. et que la perte de chance est égale à zéro, les intimées soulignent subsidiairement que la perte subie par l'appelant n'est que de 281 997, 05 euros et précisent que n'est pas démontrée le risque lié à la vente des unités de compte Optimiz 8/14, qui présentaient elles-aussi un risque de perte en capital.

Très subsidiairement, elles indiquent que, si la responsabilité de la société Axyalis était retenue, celle-ci serait garantie par les sociétés MMA.

La société Swisslife soutient que la demande de nullité ou résolution des avenants d'arbitrage ne peut aboutir dès lors que M. X. a procédé au rachat de son contrat.

Elle affirme que les unités de compte Axyalis et Kairos sont conformes au code des assurances au sens de son article L. 131-1.

Elle conteste avoir commis de faute au titre de son devoir d'information et expose que l'assureur et le courtier respectent leurs obligations dès lors qu'ils ont délivré à M. X. une information suffisante sur les dispositions essentielles du contrat et sur le risque inhérent à celui-ci.

Réfutant tout dol, elle affirme que ne sont démontrés ni l'existence de manoeuvres dolosives ni l'intention dolosive, que la société Axyalis n'est pas partie au contrat qu'elle a conclu avec M. X. et que le dol est exclu lorsque le souscripteur au contrat d'assurance-vie a reçu la documentation contractuelle dans laquelle sont indiquées toutes les caractéristiques importantes de son engagement et notamment des risques encourus.

La société Swisslife fait valoir que M. X. ne saurait se prévaloir de sa propre erreur dès lors qu'il a été averti du fonctionnement et des risques de l'unité de compte, outre qu'il ne justifie pas que cette erreur aurait été déterminante de son consentement.

Elle conclut également au rejet de la demande de résolution des avenants d'arbitrage.

L'intimée soulève l'irrecevabilité des demandes de dommages et intérêts formées par M. X. au motif d'une part que l'appelant ne précise pas le régime de responsabilité sur laquelle il se fonde et d'autre part que les actions en responsabilité sont prescrites depuis le 24 juin 2012 en application des dispositions de l'article L. 114-1 du code des assurances.

Elle conclut au rejet de la demande sur le fond, exposant n'avoir commis aucune faute et faisant valoir que le préjudice résultant d'un manquement au devoir de conseil est constitué par la perte de chance de souscrire de meilleures garanties ou d'effectuer un meilleur placement, les calculs effectués par M. X. étant en conséquence infondés.

Sur ce,

Sur l'éligibilité du produit souscrit à l'assurance-vie :

L'article L. 131-1 du code des assurances dispose que le capital ou la rente garantis peuvent être exprimés en unités de compte constituées de valeurs mobilières ou d'actifs offrant une protection suffisante de l'épargne investie et figurant sur une liste dressée par décret en Conseil d'État.

Les articles R. 131-1 et R. 332-2, dans leur version applicable, ne limitent pas strictement aux seules obligations les produits que sont susceptibles de proposer les entreprises d'assurance.

L'article L. 213-5 du code monétaire et financier définit les obligations comme des titres négociables qui, dans une même émission, confèrent les mêmes droits de créance pour une même valeur nominale.

En l'occurrence, les EMTN Axyalis Coupons, qui constituent des titres de créances complexes, peuvent être assimilés à des obligations en ce qu'elles confèrent un droit de créance général sur l'émetteur.

Elles sont négociées ou négociables sur un marché reconnu puisqu'elles ont été admises à la cotation à la bourse de Luxembourg, État partie à l'accord sur l'Espace Economique Européen et que cette place boursière a reçu un agrément comme marché réglementé.

L'Autorité de contrôle prudentiel a procédé le 15 octobre 2010 à une recommandation portant sur la commercialisation des contrats d'assurance sur la vie en unités de compte constituées d'instruments financiers complexes, considérant par là même que les produits structurés prenant la forme d'EMTN sont éligibles aux contrats d'assurance-vie.

Ces produits structurés présentent un risque de perte en capital uniquement dans le cas d'une très forte baisse de l'une des actions du sous-jacent de référence qui était fixé à 40 % concernant le produit Axyalis Coupons.

Il en résultait donc une protection suffisante de l'épargne investie, en dépit du fait que toute prise de risque n'était pas totalement exclue.

Par suite, le produit Axyalis Coupons pouvait être proposé à la souscription par la SAS Axyalis Patrimoine.

Le moyen tiré de l'inéligibilité du produit à l'assurance-vie ne peut qu'être rejeté.

 

Sur la nullité du contrat et la résolution des avenants :

L'article 1116 du code civil dans sa version applicable en l'espèce dispose que « le dol est une cause de nullité de la convention lorsque les manœuvres pratiquées par l'une des parties sont telles, qu'il est évident que, sans ces manœuvres, l'autre partie n 'aurait pas contracté. Il ne se présume pas et doit être prouvé ».

En l'espèce, M. X. se contente d'alléguer de l'existence d'un dol sans démontrer l'existence de manœuvres frauduleuses qui auraient été commises par la société Swisslife (lors de la signature du contrat originel) ou par la société Axyalis (à l'occasion de la conclusion des avenants), alors même que les éléments versés aux débats font ressortir que de nombreux documents précontractuels lui ont été remis contenant des informations précises et détaillées sur les placements souscrits et le risque encouru en termes de perte de capital.

Rien ne permet de justifier que les intimées auraient délibérément cherché à tromper M. X.

Toute erreur peut également être écartée en se fondant sur les éléments suivants :

- la société Axyalis Patrimoine justifie avoir remis à chaque entretien avec M. X. les brochures et notices d'informations concernant les supports Axyalis Coupons et Kairos et lui avoir fait signer un document attestant qu`ils avaient reçu toutes les informations nécessaires, s'agissant notamment des risques inhérents à chacun des placements envisagés,

- concernant le support Axyalis Coupons et le support Kairos, les brochures paraphées par M. X. rappellent dans 1'onglet « Inconvénients » que « le produit ne comporte pas de protection du capital » et que « dans le pire des scenarii les investisseurs peuvent perdre jusqu 'à la totalité de leur investissement »,

- des cas concrets (favorables et défavorables) sont également présentés,

- les deux avenants « aux dispositions générales du contrat valant note d'information. Demande de souscription à l'Unité de compte structurée Axyalis Coupons » signés les 23 juin 2010 et 28 février 2011 par l'appelant rappellent encore que « 'EMTN Axyalis Coupons/ est un produit à capital non garanti et présente des risques de perte en capital à l'échéance ou en cas de rachat anticipé », et il est en outre précisé que « la valeur des unités de compte n 'est pas garantie, mais est sujette à des fluctuations à la hausse ou à la baisse, dépendant en particulier de l'évolution des marchés financiers. »,

- l'avenant aux « aux dispositions générales du contrat valant note d'information. Sélection de l'Unité de compte structurée Kairos » signé les le 8 juin 2014 comporte un questionnaire aux termes duquel le souscripteur déclare avoir compris « que cette unité de compte représente un placement risqué", "qu'il encourt un risque de perte en capital en cas de constatation à maturité d'une valeur de l'une des actions du panier inférieure à 45% de sa valeur de référence » et « que le risque maximal est la perte totale de son capital ».

Ainsi, la répétition des avertissements dans les différents avenants selon des présentations de nature à attirer spécialement l'attention du souscripteur, concernant les risques de perte intégrale du capital, ne pouvait manquer d'alerter des personnes normalement diligentes sur les conséquences d'un investissement qui était tributaire des fluctuations du marché des capitaux à la hausse mais aussi à des baisses importantes.

Dès lors, la demande d'annulation ou de résolution des avenants de souscription formée par M. X. sera rejetée et le jugement déféré sera confirmé de ce chef.

 

Sur la demande de dommages et intérêts :

Il convient à titre liminaire de dire que M. X. indique fonder sa demande de dommages et intérêts sur la responsabilité contractuelle ou délictuelle et qu'aucune irrecevabilité ne peut être retenue au motif qu'il ne préciserait pas le régime de responsabilité invoqué.

Aux termes de l'ancien article 1147, en vigueur jusqu'au 30 septembre 2016 et applicable au présent litige, le débiteur est condamné, s'il y a lieu, au payement de dommages et intérêts, soit à raison de l'inexécution de l'obligation, soit à raison du retard dans l'exécution, toutes les fois qu'il ne justifie pas que l'inexécution provient d'une cause étrangère qui ne peut lui être imputée, encore qu'il n'y ait aucune mauvaise foi de sa part.

Les articles 1149 et 1150 du même code alors applicables précisaient en outre que les dommages et intérêts dus au créancier sont, en général, de la perte qu'il a faite et du gain dont il a été privé, étant précisé que le débiteur n'est tenu que des dommages et intérêts qui ont été prévus ou qu'on a pu prévoir lors du contrat, lorsque ce n'est point par son dol que l'obligation n'est point exécutée.

L'obligation d'information qui pèse sur le conseiller en gestion du patrimoine et le conseiller financier, obligation de moyens, lui impose d'informer son client non seulement sur les avantages que présente la solution d'investissement proposée mais également sur les inconvénients qui en sont le corollaire, sur les risques engendrés et plus généralement sur toute circonstance raisonnablement prévisible et propre à priver l'investisseur de tout ou partie du bénéfice qu'il peut légitimement attendre de son investissement.

En l'espèce, la société Axyalis avait reçu de M. X. suivant « lettre de mission de suivi patrimonial » du 13 juillet 2013 la mission de « lui apporter une assistance patrimoniale dans la durée » avec les prestations suivantes : « actualiser votre situation patrimoniale chaque fois que cela sera nécessaire, évaluer votre politique de placements et d'épargne et mettre en place une stratégie de gestion à moyen et long terme intégrant vos objectifs et critères de gestion personnels, examiner la situation des investissements réalisés par l'intermédiaire de notre société et de votre exposition au risque, vous conseillez (sic) sur les arbitrages nécessaires à cette gestion et répondant aux critères retenus ».

Dès lors la société Axyalis était tenue d'une obligation de conseil et de mise en garde à l'égard de M. X.

L'article L. 533-13 du code monétaire et financier prévoit que « les prestataires de services d'investissement autres que les sociétés de gestion de portefeuille se procurent les informations nécessaires concernant les connaissances et l'expérience de leurs clients, notamment de leurs clients potentiels, en matière d'investissement en rapport avec le type spécifique d'instrument financier ou de service, leur situation financière, y compris leur capacité à subir des pertes, et leurs objectifs d'investissement, y compris leur tolérance au risque, de manière à pouvoir leur recommander les services d'investissement et les instruments financiers adéquats et adaptés à leur tolérance au risque et à leur capacité à subir des pertes. (...)

I bis.-Lorsqu'ils fournissent les services mentionnés aux 4 ou 5 de l'article L. 321-1 qui impliquent un changement d'instruments financiers, les prestataires de services d'investissement, autres que les sociétés de gestion de portefeuille, obtiennent les informations nécessaires sur l'investissement du client et analysent les coûts et avantages du changement d'instruments financiers. Lorsqu'ils fournissent le service mentionné au 5 de l'article L. 321-1, ces mêmes prestataires indiquent au client si les avantages liés à un changement d'instruments financiers sont ou non supérieurs aux coûts liés à un tel changement. »

Il appartenait donc à la société Axyalis d'assurer l'adéquation des supports conseillés avec le profil de risque déclaré de l'investisseur.

La fiche d'entrée en relation signée par M. X. le 20 octobre 2003 mentionnait que le profil d'investissement de celui-ci était « prudent pour partie » et « équilibré pour une autre partie », M. X. déclarant utiliser « couramment » des investissements sous forme d'OPCVM monétaires, obligations et OPCVM obligataires, obligations convertibles en action et actions et OPCVM actions, tandis qu'il n'avait jamais eu recours à des contrats financiers à terme, des fonds communs d'intervention sur le marché à terme ou des produits structurés.

Par courrier du 16 mai 2014, la société Axyalis indiquait à M. X. : « Vous avez souscrit au produit SG Option Europe Axyalis Coupon EMTN pour 358 25000 (sic) parts. (...) Comme vous pouvez le constater, une des valeurs du panier, le composant Vallourec, ne remplit pas les conditions permettant le paiement des coupons ni le remboursement du capital à terme prévu le 01/07/2014. Soucieux de préserver votre investissement et compte-tenu du caractère aléatoire de l'évolution de la valeur, la société Axyalis Patrimoine a élaboré en collaboration avec la société Adequity une solution visant à préserver votre capital initial. »

La synthèse du rendez-vous réalisé avec M. X. le 8 juin 2014 précise qu'a été effectué un « point complet et très détaillé du support SG Option Europe Axyalis Coupon EMTN » et souligne « nous vous avons présenté notre meilleure proposition afin de préserver le capital initial investi et nous vous avons expliqué en détail le produit de remplacement Kairos. »

La notice Kairos paraphée par M. X. mentionne dès la couverture qu'il s'agit de « titres de créances de droit français présentant un risque de perte en capital en cours de vie et à l'échéance », d'un « produit de placement risqué alternatif à un investissement dynamique risqué de type actions ». Il est précisé que « l'investisseur est exposé au marché actions par le biais d'une indexation à l'échéance à l'action la moins performante parmi cinq actions françaises (Saint-Gobain, Carrefour, Schneider Electric, Société Générale, Vallourec) ».

M. X. démontre qu'à la date de souscription du produit SG Option Axyalis Coupons, trois des cinq sociétés composant le panier d'actions, à savoir les sociétés Vallourec, Carrefour et Société Générale, se trouvaient en difficulté économique, ce qui constituait un risque supplémentaire de non-remboursement du capital investi à l'échéance.

Si M. X. ne pouvait pas ignorer en 2014 les mauvaises performances de l'action Vallourec (déjà présente dans le panier support produit Axyalis Coupons) du fait du courrier précité du 16 mai 2014, la société Axyalis Patrimoine lui a toutefois présenté le produit Kairos comme étant le moyen de « préserver son investissement » mis en péril par le placement Axyalis Coupons, alors même qu'elle ne pouvait ignorer, de par sa qualité de professionnel en investissements financiers, que la valeur de l'action Vallourec (qui figurait dans le panier des 5 actions de ce nouveau produit) était déjà inférieure au plancher fixé de 55 % ce qui induisait dès la signature de cet arbitrage une perte en capital, information non portée à la connaissance de M. X. dans le courrier précité.

Ainsi, même si elle a remis à M. X. les documents précontractuels et contractuels attirant son attention sur le risque encouru de perte en capital, et n'était pas tenue de garantir la rentabilité des produits proposés, la société Axyalis Patrimoine a manqué à son devoir de conseil lors des arbitrages litigieux en ne donnant pas à l'intéressé toutes les informations utiles et nécessaires pour appréhender véritablement le degré de ce risque, alors que le souscripteur avait fait mention d'un profil mi-prudent, mi-équilibré et non « dynamique ».

Il convient en conséquence de dire que la société Axyalis Patrimoine, en sa qualité de conseil en gestion de patrimoine indépendant, a manqué à son obligation de conseil et de mise en garde à l'égard de M. X., ce qui engage sa responsabilité.

A l'inverse, M. X. ne démontre pas que la responsabilité de la société Swisslife pourrait être retenue. Il ne démontre pas en effet que la société Axyalis aurait été la « filiale ou sous-filiale » de la société Swisslife à la date des contrats et ne justifie pas que celle-ci était tenue d'une obligation de conseil à son égard dès lors qu'il avait recours à un courtier. Les demandes formées par M. X. à l'égard de la société Swisslife seront en conséquence rejetées.

Le dommage subi par l'investisseur ou l'assuré du fait de manquements à des obligations précontractuelles consiste en la perte d'une chance de mieux investir ses capitaux.

Il est de jurisprudence constante que l'indemnisation du dommage résultant de la perte d'une chance ne doit être mesurée qu'à la chance perdue et ne peut être égale à l'avantage qu'elle aurait procuré si elle s'était réalisée.

En l'espèce le préjudice de M. X. est certain et réside dans la perte de chance de ne pas souscrire aux produits Axyalis Coupons et Kairos qui n'étaient pas adaptés à son profil d'investisseur par suite du défaut de conseil de la société Axyalis Patrimoine.

L'attitude générale de M. X. au cours de la période considérée démontre qu'il a procédé à plusieurs changements dans ses investissements et la perte de chance ne peut donc être évaluée en prenant en compte le résultat de l'unité de compte Optimiz 8/14 dont rien n'établit qu'elle aurait été conservée par l'appelant.

Il n'est pas contesté cependant que M. X. n'a pas récupéré le capital investi au terme du contrat, ayant perçu la somme de 267.142,01 euros pour un total investi de 549.139,06 euros, soit une perte de 281.997,05 euros.

Considérant que tout investissement financier est affecté d'un aléa, et spécialement le type de placement choisi par M. X. vu le contexte économique général ressortant de ses propres pièces, il y a lieu de fixer la perte de chance à 30% et de condamner la société Axyalis à lui verser la somme de 84.599,11 euros de dommages et intérêts au titre de son préjudice financier.

Il convient de constater que la garantie due par les sociétés MMA à la société Axyalis Patrimoine n'est pas contestée et cette condamnation sera donc in solidum.

 

Sur les demandes accessoires :

M. X. étant accueilli en son recours, le jugement attaqué sera infirmé en ses dispositions relatives aux frais irrépétibles et dépens de première instance.

Parties perdantes, les sociétés Axyalis et MMA ne sauraient prétendre à l'allocation de frais irrépétibles et devront en outre supporter in solidum les dépens de première instance et d'appel qui seront recouvrés, s'agissant des dépens d'appel, avec distraction au bénéfice des avocats qui en ont fait la demande.

Il serait par ailleurs inéquitable de laisser à M. X. la charge des frais irrépétibles exposés et les sociétés Axyalis et MMA seront en conséquence condamnées in solidum à lui verser une somme de 5.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

L'équité commande en revanche de débouter la société Swisslife de sa demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

La cour statuant par arrêt contradictoire rendu en dernier ressort,

Rejette la fin de non-recevoir tirée du défaut de conciliation préalable ;

Infirme le jugement déféré sauf en ce qu'il a rejeté les demandes en nullité et en résolution formées par M. X. ;

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Déclare recevable les demandes formées par M. X. ;

Condamne in solidum la société Axyalis Patrimoine et les sociétés MMA Iard et MMA Iard Assurances mutuelles à verser à M. X. la somme de 84.599,11 euros de dommages et intérêts au titre de son préjudice financier ;

Déboute M. X. de ses demandes à l'encontre de la société Swisslife ;

Déboute les parties du surplus de leurs demandes ;

Condamne in solidum la société Axyalis Patrimoine et les sociétés MMA Iard et MMA Iard Assurances mutuelles à verser à M. X. la somme de 5.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Déboute la société Swisslife de sa demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne in solidum la société Axyalis Patrimoine et les sociétés MMA Iard et MMA Iard Assurances mutuelles aux dépens de première instance et d'appel avec distraction au bénéfice des avocats qui en ont fait la demande.

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévuesau deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame F. PERRET, Président et par Madame K. FOULON, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier,                                                   Le président,