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TI BÉZIERS, 22 juillet 2008

Nature : Décision
Titre : TI BÉZIERS, 22 juillet 2008
Pays : France
Juridiction : Béziers (TI)
Demande : 11-07-001578
Date : 22/07/2008
Nature de la décision : Admission
Mode de publication : Bull. transp.
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CERCLAB/CRDP - DOCUMENT N° 1363

TI BÉZIERS, 22 juillet 2008 : RG n° 11-07-001578

Publication : Lamyline ; Bull. transp.

 

Extrait : « Monsieur Y. ne discute pas de ce point mais demande au tribunal de juger cette clause non écrite au vu notamment de l'avis de la commission des clauses abusives en date du 25 janvier 2007 qui a estimé au sujet de cette clause que « en principe est licite une clause par laquelle les parties sont convenues d'abréger le délai de prescription prévu par l'article L. 110-4 du code de commerce ; que toutefois, compte tenu en l'espèce de la durée de recherche d'une solution amiable, ce délai d'un an apparaît insuffisant et de nature à priver le consommateur de la possibilité de faire valoir utilement ses droits en justice ».

Cet avis ne lie pas le tribunal et n'a pas été suivi par la Cour de Cassation dans un arrêt récent du 14 février 2008 aux termes duquel « le délai de prescription abrégé n'empêchant pas ou ne rendant pas particulièrement plus difficile par l'exercice par le consommateur de son droit à agir en justice, la clause litigieuse n'avait pas pour effet de créer, au détriment du consommateur un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat ».

Il y a effectivement lieu de relever qu'un délai d'un an ne paraît pas excessif pour constater des dommages après un déménagement et qu'en l'espèce, monsieur Y. a constaté l'essentiel dès la livraison, et les autres trois jours après ; que si comme le relève à juste titre la commission des clauses abusives, le délai d'un an peut se passer à rechercher des solutions amiables au détriment du consommateur, il n'en a non plus rien été en l'espèce, puisque d'une part c'est monsieur Y. qui a refusé l'intervention de l'expert de l'assureur en indiquant de façon tout à fait surprenante qu'il aurait jeté les meubles litigieux, et d'autre part que toutes ces correspondances se sont arrêtées en toute hypothèse au 19 février 2008 ; A cette date, monsieur Y. se prévalant d'un dommage de 8.800 euros bien supérieur à la facture du déménagement réclamée disposait encore d'un délai de huit mois pour agir à l'encontre de la SARL X. et n'en a rien fait.

Au vu de ces constatations il ne peut être considéré que l'article 19 soit une clause abusive et au vu des dispositions contractuelles la demande reconventionnelle est prescrite. »

 

TRIBUNAL D’INSTANCE DE BÉZIERS

JUGEMENT DU 22 JUILLET 2008

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R .G. n° 11-07-001578. JUGEMENT CONTRADICTOIRE, EN PREMIER RESSORT.

 

DEMANDEUR A L'INJONCTION DE PAYER ; DÉFENDEUR A L'OPPOSITION ;

Monsieur X. LES DEMENAGEURS BRETONS

[adresse], représenté(e) par Maître RENAUDIN Fabrice, avocat

 

DÉFENDEUR A L'INJONCTION DE PAYER ; DEMANDEUR A L'OPPOSITION ;

Monsieur Y.

[adresse], représenté(e) par SELAR ACTAH, avocat

 

Vu les moyens et conclusions des parties ainsi que les documents régulièrement versés aux débats

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

EXPOSÉ DU LITIGE :

La SARL X. a exécuté le déménagement du mobilier de monsieur Y. de [ville S.] au [ville C.] selon contrat accepté n° 3384, la livraison étant intervenue le 15 novembre 2006 ; A la livraison, monsieur Y. a fait inscrire qu'il y avait eu des dommages sur deux mobiliers, le pied d'une table cassé et le haut d'un miroir endommagé.

Par courrier du 17 novembre 2006 monsieur Y. a confirmé ces réclamations et fait état de dommages supplémentaires concernant un spa et un réfrigérateur.

La SARL X. a mandaté un expert le cabinet d'assurances LMT qui a alors contacté monsieur Y. à deux reprises ; monsieur Y. a refusé de le recevoir en indiquant qu'un expert judiciaire avait déjà vu le mobilier endommagé, procédé à une évaluation et pris des photographies des dégâts.

Le 19 février 2007 monsieur Y. a répondu qu'ils « s'étaient débarrassés de la table cassée qui menaçait de s'effondrer ainsi que du miroir qui comme la table était irrémédiablement détérioré. (..) Je serais en droit comme me le précise mon avocat de faire une assignation avec demande de dommages et intérêts ainsi qu'une somme sur le fondement de l'article 700 ».

A la requête de la SARL X. une ordonnance d'injonction de payer a été prise le 22 octobre 2007 pour un montant de 4.840 euros au principal ainsi que 209,52 euros de frais accessoires ; cette ordonnance a été signifiée le 7 novembre 2007 et [la SARL X. a fait opposition le 19 novembre 2007 courrier reçu le 17 novembre 2007] [N.B. passage reproduit sous toutes réserves] ;

Par ailleurs par acte d'huissier la SARL X. a fait assigner monsieur Y. pour le voir condamner au paiement de la somme de 5.000 euros correspondant au prix du déménagement.

Par conclusions du 7 mars 2008 monsieur Y. a formé une demande reconventionnelle correspondant à la valeur de remplacement des meubles qu'il chiffre à 8.800 euros.

La SARL X. soutient que la demande reconventionnelle est irrecevable en ce que l'article 19 du contrat instaure une prescription d'un an à compter de la livraison, qu'il ne s'agit pas d'une clause abusive contrairement à ce que soutient le défendeur ainsi que l'a reconnu la jurisprudence dont un arrêt tout récent de la Cour de Cassation ; qu'en toute hypothèse, la loi du 12 juin 2003 applicable en l'espèce dispose que les opérations de déménagement doivent être considérées comme des opérations de transport et donc soumises à la prescription annale prévue par l'article L. 133-6 du code de commerce ; qu'il n'y a jamais eu de reconnaissance de droit du réclamant, et que l'attitude de monsieur Y. ayant refusé toute expertise est des plus suspectes. Enfin à titre subsidiaire elle fait valoir la présomption de livraison conforme pour les meubles qui n'ont pas fait l'objet de réserves immédiatement, et enfin qu'elle ne saurait être tenue qu'au remboursement de la valeur déclarée par le client compte tenu d'une insuffisance de valeur globale déclarée et que l'indemnité compensatrice devrait être réduite à 3.084,4 euros

Elle conclut à la condamnation de monsieur Y. à verser le prix du déménagement soit la somme de 4.840 euros ainsi que 1.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Monsieur Y. conclut en réponse que la SARL X. n'a pas rempli son obligation de résultat et qu'il est donc bien fondé à opposer l'exception d'inexécution, indépendamment de la question de la prescription ; par ailleurs il soutient que la prescription invoquée sur le fondement de l'article L. 133-6 du code de commerce n'est pas applicable puisqu'il s'agit en l'espèce d'un contrat d'entreprise et non de transport ; enfin que la clause qui restreint à un an le délai pour agir est une clause abusive et doit donc être déclarée non écrite, ainsi que cela ressort d'un avis de la commission sur les clauses abusives en date du 25 janvier 2007 ;

Il maintient donc sa demande reconventionnelle à hauteur de 8.800 euros et demande au tribunal de prononcer la compensation judiciaire des créances ; à titre subsidiaire il sollicite une mesure d'expertise

Il demande enfin la condamnation de la SARL X. à lui verser la somme de 1.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                   (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIFS DE LA DÉCISION :

En raison de leur identité, il y a lieu de joindre les instances 1578/2007 et 1671/2007 qui ont le même objet, étant observé que la SARL X. gardera à sa charge les frais de l'assignation du 15 novembre 2007 qui est inutile, le greffe du tribunal d'instance convoquant les parties dans le cadre d'une opposition à injonction de payer

 

Sur la prescription invoquée :

La prescription étant une fin de non recevoir conformément à l'article 122 du code de procédure civile, ce point doit être examiné avant toute question au fond, comme l'exception d'inexécution invoquée par le défendeur.

Il ressort de l'article 19 du contrat que « de convention expresse entre les parties, il est convenu que les actions en justice pour avarie, perte ou retard auxquelles peut donner lieu le contrat de déménagement doivent être intentées dans l'année qui suit la livraison du mobilier ».

Il n'est pas discutable que monsieur Y. n'a formé aucune action dans l'année qui a suivi le déménagement, puisque même l'opposition à injonction de payer, à supposer qu'on puisse la considérer comme une demande reconventionnelle a été faite au delà du délai d'un an.

Monsieur Y. ne discute pas de ce point mais demande au tribunal de juger cette clause non écrite au vu notamment de l'avis de la commission des clauses abusives en date du 25 janvier 2007 qui a estimé au sujet de cette clause que « en principe est licite une clause par laquelle les parties sont convenues d'abréger le délai de prescription prévu par l'article L. 110-4 du code de commerce ; que toutefois, compte tenu en l'espèce de la durée de recherche d'une solution amiable, ce délai d'un an apparaît insuffisant et de nature à priver le consommateur de la possibilité de faire valoir utilement ses droits en justice ».

Cet avis ne lie pas le tribunal et n'a pas été suivi par la Cour de Cassation dans un arrêt récent du 14 février 2008 aux termes duquel « le délai de prescription abrégé n'empêchant pas ou ne rendant pas particulièrement plus difficile par l'exercice par le consommateur de son droit à agir en justice, la clause litigieuse n'avait pas pour effet de créer, au détriment du consommateur un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat ».

Il y a effectivement lieu de relever qu'un délai d'un an ne paraît pas excessif pour constater des dommages après un déménagement et qu'en l'espèce, monsieur Y. a constaté l'essentiel dès la livraison, et les autres trois jours après ; que si comme le relève à juste titre la commission des clauses abusives, le délai d'un an peut se passer à rechercher des solutions amiables au détriment du consommateur, il n'en a non plus rien été en l'espèce, puisque d'une part c'est monsieur Y. qui a refusé l'intervention de l'expert de l'assureur en indiquant de façon tout à fait surprenante qu'il aurait jeté les meubles litigieux, et d'autre part que toutes ces correspondances se sont arrêtées en toute hypothèse au 19 février 2008 ;

A cette date, monsieur Y. se prévalant d'un dommage de 8.800 euros bien supérieur à la facture du déménagement réclamée disposait encore d'un délai de huit mois pour agir à l'encontre de la SARL X. et n'en a rien fait.

Au vu de ces constatations il ne peut être considéré que l'article 19 soit une clause abusive et au vu des dispositions contractuelles la demande reconventionnelle est prescrite.

Il y a donc lieu de condamner monsieur Y. au paiement du solde du déménagement soit 4.840 euros

L'équité commande l'application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile et l'octroi à la SARL X. de la somme de 700 euros sur ce fondement.

Monsieur Y. devra supporter les dépens à l'exception de l'assignation du 7 décembre 2007

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

Le Tribunal,

Statuant contradictoirement et en premier ressort,

Ordonne la jonction des instances 1578/2007 et 1671/2007,

Dit l'opposition recevable mais non fondée,

Dit la demande reconventionnelle de monsieur Y. prescrite en raison des dispositions contractuelles,

Condamne monsieur Y. à payer à la SARL X. la somme de QUATRE MILLE HUIT CENT QUARANTE EUROS (4.840 euros),

Condamne monsieur Y. aux entiers dépens comprenant les frais de la procédure d'injonction de payer mais non l'assignation du 7 décembre 2007 ainsi qu'au paiement de la somme de SEPT CENTS EUROS (700 euros) sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

Président : Odile BARRAL.