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CA PARIS (5e ch. sect. C), 5 juillet 1996

Nature : Décision
Titre : CA PARIS (5e ch. sect. C), 5 juillet 1996
Pays : France
Juridiction : Paris (CA), 5e ch. sect. C
Demande : 95/5487
Date : 5/07/1996
Nature de la décision : Avant dire droit
Mode de publication : Lamyline
Décision antérieure : T. COM. PARIS (6e ch.), 28 novembre 1994
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CERCLAB/CRDP - DOCUMENT N° 1275

CA PARIS (5e ch. sect. C), 5 juillet 1996 : RG n° 95/5487

Publication : Lamyline ; Lamy droit de l'informatique, Bulletin d'actualité, novembre 1996, numéro 1172

 

Extrait : « Considérant que pour ce qui concerne les nullités prétendues du contrat, elle ne peuvent utilement être fondées sur l'existence de clauses abusives, puisque la sanction de celles-ci est qu'elles doivent être réputées non écrites ; que d'ailleurs, n'est pas abusive en l'espèce la clause qui prévoit la restitution des matériels loués après résiliation du contrat non plus que celle qui fixe dans le même cas, à 65 % du montant HT des loyers restant à échoir, le montant de l'indemnité de résiliation, et pas davantage celle fixant une pénalité égale à 10 % de l'ensemble des sommes dues sans que cette indemnité ne puisse être inférieure à 6 mois de loyers ».

 

COUR D’APPEL DE PARIS

CINQUIÈME CHAMBRE SECTION C

ARRÊT DU 5 JUILLET 1996

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION                                      (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 95/5487.

 

PARTIES EN CAUSE :

1°) - SARL ADVICE

[...]

2°) SA PARCEL TRANSPORTS

[...]

APPELANTES, représentées par Maître BOLLING, avoué, assistées de Maître COIN, avocat

3°) SA BAIL PARC

[...], INTIMÉE, représentée par la SCP DUBOSCQ PELLERIN, avoué, assistée de Maître JESSLEN, avocat

4°) SA ÉTUDE ET RECHERCHE EN INFORMATIQUE INDUSTRIELLE

[...], INTIMÉE, représentée par la SCP FANET, avoué, assistée de Maître MAHIU, avocat

 

COMPOSITION DE LA COUR : PRÉSIDENT : Monsieur ROGNON. CONSEILLERS : Madame CABAT ; Monsieur BETCH.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                                                         (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

LA COUR,

Statue sur l'appel formé par la SARL ADVICE et la SA PARCEL TRANSPORTS à l'encontre d'un jugement rendu le 28 novembre 1994 par le Tribunal de commerce de Paris qui les a condamnées à payer à la société BAIL PARC la somme de un million quatre cent quatre vingt dix huit mille neuf cent treize francs soixante dix centimes avec intérêts au taux légal à compter du 6 août 1993 et qui a condamné les mêmes sociétés à payer à la société BAIL PARC et à la société ETUDE ET RECHERCHE EN INFORMATIQUE INDUSTRIELLE celle de huit mille francs fixée en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile, ce après avoir constaté la résiliation du crédit-bail, intervenue le 6 août 1993, la société BAIL PARC crédit bailleur venant aux droits de TECHNICBAIL laquelle venait aux droits de la société ETUDE ET RECHERCHE EN INFORMATIQUE INDUSTRIELLE, ci-après dénommée ERII ;

La Cour se réfère pour l'exposé des faits et de la procédure à la relation exacte qu'en ont fait les premiers juges ;

Il suffit de rappeler que plusieurs contrats successifs et avenants ont été signés entre les parties en cause ;

La société ADVICE gérait un parc informatique pour l'organisation de la location de véhicules routiers appartenant à la société PARCEL TRANSPORT ; pour l'installation et le financement de ce service informatique, la société ADVICE a recouru aux services de la société ERII avec laquelle un contrat de location de matériel informatique a été conclu le 10 avril 1989, contrat suivi de trois avenants des 31 octobre 1989, 1er mai 1990 et 20 juillet 1990 ; la société ERII a en outre cédé à la société TECHNIBAIL le matériel loué ; enfin, l'avenant n° 4 du 1er décembre 1992 prévoyait en présence de la société ERII et de la société BAIL PARC, que les sociétés ADVICE et PARCEL TRANSPORT convenaient de l'adjonction de la société PARCEL TRANSPORT à la société ADVICE pour l'exécution du contrat de location et de ses avenants ;

Le 6 août 1993, constatant le défaut de paiement de loyers, la société BAIL PARC a mis en demeure les deux dernières sociétés de régler les loyers impayés et a indiqué qu'à défaut de ce faire, elle solliciterait la résiliation ;

Le litige porte principalement sur l'existence d'une erreur sur l'avenant n° 2 et sous la note dite des avenants n° 3 et n° 4 à propos desquels une plainte avec constitution de partie civile a été déposée ; aussi, les sociétés PARCEL TRANSPORTS et ADVICE appelantes, prient-elles la Cour, après infirmation du jugement entrepris, d'ordonner le sursis à statuer dans l'attente de la décision pénale à intervenir, à titre subsidiaire, de débouter la société BAIL PARC de ses demandes formées contre la société PARCEL TRANSPORT du fait que cette dernière ne serait en rien concernée par les contrats signés entre les sociétés BAIL PARC, ERII et ADVICE, et de déclarer nuls les contrats signés entre les sociétés BAIL PARC, ERII, ADVICE et PARCEL TRANSPORT, en raison de la signature d'avenants irréguliers ;

A titre infiniment subsidiaire, les appelantes sollicitent la réduction de la créance « au montant de la créance réellement due », ce en application de l'article 1152 du code civil ainsi que la condamnation des sociétés ERII et BAIL PARC au paiement de la somme de 20.000 francs au titre de leurs frais irrépétibles ;

La société BAIL PARC, première intimée, s'oppose au sursis à statuer en demandant à la Cour de constater la régularité des avenants litigieux, la confirmation qui a suivi leur signature ainsi que leur exécution par les sociétés ADVICE et PARCEL TRANSPORT et le défaut de contestation avant l'introduction du recours devant la Cour d'Appel ; elle conclut en conséquence à la confirmation du jugement entrepris en sollicitant la condamnation solidaire des appelants au paiement de la somme de 10.000 francs au titre des frais irrépétibles d'appel ; à ces fins, la société BAIL PARC soutient que la plainte a été déposée dans un but purement dilatoire, qu'il n'existe aucune erreur relative à la rédaction de l'avenant n° 2, que la contestation par la société ADVICE d'une seule des deux signatures figurant sur l'avenant n° 3 démontre le caractère peu sérieux de la plainte relative à cet avenant laquelle quelle que soit son issue, ne peut modifier la solution du litige puisque postérieurement à la signature de cet avenant, la société ADVICE en aurait le 20 août 1990 confirmé les termes par lettre, et n'aurait émis ensuite aucune protestation du chef des prélèvements mensuels effectués ; pour ce qui concerne l'avenant n° 4, l'intimée rappelle qu'il a été précédé d'échanges de correspondances par lesquelles la société PARCEL TRANSPORT avait demandé à se substituer à la société ADVICE ; elle conclut en outre à la validité de l'ensemble des conventions passées et au rejet de la demande de réduction de la clause pénale du fait que celle-ci ne porte que sur 65 % des loyers restant à courir jusqu'au terme normal de la location ;

La société ERII, seconde intimée, conclut à la confirmation de la décision entreprise en formant contre les appelantes une demande en paiement solidaire des sommes de 100.000 francs et de 15.000 francs aux titres respectifs de dommages-intérêts pour procédure abusive et vexatoire, et de l'application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

A ces fins, elle affirme que l'avenant n° 2 ne comporte aucune erreur et dénie avoir commis un faux en écritures privées ;

 

MOTIFS (justification de la décision)                                                                 (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

SUR CE, LA COUR :

1) - Sur la demande de sursis à statuer :

Considérant que les sociétés appelantes justifient de la réalité du dépôt d'une plainte avec constitution de partie civile à l'encontre du président directeur général de la société ERII du chef de faux en écritures et usage de faux et escroquerie, ainsi que la mise en mouvement de l'action publique de ces chefs, l'ordonnance du 27 avril 1995 fixant la consignation, ayant été suivie du paiement de celle-ci dans les 20 jours fixés par la même décision ;

Considérant que cette plainte vise des faux relatifs aux avenants n° 3 et n° 4 et une escroquerie commise par le président directeur général de la société ERII née de la présentation de documents mensongers propres à tromper la religion du juge et à faire « condamner son adversaire à des sommes qui ne lui sont pas dues » ;

Considérant que pour ce qui concerne les faux visés par la plainte et relatifs à l'avenant n° 3, leur recherche n'est pas de nature à pouvoir paralyser la présente instance ; qu'en effet, comme le souligne utilement la société BAIL PARC, elle ne porte que sur une seule des signatures de M. X., représentant de la société ADVICE, la seconde, portée au bas de l'acte n'étant pas arguée de faux ; qu'il en résulte que si on retirait au titre d'une mention et d'une signature apposée par un tiers, le membre des phrases manuscrites suivant, « Bon pour accord 60 loyers X 42.660 Francs HT » suivies de la signature litigieuse, l'avenant n° 3 n'en serait pas modifié puisque le texte préimprimé indiquait à l'article 2 « La durée contractuelle du présent avenant est de 60 mois » et à l'article 4 « Le loyer mensuel du contrat fixe pendant la durée du contrat, assurance comprise, hors entretien, sera majoré de 5.715 Francs HT soit un total de 42.660 Francs HT », et qu'ainsi, la mention manuscrite n'a fait en réalité que confirmer ces éléments préimprimés ;

Qu'il n'y a donc pas lieu de surseoir à statuer de ce chef, jusqu'à l'issue du procès pénal ;

Qu'il n'en est pas de même pour ce qui concerne l'avenant n° 4 : qu'en effet, même si le dépôt de plainte est particulièrement tardif, la société PARCEL TRANSPORT ne peut être condamnée au paiement des sommes réclamées par la société BAIL PARC sans qu'il ait été préalablement statué sur la validité de sa signature de l'avenant n° 4, ladite société n'ayant antérieurement à cet acte jamais apposé sa signature sur les autres actes ;

Considérant que le sursis à statuer s'impose de ce chef ainsi que de celui du recours contre la condamnation des appelantes au paiement de sommes au profit de la société ERII, recours en rapport direct avec la plainte en escroquerie au jugement ci-dessus déposée ; que les sommes demandées contre ou par la société ERII et la société PARCEL TRANSPORT, devront suivre le même sort pour le même motif ;

 

2) - Sur la nullité des actes du chef de l'existence des clauses abusives, autres que l'avenant n° 4 :

Considérant pour preuve de la nullité de ces actes, les sociétés appelantes se contentent d'affirmer qu'ils comprennent un « nombre d'erreurs et de nullités dommageables » sans expliquer en quoi consistent ces nullités et en quoi les erreurs prétendues portent sur la substance du contrat ;

Considérant pour ce qui concerne la seule erreur sur laquelle les appelantes fournissent des précisions, à savoir l'erreur sur la durée de la convention avenant n° 2, une lecture attentive de l'acte litigieux permet de comprendre qu'elle n'existe pas et que ce document ne contient aucune contradiction avec la convention de location de matériel supplémentaire ; qu'en effet, comme l'explique clairement la société BAIL PARC, la convention de location prévoit une durée de location de 51 mois du 1er mai 1990 au 31 juillet 1994 et l'avenant n° 2 précise que la location prendra effet le lendemain de l'installation des nouveaux matériels et s'achèvera en même temps que le loyer principal, l'important étant le nombre de loyers dus, et qu'ainsi, en exécution de ces documents, la société TECHNIBAIL a indiqué à la société ADVICE qu'à partir du 1er mai 1990, le montant du loyer serait porté à 43.817 francs et qu'afin de régulariser les loyers du 1er mai 1990 au 1er juin 1990, serait effectué un prélèvement de 6.030 francs, ce sur quoi la société locataire n'a élevé aucune protestation ;

Considérant que pour ce qui concerne les nullités prétendues du contrat, elle ne peuvent utilement être fondées sur l'existence de clauses abusives, puisque la sanction de celles-ci est qu'elles doivent être réputées non écrites ; que d'ailleurs, n'est pas abusive en l'espèce la clause qui prévoit la restitution des matériels loués après résiliation du contrat non plus que celle qui fixe dans le même cas, à 65 % du montant HT des loyers restant à échoir, le montant de l'indemnité de résiliation, et pas davantage celle fixant une pénalité égale à 10 % de l'ensemble des sommes dues sans que cette indemnité ne puisse être inférieure à 6 mois de loyers ;

Considérant qu'enfin, ces indemnités qui constituent une clause pénale au sens de l'article 1152 du code civil ne seront pas réduites, la société ADVICE s'abstenant d'exposer en quoi elles sont excessives alors qu'à la date de la résiliation, les loyers impayés s'élevaient à 556.545 francs et que les importants investissements de la société BAIL PARC n'étaient pas amortis ;

Considérant qu'en l'absence de contestation de la société ADVICE du chef du calcul des sommes dues en exécution du contrat et des trois avenants, il y a lieu de confirmer sa condamnation principale ;

 

3) - Sur les autres demandes :

Considérant que la société ADVICE qui succombe et qui sera condamnée aux dépens, ne peut utilement solliciter le bénéfice de l'article 700 NCPC ;

Considérant que l'équité ne commande pas pour autant de faire au profit de la société BAIL PARC une application de ce texte, les sommes obtenues en exécution des contrats susvisés étant notamment destinées à l'indemnisation de tels frais exposés devant les deux degrés de juridiction ;

Considérant qu'il y a lieu de surseoir à statuer du chef des indemnités réclamées sur le même fondement par et contre la société ERII et par la société BAIL PARC à l'encontre de la société PARCEL TRANSPORT ;

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                                                            (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS et ceux non contraires des premiers juges :

Surseoit à statuer jusqu'à décision pénale définitive consécutive à la plainte avec constitution de partie civile déposée par les sociétés PARCEL TRANSPORT et ADVICE, sur l'appel formé par la société PARCEL TRANSPORT à l'encontre des dispositions qui l'ont condamnée à payer à la société BAIL PARC la somme de 1.498.913,10 francs et à la société ERII et la société BAIL PARC la somme de 8.000 francs, et qui l'ont condamnée aux dépens de première instance ;

Surseoit à statuer jusqu'à la même décision

- sur l'appel formé par la société ADVICE à l'encontre de la disposition l'ayant condamnée à payer à la société ERII la somme de 8.000 francs,

- sur les demandes en paiement de dommages-intérêts et d'application de l'article 700 NCPC, formées par la société ERII et la société PARCEL TRANSPORT,

- sur les demandes en paiement formées par les autres parties contre ces deux dernières sociétés ;

Confirme pour le surplus, la décision entreprise à l'exception de la disposition ayant condamné la société ADVICE à payer à la société BAIL PARC la somme de 8.000 francs au titre de l'application de l'article 700 NCPC ;

Statuant à nouveau de ce chef, déboute la société BAIL PARC de la demande en paiement de ce dernier chef, en tant qu'elle est dirigée contre la société ADVICE ;

Déboute les parties de leurs demandes contraires à la motivation ci-dessus retenue ;

Condamne la société ADVICE aux dépens d'appel et admet la SCP DUBOSCQ PELLERIN, titulaire d'un office d'avoué, au bénéfice de l'article 699 NCPC.