CA CHAMBÉRY (ch. com.), 12 décembre 2006
CERCLAB/CRDP - DOCUMENT N° 1219
CA CHAMBÉRY (ch. com.), 12 décembre 2006 : RG n° 05/03011
Publication : Lamyline
Extrait : « Un contractant ne peut pas se prévaloir des dispositions de l'article L. 132-1 du Code de la Consommation relatives à la protection du consommateur en cas de clauses abusives lorsque le contrat qu'il a conclu à un rapport direct avec son activité professionnelle. En l'espèce, le contrat de crédit bail a été souscrit pour financer l'équipement de l'atelier d'architecture de Monsieur X. en matériel informatique, S'agissant d'un contrat souscrit pour les besoins de l'exercice de sa profession, il doit être considéré comme en rapport direct avec son activité professionnelle. La décision déférée sera confirmée sur ce point. »
COUR D’APPEL DE CHAMBÉRY
CHAMBRE COMMERCIALE
ARRÊT DU 12 DÉCEMBRE 2006
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 05/03011. ARRÊT CONTRADICTOIRE.
DANS LA CAUSE OPPOSANT :
APPELANT :
M. X.,
[adresse], représenté par la SCP BOLLONJEON-ARNAUD-BOLLONJEON, avoués, assisté de Maître Xavier CHANTELOT, avocat
à :
INTIMÉE :
SAS CIT anciennement CIT GROUPE FINANCE
[adresse], représentée par la SCP DANTAGNAN-DORMEVAL, avoués, assistée de Maître Joëlle BENAYOUN ORLIANGE, avocat
COMPOSITION DE LA COUR : Madame CARRIER, Monsieur BETOUS, Conseillers, Madame ROBERT, Président de chambre.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Le 17 janvier 2001, Monsieur X. a signé avec la Société NEWCOURT FINANCE, devenue CIT GROUP FINANCE puis CIT SAS, un contrat de crédit bail portant sur du matériel informatique d'une valeur de 74.259,64 Francs. Ce contrat prévoyait le paiement de 36 mensualités de 2.458,74 Francs, soit 374,83 € TTC et une option d'achat égale à 2 %, sans précision de la nature des sommes sur lesquelles ces 2 % s'appliquaient.
L'article 11-1 du contrat prévoyait qu'un trimestre au moins avant l'expiration du contrat, le locataire notifierait au bailleur sa décision soit d'acquérir le matériel en exerçant la promesse de vente soit de renouveler la location par la signature d'un nouveau contrat soit de restituer le matériel au bailleur à la date d'expiration du contrat et qu'en cas de retard du locataire égal ou supérieur à 8 jours pour procéder à la notification ci-dessus, le locataire serait redevable d'une indemnité forfaitaire égale à un mois de loyer pour chaque semaine de retard à titre d'astreinte, le loyer de référence étant le dernier loyer facturé.
L'article 10 prévoyait qu'en cas de non restitution du matériel dans les huit jours à l'expiration de la location, le locataire était redevable d'une indemnité du même montant et de la même périodicité que le dernier loyer et ce jusqu'au jour de la restitution.
Le contrat est arrivé à échéance le 17 janvier 2004. Monsieur X. n'a pas notifié ses intentions au bailleur conformément à l'article 11-1.
Par courrier en date du 23 février 2004, faisant suite à un échange téléphonique, la société GOBETWEEN, mandataire de la bailleresse, a rappelé à Monsieur X. que, le contrat n'ayant pas été résilié contractuellement à l'échéance, il se trouvait renouvelé automatiquement pour une durée d'un an et a réclamé de nouvelles échéances de 313,4 € HT à compter du 31 janvier 2004. Par un deuxième courrier du même jour, elle a proposé à Monsieur X. de mettre fin au contrat par le rachat des équipements loués pour un montant de 1.760 € HT., cette proposition étant valable sous réserve d'un règlement des sommes dues majorées des taxes en vigueur au plus tard le 28 février 2004,
Par lettre recommandée du 25 février 2004, Monsieur X. a refusé la proposition en indiquant que, dans le cadre d'un précédent contrat de crédit bail conclu avec CIT, il avait été informé par la bailleresse de l'arrivée du terme, que pour le contrat en cause, il n'avait jamais reçu l'original mentionnant la valeur résiduelle de rachat et l'échéancier ni eu connaissance des conditions générales. Il a mis en demeure la bailleresse de lui adresser l'original du contrat et ses nouvelles coordonnées afin qu'il puisse exercer l'option d'achat.
Suite à nouvelle mise en demeure du mandataire de la bailleresse au mois de juin 2004, il a maintenu sa position en indiquant qu'il considérait le contrat comme terminé depuis le début de l’année et qu'il reconnaissait devoir le montant de l'option d'achat à hauteur de la somme de 224,65 € HT pour laquelle il demandait à la Société CIT FINANCE de lui adresser une facture.
Les 20 septembre et 18 octobre 2004, la Société CIT a prélevé sur le compte professionnel de Monsieur X. les sommes de 2.998,64 € et 374,83 € au titre dudit contrat.
Par un courrier du 22 décembre 2004, la Société GOBETWEEN a fait valoir une réclamation complémentaire de 1.253,60 € HT à titre d'astreinte et a proposé la résiliation du contrat soit avec acquisition des équipements pour un montant de 601,24 € TTC à titre d'option d'achat soit sans acquisition des équipements d'équipement avec une valeur de sortie de 374,83 € TTC, ce montant n'incluant pas les éventuels arriérés de loyer restant dus au titre du contrat dans sa durée initiale.
Faisant valoir qu'il n'avait jamais reçu les conditions générales et particulières du contrat, que la Société CIT ne l'avait pas prévenu de l'arrivée du terme et que la clause édictée à l'article 11 du contrat était abusive par application de l'article L. 132-1 du Code de la Consommation, Monsieur X. a saisi le Tribunal d'Instance de BONNEVILLE à l'effet de voir prononcer la résiliation du contrat aux torts de la bailleresse, ordonner la restitution des sommes abusivement prélevées par elle à hauteur de 3.059,69 €, constater les multiples infractions commises à la loyauté des contrats et les fautes quasi délictuelles commises par la bailleresse et de voir dire que l'option d'achat a été réglée et qu'il est définitivement propriétaire du matériel
Par jugement en date du 16 novembre 2005, le Tribunal d'Instance de BONNEVILLE a :
- dit que le contrat signé le 17 janvier 2001 par Monsieur X. n'était pas soumis aux dispositions du Code de la Consommation,
- débouté Monsieur X. de l'intégralité de ses demandes,
- condamné Monsieur X. à restituer à la Société CIT GROUP FINANCE FRANCE le matériel informatique objet du contrat de crédit bail du 17 janvier 2001.
- l'a condamné à payer à la Société CIT GROUP FINANCE FRANCE la somme de 350 € en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
Monsieur X. a interjeté appel de cette décision.
Il demande à voir prononcer la résiliation du contrat aux torts de la Société CIT, à la voir condamner à lui restituer les sommes abusivement prélevées à hauteur de 3.050,69 €, à voir dire que la Société CIT a commis des fautes contractuelles en manquant notamment à son devoir de loyauté et d'information.
Il sollicite l'allocation de la somme de 6.000 € à titre de dommages et intérêts y compris les 3.059,69 € précédemment rappelés ainsi que les échéances éventuellement encore prélevées ou à venir, ce outre intérêts au taux légal à compter du 15 mars 2005.
Il demande à voir dire que l'option d'achat a été réglée par compensation et qu'il se trouve définitivement propriétaire du matériel loué.
Il sollicite l'allocation de la somme de 3.000 € en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
La Société CIT conclut à la confirmation du jugement déféré et sollicite l'allocation de la somme de 4.000 € en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
MOTIFS DE LA DÉCISION :
Sur le caractère professionnel du contrat litigieux :
Un contractant ne peut pas se prévaloir des dispositions de l'article L. 132-1 du Code de la Consommation relatives à la protection du consommateur en cas de clauses abusives lorsque le contrat qu'il a conclu à un rapport direct avec son activité professionnelle. En l'espèce, le contrat de crédit bail a été souscrit pour financer l'équipement de l'atelier d'architecture de Monsieur X. en matériel informatique, S'agissant d'un contrat souscrit pour les besoins de l'exercice de sa profession, il doit être considéré comme en rapport direct avec son activité professionnelle. La décision déférée sera confirmée sur ce point.
Sur les fautes de la Société CIT alléguées par Monsieur X. :
Monsieur X. prétend que les conditions générales et particulières du contrat qu'il a régulièrement signées et paraphées ne lui ont pas été retournées par la bailleresse après qu'elle les ait signées. Ses allégations sur ce point ne sont pas sérieuses dès lors dès lors qu'il a comptabilisé dans ses charges professionnelles la charge financière constituée par le crédit bail, qu'il n'a jamais contesté les loyers prélevés sur son compte bancaire professionnel conformément aux dispositions contractuelles et qu'il n'a jamais formulé de réclamation sur ce point à la Société CIT avant la fin de la location.
Monsieur X. justifie que, dans le cadre d'un contrat précédent, la bailleresse lui avait rappelé l'arrivée du terme et son obligation d'exercer une option en lui adressant un formulaire destiné à lui permettre de lever l'option d'achat en fin de contrat et qu'elle lui avait également adressé un échéancier valable pour toute la période de location et indiquant le montant de l'option d'achat il est constant en l'espèce que la bailleresse n'a pas rappelé à Monsieur X. ses obligations avant l'échéance du contrat. Elle ne justifie d'autre part pas lui avoir adressé l'échéancier lui permettant de connaître le montant de l'option d'achat en fin de contrat, les dispositions des conditions particulières ne permettant pas de faire le calcul de cette option faute de préciser à quelle somme les 2 % s'appliquaient. Elle n'a pas mis le locataire en mesure de s'acquitter, le cas échéant, de l'obligation de restitution, faute de l'avoir informé des modalités pratiques de restitution du matériel loué. Dans ses courriers, elle s'est prévalue faussement de dispositions contractuelles en prétendant que le contrat s'était automatiquement renouvelé pour un an. Le montant de l'option d'achat qu'elle a exigé pour mettre un terme au contrat prétendument renouvelé est d'autre part sans commune mesure avec le montant de l'option d'achat contractuelle calculé, en l'absence d'autres éléments, par référence aux stipulations du précédent contrat souscrit par Monsieur X. à savoir 2 % du montant cumulé des loyers majoré de la TVA soit la somme de 322,78 € TTC. Enfin, il est acquis que la Société CIT a effectué de nouveaux prélèvements sur le compte de Monsieur X. alors que le contrat était échu et que l'autorisation de prélèvements initiale était expirée.
Il est ainsi établi que la Société CIT a manqué à son devoir de loyauté et invoqué de mauvaise foi l'omission de Monsieur X. de lever l'option trois mois avant l'expiration du contrat ; Il y a lieu en conséquence de considérer que Monsieur. X. a valablement levé l'option par son courrier du 25 février 2004 et qu'il n'était débiteur que de la somme de 322,78 € au titre de l'option d'achat. Il est en conséquence fondé à obtenir la restitution de la somme de 3.373,47 € - 322,78 € = 3.050,69 € indûment perçue par la Société CIT par le biais des prélèvements opérés sur son compte aux mois de septembre et d'octobre 2004.
Le préjudice subi par Monsieur X. du fait des tracas et pertes de temps causés par le comportement déloyal de la Société CIT sera justement compensé par l'allocation de la somme de 1.000 € à titre de dommages et intérêts.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
LA COUR,
Statuant par mise à disposition au Greffe et contradictoirement,
CONFIRME le jugement déféré en ce qu'il a dit que le contrat litigieux n'était pas soumis aux dispositions du Code de la Consommation.
LE RÉFORME en toutes ses autres dispositions.
Statuant à nouveau,
DIT que le contrat de crédit bail souscrit par Monsieur X. auprès de la Société NEWCOURT FINANCE le 17 janvier 2001 afin de financer l'équipement de son atelier d'architecte en matériel informatique est arrivé à échéance à l'issue des trois années de location.
DIT que Monsieur X. a régulièrement levé l'option d'achat et qu'il est propriétaire du matériel informatique objet du contrat de crédit bail du 17 janvier 2001 à savoir un ordinateur Power Mac G4 450 MP comprenant une barrette mémoire 256 Mo RAM, un moniteur 21 Sony, un routeur Netopia, une mise à jour Archicad 6.5, un logiciel Archicad 6.5 second grade, un logiciel Microsoft Office 2001 Mac,
DIT que la Société CIT SAS venant aux droits de la Société NEWCOURT FINANCE et de la Société CIT GROUP FRANCE a indûment prélevé sur le compte de Monsieur X. la somme de 3.050,69 €,
LA CONDAMNE en conséquence à payer à Monsieur X. la somme de 3.059,69 € outre intérêts au taux légal à compter du 15 mars 2005,
LA CONDAMNE en outre à lui payer la somme de 1.000 € à titre de dommages et intérêts outre intérêts au taux légal à compter de ce jour.
DEBOUTE Monsieur X. du surplus de ses demandes.
CONDAMNE la Société CIT SAS à payer à Monsieur X. la somme de 1.500 € en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
LA CONDAMNE aux dépens avec distraction au profit de la SCP BOLLONJEON ARNAUD BOLLONJEON.
- 5883 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de professionnel - Critères - Clauses abusives - Critères combinés : rapport direct et besoins de l’activité
- 5946 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de professionnel - Illustrations - Contrats conclus pendant l’activité - Activité administrative - Informatique